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26/05/2004 | FRANCE | N°259914

France | France, Conseil d'État, President de la section du contentieux, 26 mai 2004, 259914


Vu la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés les 1er et 15 septembre 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés par M. Vladimir X, demeurant ... ; M. X demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 7 août 2003 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 29 juillet 2003 du préfet de l'Aveyron ordonnant sa reconduite à la frontière ;

2°)' d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;r>
3°)' d'enjoindre au préfet de l'Aveyron de lui délivrer un titre de séjour sous ast...

Vu la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés les 1er et 15 septembre 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés par M. Vladimir X, demeurant ... ; M. X demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 7 août 2003 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 29 juillet 2003 du préfet de l'Aveyron ordonnant sa reconduite à la frontière ;

2°)' d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;

3°)' d'enjoindre au préfet de l'Aveyron de lui délivrer un titre de séjour sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

4°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 800 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

5°) d'ordonner qu'il soit sursis à l'exécution du jugement attaqué ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;

Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;

Vu le décret n° 2001-492 du 6 juin 2001 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- les conclusions de M. Devys, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (....) 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait (....) ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X, de nationalité russe, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 12 décembre 2002, de la décision du 11 décembre 2002 du préfet de l'Aveyron lui refusant un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; qu'il était ainsi dans le cas prévu par les dispositions précitées de l'ordonnance du 2 novembre 1945 où le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;

Considérant toutefois qu'il ressort des pièces du dossier que M. X vit en France depuis plusieurs années, qu'il est le père d'un enfant né en France le 23 novembre 2002 et que sa compagne, enceinte d'un second enfant à la date de l'arrêté attaqué, est titulaire d'une carte de résident ; qu'ainsi, compte tenu des circonstances particulières de l'espèce, l'arrêté ordonnant sa reconduite à la frontière porte à son droit au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels cette mesure a été prise ; que le requérant est, dès lors, fondé à soutenir qu'il méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 29 juillet 2003 par lequel le préfet de l'Aveyron a ordonné sa reconduite à la frontière ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant qu'à la suite d'une annulation d'un arrêté de reconduite à la frontière, il incombe au préfet, en application des dispositions du III de l'article 22 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945, non seulement de munir l'intéressé d'une autorisation provisoire de séjour mais aussi, qu'il ait été ou non saisi d'une demande en ce sens, de se prononcer sur son droit à un titre de séjour ; que, dès lors, il appartient au juge administratif, lorsqu'il prononce l'annulation d'un arrêté de reconduite à la frontière et qu'il est saisi de conclusions en ce sens, d'user des pouvoirs qu'il tient de l'article L. 911-2 du code de justice administrative - lesquels peuvent être exercés tant par le juge unique de la reconduite à la frontière que par une formation collégiale - pour fixer le délai dans lequel la situation de l'intéressé doit être réexaminée au vu de l'ensemble de la situation de droit et de fait existant à la date de ce réexamen ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu de prescrire au préfet de l'Aveyron de se prononcer sur la situation de M. X dans le délai de 3 mois suivant la notification de la présente décision ; qu'il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner l'Etat à verser à M. X la somme de 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le jugement du 7 août 2003 du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Toulouse et l'arrêté du 29 juillet 2003 du préfet de l'Aveyron ordonnant la reconduite à la frontière de M. X sont annulés.

Article 2 : Le préfet de l'Aveyron statuera sur la régularisation de la situation de M. X dans le délai de trois mois suivant la notification de la présente décision.

Article 3 : L'Etat est condamné à verser à M. X la somme de 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. X est rejeté.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. Vladimir X, au préfet de l'Aveyron et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.


Synthèse
Formation : President de la section du contentieux
Numéro d'arrêt : 259914
Date de la décision : 26/05/2004
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 26 mai. 2004, n° 259914
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Lasserre
Rapporteur public ?: M. Devys

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2004:259914.20040526
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