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15/12/2004 | FRANCE | N°261215

France | France, Conseil d'État, 3eme sous-section jugeant seule, 15 décembre 2004, 261215


Vu la requête, enregistrée le 22 octobre 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Jean-Marc X, demeurant ... ; M. X demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 21 août 2003 par laquelle le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire a rejeté sa demande tendant à l'abrogation de l'article 8 du décret du 29 mars 1996 en tant qu'il exclut les agents contractuels de droit public du bénéfice du droit au maintien du traitement indiciaire antérieur qu'il reconnaît

aux fonctionnaires admis aux concours de recrutement des cadres d'empl...

Vu la requête, enregistrée le 22 octobre 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Jean-Marc X, demeurant ... ; M. X demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 21 août 2003 par laquelle le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire a rejeté sa demande tendant à l'abrogation de l'article 8 du décret du 29 mars 1996 en tant qu'il exclut les agents contractuels de droit public du bénéfice du droit au maintien du traitement indiciaire antérieur qu'il reconnaît aux fonctionnaires admis aux concours de recrutement des cadres d'emplois entrant dans le champ d'application de ce décret et placés en position de détachement auprès du centre national de la fonction publique territoriale en qualité d'élèves ;

2°) d'enjoindre sous astreinte au ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire de prendre les mesures nécessaires à l'exécution de cette annulation ;

3°) d'annuler pour excès de pouvoir l'article 2 de l'arrêté du président du centre national de la fonction publique territoriale en date du 1er août 2003 disposant que sa rémunération est calculée sur la base du premier échelon d'élève-administrateur ;

4°) de condamner l'Etat aux dépens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 modifiée ;

Vu le décret n° 85-1076 du 9 octobre 1985 modifié ;

Vu le décret n° 87-1097 du 30 décembre 1987 modifié ;

Vu le décret n° 96-270 du 29 mars 1996 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Edouard Crépey, Auditeur,

- les conclusions de M. François Séners, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article 36 de la loi du 26 janvier 1984 relative à la fonction publique territoriale modifiée : Les fonctionnaires sont recrutés par voie de concours organisés suivant l'une des modalités ci-après ou suivant l'une et l'autre de ces modalités :/ 1° Des concours ouverts aux candidats justifiant de certains diplômes ou de l'accomplissement de certaines études (...) ; qu'aux termes de l'article 44 de la même loi : Chaque concours donne lieu à l'établissement d'une liste d'aptitude classant par ordre alphabétique les candidats déclarés aptes par le jury (...) ; qu'aux termes de son article 45 : Lorsque les statuts particuliers des cadres d'emplois le prévoient, les candidats aux concours d'accès des cadres d'emplois de catégorie A déclarés aptes par le jury sont nommés en qualité d'élèves par le président du centre national de la fonction publique territoriale (...). Les conditions d'emploi, la rémunération et les règles de protection sociale des élèves sont fixées par décret en Conseil d'Etat./ A l'issue de leur période de formation initiale d'application, fixée par les statuts particuliers des cadres d'emplois, les élèves sont inscrits sur une liste d'aptitude établie en application de l'article 44 et publiée au Journal officiel (...) ;

Considérant qu'en vertu de l'article 1er du décret du 29 mars 1996, pris pour l'application de ces dispositions, les candidats inscrits sur la liste d'admission des concours de recrutement sont, dans les cas prévus à l'article 45 de la loi du 26 janvier 1984 précité, nommés élèves du centre national de la fonction publique territoriale par le président de ce centre pour la période de leur formation initiale d'application ; qu'aux termes de l'article 3 de ce décret : Les élèves possédant la qualité de fonctionnaire de l'Etat et des collectivités territoriales, de magistrat de l'ordre judiciaire ou de militaire, sont placés en position de détachement auprès du centre national de la fonction publique territoriale dans les conditions prévues par le statut dont ils relèvent ; qu'aux termes de l'article 7 du même décret : Les élèves sont rémunérés par le centre national de la fonction publique territoriale. Ils perçoivent un traitement correspondant à l'échelon d'élève prévu par le décret portant échelonnement indiciaire applicable au cadre d'emplois concerné ; qu'en vertu, toutefois, de l'article 8 du même décret, les élèves mentionnés à l'article 3 conservent, pendant leur formation initiale d'application, le traitement indiciaire auquel ils avaient droit dans leur corps, cadre d'emplois ou emploi d'origine si celui-ci est supérieur à leur traitement d'élève ;

Considérant que le cadre d'emplois des administrateurs territoriaux est, en vertu de l'article 4-1 du décret du 30 décembre 1987 modifié, qui définit son statut particulier, au nombre de ceux qui sont soumis aux dispositions de l'article 45 de la loi du 26 janvier 1984 et du décret du 29 mars 1996 précités ; qu'aux termes de l'article 3 du décret du 30 décembre 1987 : Le recrutement en qualité d'administrateur intervient après inscription sur les listes d'aptitude établies :/ 1° En application des dispositions de l'article 36 de la loi du 26 janvier 1984 précitée (...) ; qu'aux termes de l'article 4 de ce décret : En application du 1° de l'article 3, sont organisés : / a) Un concours externe (...) ; / b) Un concours interne ouvert (...) aux fonctionnaires et agents publics ainsi qu'aux agents en fonction dans une organisation internationale intergouvernementale ; les candidats doivent justifier, au 1er de l'année du concours, de quatre ans au moins d'ancienneté de services publics effectifs (...) ; / c) Un troisième concours (...) ; que M. X, agent contractuel de la ville de Tours, a été déclaré admis à l'issue des épreuves du concours interne organisé en 2002 en vue du recrutement des administrateurs territoriaux ; que, par un arrêté du président du centre national de la fonction publique territoriale en date du 1er août 2003, il a été nommé en qualité d'élève-administrateur pour une durée de dix-huit mois à compter du 30 août 2003 ; que l'article 2 dudit arrêté prévoit que la rémunération de l'intéressé est calculée sur la base du premier échelon d'élève-administrateur ; que le requérant a formé un recours pour excès de pouvoir dirigé, d'une part, contre l'article 2 de l'arrêté du 1er août 2003 et, d'autre part, contre la décision du 21 août 2003 par laquelle le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire a refusé de faire droit à sa demande tendant à l'abrogation de l'article 8 du décret du 29 mars 1996 précité en tant qu'il n'étend pas aux agents contractuels de droit public le bénéfice du droit au maintien du traitement indiciaire antérieur qu'il institue au profit des seuls fonctionnaires, magistrats de l'ordre judiciaire et militaires ;

Sur les conclusions relatives à la décision du ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire en date du 21 août 2003 :

Considérant, en premier lieu, que les agents contractuels et les fonctionnaires, eu égard notamment à leurs conditions de rémunération, ne se trouvent pas dans la même situation juridique au regard du service public ; que, par suite, si l'administration pouvait, comme elle l'a d'ailleurs fait sur certains points, en particulier en ce qui concerne les conditions d'accès au cadre d'emplois des administrateurs territoriaux, la rémunération à laquelle les administrateurs stagiaires peuvent prétendre et leur reclassement indiciaire lors de leur titularisation, soumettre les uns et les autres à la même réglementation, elle n'était pas tenue de le faire ; que, dès lors, le requérant n'est pas fondé à soutenir que l'article 8 du décret du 29 mars 1996 méconnaîtrait le principe d'égalité en ce qu'il ne fait pas bénéficier les agents contractuels nommés en qualité d'élèves du centre national de la fonction publique territoriale pour y recevoir une formation initiale d'application d'un régime de rémunération identique à celui dont jouissent les fonctionnaires admis dans le même établissement ; que ces dispositions ne portent pas davantage atteinte au principe d'égal accès à la fonction publique ni au principe d'égalité devant les charges publiques ;

Considérant, en deuxième lieu, que si M. X soutient que l'article 14 du décret du 9 octobre 1985 modifié relatif à l'exercice du droit à la formation des agents de la fonction publique territoriale prévoit que les agents non titulaires peuvent bénéficier des actions de formation prévues par ledit décret dans les mêmes conditions que celles fixées pour les fonctionnaires territoriaux, cette circonstance est sans incidence sur la légalité des dispositions litigieuses dès lors que la formation initiale d'application prévue par l'article 45 de la loi du 26 janvier 1984 modifiée ne peut être regardée ni comme une action de préparation aux concours et examens professionnels de la fonction publique territoriale ni comme une formation dispensée dans le but de maintenir ou de parfaire la qualification professionnelle des agents et d'assurer leur adaptation à l'évolution des techniques ou des structures administratives (...), seules visées par le décret en vertu de son article 2 ;

Considérant, en dernier lieu, que si M. X soutient que la perte de revenus subie par les agents contractuels lors de leur nomination comme élèves du centre national de la fonction publique territoriale est de nature à porter atteinte à l'attractivité des concours de recrutement des cadres d'emplois soumis en vertu de leur statut particulier aux dispositions litigieuses du décret du 29 mars 1996, il ne ressort pas des pièces du dossier que celles-ci seraient entachées d'erreur manifeste d'appréciation ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision du 21 août 2003 par laquelle le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire a refusé de déférer à sa demande tendant à l'abrogation de l'article 8 du décret du 29 mars 1996 en tant qu'il exclut les agents contractuels de droit public du bénéfice du droit au maintien du traitement indiciaire antérieur reconnu aux fonctionnaires ; qu'en outre, les conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint sous astreinte au ministre de prendre les mesures nécessaires à l'exécution de l'annulation de cette décision ne peuvent, dans ces conditions, qu'être rejetées ;

Sur les conclusions relatives à l'arrêté du président du centre national de la fonction publique territoriale en date du 1er août 2003 :

Considérant que tout justiciable est recevable à invoquer au soutien d'un pourvoi formé à l'encontre d'une décision administrative individuelle l'illégalité éventuelle de l'acte administratif réglementaire qui sert de fondement à cette décision ; qu'il ne saurait cependant en être inféré qu'il existerait un lien de connexité, au sens de l'article R. 341-1 du code de justice administrative, entre le pourvoi tendant à l'annulation pour excès de pouvoir du refus d'abroger un règlement administratif et celui contestant la légalité d'une décision individuelle prise sur le fondement dudit règlement ; que, par suite, le Conseil d'Etat n'est pas compétent en premier et dernier ressort pour connaître des conclusions de la requête dirigées contre l'article 2 de l'arrêté du 1er août 2003 du président du centre national de la fonction publique territoriale ; que l'article R. 312-12 du code de justice administrative prévoit que les litiges d'ordre individuel, et notamment ceux relatifs aux questions pécuniaires, intéressant les fonctionnaires ou agents de l'Etat et des autres personnes ou collectivités publiques relèvent du tribunal administratif dans le ressort duquel se trouve le lieu d'affectation du fonctionnaire ou agent que la décision attaquée concerne et que si cette décision prononce une nomination ou entraîne un changement d'affectation, la compétence est déterminée par le lieu de la dernière affectation (...) ; qu'eu égard aux règles de compétence ainsi fixées, il y a lieu de renvoyer le jugement de ces conclusions au tribunal administratif de Paris ;

Sur les conclusions tendant à ce que l'Etat soit condamné aux dépens :

Considérant qu'aux termes de l'article R. 761-1 du code de justice administrative : Les dépens comprennent les frais d'expertise, d'enquête et de toute autre mesure d'instruction dont les frais ne sont pas à la charge de l'Etat ; qu'aucune des mesures d'instruction visées par ces dispositions n'ayant été décidée, les conclusions tendant à ce que l'Etat soit condamné aux dépens ne peuvent qu'être rejetées ;

D E C I D E :

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Article 1er : Les conclusions de la requête de M. X tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de la décision du ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire en date du 21 août 2003 sont rejetées.

Article 2 : Les conclusions de M. X à fin d'injonction sous astreinte sont rejetées.

Article 3 : Les conclusions de M. X tendant à ce que l'Etat soit condamné aux dépens sont rejetées.

Article 4 : Le jugement des conclusions de la requête de M. X dirigées contre l'article 2 de l'arrêté du président du centre national de la fonction publique territoriale en date du 1er août 2003 est renvoyé devant le tribunal administratif de Paris.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. Jean-Marc X, au président du centre national de la fonction publique territoriale, au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales et au ministre de la fonction publique et de la réforme de l'Etat.


Synthèse
Formation : 3eme sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 261215
Date de la décision : 15/12/2004
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 15 déc. 2004, n° 261215
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Martin Laprade
Rapporteur ?: M. Edouard Crépey
Rapporteur public ?: M. Séners

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2004:261215.20041215
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