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04/04/2005 | FRANCE | N°266665

France | France, Conseil d'État, 3ème et 8ème sous-sections réunies, 04 avril 2005, 266665


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 19 avril 2004 et 14 juin 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE BASF-AGRO, dont le siège est 14, chemin du professeur Dépéret à Tassin-La-Demi-Lune (69160) ; la SOCIETE BASF-AGRO demande au Conseil d'Etat l'annulation de la décision du 24 février 2004, publiée au Journal officiel du 27 février 2004 sous la forme d'un avis aux fabricants, distributeurs et utilisateurs de produits antiparasitaires, par laquelle le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche

et des affaires rurales a, d'une part, procédé au retrait des a...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 19 avril 2004 et 14 juin 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE BASF-AGRO, dont le siège est 14, chemin du professeur Dépéret à Tassin-La-Demi-Lune (69160) ; la SOCIETE BASF-AGRO demande au Conseil d'Etat l'annulation de la décision du 24 février 2004, publiée au Journal officiel du 27 février 2004 sous la forme d'un avis aux fabricants, distributeurs et utilisateurs de produits antiparasitaires, par laquelle le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales a, d'une part, procédé au retrait des autorisations provisoires de vente des produits dénommés REGENT TS et REGENT 5 GR pour tous leurs usages, et, d'autre part, à la suspension des autorisations de mise sur le marché des produits dénommés SCHUSS, JUMPER, METIS, TEXAS et ZOOM pour tous leurs usages jusqu'à ce que la décision communautaire relative à l'inscription de la substance active Fipronil intervienne ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la directive n° 91/414/CEE du Conseil du 15 juillet 1991 modifiée concernant la mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques ;

Vu le code rural ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée relative à la motivation des actes administratifs ;

Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations ;

Vu le décret n° 94-359 du 5 mai 1994 relatif au contrôle des produits phytopharmaceutiques ;

Vu l'arrêté du 6 septembre 1994 portant application du décret n° 94-359 du 5 mai 1994 relatif au contrôle des produits phytopharmaceutiques ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Gilles Bardou, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Célice, Blancpain, Soltner, avocat de la SOCIETE BASF-AGRO et de Me Brouchot, avocat du parti Les Verts, de M. YX et M. Y,

- les conclusions de M. Emmanuel Glaser, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que, par une décision qui a fait l'objet d'une conférence et d'un communiqué de presse le 23 février 2004 et qui doit donc être regardée comme prise à cette date, le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales a, d'abord, retiré les autorisations provisoires de vente pour tous leurs usages des produits dénommés REGENT TS et REGENT 5 GR, ensuite, suspendu les autorisations de mise sur le marché pour tous leurs usages jusqu'à ce que la décision communautaire relative à l'inscription de la substance active Fipronil intervienne des produits dénommés SCHUSS, JUMPER, METIS, TEXAS et ZOOM, et enfin prévu que les semences traitées avec les produits REGENT TS, JUMPER, METIS, TEXAS et ZOOM, pour tous leurs usages, bénéficieraient d'un délai d'écoulement à la distribution et à l'utilisation des stocks pour les semis de printemps jusqu'au 31 mai 2004 ; que la SOCIETE BASF-AGRO qui fabrique ces produits demande l'annulation de cette décision ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :

Considérant qu'en vertu de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 : (...) doivent être motivées les décisions qui : (...) - retirent ou abrogent une décision créatrice de droits ; qu'au terme de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 : Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application des articles 1er et 2 de la loi (...) du 11 juillet 1979 (...) n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales. (...)/ Les dispositions de l'alinéa précédent ne sont pas applicables : 1° En cas d'urgence (...) ;

Considérant que le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales a fait savoir, par lettre du 10 février 2004 adressée au président de la SOCIETE BASF-AGRO, que compte tenu des préoccupations majeures pour l'environnement et les espèces sauvages que faisaient apparaître les travaux en cours de la commission d'étude de la toxicité concernant la substance active dénommée Fipronil, il envisageait de procéder au retrait des autorisations précédemment délivrées à plusieurs produits à base de cette substance ; que la même lettre informait la société que, préalablement à l'entrée en vigueur de ces décisions, celle-ci disposait d'un délai de dix jours à compter de la réception de la présente notification pour présenter ses observations ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la lettre du ministre a été remise au plus tôt le 16 février 2004 au représentant de la SOCIETE BASF-AGRO ; qu'ainsi le délai de dix jours mentionné dans cette correspondance expirait le 27 février 2004 ; que comme il a été dit plus haut la décision attaquée a été prise dès le 23 février 2004 ; que dans ces conditions la société requérante n'a pas disposé d'un délai suffisant pour présenter utilement ses observations préalables ; qu'il n'est pas allégué que la décision attaquée serait intervenue dans un cas d'urgence de nature à dispenser le ministre signataire de l'obligation de respecter la procédure contradictoire dont il avait lui-même fixé le terme ; que la SOCIETE BASF-AGRO est, par suite, fondée à soutenir que la décision attaquée est intervenue à l'issue d'une procédure irrégulière et à en demander, pour ce motif, l'annulation ;

D E C I D E :

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Article 1er : La décision du 23 février 2004 du ministre de l'agriculture de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales est annulée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE BASF-AGRO, au parti Les Verts, à M. Maret, à M. David, à l'association générale des producteurs de maïs et au ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et de la ruralité.


Synthèse
Formation : 3ème et 8ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 266665
Date de la décision : 04/04/2005
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

01-03-03-03 ACTES LÉGISLATIFS ET ADMINISTRATIFS. VALIDITÉ DES ACTES ADMINISTRATIFS - FORME ET PROCÉDURE. PROCÉDURE CONTRADICTOIRE. MODALITÉS. - DÉCISION INDIVIDUELLE DEVANT ÊTRE MOTIVÉE EN APPLICATION DES ARTICLES 1ER ET 2 DE LA LOI DU 11 JUILLET 1979 - DÉCISION NE POUVANT INTERVENIR QU'APRÈS QUE L'INTÉRESSÉ A ÉTÉ MIS À MÊME DE PRÉSENTER SES OBSERVATIONS (ART. 24 DE LA LOI DU 12 AVRIL 2000) - ADMINISTRATION AYANT ELLE-MÊME FIXÉ UN DÉLAI À CETTE FIN - IRRÉGULARITÉ, FAUTE NOTAMMENT D'URGENCE, DE LA DÉCISION INTERVENUE AVANT L'EXPIRATION DE CE DÉLAI.

01-03-03-03 Ministre chargé de l'agriculture ayant fait savoir, par lettre adressée au représentant légal d'une société productrice de produits antiparasitaires, d'une part, qu'il envisageait de procéder au retrait ou à la suspension des autorisations provisoires de vente et autorisations de mise sur le marché précédemment délivrées à cette société en vue de l'exploitation de plusieurs produits comportant une même substance active, compte tenu des préoccupations majeures pour l'environnement et les espèces sauvages que faisaient apparaître les travaux réalisés par la commission chargée d'étudier la toxicité de cette substance, d'autre part, que la société disposait d'un délai de dix jours à compter de la réception de cette lettre pour présenter ses observations, avant l'entrée en vigueur des mesures susmentionnées. Irrégularité des mesures adoptées avant l'expiration de ce délai, dès lors, notamment, qu'il n'est pas allégué qu'elles seraient intervenues dans le cas d'urgence prévu au 1° du second alinéa de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations.


Publications
Proposition de citation : CE, 04 avr. 2005, n° 266665
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Genevois
Rapporteur ?: M. Gilles Bardou
Rapporteur public ?: M. Glaser
Avocat(s) : SCP CELICE, BLANCPAIN, SOLTNER ; BROUCHOT

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2005:266665.20050404
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