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14/11/2005 | FRANCE | N°263849

France | France, Conseil d'État, 10ème et 9ème sous-sections réunies, 14 novembre 2005, 263849


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 23 janvier et 19 mai 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés par le Centre national de la cinématographie (CNC), dont le siège est 12 rue de Lübeck à Paris (75016), représenté par son directeur général en exercice ; le Centre national de la cinématographie (CNC) demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 25 novembre 2003 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté sa demande d'annulation du jugement du 26 juin 2001 du tribunal administratif de Bord

eaux par lequel ont été annulées sa décision du 12 juillet 1994 et sa dé...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 23 janvier et 19 mai 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés par le Centre national de la cinématographie (CNC), dont le siège est 12 rue de Lübeck à Paris (75016), représenté par son directeur général en exercice ; le Centre national de la cinématographie (CNC) demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 25 novembre 2003 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté sa demande d'annulation du jugement du 26 juin 2001 du tribunal administratif de Bordeaux par lequel ont été annulées sa décision du 12 juillet 1994 et sa décision implicite résultant du silence gardé sur la demande d'autorisation d'exploitation dans le secteur non commercial présentée le 26 mars 1996 par la société Organisation des circuits cinématographiques privés ( O.C.C.P. ) ;

2°) de régler l'affaire au fond, d'annuler le jugement du 26 juin 2001 du tribunal administratif de Bordeaux et de rejeter les demandes présentées par la société Organisation des circuits cinématographiques privés (OCCP) devant ce tribunal ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'industrie cinématographique ;

Vu le décret du 28 décembre 1946, modifié, relatif aux modalités générales d'application du titre premier du code de l'industrie cinématographique ;

Vu la décision réglementaire n°12 du 2 mars 1948, modifiée, du directeur général du Centre national de la cinématographie ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Fabienne Lambolez, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Piwnica, Molinié, avocat du CENTRE NATIONAL DE LA CINEMATOGRAPHIE et de la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat de la société Organisation des circuits cinématographiques,

- les conclusions de Mlle Célia Verot, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que, par l'arrêt attaqué, la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté la demande du CENTRE NATIONAL DE LA CINEMATOGRAPHIE tendant à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Bordeaux annulant les deux décisions de ce centre refusant à la société Organisation des circuits cinématographiques privés (O.C.C.P.), le bénéfice des dispositions réglementaires relatives au secteur non commercial de la projection de films ;

Considérant que la cour administrative d'appel de Bordeaux a relevé que la lettre du 12 juillet 1994, adressée par le CENTRE NATIONAL DE LA CINEMATOGRAPHIE à la société OCCP en réponse à deux demandes qu'elle lui avait présentées, indiquait à cette société qu'elle ne pouvait se prévaloir ni des dispositions du deuxième alinéa de l'article 16 de la décision réglementaire n° 12 du directeur général de ce Centre en date du 2 mars 1948, ni de celles de l'article 15 du décret du 28 décembre 1946 ; qu'en déduisant de ces éléments et des conséquences que la lettre du 12 juillet 1994 pouvait avoir pour l'exercice de ses activités par la société, que cette lettre constituait une décision faisant grief, susceptible de recours pour excès de pouvoir, la cour administrative d'appel de Bordeaux n'a pas commis d'erreur de droit ;

Considérant que la cour, après avoir relevé que la société OCCP avait présenté devant le tribunal administratif de Bordeaux des conclusions dirigées contre un refus tacite d'autorisation à l'appui desquelles cette société avait repris l'argumentation qu'elle avait développée dans une précédente demande jointe à ses conclusions, a pu, par une appréciation souveraine, exempte de dénaturation des pièces du dossier, en déduire que la demande de première instance comportait l'exposé de conclusions et de moyens ainsi que l'exigeait l'article R. 87 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, alors applicable ;

Considérant que le CENTRE NATIONAL DE LA CINEMATOGRAPHIE soutenait devant le juge d'appel que la société OCCP ne remplissait pas les conditions lui permettant de se prévaloir de la réglementation applicable aux entreprises exerçant une activité de projection de film en dehors du secteur commercial ; qu'en relevant que la société OCCP, qui intervenait dans le cadre de séances de projection organisées à l'initiative de personnes publiques ou privées dont ce n'était pas l'activité principale et qui les proposaient gratuitement à leurs membres ou à leurs pensionnaires, n'était soumise ni aux dispositions de l'article 15 du décret du 28 décembre 1946 ni à l'article 16 de la décision réglementaire n° 12 du directeur général du CENTRE NATIONAL DE LA CINEMATOGRAPHIE en date du 2 mars 1948, la cour administrative d'appel de Bordeaux, qui n'était pas tenue de répondre à tous les arguments du requérant, a suffisamment motivé son arrêt ;

Considérant qu'aux termes de l'article 15 du décret du 28 décembre 1946 susvisé : « Le contrôle des recettes prévu aux articles 2 et 9 du code est organisé, en ce qui concerne les recettes d'exploitation des films, suivant les dispositions ci-après : 1°) Les directeurs de salles de spectacles cinématographiques sont tenus de remettre aux spectateurs comme titre de paiement du prix de leur place les billets réglementaires prévus par le décret du 29 juillet 1939 et portant la marque du centre. 2°) Les directeurs de salles sont également astreints à tenir un registre spécial d'exploitation, conforme au modèle établi par le centre et comportant notamment en regard du chiffre des recettes journalières l'indication du programme et les numéros de billets utilisés. 3°) Les directeurs de salles doivent à chaque changement de programme, adresser au Centre une déclaration de recettes comportant les mêmes indications que le registre spécial. 4°) Des agents commissionnés par le directeur général du centre sont chargés de l'inspection des salles de spectacles, afin de contrôler notamment l'exécution des prescriptions des paragraphes 1er et 2 ci dessus. -Les dispositions ci-dessus, à l'exception de celles du 4°, ne sont pas applicables aux séances de projections cinématographiques ci-après : a) Séances organisées par les services publics à caractère non commercial ; b) Séances gratuites ; c) Séances privées organisées par des associations habilitées à diffuser la culture par le film ; d) Séances publiques et payantes organisées exceptionnellement par les associations et les groupements légalement constitués agissant sans but lucratif, dans la limite de quatre par an et par association ou groupement. »

Considérant qu'en jugeant que la société OCCP assurait des séances de projection gratuites pour les spectateurs, et que dès lors, ces séances figuraient au nombre de celles, énumérées à l'article 15 précité, auxquelles ne sont pas applicables les modalités de contrôle des recettes prévues par cet article, alors même que la société percevait une rémunération forfaitaire de la part des établissements au sein desquels les projections étaient organisées, la cour administrative d'appel de Bordeaux n'a pas entaché son arrêt d'erreur de droit ;

Considérant qu'aux termes de l'article 16 du titre VI « exploitants de salles cinématographiques » de la décision réglementaire n° 12 du directeur général du CENTRE NATIONAL DE LA CINEMATOGRAPHIE du 2 mars 1948 : « L'autorisation est accordée aux organisateurs de projections d'oeuvres ou de documents cinématographiques ou audiovisuels, soit dans les salles de spectacles cinématographiques, soit dans tout lieu spécialement équipé à cet effet, quels que soient le procédé de fixation ou de transmission et la nature du support de ces oeuvres ou documents. Ne sont pas comprises dans le champ d'application de la présente décision réglementaire les représentations publiques d'oeuvres et de documents cinématographiques ou audiovisuels organisées accessoirement à une activité principale et proposées gratuitement ou sans supplément de prix (...) » ; qu'aux termes de l'article 17 du même titre de la même décision réglementaire : « Outre les prescriptions générales édictées à l'article 2 de la présente décision, la délivrance de l'autorisation est subordonnée aux conditions suivantes : a) la salle pour laquelle l'autorisation est sollicitée doit avoir fait l'objet d'un certificat de conformité délivré par l'autorité chargée d'appliquer la réglementation concernant la protection contre l'incendie des locaux recevant du public (...) c) le requérant, s'il n'est pas propriétaire de la salle dans laquelle il compte exercer son activité, doit être titulaire d'un bail commercial ou d'un engagement en tenant lieu. »

Considérant que la cour administrative d'appel de Bordeaux a jugé que les séances de projection de films pour lesquelles intervenait la société OCCP étaient organisées à l'initiative de personnes publiques ou privées dont ce n'était pas l'activité principale et qui les proposaient gratuitement à leurs membres ou à leurs pensionnaires ; qu'en déduisant de ces éléments, que ces séances de projection n'étaient pas comprises dans le champ d'application des dispositions de l'article 16 précité, alors même que l'organisation de ces séances était l'unique activité de la société OCCP pour laquelle elle percevait une rémunération forfaitaire, la cour administrative d'appel de Bordeaux n'a pas entaché son arrêt d'erreur de droit ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le CENTRE NATIONAL DE LA CINEMATOGRAPHIE n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêt du 25 novembre 2003 de la cour administrative d'appel de Bordeaux ;

Sur les conclusions de la société OCCP tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge du CENTRE NATIONAL DE LA CINEMATOGRAPHIE le paiement à la société OCCP de la somme de 2 500 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

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Article 1er : La requête du CENTRE NATIONAL DE LA CINEMATOGRAPHIE est rejetée.

Article 2 : le CENTRE NATIONAL DE LA CINEMATOGRAPHIE versera la somme de 2 500 euros à la société Organisation des circuits cinématographiques privés (OCCP)

Article 3 : La présente décision sera notifiée au CENTRE NATIONAL DE LA CINEMATOGRAPHIE, à la société Organisation des circuits cinématographiques privés (OCCP) et au ministre de la culture et de la communication.


Synthèse
Formation : 10ème et 9ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 263849
Date de la décision : 14/11/2005
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

63-03-02 SPECTACLES, SPORTS ET JEUX. CINÉMA. RÉGIME DE L'EXPLOITATION DES SALLES. - A) RÉGIME DE CONTRÔLE DES RECETTES PRÉVU À L'ARTICLE 15 DU DÉCRET DU 28 DÉCEMBRE 1946 - CHAMP D'APPLICATION - EXCLUSION - SÉANCES DE PROJECTION GRATUITES POUR LES SPECTATEURS - CIRCONSTANCE SANS INCIDENCE - VERSEMENT D'UNE RÉMUNÉRATION FORFAITAIRE PAR LES ÉTABLISSEMENTS AU SEIN DESQUELS SONT ORGANISÉES LES PROJECTIONS - B) RÉGIME D'AUTORISATION PRÉVU AUX ARTICLES 16 ET 17 DE LA DÉCISION RÉGLEMENTAIRE N°12 DU DIRECTEUR DU CENTRE NATIONAL DE LA CINÉMATOGRAPHIE EN DATE DU 2 MARS 1948 - CHAMP D'APPLICATION - EXCLUSION - SÉANCES ORGANISÉES PAR UNE SOCIÉTÉ COMMERCIALE À L'INITIATIVE DE PERSONNES PUBLIQUES OU PRIVÉES DONT CE N'EST PAS L'ACTIVITÉ PRINCIPALE ET QUI LES PROPOSENT À TITRE GRATUIT.

63-03-02 a) Des séances de projection assurées par une société et proposées à titre gratuit aux spectateurs sont au nombre de celles, énumérées à l'article 15 du décret du 28 décembre 1946, auxquelles ne sont pas applicables les modalités de contrôle des recettes prévues par cet article, alors même que la société perçoit une rémunération forfaitaire de la part des établissements au sein desquels les projections sont organisées.,,b) Des séances de projection de films organisées par une société à l'initiative de personnes publiques ou privées dont ce n'est pas l'activité principale et qui les proposent gratuitement à leurs membres ou à leurs pensionnaires n'entrent pas dans le champ d'application des dispositions de l'article 16 du titre VI « exploitants de salles cinématographiques » de la décision réglementaire n°12 du directeur général du centre national de la cinématographie en date du 2 mars 1948, alors même que l'organisation de ces séances serait l'unique activité de la société et que celle-ci percevrait à ce titre une rémunération forfaitaire.


Publications
Proposition de citation : CE, 14 nov. 2005, n° 263849
Publié au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Genevois
Rapporteur ?: Mme Fabienne Lambolez
Rapporteur public ?: Mlle Verot
Avocat(s) : SCP PIWNICA, MOLINIE ; SCP BORE ET SALVE DE BRUNETON

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2005:263849.20051114
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