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04/04/2005 | FRANCE | N°258544

France | France, Conseil d'État, 3eme et 8eme sous-sections reunies, 04 avril 2005, 258544


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 16 juillet et 17 novembre 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la COMMUNE DE REICHSHOFFEN (Bas-Rhin), agissant par son maire en exercice ; la COMMUNE DE REICHSHOFFEN demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 6 mai 2003 par lequel la cour administrative d'appel de Nancy, à la demande de Mme Colette X, a annulé, d'une part, le jugement du 27 août 1998 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté la demande de l'intéressée tendant à l'annulation de

la décision du 18 novembre 1997 par laquelle le maire de la COMMUNE D...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 16 juillet et 17 novembre 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la COMMUNE DE REICHSHOFFEN (Bas-Rhin), agissant par son maire en exercice ; la COMMUNE DE REICHSHOFFEN demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 6 mai 2003 par lequel la cour administrative d'appel de Nancy, à la demande de Mme Colette X, a annulé, d'une part, le jugement du 27 août 1998 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté la demande de l'intéressée tendant à l'annulation de la décision du 18 novembre 1997 par laquelle le maire de la COMMUNE DE REICHSHOFFEN a prononcé son licenciement et, d'autre part, ladite décision et a mis à la charge de la commune la somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par cette dernière et non compris dans les dépens ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mme X devant le tribunal administratif de Strasbourg ;

3°) de mettre à la charge de Mme X la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code du travail, notamment son article L. 122-12 ;

Vu la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

Vu la loi n° 99-586 du 12 juillet 1999 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. François Delion, Maître des Requêtes,

- les observations de Me Spinosi, avocat de la COMMUNE DE REICHSHOFFEN, de la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat du département du Bas-Rhin et de la SCP Masse-Dessen, Thouvenin, avocat de Mme X,

- les conclusions de M. Emmanuel Glaser, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu'a été créée au cours de l'année 1995, à l'initiative de la COMMUNE DE REICHSHOFFEN, l'Association du Centre social et familial Espace Loisirs, dont l'objet est la gestion d'une halte-garderie et d'un espace- loisirs ; qu'à la suite de difficultés rencontrées par cette association, le conseil municipal de Reichshoffen a, par une délibération du 17 février 1997, dénoncé les conventions qui liaient la commune à cet organisme, en vue de confier la gestion de ses activités au centre communal d'action sociale ; que, par délibérations des 26 mars et 6 octobre 1997, le conseil d'administration de l'association puis celui du centre ont approuvé ce transfert d'activités ; qu'une nouvelle convention passée entre la commune et l'association a précisé les modalités de ce transfert, notamment en ce qui concerne la situation des personnels, et en a fixé la date d'effet au 1er octobre 1997 ; que des agents concernés par ce transfert ont manifesté publiquement leur désaccord, dans des conditions que le maire a estimées diffamatoires et injurieuses ; que le 18 novembre 1997, le maire a licencié pour faute Mme X et trois autres agents ; que par un arrêt du 6 mai 2003, la cour administrative d'appel de Nancy, infirmant le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 27 août 1998, a annulé le licenciement de Mme X ; que la COMMUNE DE REICHSHOFFEN se pourvoit en cassation contre cet arrêt ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 122-12 du code du travail : (...) S'il survient une modification dans la situation juridique de l'employeur, notamment par succession, vente, fusion, transformation du fonds, mise en société, tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l'entreprise ; qu'il résulte de ces dispositions d'ordre public et qui sont au nombre des garanties fondamentales des salariés que, lorsque l'activité d'une entité économique employant des salariés de droit privé est reprise par une personne publique gérant un service public administratif, il appartient à cette dernière, en l'absence de dispositions législatives spécifiques telles que celles de l'article 63 de la loi du 12 juillet 1999 susvisée, qui ne sont pas applicables en l'espèce, et réserve faite du cas où le transfert entraînerait un changement d'identité de l'entité transférée, soit de maintenir le contrat de droit privé des intéressés, soit de leur proposer un contrat de droit public reprenant les clauses substantielles de leur ancien contrat dans la mesure où des dispositions législatives ou réglementaires n'y font pas obstacle ; que, dans cette dernière hypothèse, le refus des salariés d'accepter les modifications qui résulteraient de cette proposition implique leur licenciement par la personne publique, aux conditions prévues par le droit du travail et leur ancien contrat ; que, dès lors que le transfert d'activité est effectivement intervenu, la personne publique en cause doit, pour l'application des dispositions de l'article L. 122-12, être regardée comme le nouvel employeur des salariés concernés, assumant l'ensemble des droits et obligations attachés à cette qualité, sans que puisse y faire par elle-même obstacle la circonstance, à la supposer établie, que ledit transfert aurait été décidé dans des conditions en ne respectant pas les clauses des status de l'ancien employeur ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond et des énonciations mêmes de l'arrêt attaqué que l'association précitée a cessé toute activité et que l'entité économique qu'elle constituait a été reprise par la COMMUNE DE REICHSHOFFEN qui, notamment, a assuré à compter du 1er octobre 1997 la rémunération des agents du Centre social et familial Espace Loisirs ; que, par l'effet des dispositions précitées de l'article L. 122-12 du code du travail, Mme X est demeurée exclusivement régie par le contrat de travail à durée indéterminée qu'elle avait conclu, lors de son recrutement, avec l'association du Centre social et familial Espace Loisirs, dès lors que l'intéressée n'a pas accepté la proposition de la commune de la placer dans un régime de droit public ; que l'action engagée par Mme X ne mettant en cause que les rapports nés de ce contrat de droit privé, la juridiction administrative est incompétente pour en connaître ; qu'il y a lieu de soulever d'office ce moyen, qui est d'ordre public, et d'annuler pour ce motif l'arrêt attaqué ;

Considérant qu'il y a lieu, en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, de régler l'affaire au fond ;

Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que la juridiction administrative n'est pas compétente pour connaître du présent litige ; que la COMMUNE DE REICHSHOFFEN est, par suite, fondée à demander l'annulation du jugement du 27 août 1998 du tribunal administratif de Strasbourg ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu, en application de ces dispositions, de mettre à la charge de Mme X les sommes que la COMMUNE DE REICHSHOFFEN demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; que ces mêmes dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de la COMMUNE DE REICHSHOFFEN, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, les sommes que Mme X demande au même titre ;

D E C I D E :

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Article 1 : L'arrêt du 6 mai 2003 de la cour administrative d'appel de Nancy et le jugement du 27 août 1998 du tribunal administratif de Strasbourg sont annulés.

Article 2 : La demande de Mme X devant le tribunal administratif de Strasbourg est rejetée comme portée devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître.

Article 3 : Le surplus des conclusions de Mme X et les conclusions de la COMMUNE DE REICHSHOFFEN sont rejetés.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à la COMMUNE DE REICHSHOFFEN, à Mme Colette X, au département du Bas-Rhin et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.


Synthèse
Formation : 3eme et 8eme sous-sections reunies
Numéro d'arrêt : 258544
Date de la décision : 04/04/2005
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 04 avr. 2005, n° 258544
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Genevois
Rapporteur ?: M. François Delion
Rapporteur public ?: M. Glaser
Avocat(s) : SPINOSI ; SCP MASSE-DESSEN, THOUVENIN ; SCP BORE ET SALVE DE BRUNETON

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2005:258544.20050404
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