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08/03/2004 | FRANCE | N°265144

France | France, Conseil d'État, Juge des referes, 08 mars 2004, 265144


Vu la requête, enregistrée le 2 mars 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour la SOCIÉTÉ YACHT CLUB INTERNATIONAL DE SAINT-LAURENT-DU-VAR, dont le siège est Port de Saint-Laurent-du-Var à Saint-Laurent-du-Var (06700) ; la société demande au juge des référés du Conseil d'Etat :

1) d'annuler l'article 1er de l'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Nice du 17 février 2004 lui faisant injonction de rétablir Mme X dans son droit d'occupation du poste d'amarrage n° 1360 du port de Saint-Laurent-du-Var, ainsi que l'article 3

de la même ordonnance la condamnant à payer 500 euros sur le fondement d...

Vu la requête, enregistrée le 2 mars 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour la SOCIÉTÉ YACHT CLUB INTERNATIONAL DE SAINT-LAURENT-DU-VAR, dont le siège est Port de Saint-Laurent-du-Var à Saint-Laurent-du-Var (06700) ; la société demande au juge des référés du Conseil d'Etat :

1) d'annuler l'article 1er de l'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Nice du 17 février 2004 lui faisant injonction de rétablir Mme X dans son droit d'occupation du poste d'amarrage n° 1360 du port de Saint-Laurent-du-Var, ainsi que l'article 3 de la même ordonnance la condamnant à payer 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2) de rejeter les conclusions de Mme X dirigées à son encontre ;

3) de condamner Mme X à lui verser une somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

la société requérante soutient que l'ordonnance attaquée est entachée d'une insuffisance de motivation ; que la condition d'urgence posée à l'article L. 521-2 du code de justice administrative n'était pas remplie ; que c'est à tort que l'ordonnance s'est fondée sur l'existence d'une atteinte grave et manifestement illégale au droit de propriété de Mme X sur son navire ; que l'ordonnance est entachée d'une erreur d'appréciation ;

Vu l'ordonnance attaquée ;

Vu, enregistré le 5 mars 2004, le mémoire en défense présenté pour Mme X, demeurant 21 Avenue du Général de Gaulle, LE BAR-SUR-LOUP (06200) et tendant d'une part au rejet de la requête et d'autre part à ce que la SOCIETE YACHT CLUB INTERNATIONAL DE SAINT-LAURENT-DU-VAR soit condamnée à lui verser une somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; elle soutient qu'il y a urgence ; qu'il a été porté une atteinte grave et manifestement illégale à son droit de propriété ;

Vu, enregistré, le 8 mars 2004, le mémoire en intervention présenté pour la commune de SAINT-LAURENT-DU-VAR qui tend aux mêmes fins que la requête de la SOCIETE YACHT CLUB INTERNATIONAL DE SAINT-LAURENT-DU-VAR et à ce que Mme X soit condamnée à lui payer la somme de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir convoqué à une audience publique, d'une part, la SOCIETE YACHT CLUB INTERNATIONAL DE SAINT-LAURENT-DU-VAR, d'autre part, Mme X et la commune de Saint-Laurent-du-Var ;

Vu le procès verbal de l'audience publique du 8 mars 2004 à 17H00 au cours de laquelle ont été entendus :

- Me BRIARD, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat de la société requérante ;

- Me MOLINIE, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat de la commune de Saint-Laurent-du-Var ;

- Me NICOLAY, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat de Mme X ;

Sur l'intervention de la commune de Saint-Laurent-du-Var :

Considérant que la commune, autorité concédante du port de Saint-Laurent-du-Var, a intérêt à l'annulation de l'ordonnance attaquée ; qu'ainsi son intervention et recevable ;

Sur les conclusions de la SOCIETE YACHT CLUB INTERNATIONAL DE SAINT-LAURENT-DU-VAR dirigées contres les articles 1er et 3 de l'ordonnance du 17 février 2004 :

Considérant que par décision du 21 novembre 2003 la SOCIETE YACHT CLUB INTERNATIONAL DE SAINT-LAURENT-DU-VAR a mis fin au contrat d'occupation d'un poste d'amarrage situé dans le port de Saint-Laurent-du-Var qu'elle avait conclu avec Mme X le 14 septembre 2001 pour une durée d'un an renouvelable par tacite reconduction ; que la notification de la décision du 21 novembre 2003 mentionnait que Mme X disposait,- conformément aux stipulations du contrat du 14 septembre 2001 lequel prévoyait expressément la possibilité d'une résiliation anticipée avec préavis de 60 jours - d'un délai de deux mois pour libérer l'emplacement qu'elle occupait ; que saisi par Mme X le 13 janvier 2004 d'une demande présentée sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative le juge des référés du tribunal administratif de Nice a, par ordonnance du 16 janvier 2004, fait injonction à la SOCIETE YACHT CLUB INTERNATIONAL DE SAINT-LAURENT-DU-VAR de rétablir Mme X dans son droit d'occupation de son poste d'amarrage ; que, saisi le 3 février 2004 d'un appel par la SOCIETE YACHT CLUB INTERNATIONAL DE SAINT-LAURENT-DU-VAR, le juge des référés du Conseil d'Etat a, par ordonnance du 6 février 2004 constaté que la condition d'urgence posée à l'article L. 521-2 du code de justice administrative n'était pas remplie et a, en conséquence, annulé l'ordonnance du 16 janvier 2004 en tant qu'elle adressait une injonction à la SOCIETE YACHT CLUB INTERNATIONAL DE SAINT-LAURENT-DU-VAR ;

Considérant qu'à la suite de cette ordonnance du juge des référés du Conseil d'Etat, la SOCIETE YACHT CLUB INTERNATIONAL DE SAINT-LAURENT-DU-VAR a demandé à Mme X de libérer dans les 48 heures le poste d'amarrage en précisant qu'à défaut d'exécution dans ce délai il y serait pourvu d'office ; que Mme X a, à nouveau, saisi le tribunal administratif de Nice sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative ; que par l'article 1er de son ordonnance du 17 février 2004 le juge des référés du tribunal administratif de Nice a fait droit à cette demande et a fait injonction à la SOCIETE YACHT CLUB INTERNATIONAL DE SAINT-LAURENT-DU-VAR de rétablir Mme X dans son droit d'occupation du poste d'amarrage dans un délai de trois jours ; que la SOCIETE YACHT CLUB INTERNATIONAL DE SAINT-LAURENT-DU-VAR fait appel de cette ordonnance ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 521-2 du code de justice administrative : Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale ;

Considérant qu'après avoir énoncé que ... le droit d'utiliser librement ses biens, qui est un corollaire de droit de propriété, a le caractère d'une liberté fondamentale au sens de l'article L. 521-2 du code de justice administrative , l'ordonnance attaquée relève que la mise en demeure adressée par la SOCIETE YACHT CLUB INTERNATIONAL DE SAINT-LAURENT-DU-VAR à Mme X ... constitue, dans les circonstances de l'espèce, une atteinte grave et manifestement illégale à la liberté d'utiliser librement le bien constitué par le navire Tuku Hetuu ;

Mais considérant qu'il résulte de ses termes mêmes que la décision du 11 février 2004, relative à l'occupation d'un poste d'amarrage, ne met pas en cause la libre disposition par Mme X de son navire ; qu'à aucun autre titre - quelles que soient les graves anomalies, au regard des principes et des règles de la domanialité publique, des stipulations de la concession du port de plaisance de Saint-Laurent-du-Var qui confèrent aux détenteurs initiaux ou successifs d'actions de la société concessionnaire des droits particuliers sur les dépendances du domaine public que constituent les postes d'amarrage - il n'apparaît pas, en l'état, qu'une liberté fondamentale au sens de l'article L. 521-2 du code de justice administrative soit affectée par cette décision ;

Considérant dès lors qu'il y a lieu de constater à nouveau que les conditions d'application de l'article L. 521-2 du code de justice administrative ne sont pas remplies dans le litige opposant la SOCIETE YACHT CLUB INTERNATIONAL DE SAINT-LAURENT-DU-VAR et Mme X ; que dès lors et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, et notamment celui tiré de ce que l'ordonnance attaquée aurait fait une inexacte application de la notion d'urgence, il y a lieu de faire droit à l'appel interjeté par la SOCIETE YACHT CLUB INTERNATIONAL DE SAINT-LAURENT-DU-VAR et d'annuler les articles 1er et 3 de l'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Nice du 17 février 2004 ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions de Mme X tendant à ce que le paiement d'une somme de 3 000 euros soit mis à la charge de la SOCIETE YACHT CLUB INTERNATIONAL DE SAINT-LAURENT-DU-VAR, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante ; qu'elles font également obstacle à ce que la commune de Saint-Laurent-du-Var, qui n'a pas la qualité de partie, en demande le bénéfice ;

Considérant qu'il y a lieu en revanche de faire droit aux conclusions de la SOCIETE YACHT CLUB INTERNATIONAL DE SAINT-LAURENT-DU-VAR tendant à ce que Mme X supporte une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; que si la somme de 6 000 euros demandée par la SOCIETE YACHT CLUB INTERNATIONAL DE SAINT-LAURENT-DU-VAR ne paraît pas justifiée, il y a lieu de retenir un montant plus élevé que celui de 3 000 euros fixé par l'ordonnance du 6 février 2004 et de fixer en l'espèce cette somme à 4 000 euros ;

O R D O N N E :

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Article 1er : L'intervention de la commune de Saint-Laurent-du-Var est admise.

Article 2 : Les articles 1er et 3 de l'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Nice du 17 février 2004 sont annulés.

Article 3 : Les conclusions de première instance accueillies par les articles 1er et 3 de l'ordonnance du 17 février 2004 du juge des référés du tribunal administratif de Nice sont rejetées.

Article 4 : Mme X versera à la Société requérante une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions présentées par la SOCIETE YACHT CLUB INTERNATIONAL DE SAINT-LAURENT-DU-VAR, par Mme X et par la commune de Saint-Laurent-du-Var est rejeté.

Article 6 : La présente ordonnance sera notifiée à la SOCIÉTÉ YACHT CLUB INTERNATIONAL DE SAINT-LAURENT-DU-VAR, à Mme Evelyne X, et à la commune de Saint-Laurent-du-Var.

Copie en sera adressée pour information au préfet des Alpes-Maritimes.


Synthèse
Formation : Juge des referes
Numéro d'arrêt : 265144
Date de la décision : 08/03/2004
Sens de l'arrêt : Satisfaction totale
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 08 mar. 2004, n° 265144
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Labetoulle
Avocat(s) : SCP DELAPORTE, BRIARD, TRICHET

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2004:265144.20040308
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