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14/03/2005 | FRANCE | N°261191

France | France, Conseil d'État, 4eme et 5eme sous-sections reunies, 14 mars 2005, 261191


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 21 octobre 2003 et 19 février 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour les ETABLISSEMENTS LINARD J.P., dont le siège est ... ; les ETABLISSEMENTS LINARD J.P. demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision du 17 juin 2003 par laquelle la commission nationale d'équipement commercial a accordé à la SCI Papillon l'autorisation préalable requise en vue de la création d'un magasin de 1 500 m² de surface de vente à l'enseigne Bricomarché spécialisé dans la distribution

d'articles pour le bricolage, le jardinage et la décoration, à Henrichemo...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 21 octobre 2003 et 19 février 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour les ETABLISSEMENTS LINARD J.P., dont le siège est ... ; les ETABLISSEMENTS LINARD J.P. demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision du 17 juin 2003 par laquelle la commission nationale d'équipement commercial a accordé à la SCI Papillon l'autorisation préalable requise en vue de la création d'un magasin de 1 500 m² de surface de vente à l'enseigne Bricomarché spécialisé dans la distribution d'articles pour le bricolage, le jardinage et la décoration, à Henrichemont (Cher) ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 800 euros au titre de l'article L. 761 ;1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 11 février 2005, présentée pour les ETABLISSEMENTS LINARD J.P. ;

Vu le code de commerce ;

Vu la loi n° 73-1193 du 27 décembre 1973 modifiée ;

Vu le décret n° 93-306 du 9 mars 1993 modifié ;

Vu l'arrêté du 12 décembre 1997 fixant le contenu de la demande d'autorisation d'exploitation de certains magasins de commerce de détail ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Hervé Cassagnabère, Auditeur,

- les observations de la SCP Vuitton, Vuitton, avocat des ETABLISSEMENTS LINARD J.P. et de la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat de la SCI Papillon Intermarché,

- les conclusions de Mme Anne-Françoise Roul, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que les établissements Thierry, Fortin, Mardesson, Laplantine, SAS Jars Matériaux et la SARL Godin ont intérêt à l'annulation de la décision attaquée ; que leur intervention est, par suite, recevable ;

Considérant que si, eu égard à la nature, à la composition et aux attributions de la commission nationale d'équipement commercial, les décisions qu'elle prend doivent être motivées, cette obligation n'implique pas que la commission soit tenue de prendre explicitement parti sur le respect par le projet qui lui est soumis de chacun des objectifs et critères d'appréciation fixés par les dispositions législatives applicables ; qu'en motivant sa décision en se référant notamment au niveau extrêmement faible de la densité commerciale en grandes et moyennes surfaces spécialisées dans le bricolage ;jardinage, à l'absence de magasin offrant une offre comparable aux magasins de type Bricomarché, à un mode d'habitat largement individuel et au freinage de l'évasion commerciale susceptible de résulter du projet, la commission nationale a satisfait à cette exigence ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la commission nationale ait fondé cette motivation sur des faits matériellement inexacts ;

Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la délimitation de la zone de chalandise, qui comprend les communes situées à moins de vingt minutes en voiture du lieu d'implantation du projet, soit inexacte ; que, compte tenu des précisions et compléments d'information apportés par les services instructeurs et des avis, y compris ceux défavorables au projet, portés à sa connaissance, la commission nationale d'équipement commercial a disposé de l'ensemble des éléments lui permettant d'apprécier l'impact prévisible du projet au regard des critères fixés par le législateur, et n'a pas fait reposer sa décision sur un dossier incomplet ou inexact ;

Sur le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 1er de la loi du 27 décembre 1973 et des articles L. 720 ;1 à L. 720 ;3 du code de commerce ;

Considérant que, pour l'application des dispositions combinées de l'article 1er de la loi du 27 décembre 1973 et des articles L. 720 ;1, L. 720 ;2 et L. 720 ;3 du code de commerce, il appartient aux commissions d'équipement commercial, d'apprécier, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si un projet soumis à autorisation est de nature à compromettre, dans la zone de chalandise intéressée, l'équilibre voulu par le législateur entre les diverses formes de commerce et, dans l'affirmative, de rechercher si cet inconvénient est compensé par les effets positifs du projet, appréciés, d'une part, en tenant compte de sa contribution à l'emploi, à l'aménagement du territoire, à la concurrence, à la modernisation des équipements commerciaux et, plus généralement, à la satisfaction des besoins des consommateurs, et, d'autre part, en évaluant son impact sur les conditions de circulation et de stationnement aux abords du site du projet envisagé ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la densité, dans la zone de chalandise du projet, en commerces de détail spécialisés dans la vente d'articles de jardinage et de bricolage disposant d'une surface de vente de plus de 300 m², est très nettement inférieure aux densités calculées pour ce type de commerces aux niveaux national et départemental ; que, dans ces conditions, la création à Henrichemont d'un magasin à l'enseigne Bricomarché spécialisé dans la distribution d'articles pour le bricolage, le jardinage et la décoration, d'une surface de vente de 1 500 m2, n'est pas de nature à compromettre l'équilibre recherché par le législateur entre les différentes formes de commerce ; que, dès lors, la commission nationale d'équipement commercial n'a pas, en accordant l'autorisation attaquée, méconnu les objectifs fixés par les dispositions législatives analysées ci ;dessus ;

Sur le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 420 ;2 du code de commerce :

Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que l'autorisation attaquée aurait pour effet que la SCI Papillon exploite abusivement une position dominante ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 420 ;2 du code de commerce, qui prohibe l'exploitation abusive d'une position dominante, doit être écarté ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les ETABLISSEMENTS LINARD J.P. ne sont pas fondés à demander l'annulation de la décision attaquée ;

Sur l'application de l'article L. 761 ;1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de cet article font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, verse aux ETABLISSEMENTS LINARD J.P. la somme qu'ils demandent, au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge du requérant la somme de 3 000 euros demandée, au même titre, par la SCI Papillon ; que les établissements Thierry, Fortin, Mardesson, Laplantine, SAS Jars Matériaux et la SARL Godin étant intervenants, et non parties à l'instance, les dispositions de l'article L. 761 ;1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à leur charge la somme demandée par la SCI Papillon ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'intervention des établissements Thierry, Fortin, Mardesson, Laplantine, SAS Jars Matériaux et de la SARL Godin est admise.

Article 2 : La requête des ETABLISSEMENTS LINARD J.P. est rejetée.

Article 3 : Les ETABLISSEMENTS LINARD J.P. verseront la somme de 3 000 euros à la SCI Papillon.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la SCI Papillon est rejeté.

Article 5 : La présente décision sera notifiée aux ETABLISSEMENTS LINARD J.P., à la SCI Papillon, aux établissements Thierry, Fortin, Mardesson, Laplantine, SAS Jars Matériaux, à la SARL Godin, à la commission nationale d'équipement commercial et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.


Synthèse
Formation : 4eme et 5eme sous-sections reunies
Numéro d'arrêt : 261191
Date de la décision : 14/03/2005
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 14 mar. 2005, n° 261191
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Genevois
Rapporteur ?: M. Hervé Cassagnabère
Rapporteur public ?: Mme Roul
Avocat(s) : SCP VUITTON, VUITTON ; SCP WAQUET, FARGE, HAZAN

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2005:261191.20050314
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