Vu la requête, enregistrée le 12 février 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat , présentée par M. Sid Ali X, demeurant ... ; M. X demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 18 novembre 2003 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 23 juillet 2003 du préfet de police décidant sa reconduite à la frontière ;
2°) d'annuler cet arrêté pour excès de pouvoir ;
3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer une carte de séjour temporaire sur la base de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1967 modifié ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1500 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;
Vu la convention de New York du 26 janvier 1990 relative aux droits de l'enfant ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée telle que reprise par le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- les conclusions de M. François Séners, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée tel que repris par l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait (...) ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X, de nationalité algérienne, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 3 avril 2003, de la décision du préfet de police lui refusant un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; qu'il était ainsi dans le cas prévu par les dispositions précitées de l'ordonnance du 2 novembre 1945, telle que reprise par le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, où le préfet peut décider la reconduite à la frontière d'un étranger ;
Considérant toutefois que M. X est entré en France en décembre 1997, qu'il s'est marié en 2002 avec une compatriote titulaire d'une carte de résident, avec laquelle il vivait en concubinage depuis septembre 2000 ; qu'il participe à l'éducation de la fille de sa femme issue d'un précédent mariage ; que, par suite, dans les circonstances de l'espèce, l'arrêté du 23 juillet 2003 décidant sa reconduite à la frontière a porté une atteinte à son droit au respect de sa vie privée et familiale disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; que, dès lors, M. XX est fondé à soutenir que l'arrêté attaqué est contraire aux stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. XX est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 23 juillet 2003 par lequel le préfet de police a ordonné sa reconduite à la frontière ;
Sur les conclusions aux fins d'injonction :
Considérant qu'aux termes du III de l'article 22 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 tel que repris par l'article L. 512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Si l'arrêté de reconduite à la frontière est annulé, (...) l'étranger est muni d'une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce que le préfet ait à nouveau statué sur son cas ; qu'il y a lieu, par application de ces dispositions, d'ordonner au préfet de police de délivrer une autorisation provisoire de séjour à M. X et de se prononcer sur son droit à un titre de séjour dans un délai de deux mois à compter de la notification de la présente décision ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat, en application des dispositions susvisées, la somme de 1 500 euros que M. BENKENOUN demande pour les frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
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Article 1er : Le jugement du 5 août 2003 du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris et l'arrêté du 23 juillet 2003 du préfet de police ordonnant la reconduite à la frontière de M. XX sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet de police de délivrer à M. X une autorisation provisoire de séjour et de statuer sur son droit à un titre de séjour dans un délai de deux mois à compter de la notification de la présente décision.
Article 3 : L'Etat versera à M. XX la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. Sid ali X, au préfet de police et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.