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28/03/2006 | FRANCE | N°291399

France | France, Conseil d'État, Juge des referes, 28 mars 2006, 291399


Vu la requête, enregistrée le 16 mars 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, et le mémoire complémentaire, enregistré le 17 mars, présentés pour la COMMUNE DE SAINT CHELY D'APCHER (Lozère), représentée par son maire ; la commune demande au juge des référés du Conseil d'Etat, sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative :

1°) d'annuler l'ordonnance en date du 10 mars 2006 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Montpellier lui a enjoint de prendre toutes dispositions pour qu'il soit procédé, dans un dél

ai de huit jours, à l'enregistrement des statuts du syndicat CGT des fonct...

Vu la requête, enregistrée le 16 mars 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, et le mémoire complémentaire, enregistré le 17 mars, présentés pour la COMMUNE DE SAINT CHELY D'APCHER (Lozère), représentée par son maire ; la commune demande au juge des référés du Conseil d'Etat, sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative :

1°) d'annuler l'ordonnance en date du 10 mars 2006 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Montpellier lui a enjoint de prendre toutes dispositions pour qu'il soit procédé, dans un délai de huit jours, à l'enregistrement des statuts du syndicat CGT des fonctionnaires territoriaux de Saint Chély d'Apcher - Margueride - Aubrac et à la délivrance du récépissé correspondant à la transmission de ces statuts au procureur de la République près le tribunal de grande instance de Mende ;

2°) de rejeter la requête présentée au juge des référés par le syndicat CGT des fonctionnaires territoriaux de Saint Chély d'Apcher - Margueride - Aubrac ;

elle soutient que le maire a pu légalement prévoir que le syndicat requérant disposerait de locaux non dans les bâtiments mêmes de la mairie mais dans un autre immeuble municipal ; qu'il a transmis les statuts du syndicat au préfet et au procureur de la République ; qu'ainsi la requête ne satisfait pas à l'exigence d'urgence particulière prévue par l'article L. 521 ;2 du code de justice administrative ; qu'aucune atteinte grave et manifestement illégale à la liberté syndicale ne peut être reprochée à la commune ; que la demande d'injonction est dépourvue d'objet dès lors que la transmission sollicitée a été effectuée ;

Vu l'ordonnance attaquée ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 22 mars 2006, présenté par le syndicat CGT des fonctionnaires territoriaux de Saint Chély d'Apcher - Margueride - Aubrac ; le syndicat CGT des fonctionnaires territoriaux de Saint Chély d'Apcher - Margueride - Aubrac conclut au rejet de la requête ; il soutient qu'il n'a obtenu ni récépissé de sa déclaration ni enregistrement de ses statuts ; qu'ainsi l'objet du litige n'a pas disparu ; que le maire a porté une atteinte grave à la liberté syndicale en prétendant exercer un contrôle sur les statuts du syndicat ; que le litige porte sur ce point et non sur l'attribution d'un local, que le syndicat requérant n'a au demeurant pas demandée ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 22 mars 2006, présenté pour la COMMUNE DE SAINT CHELY D'APCHER, qui reprend les conclusions et les moyens de sa requête ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code du travail ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir convoqué à une audience publique, d'une part, la COMMUNE DE SAINT CHELY D'APCHER et d'autre part, le syndicat CGT des fonctionnaires territoriaux de Saint Chély d'Apcher - Margueride - Aubrac et le ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire ;

Vu le procès-verbal de l'audience publique du 23 mars 2006 à 16 heures 45, au cours de laquelle ont été entendus Me X..., avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat de la COMMUNE DE SAINT CHELY D'APCHER et le représentant du syndicat CGT des fonctionnaires territoriaux de Saint Chély d'Apcher - Margueride - Aubrac, et à l'issue de laquelle le juge des référés décide de prolonger l'instruction jusqu'au mardi 28 mars 2006 à 12 heures ;

Vu, enregistré le 24 mars 2006, le nouveau mémoire présenté pour la COMMUNE DE SAINT CHELY D'APCHER, qui reprend les conclusions et les moyens de sa requête ; elle soutient en outre qu'il appartient au syndicat de modifier de lui-même son siège et qu'à défaut le juge des référés pourrait lui ordonner de le faire ;

Vu, enregistré le 27 mars 2006, le nouveau mémoire présenté par le syndicat CGT des fonctionnaires territoriaux de Saint Chély d'Apcher - Margueride - Aubrac ; le syndicat CGT des fonctionnaires territoriaux de Saint Chély d'Apcher - Margueride - Aubrac reprend les conclusions et les moyens de son précédent mémoire ; il soutient en outre que le local qui lui a été attribué est déjà occupé par un autre syndicat ;

Considérant que l'article L. 521-2 du code de justice administrative prévoit que le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une autorité administrative aurait, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, porté une atteinte grave et manifestement illégale ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 411-3 du code du travail : « Les fondateurs de tout syndicat professionnel doivent déposer les statuts et les noms de ceux qui, à un titre quelconque, sont chargés de l'administration ou de la direction » ; que l'article R. 411-1 de ce code précise que le dépôt prévu à l'article L. 411-3 a lieu à la mairie de la localité où le syndicat est établi et dispose que « communication des statuts doit être donnée par le maire au procureur de la République » ;

Considérant que le syndicat CGT des fonctionnaires territoriaux de Saint Chély d'Apcher - Margeride - Aubrac a, en application de ces dispositions, déposé ses statuts à la mairie de Saint Chély d'Apcher (Lozère) le 7 novembre 2005 ; que ces statuts fixaient le siège social du syndicat à la mairie ; que le maire, estimant qu'il ne pouvait mettre des locaux adéquats à la disposition du syndicat à la mairie, a demandé une modification des statuts sur ce point ; qu'une délibération du conseil municipal du 13 janvier 2006 a décidé d'attribuer au nouveau syndicat des locaux situés dans le centre socio-culturel communal ; que le maire a pris un arrêté en ce sens le 6 février 2006 ; que, le maire n'ayant pas procédé à la transmission des statuts au procureur de la République, le syndicat a saisi, le 7 mars 2006 le juge des référés du tribunal administratif de Montpellier sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative ; que, par une ordonnance du 10 mars, le juge des référés a enjoint à la commune de prendre toutes dispositions pour assurer la transmission des statuts du syndicat au procureur de la République ; qu'il résulte toutefois de l'instruction, et notamment des pièces produites devant le Conseil d'Etat, que, dès le 8 mars 2006, le maire avait transmis les statuts du syndicat au procureur de la République et au préfet en précisant que le siège social de ce syndicat ne pouvait être en mairie et qu'un autre local avait été attribué au syndicat par la commune ;

Considérant que, si la liberté syndicale a le caractère d'une liberté fondamentale et si elle a pour corollaire la libre constitution des syndicats selon la procédure prévue par la loi, elle n'implique pas qu'un syndicat puisse fixer son siège dans des locaux administratifs sans l'accord des autorités dont ceux-ci dépendent ; qu'avant que le juge des référés de première instance ait statué, le maire avait transmis les statuts du syndicat au procureur de la République et au préfet ; que, même si cette transmission était accompagnée d'une lettre indiquant que le siège du syndicat ne pouvait être fixé à la mairie mais pouvait éventuellement, si le syndicat en décidait ainsi, être fixé dans les locaux mis à la disposition du syndicat par la commune, et si un désaccord subsiste quant à la possibilité pour le syndicat de disposer effectivement de ces derniers locaux, le comportement de la commune ne fait pas ressortir d'atteinte grave et manifestement illégale à la liberté syndicale, dès lors que les statuts ont été transmis au procureur de la République, seul habilité à se prononcer sur leur validité et saisir, le cas échéant, le tribunal compétent ; que la COMMUNE DE SAINT CHELY D'APCHER est, en conséquence, fondée à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le juge des référés du tribunal administratif de Montpellier a estimé qu'une telle atteinte ressortait du dossier et a, en conséquence, fait usage du pouvoir que l'article L. 521-2 du code de justice administrative lui confère dans un tel cas ;

O R D O N N E :

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Article 1er : L'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Montpellier en date du 10 mars 2006 est annulée.

Article 2 : La requête présentée devant le juge des référés du tribunal administratif de Montpellier par le syndicat CGT des fonctionnaires territoriaux de Saint Chély d'Apcher - Margeride - Aubrac est rejetée.

Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée à la COMMUNE DE SAINT CHELY D'APCHER et au syndicat CGT des fonctionnaires territoriaux de Saint Chély d'Apcher - Margeride - Aubrac.

Copie en sera adressée pour information au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire et au préfet de la Lozère.


Synthèse
Formation : Juge des referes
Numéro d'arrêt : 291399
Date de la décision : 28/03/2006
Sens de l'arrêt : Satisfaction totale
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

54-035-03-03-01-01 PROCÉDURE. - PROCÉDURES INSTITUÉES PAR LA LOI DU 30 JUIN 2000. - RÉFÉRÉ TENDANT AU PRONONCÉ DE MESURES NÉCESSAIRES À LA SAUVEGARDE D'UNE LIBERTÉ FONDAMENTALE (ART. L. 521-2 DU CODE DE JUSTICE ADMINISTRATIVE). - CONDITIONS D'OCTROI DE LA MESURE DEMANDÉE. - ATTEINTE GRAVE ET MANIFESTEMENT ILLÉGALE À UNE LIBERTÉ FONDAMENTALE. - LIBERTÉ FONDAMENTALE. - LIBERTÉ SYNDICALE - PORTÉE.

54-035-03-03-01-01 Si la liberté syndicale a le caractère d'une liberté fondamentale et si elle a pour corollaire la libre constitution des syndicats selon la procédure prévue par la loi, elle n'implique pas qu'un syndicat puisse fixer son siège dans des locaux administratifs sans l'accord des autorités dont ceux-ci dépendent.


Publications
Proposition de citation : CE, 28 mar. 2006, n° 291399
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Stirn
Rapporteur ?: M. Bernard Stirn
Avocat(s) : BLONDEL

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2006:291399.20060328
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