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05/04/2004 | FRANCE | N°260152

France | France, Conseil d'État, 3eme et 8eme sous-sections reunies, 05 avril 2004, 260152


Vu l'ordonnance, enregistrée le 10 septembre 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, par laquelle le président de la cour administrative d'appel de Bordeaux transmet au Conseil d'Etat, en application des dispositions de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, la requête présentée devant cette cour par la COMMUNE DE BAGNERES-DE-LUCHON le 24 juin 2003 ;

Vu la requête sommaire, enregistrée le 2 septembre 2003 au greffe de la cour administrative d'appel de Bordeaux, et le mémoire complémentaire, enregistré le 3 novembre 2003 au secrétariat du content

ieux du Conseil d'Etat, présentés pour la COMMUNE DE BAGNERES-DE-...

Vu l'ordonnance, enregistrée le 10 septembre 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, par laquelle le président de la cour administrative d'appel de Bordeaux transmet au Conseil d'Etat, en application des dispositions de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, la requête présentée devant cette cour par la COMMUNE DE BAGNERES-DE-LUCHON le 24 juin 2003 ;

Vu la requête sommaire, enregistrée le 2 septembre 2003 au greffe de la cour administrative d'appel de Bordeaux, et le mémoire complémentaire, enregistré le 3 novembre 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la COMMUNE DE BAGNERES-DE-LUCHON, représentée par son maire en exercice, domicilié en cette qualité à l'Hôtel de ville de Bagnères-de-Luchon, 23, allée d'Etigny à Luchon (31110) ; la COMMUNE DE BAGNERES-DE-LUCHON demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance du 24 juin 2003 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Toulouse a liquidé, à la demande de M. Jacques X, l'astreinte qu'il avait prononcée par ordonnance du 17 décembre 2002 ;

2°) statuant comme juge des référés, de rejeter la demande présentée par M. X devant le juge des référés du tribunal administratif de Toulouse ;

3°) de mettre à la charge de M. X une somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 88-20 du 6 janvier 1988 ;

Vu le décret n° 91-859 du 2 septembre 1991 modifié ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Crépey, Auditeur,

- les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de la COMMUNE DE BAGNERES-DE-LUCHON et de Me Odent, avocat de M. Jacques X,

- les conclusions de M. Séners, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que par un jugement du 4 avril 2000, frappé d'appel, le tribunal administratif de Toulouse a annulé l'arrêté du 28 mars 1997 par lequel le maire de Bagnères-de-Luchon avait radié M. X des cadres de la commune ; que par ordonnance du 17 décembre 2002, le juge des référés du même tribunal a, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, suspendu l'exécution de l'arrêté du maire en date du 8 octobre 2002 réintégrant M. X à compter du 23 septembre 2002 en tant qu'il n'affectait pas M. X sur un emploi précis, et a enjoint au maire de procéder à l'affectation de l'intéressé sur un tel emploi dans un délai d'un mois sous astreinte de 50 euros par jour de retard ; que le maire a pris, le 20 janvier 2003, un nouvel arrêté annulant celui du 8 octobre 2002 et réintégrant M. X à compter du 28 mars 1997 sans toutefois l'affecter à un emploi précis ; que, le 9 avril 2003, M. X a saisi à nouveau le juge des référés en vue de faire liquider l'astreinte prononcée le 17 décembre 2002 et de fixer une nouvelle astreinte ; qu'au cours de l'instruction de cette instance, le maire a pris un nouvel arrêté le 9 mai 2003, annulant celui du 20 janvier 2003, réintégrant M. X à compter du 23 septembre 2002 et décrivant son affectation ; que par une nouvelle ordonnance du 24 juin 2003, le juge des référés, après avoir relevé que cet arrêté du 9 mai 2003 n'était pas exécutoire, faute d'avoir été transmis au préfet, a liquidé l'astreinte qu'il avait déjà prononcée à la somme de 5 950 euros, dont la moitié pour M. X et la moitié pour l'Etat, et, compte tenu du mauvais vouloir persistant opposé par la commune à l'exécution de l'ordonnance du 17 décembre 2002, porté le taux de l'astreinte à 200 euros par jour de retard supplémentaire ; que la commune se pourvoit en cassation contre cette ordonnance ;

Sur la légalité de l'ordonnance attaquée :

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés que la COMMUNE DE BAGNERES-DE-LUCHON a produit le 15 mai 2003 l'arrêté du 9 mai 2003 et que cet arrêté mentionne que le maire certifie sous sa responsabilité le caractère exécutoire de cet acte ; que, nonobstant cette mention, le juge des référés a, dans son ordonnance du 24 juin 2003, soulevé d'office le moyen tiré de ce que l'arrêté du 9 mai 2003 n'était pas exécutoire, faute pour la commune d'avoir apporté la preuve de sa transmission au représentant de l'Etat ; qu'en vertu des articles R. 611-7 et R. 522-9 du code de justice administrative, il appartient au juge des référés statuant en urgence, sauf lorsqu'il est fait application de l'article L. 522-3, d'informer les parties, le cas échéant au cours de l'audience, de ce que l'ordonnance lui paraît susceptible d'être fondée sur un moyen relevé d'office ; qu'il ne ressort pas des mentions de l'ordonnance attaquée que le juge des référés en ait informé les parties et les ait invitées à présenter leurs observations sur ce moyen ; que la commune est par suite fondée à soutenir que l'ordonnance attaquée a été rendue au terme d'une procédure irrégulière et à en demander, pour ce motif, l'annulation ;

Considérant qu'en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, il y a lieu de régler l'affaire au titre de la procédure de référé engagée ;

Sur la recevabilité de la demande présentée devant le juge des référés :

Considérant que, contrairement à ce que soutient la commune, M. X conteste non pas le caractère adéquat de la reconstitution de carrière à laquelle le maire a procédé dans ses arrêtés des 20 janvier et 9 mai 2003, ce qui soulèverait un litige distinct de l'exécution de l'ordonnance du 17 décembre 2002, mais l'absence de l'affectation dans un emploi précis qu'impliquait l'exécution de cette ordonnance ; qu'ainsi la demande est recevable ;

Sur l'exécution de l'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Toulouse en date du 17 décembre 2002 :

Considérant qu'aux termes de l'arrêté du 9 mai 2003 : A compter du 23 septembre 2002, M. Jacques X est réintégré dans le grade d'assistant territorial spécialisé d'enseignement artistique. Il assurera un enseignement artistique dans la spécialité arts plastiques dans les établissements scolaires du primaire de la commune, sous la responsabilité des personnels enseignants ;

Considérant qu'aux termes de l'article 2 du décret du 2 septembre 1991 modifié portant statut particulier du cadre d'emplois des assistants territoriaux spécialisés d'enseignement artistique (musique, danse, arts plastiques) : Les assistants spécialisés d'enseignement artistique exercent leurs fonctions (...) dans les spécialités suivantes : / (...) : 3° Arts plastiques./(...) Ils peuvent notamment être chargés de missions prévues à l'article 7 de la loi du 6 janvier 1988 susvisée./ (...) Les assistants spécialisés d'enseignement artistique sont placés, pour l'exercice de leurs fonctions, sous l'autorité du fonctionnaire chargé de la direction de l'établissement dans lequel ils exercent leurs fonctions ; qu'aux termes de l'article 7 de la loi du 6 janvier 1988, aujourd'hui codifié à l'article L. 911-6 du code de l'éducation : Des personnes justifiant d'une compétence professionnelle dans les domaines de la création ou de l'expression artistique, de l'histoire de l'art ou de la conservation du patrimoine peuvent apporter, sous la responsabilité des personnels enseignants, leur concours aux enseignements artistiques dans des conditions fixées par décret au Conseil d'Etat ; qu'en affectant M. X à des tâches d'enseignement artistique dans les établissements scolaires du primaire de la commune à compter du 9 mai 2003, sous l'autorité des directeurs de ces établissements à qui il revient de fixer les horaires de l'intéressé, le maire doit donc être regardé comme ayant satisfait à l'injonction prononcée par le juge des référés dans son ordonnance du 17 décembre 2002 ;

Sur la liquidation de l'astreinte prononcée par l'ordonnance du 17 décembre 2002 :

Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 911-7 du code de justice administrative : En cas d'inexécution totale ou partielle ou d'exécution tardive, la juridiction procède à la liquidation de l'astreinte qu'elle avait prononcée ; qu'aux termes de l'article L. 911-8 du même code : La juridiction peut décider qu'une part de l'astreinte ne sera pas versée au requérant. Cette part est affectée au budget de l'Etat ;

Considérant que l'ordonnance du 17 décembre 2002 a été notifiée à la commune le 24 décembre 2002 ; que celle-ci n'a procédé à l'affectation de M. X sur un emploi correspondant à son grade que par l'arrêté du 9 mai 2003 dont il ressort des pièces produites pour la première fois en cassation qu'il est devenu exécutoire le 13 mai suivant, date de sa transmission au préfet ; que la commune doit, par suite, être regardée comme n'ayant pas intégralement exécuté l'ordonnance du 17 décembre 2002 avant le 13 mai 2003 ; que le montant de l'astreinte, calculé au taux de 50 euros par jour pour la période allant du 25 janvier 2003 inclus au 13 mai 2003 inclus, atteint 5 450 euros ; que, compte tenu des circonstances de l'espèce, il convient de partager cette somme à raison de 90 % au profit de l'Etat et de 10 % au profit de M. X ; qu'en revanche il y a lieu de rejeter la demande de liquidation de l'astreinte pour la période postérieure au 13 mai 2003, date à partir de laquelle la commune doit être regardée comme ayant exécuté l'ordonnance du 17 décembre 2002, ainsi que la demande de majoration du taux de l'astreinte ;

Sur les conclusionsX tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a lieu ni de mettre à la charge de la COMMUNE DE BAGNERES-DE-LUCHON la somme que M. X demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ni de mettre à la charge de M. Sourt la somme que la COMMUNE DE BAGNERES-DE-LUCHON demande au même titre ;

D E C I D E :

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Article 1er : L'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Toulouse en date du 24 juin 2003 est annulée.

Article 2 : La commune de Bagnères-de-Luchon est condamnée à verser une somme de 545 euros à M. X ainsi qu'une somme de 4 905 euros au budget de l'Etat.

Article 3 : Le surplus de la demande de M. X devant le juge des référés du tribunal administratif de Toulouse est rejeté.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la COMMUNE DE BAGNERES-DE-LUCHON est rejeté.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à la COMMUNE DE BAGNERES-DE-LUCHON, à M. Jacques X au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales et au ministère public près la Cour de discipline budgétaire et financière.


Synthèse
Formation : 3eme et 8eme sous-sections reunies
Numéro d'arrêt : 260152
Date de la décision : 05/04/2004
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 05 avr. 2004, n° 260152
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Lasserre
Rapporteur ?: M. Edouard Crépey
Rapporteur public ?: M. Séners
Avocat(s) : SCP LYON-CAEN, FABIANI, THIRIEZ

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2004:260152.20040405
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