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07/12/2005 | FRANCE | N°274577

France | France, Conseil d'État, President de la section du contentieux, 07 décembre 2005, 274577


Vu la requête sommaire et le mémoire ampliatif, enregistrés les 25 novembre 2004 et 24 janvier 2005 au secrétariat de la section du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Y... A, domicilié ... ; M. A demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 14 juin 2004 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 1er avril 2004 par lequel le préfet de Seine-Saint-Denis a décidé sa reconduite à la frontière et

la décision distincte fixant le pays de destination ;

2°) d'annuler cet ar...

Vu la requête sommaire et le mémoire ampliatif, enregistrés les 25 novembre 2004 et 24 janvier 2005 au secrétariat de la section du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Y... A, domicilié ... ; M. A demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 14 juin 2004 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 1er avril 2004 par lequel le préfet de Seine-Saint-Denis a décidé sa reconduite à la frontière et la décision distincte fixant le pays de destination ;

2°) d'annuler cet arrêté et cette décision pour excès de pouvoir ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- les observations de la SCP Ancel, Couturier-Heller, avocat de M. A,

- les conclusions de M. Christophe Devys, Commissaire du gouvernement ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant que pour rejeter les conclusions de M. A dirigées contre l'arrêté du 1er avril 2004 du préfet de Seine-Saint-Denis ordonnant sa reconduite à la frontière, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a employé dans un considérant le nom de Amidou Dembele au lieu de celui du requérant ; qu'il s'est, de plus, fondé sur le fait que l'ensemble de la famille de l'intéressé est au Mali, où résideraient son épouse et son enfant, alors qu'il ressort des pièces du dossier et qu'il n'est pas contesté que M. A est de nationalité mauritanienne, qu'il est célibataire et sans enfant ; que, dès lors, M. A est fondé à soutenir que le jugement du tribunal administratif de Cergy-Pontoise est entaché d'erreur de fait et à demander pour ce motif son annulation ;

Considérant qu'il appartient au juge d'appel, par voie d'évocation, d'examiner les autres moyens présentés par M. A à l'appui de son recours dirigé contre l'arrêté décidant sa reconduite à la frontière ;

Sur les conclusions aux fins d'annulation de l'arrêté de reconduite à la frontière :

Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée, en vigueur à la date de l'arrêté attaqué : Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait (...) ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A, de nationalité mauritanienne, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois à compter de la notification, le 26 janvier 2004, de la décision du 23 janvier 2004 lui refusant un titre de séjour ; que, par suite, M. A se trouvait dans le cas prévu à l'article 22-I-3° de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée où le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;

Sur la légalité externe de l'arrêté de reconduite à la frontière :

Considérant que Mme Denise X..., directeur des étrangers à la préfecture de Seine-Saint-Denis, dispose d'une délégation du préfet régulièrement publiée au recueil des actes administratifs du département, pour signer les arrêtés de reconduite à la frontière ; que le moyen doit donc être écarté ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir soulevée par le préfet de Seine-Saint-Denis tirée de la tardiveté de l'exception d'illégalité du refus de titre de séjour ;

Considérant que l'article 12 quater de l'ordonnance précitée du 2 novembre 1945 prévoit que : Dans chaque département, est instituée une commission du titre de séjour. La commission est saisie par le préfet lorsque celui-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article 12 bis ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné à l'article 15 ; que selon l'article 12 bis de la même ordonnance : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger, ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus ; qu'il résulte de ces dispositions que le préfet est tenu de saisir la commission du cas des seuls étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues aux articles 12 bis et 15 de l'ordonnance, auxquels il envisage de refuser le titre de séjour sollicité, et non de tous les étrangers qui se prévalent de ces dispositions ;

Considérant que, pour les mêmes motifs que ceux énoncés ci-dessous, la décision du préfet de Seine-Saint-Denis du 23 janvier 2004 refusant à M. A la délivrance d'un titre de séjour n'a pas méconnu les dispositions de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 ; que, dès lors, contrairement à ce qu'il soutient, M. A n'était pas au nombre des étrangers pouvant obtenir de plein droit un titre de séjour ou un certificat de résidence en application du 7° de l'article 12 bis ; que, par suite, le préfet n'était pas tenu de soumettre son cas à la commission du titre de séjour avant de rejeter sa demande ;

Sur la légalité interne de l'arrêté attaqué :

Considérant que si M. A, de nationalité mauritanienne, fait valoir qu'il réside auprès de sa soeur qui est en situation régulière sur le territoire français, qu'il s'est parfaitement intégré en France, qu'il a un emploi et dispose d'une couverture sociale, il ressort des pièces du dossier qu'il a toujours des attaches en Mauritanie ; que compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, notamment de la faible durée et des conditions de séjour de M. A, entré en France en 2001, célibataire et sans enfant, et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, l'arrêté du préfet de Seine-Saint-Denis en date du 1er avril 2004 n'a pas porté au droit de celui-ci au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; qu'il n'a ainsi pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Sur la légalité de la décision distincte fixant le pays de renvoi :

Considérant que si M. A, à qui le statut de réfugié a été refusé par une décision du directeur de l'office français de protection des réfugiés et apatrides du 26 mai 2003, confirmée par une décision de la commission des recours des réfugiés du 11 décembre 2003, fait état de ce qu'il courrait des risques en cas de retour en Mauritanie, les pièces qu'il produit ne permettent pas de justifier de façon suffisamment probante des risques et menaces encourus en cas de retour dans son pays d'origine ; que M. A, n'est, par suite, pas fondé à soutenir que la décision distincte fixant le pays de destination méconnaîtrait les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le jugement du 14 juin 2005 du conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Cergy-Pontoise est annulé.

Article 2 : La demande de M. A devant le tribunal administratif de Cergy-Pontoise est rejetée.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. Y... A, au préfet de Seine-Saint-Denis et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur, et de l'aménagement du territoire.


Synthèse
Formation : President de la section du contentieux
Numéro d'arrêt : 274577
Date de la décision : 07/12/2005
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 07 déc. 2005, n° 274577
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Musitelli
Rapporteur public ?: M. Devys
Avocat(s) : SCP ANCEL, COUTURIER-HELLER

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2005:274577.20051207
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