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24/01/2007 | FRANCE | N°290066

France | France, Conseil d'État, 6ème sous-section jugeant seule, 24 janvier 2007, 290066


Vu la requête, enregistrée le 10 février 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour M. et Mme Hamed A, demeurant ... ; M. et Mme A demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision du 13 octobre 2005, par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté leur recours dirigé contre la décision du 13 mars 2005 du consul général de France à Alger refusant un visa d'entrée en France à leur fille, Mlle Kenza B ;

2°) d'enjoindre au ministre des affaires étrangères de délivrer à Mlle

B un visa de long séjour ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu l'accord fran...

Vu la requête, enregistrée le 10 février 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour M. et Mme Hamed A, demeurant ... ; M. et Mme A demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision du 13 octobre 2005, par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté leur recours dirigé contre la décision du 13 mars 2005 du consul général de France à Alger refusant un visa d'entrée en France à leur fille, Mlle Kenza B ;

2°) d'enjoindre au ministre des affaires étrangères de délivrer à Mlle B un visa de long séjour ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;

Vu le code de l'entrée et de séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le décret n° 2000-1093 du 10 novembre 2000 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Bruno Chavanat, Maître des Requêtes,

- les conclusions de M. Yann Aguila, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mlle Kenza B a été confiée à son grand père maternel, M. A ressortissant français établi en France, par une mesure de délégation de l'autorité parentale dite « kafala » prise par les autorités judiciaires algériennes ; que M. et Mme A ont demandé, au profit de Mlle B, un visa de long séjour à la suite d'une décision du préfet des Bouches-du-Rhône du 16 juillet 2004, autorisant le regroupement familial en application des dispositions de l'article 29, alors en vigueur, de l'ordonnance du 2 novembre 1945 relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;

Considérant que la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours dont elle était saisie, au motif que le refus de visa était conforme à l'intérêt supérieur de l'enfant, âgée de 10 ans et ayant toujours vécu en Algérie avec ses parents, et qu'il n'était pas établi que ceux-ci ne puissent pas pourvoir à son entretien ; que l'appréciation de l'intérêt supérieur de l'enfant, qu'il appartient au préfet de porter lorsqu'il se prononce sur une demande de regroupement familial, n'est toutefois pas au nombre des motifs d'ordre public pouvant, à eux seuls, justifier légalement le refus de la délivrance d'un visa de long séjour lorsque le regroupement familial a été autorisé par le préfet ; que les requérants sont, dès lors, fondés à soutenir que la décision attaquée est entachée d'une erreur de droit ;

Considérant que l'administration peut, en première instance comme en appel, faire valoir devant le juge de l'excès de pouvoir que la décision dont l'annulation est demandée est légalement justifiée par un motif, de droit ou de fait, autre que celui initialement indiqué, mais également fondé sur la situation existant à la date de cette décision ; qu'il appartient alors au juge, après avoir mis à même l'auteur du recours de présenter ses observations sur la substitution ainsi sollicitée, de rechercher si un tel motif est de nature à fonder légalement sa décision, puis d'apprécier s'il résulte de l'instruction que l'administration aurait pris la même décision si elle s'était fondée initialement sur ce motif ; que dans l'affirmative il peut procéder à la substitution demandée, sous réserve toutefois qu'elle ne prive pas le requérant d'une garantie procédurale liée au motif substitué ;

Considérant que si le ministre des affaires étrangères invoque, dans son mémoire en défense communiqué à M. et Mme A, un autre motif, tiré de ce que le visa sollicité révèle un détournement des dispositions de l'accord franco-algérien sur le regroupement familial, à des fins purement économiques et migratoires, il n'établit pas l'existence d'un tel détournement ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. et Mme A sont fondés à demander l'annulation de la décision de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France en date du 13 octobre 2005 ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : « Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une décision dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution » ; qu'eu égard aux motifs de la présente décision et alors, d'une part, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la situation de Mlle B se serait modifiée, en droit ou en fait, depuis l'intervention de la décision attaquée, d'autre part, qu'aucun motif d'ordre public ne fait obstacle à la venue en France de Mlle B, l'exécution de cette décision implique nécessairement la délivrance d'un visa de long séjour à l'intéressée ; que, par suite, il y a lieu pour le Conseil d'Etat de prescrire au ministre des affaires étrangères de délivrer à Mlle B un visa de long séjour dans le délai d'un mois à compter de la notification de la présente décision ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La décision de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France en date du 13 octobre 2005 est annulée.

Article 2 : Il est enjoint au ministre des affaires étrangères de délivrer à Mlle B un visa de long séjour sur le territoire français dans le délai d'un mois à compter de la notification de la présente décision.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. et Mme Hamed A et au ministre des affaires étrangères.


Synthèse
Formation : 6ème sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 290066
Date de la décision : 24/01/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 24 jan. 2007, n° 290066
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Schrameck
Rapporteur public ?: M. Aguila

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2007:290066.20070124
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