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27/11/2008 | FRANCE | N°320649

France | France, Conseil d'État, Juge des référés, 27 novembre 2008, 320649


Vu la requête, enregistrée le 15 septembre 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par Mme Noella B, née C, et son mari, M. Mustafa B, élisant domicile ... ; M. et Mme B demandent au juge des référés du Conseil d'Etat :

1°) d'ordonner, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension de l'exécution de la décision du consul général de France à Istanbul (Turquie) du 9 octobre 2007, refusant la délivrance d'un visa de long séjour à M. B, en qualité de conjoint d'une ressortissante française ;

2°) d'

ordonner sur le même fondement la suspension de l'exécution de la décision implic...

Vu la requête, enregistrée le 15 septembre 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par Mme Noella B, née C, et son mari, M. Mustafa B, élisant domicile ... ; M. et Mme B demandent au juge des référés du Conseil d'Etat :

1°) d'ordonner, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension de l'exécution de la décision du consul général de France à Istanbul (Turquie) du 9 octobre 2007, refusant la délivrance d'un visa de long séjour à M. B, en qualité de conjoint d'une ressortissante française ;

2°) d'ordonner sur le même fondement la suspension de l'exécution de la décision implicite par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté leur recours dirigé contre la décision du 9 octobre 2007 du consul général de France à Istanbul ;

3°) d'enjoindre au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire de délivrer le visa sollicité dans un délai de cinq jours à compter de la notification de l'ordonnance à intervenir, sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

ils soutiennent qu'il y a urgence dès lors que le refus de visa, qui les empêche de mener une vie maritale normale depuis 2006, intervient alors que les contraintes professionnelles de Mme B l'empêchent de se rendre auprès de son mari et méconnaît pour ces raisons l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que la décision attaquée est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'elle méconnaît les articles 8 et 12 de la même convention, puisque M. B est légalement divorcé de sa précédente épouse, qu'il vit éloigné d'elle quoiqu'il ait la garde de leurs enfants, et que son attachement pour son épouse est sincère ;

Vu la décision dont la suspension est demandée ;

Vu la copie de la requête à fin d'annulation présentée à l'encontre de cette décision ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 16 octobre 2008, présenté par le ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire qui conclut au rejet de la requête ; il soutient que les conclusions à fin de suspension de la décision du consul du 9 octobre 2007 sont irrecevables puisqu'il résulte du décret du 10 novembre 2000 instituant une commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France que sa décision implicite de rejet du 9 janvier 2008 s'est substituée à celle du consul ; que le juge des référés ne tient pas de l'article L. 521-1 du code de justice administrative le pouvoir d'annuler une décision administrative ; que la séparation familiale invoquée ne suffit pas à constituer une situation d'urgence; que la décision contestée n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors que de nombreux indices permettent d'établir le caractère complaisant du divorce de M. B d'avec sa première épouse, et par suite l'insincérité de son mariage avec Mme A, alors qu'il n'existe aucune preuve tangible d'une relation suivie entre les deux époux depuis 2006 ; qu'il en résulte qu'il n'y a pas d'atteinte au droit à une vie privée et familiale, Mme B, née A ne prouvant d'ailleurs pas l'impossibilité de rendre visite son mari ; qu'il n'est pas porté atteinte au droit au mariage prévu à l'article 12 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, par suite, les conclusions prises sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont irrecevables ;

Après avoir convoqué à une audience publique, d'une part, M. et Mme B et, d'autre part, le ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire ;

Vu le procès-verbal de l'audience publique du 21 octobre 2008 à 10 heures au cours de laquelle ont été entendus :

- Me Blancpain, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat des requérants ;

- Mme B, née A ;

- les représentantes du ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire ;

Et à l'issue de laquelle le juge des référés a décidé de prolonger l'instruction ;

Vu le nouveau mémoire, enregistré le 12 novembre 2008, présenté par M. et Mme B, qui tend aux mêmes fins que la requête, par les mêmes moyens ; M. et Mme B produisent des précisions relatives aux liens qu'ils entretiennent entre eux ;

Vu le nouveau mémoire, enregistré le 18 novembre 2008, présenté par le ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire ; le ministre conclut au rejet de la requête, par les mêmes moyens que son précédent mémoire ; il indique que les précisions complémentaires apportées par les requérants ne sont pas suffisamment étayées pour être convaincantes ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Considérant qu'en vertu de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution d'une décision administrative lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de cette décision ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. Mustafa B, ressortissant turc, né en 1964, est entré irrégulièrement en France, où résidaient plusieurs membres de sa famille, en 2001 ; qu'il a divorcé en décembre 2004 de sa première épouse, de nationalité turque également, dont il avait eu deux enfants, nés en 1989 et 1992 ; que la tutelle de ces deux enfants lui a été confiée ; que sa situation administrative n'ayant pas été régularisée, il a fait l'objet, en février 2005, d'un arrêté de reconduite à la frontière ; que, rentré en Turquie après cette mesure, il y a épousé, le 15 juillet 2005, Mme A, ressortissante française ; que ce mariage a été transcrit sur les registres de l'état civil français à Istanbul le 10 mars 2006 ; que M. B a sollicité, à la suite de cette transcription, un visa de long séjour en qualité de conjoint de ressortissant français ; qu'il demande la suspension de l'exécution du refus opposé à sa demande par les autorités consulaires et implicitement confirmé par la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France ;

Considérant que, si Mme B s'est rendue, depuis son mariage, une fois chaque année en Turquie, et en dernier lieu du 31 octobre au 9 novembre 2008, M. et Mme B n'ont produit, ni à l'appui de leur requête ni à la suite du complément d'instruction décidé par le juge des référés au terme de l'audience publique, de documents permettant de justifier qu'ils entretiennent des relations suivies et régulières ; que, dans ces conditions, la condition d'urgence, à laquelle est subordonnée la suspension qu'ils sollicitent, ne peut être regardée comme remplie ; que leur requête, y compris ses conclusions tendant à l'application de l'article L . 761-1 du code de justice administrative, doit dès lors être rejetée ;

O R D O N N E :

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Article 1er : La requête de M. et Mme B est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à M. et Mme B et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.


Synthèse
Formation : Juge des référés
Numéro d'arrêt : 320649
Date de la décision : 27/11/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 27 nov. 2008, n° 320649
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Stirn
Rapporteur ?: M. Bernard Stirn
Avocat(s) : SCP CELICE, BLANCPAIN, SOLTNER

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2008:320649.20081127
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