La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

23/06/2004 | FRANCE | N°260730

France | France, Conseil d'État, President de la section du contentieux, 23 juin 2004, 260730


Vu la requête, enregistrée le 2 octobre 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Muhammet X, demeurant ... ; M. X demande au président de la section du contentieux du Conseil d' Etat :

1°) d'annuler le jugement du 15 septembre 2003 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif d'Orléans a rejeté pour tardiveté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 11 août 2003 par lequel le préfet d'Eure-et-Loir a décidé sa reconduite à la frontière ;

2°) d'annuler cet arrêté pour excès de pouvoir ;r>
3°) de condamner l'Etat au versement de la somme de 1 000 euros au titre des dispositi...

Vu la requête, enregistrée le 2 octobre 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Muhammet X, demeurant ... ; M. X demande au président de la section du contentieux du Conseil d' Etat :

1°) d'annuler le jugement du 15 septembre 2003 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif d'Orléans a rejeté pour tardiveté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 11 août 2003 par lequel le préfet d'Eure-et-Loir a décidé sa reconduite à la frontière ;

2°) d'annuler cet arrêté pour excès de pouvoir ;

3°) de condamner l'Etat au versement de la somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la loi n° 2003-1119 du 26 novembre 2003 relative à la maîtrise de l'immigration, au séjour des étrangers en France et à la nationalité ;

Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- les conclusions de Mme Mitjavile, Commissaire du gouvernement ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant qu'aux termes de l'article 22 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : L'étranger qui fait l'objet d'un arrêté préfectoral de reconduite à la frontière peut, dans les quarante-huit heures suivant sa notification lorsque l'arrêté est notifié par voie administrative ou dans les sept jours lorsqu'il est notifié par voie postale, demander l'annulation de cet arrêté au président du tribunal administratif (...) ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que si la lettre recommandée avec accusé de réception portant notification de l'arrêté de reconduite à la frontière du 11 août 2003 a été présentée le 2 septembre 2003 à l'adresse indiquée par M. X, elle n'a été effectivement reçue par celui-ci que le 8 septembre 2003, date à laquelle il l'a retirée auprès du bureau de poste de Dreux-Oriels ; que, par suite, sa demande enregistrée au greffe du tribunal administratif d'Orléans le 12 septembre 2003 a été présentée avant l'expiration du délai de sept jours imparti par les dispositions précitées, contrairement à ce qu'a estimé le magistrat délégué par le président du tribunal administratif d'Orléans ; que, dès lors, M. X est fondé à demander l'annulation du jugement attaqué qui a rejeté sa demande pour tardiveté ;

Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. X devant le tribunal administratif d'Orléans ;

Sur la légalité de l'arrêté de reconduite à la frontière :

Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait (...) ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X, de nationalité turque, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 13 mars 2003, de la décision du préfet d'Eure-et-Loir du même jour lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; qu'il entrait ainsi dans le champ d'application de la disposition précitée ;

Considérant que si M. X, entré en France en décembre 2002, fait valoir qu'il est parfaitement intégré en France où il a vécu dès l'âge de cinq ans et que ses parents et ses frères et soeurs, dont trois ont la nationalité française, y résident régulièrement, il ressort des pièces du dossier que, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, notamment de la durée et des conditions du séjour de l'intéressé en France et du fait qu'il n'est pas dépourvu de toutes attaches familiales dans son pays d'origine où résident notamment son ex-épouse et son jeune fils, l'arrêté du préfet d'Eure-et-Loir en date du 11 août 2003 n'a pas porté au droit de M. X au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; que par suite, le moyen tiré de ce que le préfet d'Eure-et-Loir ne pouvait légalement prendre à son encontre l'arrêté attaqué sans méconnaître les dispositions du 7° de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut qu'être écarté ;

Considérant que M. X ne peut utilement, en tout état de cause, invoquer la méconnaissance de la loi du 26 novembre 2003 qui est postérieure à l'arrêté attaqué ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêté du 11 août 2003 par lequel le préfet d'Eure-et-Loir a ordonné sa reconduite à la frontière ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamné à payer à M. X la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le jugement du conseiller délégué par le président du tribunal administratif d'Orléans en date du 15 septembre 2003 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. X devant le tribunal administratif d'Orléans est rejetée.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. Muhammet X, au préfet d'Eure-et-Loir et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.


Synthèse
Formation : President de la section du contentieux
Numéro d'arrêt : 260730
Date de la décision : 23/06/2004
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 23 jui. 2004, n° 260730
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. de La Verpillière
Rapporteur public ?: Mme Mitjavile

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2004:260730.20040623
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award