Vu la requête, enregistrée le 3 juillet 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Abderrahmane A, demeurant ... ; Monsieur A demande au juge des référés du Conseil d'Etat :
1°) d'ordonner, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension de la décision implicite par laquelle la Commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté la réclamation formée contre la décision du 13 décembre 2005 du consul général de France à Alger lui refusant la délivrance d'un visa de court séjour en qualité de parent d'un enfant français ;
2°) d'enjoindre au ministre des affaires étrangères et au Consul général de France à Alger de réexaminer la demande de visa au regard des motifs de la décision à intervenir dans un délai de quinze jours à compter de la notification de celle-ci sous une astreinte de 200 euros par jour de retard ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement à son conseil de la somme de 3000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, moyennant la renonciation dudit conseil à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle qu'il a exercée ;
il expose qu'il est de nationalité algérienne, né avant l'indépendance de l'Algérie, le 28 novembre 1961 ; qu'il a contracté mariage le 15 novembre 1990 avec Madame Aïcha B ; qu'il est entré en France avec son épouse le 18 mars 2000 sous couvert d'un visa de trente jours ; que leurs demandes d'asile politique ont été rejetées tant par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) que par la Commission des recours des réfugiés ; qu'à la date du 13 juin 2002 des arrêtés de reconduite à la frontière ont été pris à leur encontre par le préfet du Puy-de-Dôme ; que cette mesure a été réitérée le 29 mai 2004 à l'égard de l'exposant et mise à exécution ; que son épouse, demeurée sur le territoire français, a donné naissance le 4 avril 2005 à une enfant, Ilyana, laquelle a la nationalité française en vertu du « double droit du sol » ; qu'en sa qualité de père d'un enfant français l'exposant a présenté le 19 juillet 2005 une première demande de visa de court séjour qui a été rejetée le 3 août 2005 au motif que la preuve n'était pas rapportée de la nationalité française de son enfant ; qu'une nouvelle demande du 7 septembre 2005 a été rejetée le 13 décembre 2005 sans autre motivation qu'une référence générale au code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, à la convention de Schengen du 19 juin 1990 et à l'accord franco-algérien ; que la réclamation adressée à la Commission instituée par le décret du 10 novembre 2000 a été implicitement rejetée le 20 avril 2006 ; qu'un recours en annulation a été formé contre cette décision ; qu'il a été décidé de saisir en outre le juge des référés d'une demande de suspension ; qu'il y a en effet urgence compte tenu du fait qu'il se trouve séparé contre son gré de son épouse et de ses deux enfants, Amine né le 29 avril 1992 et Ilyana ; qu'il existe un doute sérieux quant à la légalité de la décision contestée ; que celle-ci n'est pas motivée en la forme contrairement à ce qu'impose l'article L. 211-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que la seule mention dans la décision du consul général en date du 13 décembre 2005 de l'article 5-1 e) de l'accord de Schengen ne satisfait pas aux exigences découlant des articles 1 et 3 de la loi n°79-587 du 11 juillet 1979 ; qu'en l'espèce, le refus de visa porte une atteinte excessive au droit de l'exposant de mener une vie familiale normale garanti tant par le Préambule de la Constitution de 1946 que par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'accusé de réception postal du 20 février 2006 de la réclamation adressée le 15 février 2006 à la Commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France ;
Vu, enregistré le 18 juillet 2006, le mémoire présenté par le ministre des affaires étrangères en réponse à la communication qui lui a été donnée du pourvoi ; le ministre conclut à ce qu'il n'y ait lieu de statuer au motif qu'il a donné pour instructions au consul général de France à Alger de délivrer le visa sollicité ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique, notamment ses articles 20, 37 et 75 ;
Vu le décret n° 2000-1093 du 10 novembre 2000 ;
Vu le code de justice administrative, notamment ses articles L. 511-2, L. 521-1 et L. 761-1 ;
Après avoir convoqué à une audience publique, d'une part, M. Abderrahmane A, d'autre part, le ministre des affaires étrangères ;
Vu le procès-verbal de l'audience publique du 18 juillet 2006 à 15 heures au cours de laquelle ont été entendus :
- Me Gaschignard, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, pour M. A ;
- les représentants du ministre des affaires étrangères ;
Sur la demande d'aide juridictionnelle :
Considérant qu'a été transmise au Conseil d'Etat une demande d'aide juridictionnelle au nom de M. A ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'admettre provisoirement le requérant au bénéfice de cette aide, par application des dispositions de l'article 20 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
Sur les conclusions aux fins d'injonction et de réexamen :
Considérant que postérieurement à l'introduction du pourvoi de M. Abderrahmane A tendant à ce que soit ordonnée la suspension de la décision refusant de lui accorder un visa de court séjour en qualité de parent d'un enfant français et à ce qu'il soit enjoint au consul général de France à Alger de réexaminer sa demande, le ministre des affaires étrangères a donné pour instruction à l'autorité consulaire de délivrer le visa sollicité ; qu'ainsi les conclusions de la requête aux fins d'injonction et de réexamen sont devenues sans objet ;
Sur les conclusions relatives au remboursement des frais exposés et non compris dans les dépens :
Considérant que dans les circonstances de l'affaire il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat le paiement au conseil du requérant de la somme de 3000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, moyennant la renonciation dudit conseil, par application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 susvisée, à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle qu'il a exercée ;
O R D O N N E :
Article 1er : M. Abderrahmane A est admis provisoirement au bénéfice de l'aide juridictionnelle.
Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de M. Abderrahmane A aux fins d'injonction et de réexamen.
Article 3 : L'Etat versera au conseil de M. Abderrahmane A la somme de 3000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, moyennant la renonciation dudit conseil à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle qu'il a exercée.
Article 4 : La présente ordonnance sera notifiée à M. Abderrahmane A et au ministre des affaires étrangères.