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29/04/2002 | FRANCE | N°223443

France | France, Conseil d'État, 8 ss, 29 avril 2002, 223443


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 24 juillet et 23 novembre 2000 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE L'UNITE HERMETIQUE, dont le siège est à La Verpillière (38290) prise en la personne de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège ; la SOCIETE L'UNITE HERMETIQUE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt du 29 mai 2000 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon, à la demande de Mlle Evelyne X..., a annulé 1°) le jugement en date du 7 février 1997 par lequel le

tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'ann...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 24 juillet et 23 novembre 2000 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE L'UNITE HERMETIQUE, dont le siège est à La Verpillière (38290) prise en la personne de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège ; la SOCIETE L'UNITE HERMETIQUE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt du 29 mai 2000 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon, à la demande de Mlle Evelyne X..., a annulé 1°) le jugement en date du 7 février 1997 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 17 juin 1994 par laquelle le ministre du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle a autorisé la SOCIETE L'UNITE HERMETIQUE à prononcer son licenciement, 2°) ladite décision du 17 juin 1994 ;
2°) de condamner Mlle X... à lui verser la somme de 20 000 F au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Sauron, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Gatineau, avocat de la SOCIETE L'UNITE HERMETIQUE et de la SCP Masse-Dessen, Georges, Thouvenin, avocat de Mlle X...,
- les conclusions de Mme Mignon, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que la SOCIETE L'UNITE HERMETIQUE se pourvoit en cassation contre l'arrêt en date du 29 mai 2000 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon, sur requête de Mlle X..., a annulé le jugement du tribunal administratif de Grenoble en date du 7 février 1997 qui avait rejeté la demande de cette dernière tendant à l'annulation de la décision du 17 juin 1994 par laquelle le ministre du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle a autorisé la SOCIETE L'UNITE HERMETIQUE à prononcer son licenciement ;
Considérant qu'après avoir censuré le motif par lequel les premiers juges, sans examiner la fin de non-recevoir pour tardiveté opposée par le ministre, avaient rejeté au fond la demande de Mlle X..., la cour administrative d'appel de Lyon a annulé la décision du ministre sans statuer au préalable sur cette fin de non-recevoir dont elle était saisie par l'effet dévolutif de l'appel ; que, dès lors, la SOCIETE L'UNITE HERMETIQUE est fondée à soutenir que la cour a entaché son arrêt d'irrégularité et à en demander l'annulation ;
Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, par application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, de régler l'affaire au fond ;
Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir soulevée par le ministre :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 425-1 du code du travail : "Tout licenciement envisagé par l'employeur d'un délégué du personnel, titulaire ou suppléant, est obligatoirement soumis au comité d'entreprise qui donne son avis sur le projet de licenciement. Le licenciement ne peut intervenir que sur autorisation de l'inspecteur du travail dont dépend l'établissement ( ...)" ; qu'en vertu de ces dispositions, les salariés légalement investis d'un mandat de délégué du personnel bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle ; que lorsque le licenciement d'un de ces salariés est envisagé, il ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé ; que, dans le cas où la demande de licenciement est fondée sur un motif de caractère économique, il appartient à l'inspecteur du travail et, le cas échéant, au ministre, de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si la situation de l'entreprise justifie le licenciement du salarié, en tenant compte, notamment, de la nécessité des réductions d'effectifs envisagées et de la possibilité d'assurer le reclassement du salarié dans l'entreprise ;
Sur l'insuffisance de motivation de la décision du ministre :
Considérant que la décision du 17 juin 1994 du ministre du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle comporte les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement ; qu'ainsi le moyen tiré par Mlle X... de son insuffisante motivation doit être écarté ;
Sur l'absence de motif économique du licenciement :

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la SOCIETE L'UNITE HERMETIQUE a engagé en novembre 1993 une procédure de licenciement collectif suite à des difficultés économiques révélées, notamment, par une baisse du chiffre d'affaires de 20 % au premier semestre de 1993 ; qu'elle a été amenée, dans ces conditions, à licencier des membres de son personnel dans deux de ses trois établissements ; que, dans le cadre d'un plan social, 95 emplois de personnels de production dans l'établissement de Cessieu, où travaillait Mlle X... comme employée de fabrication, ont été supprimés ; qu'elle a licencié 59 personnes dans ledit établissement, selon un ordre de licenciement reposant sur les critères de valeur professionnelle, d'ancienneté et de situation familiale ; qu'elle a également supprimé l19 emplois sur le site de la Verpillière ;
Considérant que la réalité des difficultés économiques ayant justifié le licenciement collectif décidé par la SOCIETE L'UNITE HERMETIQUE ressort des pièces du dossier ; que la circonstance que la SOCIETE L'UNITE HERMETIQUE a été amenée à embaucher des personnels intérimaires en juin-juillet 1994 pour remplacer des salariés absents, ne permet pas d'établir qu'à la date à laquelle ils ont été opérés, les licenciements n'étaient pas justifiés ;
Sur l'absence d'effort de reclassement :
Considérant que la société soutient, sans être utilement contredite, qu'elle ne pouvait assurer le reclassement de Mlle X... dans l'établissement de Cessieu dans la mesure où cela l'aurait conduite à licencier un autre salarié à la place de l'intéressée ; que, par suite, en proposant à Mlle X... une mutation avec aide à la mobilité pour un emploi dans l'établissement de la Mure, seul établissement non touché par les licenciements, la société doit être regardée comme ayant satisfait à son obligation de reclassement de l'intéressée ;
Sur le lien entre le mandat et le licenciement :
Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la place de Mlle Bejuy dans l'ordre des licenciements établi par la SOCIETE L'UNITE HERMETIQUE ou l'application qui lui a été faite des critères en fonction desquels cet ordre a été défini, et sur la validité desquels il n'appartient pas à l'autorité administrative de se prononcer, ait été en rapport avec l'exercice du mandat de délégué du personnel suppléant dont l'intéressée était investie ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mlle X... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa requête tendant à l'annulation de la décision du 17 juin 1994 du ministre du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle ;
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu dans les circonstances de l'espèce de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de condamner Mlle X... à payer à la SOCIETE L'UNITE HERMETIQUE une somme de 500 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Lyon du 29 mai 2000 est annulé.
Article 2 : La requête de Mlle X... devant la cour administrative d'appel de Lyon est rejetée.
Article 3 : Mlle X... versera à la SOCIETE L'UNITE HERMETIQUE la somme de 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE L'UNITE HERMETIQUE, à Mlle Evelyne X... et au ministre de l'emploi et de la solidarité.


Synthèse
Formation : 8 ss
Numéro d'arrêt : 223443
Date de la décision : 29/04/2002
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Recours en cassation

Analyses

66-07-01-04-03 TRAVAIL ET EMPLOI - LICENCIEMENTS - AUTORISATION ADMINISTRATIVE - SALARIES PROTEGES - CONDITIONS DE FOND DE L'AUTORISATION OU DU REFUS D'AUTORISATION - LICENCIEMENT POUR MOTIF ECONOMIQUE


Références :

Code de justice administrative L821-2, L761-1
Code du travail L425-1


Publications
Proposition de citation : CE, 29 avr. 2002, n° 223443
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Sauron
Rapporteur public ?: Mme Mignon

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2002:223443.20020429
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