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22/02/2008 | FRANCE | N°308879

France | France, Conseil d'État, 5ème sous-section jugeant seule, 22 février 2008, 308879


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 27 août et 11 septembre 2007 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Rehan B, demeurant ... et Mme Adia A, demeurant ... ; M. B et Mme A demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance du 10 août 2007 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté leur demande tendant à la suspension de l'arrêté du 4 mai 2005 du préfet de Seine-Saint-Denis déclarant l'insalubrité irrémédiable de l'immeuble sis à Saint-Ouen, 60 rue Mathieu

et l'interdisant définitivement à l'habitation et de l'arrêté du 25 juin 200...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 27 août et 11 septembre 2007 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Rehan B, demeurant ... et Mme Adia A, demeurant ... ; M. B et Mme A demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance du 10 août 2007 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté leur demande tendant à la suspension de l'arrêté du 4 mai 2005 du préfet de Seine-Saint-Denis déclarant l'insalubrité irrémédiable de l'immeuble sis à Saint-Ouen, 60 rue Mathieu et l'interdisant définitivement à l'habitation et de l'arrêté du 25 juin 2007 de la même autorité déclarant d'utilité publique l'acquisition par la ville de Saint-Ouen des lots dépendants de la co-propriété sise au 60, rue Mathieu et 47, rue Kléber à Saint-Ouen et déclarant cessibles immédiatement et en totalité au profit de la ville de Saint-Ouen les lots de copropriété 1 à 8,13,14,16 à 18 désignés par l'état parcellaire annexé à l'arrêté ;

2°) statuant en référé, de suspendre les arrêtés du préfet de Seine-Saint-Denis du 4 mai 2005 et du 25 juin 2007 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat d'une part, et de la commune de Saint-Ouen d'autre part, la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu la loi n° 70-612 du 10 juillet 1970 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Nicole Guedj, Conseiller d'Etat,

- les observations de la SCP Delaporte, Briard, Trichet, avocat de M. B et de Mme A, et de la SCP Lyon-Caen, avocat de la ville de Saint-Ouen,

- les conclusions de M. Terry Olson, Commissaire du gouvernement ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête ;

Sur l'ordonnance en tant qu'elle rejette les conclusions à fin de suspension de l'arrêté du 4 mai 2005 par lequel le préfet de Seine-Saint-Denis a déclaré irrémédiablement insalubre et a interdit à l'habitation l'immeuble sis 60, rue Mathieu à Saint-Ouen :

Considérant que, pour rejeter les conclusions tendant à la suspension de l'arrêté susvisé du préfet de Seine-Saint-Denis, le juge des référés du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a relevé qu'à la date de la présentation de ces conclusions, plus de deux mois s'étaient écoulés depuis l'accomplissement par l'administration des formalités prescrites par l'article L. 1331-27 du code de la santé publique et que la requête en annulation de l'arrêté, faute d'avoir été introduite dans le délai de recours contentieux, était tardive ; que, toutefois, les dispositions de l'article L. 1331-27 du code de la santé publique ne sont pas applicables à la notification des arrêtés déclarant l'insalubrité des immeubles, qui est organisée par les dispositions de l'article L. 1331-28-1 du même code, mais à celle des avis adressés par le préfet aux propriétaires pour les informer de l'ouverture de la procédure préalable à l'intervention de ces arrêtés ; que, par suite, les requérants sont fondés à soutenir que l'ordonnance attaquée est entachée d'erreur de droit en tant qu'elle a rejeté la demande de suspension de l'arrêté du préfet de Seine-Saint-Denis en date du 4 mai 2005 ;

Sur l'ordonnance en tant qu'elle rejette les conclusions à fins de suspension de l'arrêté du 25 juin 2007 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a déclaré d'utilité publique l'acquisition par la ville de Saint-Ouen dudit immeuble :

Considérant qu'il appartient au juge des référés qui rejette une demande tendant à la suspension de l'exécution d'une décision administrative au motif qu'il n'est pas fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de cette décision, d'analyser soit dans les visas de son ordonnance soit dans les motifs de celle-ci, les moyens développés au soutien de la demande de suspension, afin, notamment, de mettre le juge de cassation en mesure d'exercer son contrôle ;

Considérant que, dans l'analyse de l'argumentation présentée par M. B et Mme A à l'appui de leur demande de suspension de l'arrêté du préfet de Seine-Saint-Denis en date du 25 juin 2007, l'ordonnance attaquée a omis de mentionner le moyen tiré de ce que cet arrêté, en méconnaissance des dispositions de l'article 14 de la loi du 10 juillet 1970, n'aurait pas mentionné les offres de relogement faites aux occupants de l'immeuble expropriés ni fixé précisément la date de prise de possession par la ville de Saint-Ouen de cet immeuble ; qu'elle n'a pas davantage fait état de ce moyen dans ses motifs ; que par suite, l'ordonnance attaquée est entachée d'un défaut de motivation en tant qu'elle a rejeté la demande de suspension de l'arrêté préfectoral du 25 juin 2007 ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les requérants sont fondés à demander l'annulation de l'ordonnance attaquée ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, le Conseil d'Etat, lorsqu'il prononce l'annulation d'une décision d'une juridiction administrative statuant en dernier ressort, peut régler l'affaire au fond si l'intérêt d'une bonne administration de la justice le justifie ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de régler l'affaire au titre de la procédure de référé engagée ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner les fins de non-recevoir opposées par la ville de Saint-Ouen ;

Sur les conclusions tendant à la suspension de l'arrêté du préfet de Seine-Saint-Denis en date du 4 mai 2005 constatant l'insalubrité irrémédiable de l'immeuble :

Considérant qu'en vertu de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension par le juge des référés de l'exécution d'une décision administrative est subordonnée, notamment, à la condition que « l'urgence le justifie » ; que, selon l'article R. 522-1 du même code : « La requête visant au prononcé de mesures d'urgence doit justifier de l'urgence de l'affaire » ; qu'il ressort des pièces du dossier que les requérants ont demandé l'annulation de l'arrêté susvisé en date du 4 mai 2005 au tribunal administratif de Cergy-Pontoise le 21 novembre 2006 et sa suspension par une requête enregistrée au greffe de ce tribunal le 16 juillet 2007 et n'exposent pas les motifs qui justifieraient l'urgence à suspendre cette décision ; que, dans ces conditions, la demande de suspension de cet arrêté doit être rejetée pour défaut d'urgence ;

Sur les conclusions tendant à la suspension de l'arrêté du préfet de Seine-Saint-Denis en date du 25 juin 2007 déclarant l'utilité publique de l'expropriation de l'immeuble au profit de la ville de Saint-Ouen :

Considérant que les requérants soutiennent que l'arrêté omet de mentionner les offres de relogement faites aux occupants en méconnaissance des dispositions de l'article 14 de la loi du 10 juillet 1970 ; qu'il ne donne aucune date de prise de possession de l'immeuble ; que le recours à la procédure d'expropriation organisée par la loi du 10 juillet 1970 caractérise un détournement de procédure ; qu'aucun de ces moyens n'est, en l'état de l'instruction, de nature à créer un doute sérieux sur la légalité de cet arrêté ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la demande des requérants tendant à la suspension des arrêtés susvisés doit être rejetée ainsi que leurs conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'il y a lieu, en revanche, de faire droit aux conclusions de la commune de Saint-Ouen ayant le même objet et de mettre à la charge des requérants la somme de 3 500 euros qu'elle demande au titre de ces dispositions ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'ordonnance en date du 10 août 2007 du juge des référés du tribunal administratif de Cergy-Pontoise est annulée.

Article 2 : La demande de M. B et Mme A tendant à la suspension des arrêtés du 4 mai 2005 et du 25 juin 2007 du préfet de Seine-Saint-Denis est rejetée.

Article 3 : M. B et Mme A verseront à la ville de Saint-Ouen la somme de 3 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. Rehan B, à Mme Adia A, à la ville de Saint-Ouen, au ministre de la santé et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales.


Synthèse
Formation : 5ème sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 308879
Date de la décision : 22/02/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 22 fév. 2008, n° 308879
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : Mme Hubac
Rapporteur ?: Mme Nicole Guedj
Rapporteur public ?: M. Olson Terry
Avocat(s) : SCP LYON-CAEN, FABIANI, THIRIEZ ; SCP DELAPORTE, BRIARD, TRICHET

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2008:308879.20080222
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