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01/06/2005 | FRANCE | N°266783

France | France, Conseil d'État, President de la section du contentieux, 01 juin 2005, 266783


Vu la requête, enregistrée le 22 avril 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Abdelmalek X, domicilié ... ; M. X demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 18 mars 2004 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 4 mars 2004 par lequel le préfet de la Drôme a décidé sa reconduite à la frontière et de la décision du même jour fixant l'Algérie comme pays de renvoi ;

2°)

d'annuler cet arrêté pour excès de pouvoir ;

3°) d'annuler le refus d'asile territor...

Vu la requête, enregistrée le 22 avril 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Abdelmalek X, domicilié ... ; M. X demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 18 mars 2004 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 4 mars 2004 par lequel le préfet de la Drôme a décidé sa reconduite à la frontière et de la décision du même jour fixant l'Algérie comme pays de renvoi ;

2°) d'annuler cet arrêté pour excès de pouvoir ;

3°) d'annuler le refus d'asile territorial du ministre de l'intérieur du 23 janvier 2003 et le refus de titre de séjour du préfet de la Drôme du 1er avril 2003 ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Drôme de réexaminer sa situation dans le délai d'un mois en vue de l'attribution d'un titre de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

Vu la loi n° 52-893 du 25 juillet 1952 modifiée ;

Vu l'ordonnance n°45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;

Vu le décret n° 98-503 du 23 juin 1998 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- les conclusions de M. Laurent Olléon, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée, en vigueur à la date de l'arrêté attaqué : Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait (...) ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X, de nationalité algérienne, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après le refus de titre de séjour du préfet de la Drôme qui lui a été notifié le 4 avril 2003 ; qu'il entrait, ainsi, dans le champ d'application de la disposition précitée ;

Sur l'exception d'illégalité du refus d'asile territorial décidé par le ministre de l'intérieur :

Considérant qu'aux termes de l'article 13 de la loi n° 52-893 du 25 juillet 1952 modifiée Dans les conditions compatibles avec les intérêts du pays, l'asile territorial peut être accordé par le ministre de l'intérieur après consultation du ministre des affaires étrangères à un étranger si celui-ci établit que sa vie ou sa liberté est menacée dans son pays ou qu'il y est exposé à des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde et des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Les décisions du ministre n'ont pas à être motivées ; qu'il résulte des termes mêmes de cet article que les décisions refusant l'asile territorial n'ont pas à être motivées ;

Considérant qu'aux termes de l'article 1 du décret du 23 juin 1998, pris pour l'application des dispositions précitées : L'étranger qui demande l'asile territorial est tenu de se présenter à la préfecture de sa résidence (...) Il y dépose son dossier qui est enregistré. Une convocation lui est remise, afin qu'il soit procédé à son audition ; qu'en vertu de l'article 2 de ce même décret : L'étranger est entendu en préfecture au jour que lui a fixé la convocation. Il peut demander au préalable l'assistance d'un interprète et peut être accompagné d'une personne de son choix ; que son article 3 dispose : Le préfet transmet au ministre de l'intérieur le dossier de la demande comportant les informations qu'il a pu recueillir et son avis motivé. Avant de statuer le ministre de l'intérieur transmet la copie des éléments (...) et du compte-rendu au ministre des affaires étrangères qui lui communique son avis dans les meilleurs délais ; qu'il ressort des pièces du dossier que M. X a demandé l'asile territorial le 2 avril 2002 ; que l'administration n'est pas tenue, dans la convocation qu'elle adresse au demandeur, d'informer celui-ci qu'il peut être assisté d'un interprète ; qu'il a été entendu le 29 octobre 2002, soit après un délai suffisant pour préparer cette audition ; que le ministre des affaires étrangères a rendu un avis défavorable qui n'avait pas à être motivé le 15 janvier 2003 au ministre de l'intérieur qui, par décision du 23 janvier 2003, a rejeté la demande d'asile ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que M. X ne se serait pas vu délivrer un récépissé ;

Considérant que M. X, de nationalité algérienne, soutient qu'il a reçu de la part du FIS de nombreuses menaces téléphoniques, puis que, réquisitionné pour tenir un bureau de vote pour des élections, il a été l'objet de menaces de mort ; que toutefois, ces allégations ne sont pas établies par les pièces du dossier et se rapportent à des faits antérieurs de plus de deux ans à l'arrivée du requérant en France ; qu'il n'est dès lors pas fondé à invoquer une violation des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 13 de la loi du 25 juillet 1952 ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le requérant n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le magistrat délégué n'a pas censuré l'erreur manifeste d'appréciation commise par le ministre de l'intérieur quant aux conséquences que ce refus d'asile territorial comporterait sur sa situation personnelle ;

Sur l'exception d'illégalité du refus de titre de séjour :

Considérant que la décision contestée, qui énonce les considérations de fait et de droit sur lesquelles elle se fonde, est suffisamment motivée ;

Considérant qu'aux termes de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : (...) 7º) A l'étranger, ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) ; qu'aux termes de l'article 12 quater de la même ordonnance : Dans chaque département est instituée une commission du titre de séjour (...). La commission est saisie par le préfet lorsque celui-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article 12 bis ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné à l'article 15 (...) ;

Considérant qu'aux termes de l'article 2 de la même ordonnance : Les étrangers sont, en ce qui concerne leur séjour en France, soumis aux dispositions de la présente ordonnance, sous réserve des conventions internationales ; que si l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 régit d'une manière complète les conditions dans lesquelles les ressortissants algériens peuvent être admis à séjourner en France et y exercer une activité professionnelle, ainsi que les règles concernant la nature des titres de séjour qui peuvent leur être délivrés, il n'a toutefois pas entendu écarter, sauf stipulations incompatibles expresses, l'application des dispositions de procédure qui s'appliquent à tous les étrangers en ce qui concerne la délivrance, le renouvellement ou le refus de titres de séjour ; qu'au nombre de ces dispositions, figurent notamment celles qui résultent des articles 12 bis (7º) et 12 quater précités de l'ordonnance qui prévoient que le préfet doit consulter la commission du titre de séjour lorsqu'il envisage de refuser un titre de séjour à un étranger dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que ce refus porterait au droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus ; que le préfet n'est toutefois tenu de saisir la commission que du seul cas des étrangers qui remplissent effectivement cette condition, et non de celui de tous les étrangers qui s'en prévalent ;

Considérant que M. X, né en 1974 en Algérie, est entré en France en 2002 ; qu'il n'a pas d'attache familiale sur le territoire français ; que la seule circonstance allèguée selon laquelle il entretient une relation suivie avec une jeune femme française avec laquelle il souhaite fonder un foyer et que sa situation serait précaire sur le marché du travail, ne suffisent pas à établir que le préfet, dont il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il n'a pas procédé à un examen particulier de la situation de l'intéressé, a méconnu son droit à mener une vie privée et familiale normale en France ; que, par suite, M. X n'est pas fondé à soutenir que le préfet de la Drôme était tenu, sur le fondement des articles 12 bis 7º et 12 quater précités de l'ordonnance du 2 novembre 1945, de consulter la commission du titre de séjour préalablement à sa décision ;

Sur les autres moyens dirigés contre l'arrêté de reconduite à la frontière :

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le préfet de la Drôme a suffisamment motivé son arrêté de reconduite à la frontière ;

Considérant que pour les raisons qui viennent d'être exposées, l'intéressé n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté du préfet de la Drôme viole les dispositions de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde et des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions de l'article 12 bis 7° de l'ordonnance du 2 novembre 1945 ; que le préfet n'a pas non plus commis d'erreur manifeste dans son appréciation des conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé de la mesure de reconduite à la frontière contestée ;

Sur la légalité de l'arrêté fixant l'Algérie comme pays de destination :

Considérant que pour les raisons qui viennent d'être exposées, l'intéressé n'est pas fondé à soutenir que la décision distincte fixant le pays de renvoi viole les dispositions de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, dès lors qu'il ne justifie pas de menaces réelles et personnelles à son encontre ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

Considérant que la présente décision, qui rejette la requête de M. X n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 911-2 du code de justice administrative tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet de réexaminer la situation de M. X en vue de l'attribution d'un titre de séjour sont irrecevables et doivent être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, verse à M. X la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de M. X est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Abdelmalek X, au préfet de la Drôme et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.


Synthèse
Formation : President de la section du contentieux
Numéro d'arrêt : 266783
Date de la décision : 01/06/2005
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 01 jui. 2005, n° 266783
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : Mme Hagelsteen
Rapporteur public ?: M. Olléon

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2005:266783.20050601
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