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29/04/2008 | FRANCE | N°314694

France | France, Conseil d'État, Juge des référés, 29 avril 2008, 314694


Vu la requête, enregistrée le 31 mars 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par Mme Btissam A, demeurant ... ; Mme Btissam A demande au juge des référés du Conseil d'Etat :

1°) d'ordonner, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension de l'exécution de la décision implicite par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté son recours dirigé contre la décision du 26 octobre 2007 du consul général de France à Fès lui refusant un visa

d'entrée et de long séjour en France en qualité de conjoint de ressortiss...

Vu la requête, enregistrée le 31 mars 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par Mme Btissam A, demeurant ... ; Mme Btissam A demande au juge des référés du Conseil d'Etat :

1°) d'ordonner, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension de l'exécution de la décision implicite par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté son recours dirigé contre la décision du 26 octobre 2007 du consul général de France à Fès lui refusant un visa d'entrée et de long séjour en France en qualité de conjoint de ressortissant français ;

2°) d'enjoindre au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire de lui délivrer un visa ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;



elle soutient qu'il existe un doute sérieux quant à la légalité de la décision contestée ; qu'en effet, celle-ci est insuffisamment motivée dans la mesure où seule la fraude, l'annulation du mariage ou la menace à l'ordre public peuvent être opposées à un conjoint de ressortissant français ; qu'aucun de ces griefs ne peut être retenu dans son cas ; que la décision dont la suspension est demandée est entachée d'erreur de droit dès lors que la condition de connaissance de la langue française et des valeurs de la République ne s'appliquait pas à la date à laquelle elle a été prise ; que cette décision est entachée d'erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'elle apporte les éléments justifiant la sincérité de son union avec M. B et la réalité de la communauté de vie ; que son époux n'est pas actuellement sans emploi mais en invalidité ; que la décision contestée porte une atteinte excessive à son droit de mener une vie privée et familiale normale, méconnaissant ainsi l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que la condition d'urgence est remplie dès lors qu'elle est mariée depuis plus de dix-huit mois et vit séparée de son époux ; que celui-ci rencontre de graves difficultés psychologiques aggravées par la séparation ; qu'il ne dispose que de revenus faibles, ce qui l'empêche de se rendre régulièrement auprès d'elle au Maroc ;



Vu la décision dont la suspension est demandée ;

Vu la requête à fin d'annulation présentée à l'encontre de cette décision et le recours présenté à la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France ;

Vu, enregistré le 21 avril 2008, le mémoire en défense présenté par le ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire, qui conclut au rejet de la requête ; le ministre soutient que le juge des référés ne peut, sans excéder son office, lui enjoindre de délivrer un visa ; que les conclusions de Mme A sont irrecevables dès lors qu'elles sont exclusivement dirigées contre la décision consulaire du 26 octobre 2007 et que la décision implicite de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France s'est substituée à cette décision ; à titre subsidiaire, que la condition d'urgence n'est pas remplie dès lors que M. B est en situation d'invalidité depuis 1995 ; que, s'il semble bien souffrir d'un symptôme de type dépressif, rien ne permet de soutenir le caractère bénéfique de la venue en France de Mme A ; qu'il n'existe aucune circonstance de nature à établir l'existence d'un préjudice grave et immédiat ; que le moyen tiré du défaut de motivation de la décision consulaire est inopérant dès lors que la décision de la commission se substitue à celle du consul ; qu'au surplus la décision du consul est en l'espèce motivée ; que le moyen tiré de l'erreur de droit manque en fait dès lors que c'est à bon droit que la décision litigieuse est fondée sur un faisceau d'éléments établissant que l'union n'a été contractée que dans le but de permettre à Mme A de s'établir en France ; que le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation n'est pas fondé dès lors qu'un tel faisceau d'éléments permet d'établir le caractère frauduleux du mariage ; que le moyen tiré de la violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'est pas fondé dès lors que l'existence d'une relation entre les époux n'est pas établie ;

Vu, enregistré le 21 avril 2008, le mémoire en réplique présenté par Mme A qui persiste dans les conclusions de sa requête ; elle reprend les mêmes moyens et soutient en outre qu'aucune décision de refus implicite de la commission ne peut naître ; qu'il existe une présomption d'urgence en matière de refus de visa à un conjoint de Français ; que le ministre inverse la charge de la preuve ; qu'il n'apporte pas d'éléments prouvant le caractère frauduleux du mariage ; qu'il méconnaît la liberté de mariage protégée par l'article 12 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code civil ;
Vu le code de justice administrative ;


Après avoir convoqué à une audience publique, d'une part Mme Btissam A, et d'autre part, le ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire ;

Vu le procès-verbal de l'audience publique du 23 avril 2008 à 16 heures au cours de laquelle ont été entendus :

- Me de Nervo, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat de Mme Btissam A ;

- le représentant du ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : « Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision » ;


Considérant qu'il résulte des pièces du dossier soumis au juge des référés que Mme A, ressortissante marocaine, a épousé le 21 septembre 2006 à Fès (Maroc) M. C, ressortissant français ; que ce mariage a été transcrit le 13 septembre 2007 sur les registres de l'état civil français ; que le visa sollicité par Mme A pour entrer en France lui a toutefois été refusé au motif qu'elle aurait contracté ce mariage à des fins étrangères à l'union matrimoniale, dans le but d'obtenir un visa d'entrée et de séjour en France ; qu'un tel motif ne repose pas par lui-même sur une erreur de droit ; qu'en l'espèce et en l'état de l'instruction, alors d'une part que le mariage de la requérante a été célébré peu de temps après sa rencontre avec M. C, au cours d'un voyage au Maroc de ce dernier financé par l'oncle de Mme A, d'autre part que les éléments produits devant le juge des référés ne font pas apparaître de relations suivies entre les époux, les moyens tirés de ce que le refus litigieux serait entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ou qu'il méconnaîtrait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne sont pas de nature à créer un doute sérieux sur la légalité du refus de visa litigieux ; qu'il en résulte que la requête de Mme A, y compris ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ne peut qu'être rejetée ;




O R D O N N E :
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Article 1er : La requête de Mme Btissam A est rejetée.
Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à Mme Btissam A et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.


Synthèse
Formation : Juge des référés
Numéro d'arrêt : 314694
Date de la décision : 29/04/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 29 avr. 2008, n° 314694
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Stirn
Rapporteur ?: M. Bernard Stirn

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2008:314694.20080429
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