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01/07/2009 | FRANCE | N°296842

France | France, Conseil d'État, 9ème et 10ème sous-sections réunies, 01 juillet 2009, 296842


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 25 août et 26 décembre 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour le GAEC MONTJEAN COTEAUX DELAUNAY PERE ET FILS, dont le siège est à Montjean-sur-Loire (49570) ; le GAEC MONTJEAN COTEAUX DELAUNAY PERE ET FILS demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'article 4 de l'arrêt du 7 juin 2006 par lequel la cour administrative d'appel de Nantes a rejeté les conclusions de ses requêtes tendant à l'annulation des jugements du tribunal administratif de Nantes du 1er octobre 2004 rejetan

t ses demandes tendant en premier lieu à la décharge de l'impôt sur ...

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 25 août et 26 décembre 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour le GAEC MONTJEAN COTEAUX DELAUNAY PERE ET FILS, dont le siège est à Montjean-sur-Loire (49570) ; le GAEC MONTJEAN COTEAUX DELAUNAY PERE ET FILS demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'article 4 de l'arrêt du 7 juin 2006 par lequel la cour administrative d'appel de Nantes a rejeté les conclusions de ses requêtes tendant à l'annulation des jugements du tribunal administratif de Nantes du 1er octobre 2004 rejetant ses demandes tendant en premier lieu à la décharge de l'impôt sur les sociétés, de la contribution de 10 % sur l'impôt sur les sociétés et de l'imposition forfaitaire annuelle des sociétés auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 1995 et des pénalités correspondantes, en deuxième lieu à la décharge de l'imposition forfaitaire annuelle des sociétés à laquelle il a été assujetti au titre des années 1998 à 2000 ainsi que des pénalités correspondantes, en troisième lieu à la décharge de la taxe d'apprentissage à laquelle il a été assujetti au titre des années 1998 à 2000 et des pénalités correspondantes ;

2°) réglant l'affaire au fond, de prononcer la décharge des impositions restant en litige ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code rural ;

Vu la loi n° 62-917 du 8 août 1962 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Eric Combes, chargé des fonctions de Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle, Hannotin, avocat du GAEC MONTJEAN COTEAUX DELAUNAY PERE ET FILS,

- les conclusions de M. Pierre Collin, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle, Hannotin, avocat du GAEC MONTJEAN COTEAUX DELAUNAY PERE ET FILS ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu'à l'issue de deux vérifications de comptabilité du GROUPEMENT AGRICOLE D'EXPLOITATION EN COMMUN (GAEC) MONTJEAN COTEAUX DELAUNAY PERE ET FILS portant respectivement sur les exercices clos les 30 juin 1995, 1996 et 1997 et les 30 juin 1998, 1999 et 2000, l'administration fiscale l'a assujetti à l'impôt sur les sociétés au titre de l'exercice clos le 30 juin 1995, à la contribution de 10 % sur l'impôt sur les sociétés au titre de ce même exercice, à l'imposition forfaitaire annuelle au titre des années 1995 et 1998 à 2000 ainsi qu'à la taxe d'apprentissage au titre des années 1998 à 2000, au motif que le GAEC se livrait à des opérations commerciales accessoires à son activité agricole ; que le GAEC se pourvoit en cassation contre l'article 4 de l'arrêt du 7 juin 2006 par lequel la cour administrative d'appel de Nantes a confirmé les quatre jugements du tribunal administratif de Nantes du 1er octobre 2004 rejetant ses demandes tendant à la décharge de ces impositions et des pénalités correspondantes ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi ;

Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 323-1 du code rural reprenant les termes de l'article 1er de la loi du 8 août 1962 relative aux groupements agricoles d'exploitation en commun : Les groupements agricoles d'exploitation en commun sont des sociétés civiles de personnes régies par les chapitres Ier et II du titre IX du livre III du code civil et par les dispositions du présent chapitre. Ils sont formés entre personnes physiques majeures ; qu'aux termes de l'article 7 de la même loi, dont les dispositions ont été codifiées à l'article L. 323-13 du code rural dans sa rédaction issue de la loi du 22 juillet 1993 relative à la partie législative du livre III (nouveau) du code rural : La participation à un groupement agricole d'exploitation en commun ne doit pas avoir pour effet de mettre ceux des associés qui sont considérés comme chefs d'exploitation et leur famille, pour tout ce qui touche leurs statuts économique, social et fiscal, dans une situation inférieure à celle des autres chefs d'exploitation agricole, et à celle des autres familles de chefs d'exploitation agricole ; qu'il résulte des dispositions de la loi du 8 août 1962, éclairées par les travaux parlementaires, que le législateur a entendu maintenir à l'exploitant agricole qui participe à un GAEC le statut, notamment fiscal, dont il bénéficiait auparavant comme exploitant à titre individuel ;

Considérant d'autre part, qu'aux termes du 2 de l'article 206 du code général des impôts, relatif à l'impôt sur les sociétés, dans sa rédaction applicable aux années d'imposition en litige : Sous réserve des dispositions de l'article 239 ter, les sociétés civiles sont également passibles dudit impôt, même lorsqu'elles ne revêtent pas l'une des formes visées au 1, si elles se livrent à une exploitation ou à des opérations visées aux articles 34 et 35. / Toutefois, les sociétés civiles dont l'activité principale entre dans le champ d'application de l'article 63 peuvent bénéficier des dispositions de l'article 75 lorsqu'elles sont soumises à un régime réel d'imposition (...) ; qu'aux termes de l'article 75 de ce code, dans sa rédaction applicable avant le 1er janvier 1998 : Le chiffre d'affaires tiré d'activités accessoires relevant de la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux et de celle des bénéfices non commerciaux réalisé par un exploitant agricole soumis à un régime réel (...) peut être pris en compte pour la détermination du bénéfice agricole lorsqu'il n'excède ni 30 pour 100 du chiffre d'affaires tiré de l'activité agricole, ni 200 000 F au titre d'un exercice (...) ; qu'aux termes du même article du code dans sa rédaction applicable pour la détermination des résultats des exercices clos à compter du 1er janvier 1998 : Les produits des activités accessoires relevant de la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux (...) réalisés par un exploitant agricole soumis à un régime réel (...) peuvent être pris en compte pour la détermination du bénéfice agricole lorsque, au titre de l'année civile précédant la date d'ouverture de l'exercice, les recettes accessoires commerciales (...) n'excèdent ni 30 pour 100 des recettes tirées de l'activité agricole, ni 200 000 F (...) ; qu'en application du principe de transparence fiscale institué par les dispositions de la loi du 8 août 1962, d'une part, la somme des recettes accessoires commerciales du GAEC et de chaque associé du groupement ayant la qualité de chef d'exploitation, divisée par la somme des recettes tirées de l'activité du GAEC et de chaque associé ayant la qualité de chef d'exploitation, ne doit pas excéder 30 %, d'autre part, la somme des recettes accessoires commerciales du GAEC et des associés du groupement ayant la qualité de chef d'exploitation, divisée par le nombre des associés ayant la qualité de chef d'exploitation, ne doit pas excéder 200 000 F ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la cour administrative d'appel de Nantes, en jugeant que l'appréciation du seuil de 200 000 F fixé à l'article 75 du code général des impôts ne devait pas être effectuée en fonction du nombre d'associés du GAEC, a commis une erreur de droit ; que, dès lors, le GAEC MONTJEAN COTEAUX DELAUNAY PERE ET FILS est fondé à demander l'annulation de l'article 4 de l'arrêt attaqué ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative et de régler l'affaire au fond ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que le GAEC MONTJEAN COTEAUX DELAUNAY PERE ET FILS, qui est soumis à un régime réel d'imposition, comprend six associés ayant la qualité de chef d'exploitation ; qu'en application des ratios mentionnés ci-dessus, les seuils de 30 % et de 200 000 F ne sont pas dépassés au cours de chacun des exercices clos les 30 juin 1995, 1996, 1997, 1998, 1999 et 2000 ; que l'article 206 du code général des impôts conditionnant l'assujettissement à la contribution de 10 % de l'impôt sur les sociétés prévue par l'article 235 ter ZA du même code et à l'imposition forfaitaire annuelle instituée par l'article 223 septies de ce code, le GAEC MONTJEAN COTEAUX DELAUNAY PERE ET FILS est fondé à demander à être déchargé non seulement de l'impôt sur les sociétés mis à sa charge au titre de 1995 mais aussi de la contribution de 10 % de l'impôt sur les sociétés mise en recouvrement au titre de l'année 1995 et de l'imposition forfaitaire annuelle qui lui a été réclamée au titre des années 1995 et 1998 à 2000 ;

Considérant qu'aux termes de l'article 224 du code général des impôts : 1. Il est établi une taxe, dite taxe d'apprentissage, (...) / 2. Cette taxe est due : / (...) 2° Par les sociétés, associations et organismes passibles de l'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 206, à l'exception de ceux désignés au 5 de l'article précité, quel que soit leur objet (...) ; qu'il résulte de ces dispositions que le GAEC MONTJEAN COTEAUX DELAUNAY PERE ET FILS n'est pas passible de la taxe d'apprentissage même pour la part de ses recettes correspondant à son activité non agricole ; que, par suite, il est fondé à demander à être déchargé de la taxe d'apprentissage mise à sa charge au titre des années 1998 à 2000 ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le GAEC MONTJEAN COTEAUX DELAUNAY PERE ET FILS est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Nantes a rejeté ses demandes tendant à la décharge des impositions restant en litige ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros au titre des frais exposés par le GAEC MONTJEAN COTEAUX DELAUNAY PERE ET FILS et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

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Article 1er : L'article 4 de l'arrêt de la cour administrative d'appel de Nantes du 7 juin 2006 est annulé.

Article 2 : Il est accordé au GAEC MONTJEAN COTEAUX DELAUNAY PERE ET FILS la décharge des cotisations d'impôt sur les sociétés au titre de l'exercice clos en 1995, de contribution de 10 % sur cet impôt au titre de ce même exercice, d'imposition forfaitaire annuelle relatives aux années 1995, 1998, 1999 et 2000 ainsi que de taxe d'apprentissage relatives aux années 1998 à 2000.

Article 3 : Les quatre jugements du tribunal administratif de Nantes du 1er octobre 2004 sont réformés en ce qu'ils ont de contraire à la présente décision.

Article 4 : L'Etat versera au GAEC MONTJEAN COTEAUX DELAUNAY PERE ET FILS la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée au GAEC MONTJEAN COTEAUX DELAUNAY PERE ET FILS et au ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat.


Synthèse
Formation : 9ème et 10ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 296842
Date de la décision : 01/07/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 01 jui. 2009, n° 296842
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Martin
Rapporteur ?: M. Eric Combes
Rapporteur public ?: M. Collin Pierre
Avocat(s) : SCP NICOLAY, DE LANOUVELLE, HANNOTIN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2009:296842.20090701
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