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07/02/2003 | FRANCE | N°220215

France | France, Conseil d'État, 5 / 7 ssr, 07 février 2003, 220215


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés le 21 avril 2000 et le 18 août 2000 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE CIVILE D'EXPLOITATION AGRICOLE LE HARAS D'X... II, dont le siège est ..., représentée par son gérant ; la SOCIETE CIVILE D'EXPLOITATION AGRICOLE LE HARAS D'X... II demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt du 17 février 2000 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a partiellement fait droit aux requêtes d'appel de la commune d'Achères-la-Forêt en annulant le jugement du tribunal ad

ministratif de Melun du 14 mai 1998 qui avait annulé l'arrêté munici...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés le 21 avril 2000 et le 18 août 2000 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE CIVILE D'EXPLOITATION AGRICOLE LE HARAS D'X... II, dont le siège est ..., représentée par son gérant ; la SOCIETE CIVILE D'EXPLOITATION AGRICOLE LE HARAS D'X... II demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt du 17 février 2000 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a partiellement fait droit aux requêtes d'appel de la commune d'Achères-la-Forêt en annulant le jugement du tribunal administratif de Melun du 14 mai 1998 qui avait annulé l'arrêté municipal du 18 novembre 1996 rejetant la demande de permis de construire présentée par la SCEA LE HARAS D'X... II ;
2°)° statuant au fond, de rejeter les conclusions d'appel de la commune et d'ordonner au maire d'Achères-la-Forêt de lui délivrer un permis de construire sous astreinte d'un montant et à compter de la date que le Conseil d'Etat déterminera ou, subsidiairement, de réexaminer la demande de permis de construire dans un délai de deux mois, sous peine d'astreinte ;
3°)° de condamner la commune d'Achères-la-Forêt à lui rembourser une somme de 30 000 F au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Logak, Maître des Requêtes ;
- les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de la SOCIETE CIVILE D'EXPLOITATION AGRICOLE LE HARAS D'X... II, et de la SCP Parmentier, Didier, avocat de la commune d'Achères,
- les conclusions de M. Olson, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que la SOCIETE CIVILE D'EXPLOITATION AGRICOLE LE HARAS D'X... II demande l'annulation de l'arrêt en date du 17 février 2000 de la cour administrative d'appel de Paris en tant qu'elle a annulé le jugement du tribunal administratif de Melun du 14 mai 1998 qui avait annulé l'arrêté du 18 novembre 1996 du maire d'Achères-la-Forêt (Seine-et-Marne) rejetant sa demande de permis de construire ;
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :
Considérant qu'aux termes de l'article R. 193 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, applicable à la date de l'arrêt attaqué : "Toute partie doit être avertie, par une notification faite conformément aux articles R. 139 ou R. 140, du jour où l'affaire sera appelée à l'audience" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la société requérante a informé, par un courrier enregistré le 18 juin 1999, le greffe de la cour administrative d'appel de Paris de son changement d'adresse à compter du 23 juin 1999 ; que l'avis d'audience, qui a été retourné à la cour avec la mention "n'habite pas à l'adresse indiquée", a été adressé le 28 juin 2000 à l'ancienne adresse de la société ; que par suite, la SCEA LE HARAS D'X... II est fondée à soutenir que l'arrêt attaqué a été rendu à l'issue d'une procédure irrégulière ; qu'il doit, pour ce motif, être annulé dans la limite des conclusions présentées par la société requérante ;
Considérant qu'en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, il y a lieu de régler l'affaire au fond ;
Sur la recevabilité de la demande de première instance de la SCEA LE HARAS D'X... II :
Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article L. 600-3 du code de l'urbanisme reprises à l'article R. 600-1 du même code : "En cas de déféré du préfet ou de recours contentieux à l'encontre d'un document d'urbanisme ou d'une décision relative à l'occupation ou l'utilisation du sol régie par le présent code, le préfet ou l'auteur du recours est tenu, à peine d'irrecevabilité, de notifier son recours à l'auteur de la décision et, s'il y a lieu, au titulaire de l'autorisation. Cette notification doit également être effectuée dans les mêmes conditions en cas de demande tendant à l'annulation ou à la réformation d'une décision juridictionnelle concernant un document d'urbanisme ou une décision relative à l'occupation ou l'utilisation du sol" ;

Considérant qu'il ressort de ces dispositions que le législateur, en employant l'expression de "décision relative à l'occupation ou l'utilisation du sol régie par le présent code", n'a entendu viser, conformément à l'objectif de sécurité juridique poursuivi par la loi, que les décisions valant autorisation d'occupation ou d'utilisation du sol qui sont régies par le code de l'urbanisme ; qu'ainsi un refus de permis de construire ne constitue pas une décision entrant dans le champ de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme ; que, dès lors, la SCEA LE HARAS D'X... II n'était pas tenue de notifier à la commune d'Achères son recours contre la décision du 18 novembre 1996 par laquelle la commune a refusé de lui délivrer un permis de construire ; que, par suite, c'est à bon droit que le tribunal administratif de Melun a écarté la fin de non-recevoir opposée par la commune d'Achères ;
Sur la légalité de l'arrêté du 18 novembre 1996 :
Considérant que si aux termes de l'article R. 111-15 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable au présent litige : "Le permis de construire peut être refusé ou n'être accordé que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales lorsque, par leur importance, leur situation et leur affectation, des constructions contrarieraient l'action d'aménagement du territoire et d'urbanisme telle qu'elle résulte ( ...) des dispositions des schémas directeurs intéressant les agglomérations nouvelles ( ...)", le schéma directeur de la région d'Ile-de-France, régi par les dispositions des articles L. 141-1, R. 141-1 et R. 141-2 du code de l'urbanisme, n'est pas au nombre des schémas directeurs mentionnés par les dispositions précitées ; que, par suite, le maire d'Achères-la-Forêt ne pouvait légalement se fonder sur ces dispositions pour refuser le permis de construire sollicité par la SCEA LE HARAS D'X... II ;
Considérant en outre que si la décision attaquée a été également prise sur le fondement de l'article R. 111-14-2 du code de l'urbanisme, qui prévoit qu'un permis de construire "peut n'être accordé que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales, si les constructions, par leur situation, leur destination ou leurs dimensions, sont de nature à avoir des conséquences dommageables pour l'environnement", ces dispositions ne permettent pas à l'autorité administrative de refuser un permis de construire, mais seulement de l'accorder sous réserve du respect de prescriptions spéciales ;
Considérant il est vrai, que le maire d'Achères-la-Forêt invoque devant le Conseil d'Etat, pour donner un fondement légal à la décision attaquée, un autre motif tiré de ce que le projet de construction était de nature à favoriser une urbanisation dispersée incompatible avec la vocation des espaces naturels environnants et que, par suite, la décision attaquée aurait pu être prise sur le fondement de l'article R. 111-14-1 du code de l'urbanisme ; qu'à supposer que ce dernier motif ait pu justifier le refus d'autoriser la construction en cause, cette circonstance n'est pas de nature à rendre légale la décision du 18 novembre 1996 qui, comme il a été dit ci-dessus, a été prise pour d'autres motifs, lesquels étaient erronés en droit ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la commune d'Achères-la-Forêt n'est pas fondée à demander l'annulation du jugement du 14 mai 1998 par lequel le tribunal administratif de Melun a annulé la décision du 18 novembre 1996 refusant de délivrer à la SCEA LE HARAS D'X... II un permis de construire ;
Sur les conclusions aux fins d'injonction :
Considérant que l'annulation de l'arrêté du maire d'Achères-la-Forêt en date du 18 novembre 1996 refusant de délivrer à la SCEA LE HARAS D'X... II le permis de construire qu'elle sollicitait implique nécessairement que le maire d'Achères-la-Forêt se prononce à nouveau sur la demande de la société ; que si les conclusions de celle-ci tendant à ce que le permis de construire sollicité lui soit accordé doivent être rejetées, il y a lieu, en revanche, pour le Conseil d'Etat d'ordonner au maire d'Achères-la-Forêt de réexaminer cette demande dans un délai de deux mois, à compter de la notification de la présente décision, dans le respect notamment des prescriptions de l'article L. 600-2 du code de l'urbanisme ; qu'il n'y a pas lieu pour le Conseil d'Etat de prononcer une astreinte ;
Sur les conclusions tendant au remboursement des frais exposés et non compris dans les dépens :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la SCEA LE HARAS D'X... II qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamnée à payer à la commune d'Achères-la-Forêt la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de condamner la commune d'Achères-la-Forêt à verser à la SCEA LE HARAS D'X... II une somme de 3 000 euros au titre des frais de même nature qu'elle a exposés en appel et en cassation ;
Article 1er : L'arrêt du 17 février 2000 de la cour administrative d'appel de Paris est annulé en tant qu'il statue sur l'appel formé contre le jugement du tribunal administratif de Melun du 14 mai 1998.
Article 2 : Les conclusions de la requête d'appel de la commune d'Achères-la-Forêt dirigées contre le jugement du tribunal administratif de Melun du 14 mai 1998 sont rejetées.
Article 3 : Il est enjoint au maire d'Achères-la-Forêt de prendre les mesures nécessaires au réexamen, dans le délai de deux mois à compter de la notification de la présente décision, de la demande de permis de construire de la SCEA LE HARAS D'X... II.
Article 4 : La commune d'Achères-la-Forêt versera à la SCEA LE HARAS D'X... II une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de la SCEA LE HARAS D'X... II est rejeté.
Article 6 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE CIVILE D'EXPLOITATION AGRICOLE LE HARAS D'X... II, à la commune d'Achères-la-Forêt et au ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer.


Synthèse
Formation : 5 / 7 ssr
Numéro d'arrêt : 220215
Date de la décision : 07/02/2003
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Recours en cassation

Analyses

68-03-03 URBANISME ET AMENAGEMENT DU TERRITOIRE - PERMIS DE CONSTRUIRE - LEGALITE INTERNE DU PERMIS DE CONSTRUIRE


Références :

Arrêté du 18 novembre 1996
Code de justice administrative L821-2, L761-1
Code de l'urbanisme L600-3, R600-1, R111-15, L141-1, R141-1, R141-2, R111-14-2, R111-14-1, L600-2
Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel R193


Publications
Proposition de citation : CE, 07 fév. 2003, n° 220215
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Logak
Rapporteur public ?: M. Olson

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2003:220215.20030207
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