Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 29 juillet et 28 novembre 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Kamel A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le décret du 27 mai 2002 rapportant un décret du 14 juin 2001 en tant qu'il le naturalisait ;
2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789 ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;
Vu le code civil ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Devys, Maître des Requêtes,
- les observations de Me Spinosi, avocat de M. A,
- les conclusions de Mme Prada Bordenave, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article 27-2 du code civil : Les décrets portant... naturalisation... peuvent être rapportés sur avis conforme du Conseil d'Etat dans le délai d'un an à compter de leur publication au Journal officiel si le requérant ne satisfait pas aux conditions légales ; qu'aux termes de l'article 21-23 du même code : Nul ne peut être naturalisé s'il n'est pas de bonne vie et moeurs ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le moyen tiré par M. A de ce que le décret attaqué ne serait pas revêtu de la signature du Premier ministre et du contreseing du ministre des affaires sociales, du travail et de l'emploi manque en fait ;
Considérant que le décret attaqué n'avait pas à mentionner la date, le lieu et les autres circonstances des faits sur lesquels le Gouvernement s'est fondé pour rapporter le décret du 14 juin 2001 en tant que celui-ci prononçait la naturalisation de M. A ; que, par suite, ce dernier n'est pas fondé à prétendre que le décret attaqué serait insuffisamment motivé ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A a été mis en examen et placé sous mandat de dépôt le 3 octobre 2001 pour des faits de participation à une association de malfaiteurs en vue de préparer des actes de terrorisme ; que ces faits ont été commis, au moins pour partie, antérieurement à l'intervention du décret du 14 juin 2001 ; qu'en estimant, eu égard à la gravité des faits reprochés à M. A, lesquels le concernaient personnellement, qu'il ne pouvait être regardé, à la date dudit décret, comme satisfaisant à la condition posée par les dispositions de l'article 21-23 du code civil, et alors même que la juridiction pénale ne s'était pas encore prononcée sur la culpabilité du requérant, le Gouvernement n'a ni méconnu le principe de la présomption d'innocence garanti notamment par les dispositions de l'article 9 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, ni fait une inexacte application des dispositions législatives précitées ;
Considérant que M. A ne saurait utilement se prévaloir, à l'encontre du décret attaqué, d'une prétendue méconnaissance des stipulations du 1 de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales relatives au droit à un procès équitable ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à demander l'annulation du décret attaqué ;
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamné à verser la somme que M. A demande pour les frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
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Article 1er : La requête de M. A est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Kamel A et au ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.