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09/05/2005 | FRANCE | N°242020

France | France, Conseil d'État, 10eme sous-section jugeant seule, 09 mai 2005, 242020


Vu la requête, enregistrée le 16 janvier 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE LA GIRONDE ; le PREFET DE LA GIRONDE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 14 décembre 2001 par lequel le conseiller délégué par le Président du tribunal administratif de Bordeaux a annulé son arrêté du 30 novembre 2001 décidant la reconduite à la frontière de M. Hocine X et a fixé l'Algérie comme pays de destination ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. X devant le tribunal administratif de Bordeaux ;

Vu

les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de...

Vu la requête, enregistrée le 16 janvier 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE LA GIRONDE ; le PREFET DE LA GIRONDE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 14 décembre 2001 par lequel le conseiller délégué par le Président du tribunal administratif de Bordeaux a annulé son arrêté du 30 novembre 2001 décidant la reconduite à la frontière de M. Hocine X et a fixé l'Algérie comme pays de destination ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. X devant le tribunal administratif de Bordeaux ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Jean-François Debat, Maître des Requêtes,

- les conclusions de Mme Marie-Hélène Mitjavile, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée en vigueur à la date de l'arrêté attaqué : Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la notification du refus ou du retrait (...) ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X, ressortissant algérien né en 1970, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois à compter de la notification de l'arrêté du 5 octobre 2001 par lequel le PREFET DE LA GIRONDE lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour ; qu'il se trouvait ainsi dans le cas où, en application du 3° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;

Considérant que l'arrêté ordonnant la reconduite à la frontière d'un étranger n'a pas pour objet de fixer le pays de destination, lequel est déterminé par une décision distincte ; que si à l'appui de sa demande d'annulation de l'arrêté ordonnant sa reconduite à la frontière, M. X a fait valoir qu'il encourait des risques personnels en cas de retour en Algérie, ce moyen est inopérant à l'encontre de cet arrêté ; que, par suite, c'est à tort que le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Bordeaux s'est fondé sur ce qu'il était entaché d'une telle erreur pour en prononcer l'annulation ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. X devant le tribunal administratif de Bordeaux ;

Sur les conclusions dirigées contre l' arrêté de reconduite à la frontière :

Considérant qu'à l'appui de ses conclusions dirigées contre l'arrêté ordonnant sa reconduite à la frontière, M. X excipe de l'illégalité tant de la décision du 5 octobre 2001 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour que de la décision du 22 juin 2001, dont elle constitue le fondement, par laquelle le ministre de l'intérieur a refusé de lui accorder l'asile territorial ; que M. X s'étant pourvu dans le délai du recours contentieux contre la décision du préfet de la Gironde lui refusant un titre de séjour qui portait à sa connaissance la décision du ministre de l'intérieur, ces deux décisions n'étaient pas devenues définitives à la date à laquelle il a saisi le tribunal administratif ; que, dès lors, l'exception d'illégalité est recevable ;

Considérant qu'aux termes de l'article 13 de la loi du 25 juillet 1952 susvisée : Dans les conditions compatibles avec les intérêts du pays, l'asile territorial peut être accordé par le ministre de l'intérieur après consultation du ministre des affaires étrangères à un étranger si celui-ci établit que sa vie ou sa liberté est menacée dans son pays ou qu'il y est exposé à des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que si M. X, qui est algérien d'origine kabyle, fait valoir qu'il s'est présenté comme candidat indépendant aux élections présidentielles de mars 1999 en Algérie et qu'il a fait l'objet depuis cette candidature de menaces, il n'apporte pas de justifications des risques personnels allégués ; qu'il n'est dès lors pas fondé à soutenir que la décision du 22 juin 2001 du ministre de l'intérieur lui refusant l'asile territorial et la décision du 5 octobre 2001 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour auraient méconnu les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant que si M. X fait valoir que son état de santé nécessite des soins qui lui imposerait de rester en France, il ressort des pièces du dossier que les affections dont il souffre ne sont pas d'une gravité telle qu'il ne pourrait recevoir un traitement approprié en Algérie ; que dés lors, le préfet de la Gironde n'a pas entaché son arrêté d'une erreur manifeste d'appréciation des conséquences de la mesure d'éloignement sur la situation personnelle de M. X ;

Considérant que, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est inopérant à l'encontre de l' arrêté attaqué ;

Sur les conclusions dirigées contre la décision fixant le pays de destination :

Considérant que si M. X soutient que les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ont été méconnues par la décision préfectorale fixant l'Algérie comme pays à destination duquel il doit être reconduit, il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que l'intéressé ne justifie pas de la réalité des risques personnels allégués en cas de retour dans son pays d'origine ; qu'il n'est dès lors pas fondé à soutenir que la décision fixant le pays de destination méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DE LA GIRONDE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Bordeaux a annulé l'arrêté du 30 novembre 2001 prononçant la reconduite à la frontière M. X ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant que la présente décision qui rejette la demande présentée par M. X devant le tribunal administratif de Bordeaux, n'appelle aucune mesure d'exécution ; que les conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales de lui accorder l'asile territorial doivent, en tout état de cause, être rejetées ;

Sur les conclusions de M. X tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que la somme que demande M. X au titre des frais exposés par lui non compris dans les dépens soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le jugement du 14 décembre 2001 du conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Bordeaux est annulé.

Article 2 : La demande de M. X devant le tribunal administratif de Bordeaux et ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE LA GIRONDE, à M. Hocine X et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.


Synthèse
Formation : 10eme sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 242020
Date de la décision : 09/05/2005
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 09 mai. 2005, n° 242020
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Vigouroux
Rapporteur ?: M. Jean-François Debat
Rapporteur public ?: Mme Mitjavile

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2005:242020.20050509
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