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09/03/2009 | FRANCE | N°296538

France | France, Conseil d'État, 5ème sous-section jugeant seule, 09 mars 2009, 296538


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 16 août et 14 décembre 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la COMMUNE DE TRIMBACH, représentée par son maire en exercice domicilié en cette qualité en mairie de Trimbach (67470) ; la COMMUNE DE TRIMBACH demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 1er juin 2006 par lequel la cour administrative d'appel de Nancy a annulé le jugement du 10 février 2004 du tribunal administratif de Strasbourg annulant, à la demande de la COMMUNE DE TRIMBACH, l'arrêté du 24 décem

bre 2001 du préfet du Bas-Rhin délivrant à M. Volkmar A un permis de cons...

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 16 août et 14 décembre 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la COMMUNE DE TRIMBACH, représentée par son maire en exercice domicilié en cette qualité en mairie de Trimbach (67470) ; la COMMUNE DE TRIMBACH demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 1er juin 2006 par lequel la cour administrative d'appel de Nancy a annulé le jugement du 10 février 2004 du tribunal administratif de Strasbourg annulant, à la demande de la COMMUNE DE TRIMBACH, l'arrêté du 24 décembre 2001 du préfet du Bas-Rhin délivrant à M. Volkmar A un permis de construire pour un hall d'aérodrome ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à sa demande de première instance ;

3°) de mettre à la charge solidaire de M. A et de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Marc Lambron, Conseiller d'Etat,

- les observations de la SCP Didier, Pinet, avocat de la COMMUNE DE TRIMBACH,

- les conclusions de Mme Catherine de Salins, Rapporteur public ;

Considérant que la COMMUNE DE TRIMBACH se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 1er juin 2006 par lequel la cour administrative d'appel de Nancy a, après avoir annulé le jugement du 10 février 2004 du tribunal administratif de Nancy, rejeté la demande de cette commune tendant à l'annulation de l'arrêté du 24 décembre 2001 du préfet du Bas-Rhin délivrant à M. A un permis de construire pour un hall d'aérodrome au lieu-dit « Leizelberg » à Trimbach ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la commune avait soulevé devant le tribunal administratif un moyen tiré de ce que la construction projetée méconnaîtrait les dispositions du a) de l'article R. 111-14-1 du code de l'urbanisme ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen, dont elle était saisie par l'effet dévolutif de l'appel, la cour a entaché son arrêt d'insuffisante motivation ; que la COMMUNE DE TRIMBACH est dès lors fondée, pour ce motif, à en demander l'annulation ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative et de régler l'affaire au fond ;

Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article L. 421-5 du code de l'urbanisme dans sa rédaction alors applicable : « Lorsque, compte tenu de la destination de la construction projetée, des travaux portant sur des réseaux publics de distribution d'eau, d'assainissement ou de distribution d'électricité sont nécessaires pour assurer la desserte de ladite construction, le permis de construire ne peut être accordé si l'autorité qui le délivre n'est pas en mesure d'indiquer dans quel délai et par quelle collectivité publique ou par quel concessionnaire de service public lesdits travaux doivent être exécutés » ; qu'aux termes de l'article R. 111-13 du même code : « .... /, le permis de construire peut être refusé ou n'être accordé que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation ou leur importance imposent, soit la réalisation par la commune d'équipements publics nouveaux hors de proportion avec ses ressources actuelles soit un surcroît important des dépenses de fonctionnement des services publics » ;

Considérant que pour annuler le permis de construire délivré le 24 décembre 2001 à M. A par le préfet du Bas-Rhin, le tribunal administratif a relevé que la construction envisagée, destinée selon ce tribunal à un hall d'aérodrome permettant la construction d'aéronefs ULM, nécessitait une desserte par les réseaux publics et méconnaissait de ce fait les dispositions des articles L. 421-5 et R. 111-13 du code de l'urbanisme ; qu'il résulte toutefois des pièces du dossier que la demande de permis de construire, dans son dernier état, portait sur un bâtiment ayant pour unique objet d'être utilisé comme un garage abritant les ULM évoluant depuis l'aérodrome privé pour lequel M. A dispose d'une autorisation et que le permis de construire est assorti de prescriptions formulées par le service départemental d'incendie et de secours imposant la réalisation d'une réserve d'eau de 120 m3 ; qu'il s'ensuit que la desserte de la construction projetée n'impliquait pas d'extension ou de renforcement des réseaux publics d'assainissement ou de distribution d'eau ou d'électricité ; que, dès lors, c'est à tort que le tribunal administratif s'est fondé sur une méconnaissance des dispositions des articles L. 421-5 et R. 111-13 du code pour annuler l'arrêté du préfet du Bas-Rhin du 24 décembre 2001 ;

Considérant toutefois qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par la COMMUNE DE TRIMBACH devant le tribunal administratif de Strasbourg ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 111-1-2 du code de l'urbanisme dans sa rédaction alors applicable : « En l'absence de plan local d'urbanisme ou de carte communale opposable aux tiers, ou de tout document d'urbanisme en tenant lieu, seules sont autorisées, en dehors des parties actuellement urbanisées de la commune : (...) 3° Les constructions et installations incompatibles avec le voisinage des zones habitées et l'extension mesurée des constructions et installations existantes (...) » ; que le bâtiment ici en cause, dont le terrain d'assiette est situé en dehors des parties actuellement urbanisées de la commune, est constitutif en tant que dépendance d'un aérodrome d'une construction incompatible avec le voisinage des zones habitées ; qu'ainsi, dès lors que la construction relève de l'exception prévue par le 3° de l'article L. 111-1-2, laquelle n'est pas limitée à l'extension des bâtiments existants, le moyen tiré de la méconnaissance de cet article doit être écarté ;

Considérant qu'aux termes de l'article R.111-14-1 du code de l'urbanisme : « Le permis de construire peut être refusé ou n'être accordé que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions sont de nature, par leur localisation ou leur destination : a) A favoriser une urbanisation dispersée incompatible avec la vocation des espaces naturels environnants, en particulier lorsque ceux-ci sont peu équipés ; .... c) A compromettre les activités agricoles ou forestières, notamment en raison de la valeur agronomique des sols, des structures agricoles, de l'existence de terrains objets d'une délimitation au titre d'une appellation d'origine contrôlée ou d'une indication géographique protégée ou comportant des équipements spéciaux importants ainsi que de périmètres d'aménagement fonciers hydrauliques.... » ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la construction en cause, eu égard notamment à sa consistance, à son objet, et à sa localisation, soit de nature à favoriser une urbanisation dispersée incompatible avec la vocation des espaces naturels environnants, non plus qu'à compromettre les activités agricoles ou forestières pour les raisons énumérées au c) de l'article R. 111-14-1 du code ; qu'il s'ensuit que la commune requérante n'est pas fondée à soutenir que le préfet du Bas-Rhin aurait commis une erreur manifeste d'appréciation au regard de ces dispositions en délivrant le permis de construire attaqué ;

Considérant qu'aux termes de l'article R.111-4 du code de l'urbanisme dans sa rédaction alors applicable : « Le permis de construire peut être refusé sur des terrains qui ne seraient pas desservis par des voies publiques ou privées dans des conditions répondant à l'importance ou à la destination de l'immeuble ou de l'ensemble d'immeubles envisagé, et notamment si les caractéristiques de ces voies rendent difficile la circulation ou l'utilisation des engins de lutte contre l'incendie » ; qu'il ressort des pièces du dossier que le terrain d'assiette de la construction projetée est desservi par un chemin rural sur lequel il n'est plus sérieusement contesté que M. A dispose d'un droit d'usage ; qu'il ressort également du dossier, notamment de l'avis favorable des services départementaux d'incendie et de secours du Bas-Rhin sur la demande déposée par l'intéressé, que les caractéristiques de cette voie n'ont pas pour effet de rendre difficile la circulation ou l'utilisation des engins de lutte contre l'incendie ; que, dès lors, le préfet du Bas-Rhin n'a pas entaché son appréciation d'une erreur manifeste au regard des dispositions de l'article R. 111-4 ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement du 10 février 2004, le tribunal administratif de Strasbourg a annulé l'arrêté du préfet du Bas-Rhin du 24 décembre 2001 lui délivrant un permis de construire ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge solidaire de M. A et de l'Etat, qui ne sont pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que la COMMUNE DE TRIMBACH demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de la COMMUNE DE TRIMBACH la somme de 4 000 euros que M. A demande au titre desdits frais ;

D E C I D E :

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Article 1er : L'arrêt du 1er juin 2006 de la cour administrative d'appel de Nancy et le jugement du 10 février 2004 du tribunal administratif de Strasbourg sont annulés.

Article 2 : La demande de la COMMUNE DE TRIMBACH devant le tribunal administratif de Strasbourg est rejetée.

Article 3 : La COMMUNE DE TRIMBACH versera à M. A une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la COMMUNE DE TRIMBACH est rejeté.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à la COMMUNE DE TRIMBACH, à M. Volkmar A et au ministre d'Etat, ministre de l'écologie, de l'énergie.


Synthèse
Formation : 5ème sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 296538
Date de la décision : 09/03/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 09 mar. 2009, n° 296538
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : Mme Hubac
Rapporteur ?: M. Marc Lambron
Avocat(s) : SCP DIDIER, PINET

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2009:296538.20090309
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