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03/07/2009 | FRANCE | N°304305

France | France, Conseil d'État, 8ème et 3ème sous-sections réunies, 03 juillet 2009, 304305


Vu le pourvoi et le mémoire complémentaire, enregistrés les 2 avril et 2 juillet 2007 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE THERABEL LUCIEN PHARMA dont le siège social est situé 123, rue Jules Guesdes à Levallois Perret (92309) ; la SOCIETE THERABEL LUCIEN PHARMA demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 25 janvier 2007 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté sa requête tendant à l'annulation de l'article 2 du jugement en date du 17 décembre 2003 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté le

surplus des conclusions de sa demande tendant à la décharge des somme...

Vu le pourvoi et le mémoire complémentaire, enregistrés les 2 avril et 2 juillet 2007 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE THERABEL LUCIEN PHARMA dont le siège social est situé 123, rue Jules Guesdes à Levallois Perret (92309) ; la SOCIETE THERABEL LUCIEN PHARMA demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 25 janvier 2007 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté sa requête tendant à l'annulation de l'article 2 du jugement en date du 17 décembre 2003 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté le surplus des conclusions de sa demande tendant à la décharge des sommes qui lui ont été réclamées en matière de prélèvements sur les produits de placements à revenu fixe au titre des années 1992 et 1993 par un avis de mise en recouvrement du 26 mars 1996 ;

2°) réglant l'affaire au fond, de prononcer la décharge de ces prélèvements ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 66-537 du 24 juillet 1966 sur les sociétés commerciales ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Jérôme Michel, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Célice, Blancpain, Soltner, avocat de la SOCIETE THERABEL LUCIEN PHARMA,

- les conclusions de M. Laurent Olléon, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Célice, Blancpain, Soltner, avocat de la SOCIETE THERABEL LUCIEN PHARMA ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu'au cours de la vérification de comptabilité dont la SOCIETE THERABEL LUCIEN PHARMA a fait l'objet, l'administration fiscale a constaté que MM. Max et Bruno Lucien et Mme Joëlle Briere avaient cédé, le 18 avril 1991, leurs parts de la société Laboratoire Lucien à la société de droit belge Therabel et à la SA Laboratoires Gonnon, cette dernière devenue, par voie d'absorption le 23 octobre 1991, la SOCIETE THERABEL LUCIEN PHARMA ; qu'à la suite de cette cession, la SOCIETE THERABEL LUCIEN PHARMA a émis en octobre 1991 un emprunt obligataire de 16 000 000 F, divisé en 3 200 obligations de 5 000 F chacune, réservé à ces trois personnes qui s'étaient par l'effet d'un protocole d'accord signé le 15 mars 1991 engagées à réemployer une quote-part du prix de cession des titres pour la souscription d'un emprunt obligataire et qui avaient également signé, le 18 avril 1991, une convention de garantie de passif prévoyant que les obligations devaient être placées sur un compte séquestre ; que les bénéficiaires des obligations ont opté pour l'assujettissement des produits de ces obligations au prélèvement prévu par le I de l'article 125 A du code général des impôts ; que la SOCIETE THERABEL LUCIEN PHARMA a estimé que ces produits relevaient du taux prévu au 1° du III bis de cet article ; que l'administration a remis en cause ce taux pour y substituer celui de 35 % applicable aux produits de placements courus à partir du 1er janvier 1990 au motif que les obligations émises par la société n'étaient pas des titres négociables au sens des dispositions du 1° du III bis de l'article 125 A ; que la SOCIETE THERABEL LUCIEN PHARMA se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 25 janvier 2007 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a confirmé le jugement du 17 décembre 2003 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté le surplus des conclusions de sa demande tendant à la décharge des sommes qui lui ont été réclamées à la suite du redressement dont elle a fait l'objet au titre des années 1992 et 1993 ;

Considérant qu'aux termes de l'article 125 A du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux années en litige : I. Sous réserve des dispositions du 1 de l'article 119 bis et de l'article 125 B, les personnes physiques qui bénéficient d'intérêts, arrérages et produits de toute nature de fonds d'Etat, obligations, titres participatifs, bons et autres titres de créances, dépôts, cautionnements et comptes courants, ... peuvent opter pour leur assujettissement à un prélèvement qui libère les revenus auxquels il s'applique de l'impôt sur le revenu. La retenue à la source éventuellement opérée sur les revenus est imputée sur le prélèvement. Celui-ci est effectué par le débiteur ou par la personne qui assure le paiement des revenus... III bis. Le taux du prélèvement est fixé : 1° à 15 % pour les produits d'obligations négociables et de titres participatifs... 7° à 45 % pour les produits des placements, autres que les bons et titres courus à partir du 1er janvier 1983, et à 35 % pour les produits des placements courus à partir du 1er janvier 1990 ; que, sauf dispositions législatives spéciales, les dispositions du 1° précité soumettent au taux de 15 % les produits des obligations, lesquelles sont, aux termes de l'article 284 de la loi du 24 juillet 1966, ultérieurement codifié à l'article 228-38 du code de commerce, des titres négociables, sans que puissent faire obstacle à l'application de ce taux les conditions de détention de ces titres et la circonstance que l'emprunt n'ait pas fait l'objet d'une souscription publique ;

Considérant, par suite, qu'en jugeant que l'administration avait pu remettre en cause le bénéfice du taux de 15 % initialement appliqué aux produits des obligations émises par la SOCIETE THERABEL LUCIEN PHARMA au motif que les titres avaient été virés sur un compte séquestre aux fins de cautionner une garantie de passif consentie à la suite d'une cession de droits sociaux et qu'ils y ont figuré au cours des années 1992 et 1993 et qu'ainsi, ces titres ne revêtaient pas le caractère d'obligations négociables au sens du 1° du III bis de l'article 125 A précité du code général des impôts, la cour administrative d'appel de Paris a commis une erreur de droit ; que, par suite, la SOCIETE THERABEL LUCIEN PHARMA est fondée à demander l'annulation de l'arrêt attaqué ;

Considérant qu'en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, il y a lieu pour le Conseil d'Etat de régler l'affaire au fond ;

Considérant, en premier lieu, qu'ainsi qu'il a été dit plus haut, est sans incidence sur l'application du taux de 15 % aux produits des obligations émises par la société requérante la circonstance que ces titres aient été déposés sur un compte séquestre dès leur acquisition ;

Considérant, en second lieu, que la circonstance que l'emprunt obligataire émis par la SOCIETE THERABEL LUCIEN PHARMA ait été souscrit exclusivement par trois personnes, conformément à un protocole signé entre la société et ces dernières, et qu'il n'ait pas fait l'objet d'une souscription publique n'est pas de nature à priver les produits de ces titres du bénéfice du taux prévu pour les obligations négociables ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SOCIETE THERABEL LUCIEN PHARMA est fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Paris a rejeté le surplus des conclusions de sa demande ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros que demande la SOCIETE THERABEL LUCIEN PHARMA au titre des frais exposés par elle dans la présente instance et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt du 25 janvier 2007 de la cour administrative d'appel de Paris et l'article 2 du jugement du 17 décembre 2003 du tribunal administratif de Paris sont annulés.

Article 2 : La SOCIETE THERABEL LUCIEN PHARMA est déchargée des sommes restant à sa charge en matière de prélèvement sur les revenus de placements à revenu fixe mises en recouvrement le 26 mars 1996 au titre des années 1992 et 1993.

Article 3 : L'Etat versera à la SOCIETE THERABEL LUCIEN PHARMA une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE THERABEL LUCIEN PHARMA et au ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat.


Synthèse
Formation : 8ème et 3ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 304305
Date de la décision : 03/07/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-03-03 CONTRIBUTIONS ET TAXES. IMPÔTS SUR LES REVENUS ET BÉNÉFICES. REVENUS ET BÉNÉFICES IMPOSABLES - RÈGLES PARTICULIÈRES. REVENUS DES CAPITAUX MOBILIERS ET ASSIMILABLES. PRODUITS DES PLACEMENTS À REVENUS FIXES. - PRÉLÈVEMENT OPTIONNEL LIBÉRATOIRE DE L'IMPÔT SUR LE REVENU (ART. 125 A DU CGI) - TAUX APPLICABLE AUX PRODUITS D'OBLIGATIONS NÉGOCIABLES (III BIS, 1° DE CET ARTICLE) - TAUX APPLICABLE, SAUF DISPOSITIONS LÉGISLATIVES SPÉCIALES, À L'ENSEMBLE DES OBLIGATIONS, LESQUELLES ONT LE CARACTÈRE DE TITRES NÉGOCIABLES (ART. L. 228-38 DU CODE DE COMMERCE) [RJ1].

19-04-02-03-03 Sauf dispositions législatives spéciales, les dispositions du 1° du III bis de l'article 125 A du code général des impôts (CGI) soumettent à un taux de 15 %, dans leur rédaction applicable aux années d'imposition en litige, les produits des obligations, lesquelles sont, aux termes de l'article 284 de la loi n° 66-537 du 24 juillet 1966, ultérieurement codifié à l'article L. 228-38 du code de commerce, des titres négociables, sans que puissent faire obstacle à l'application de ce taux les conditions de détention de ces titres et la circonstance que l'emprunt n'ait pas fait l'objet d'une souscription publique. Pour l'application de ces dispositions, est notamment sans incidence sur le caractère négociable d'obligations la circonstance qu'elles ont été virées sur un compte séquestre, aux fins de cautionner une garantie de passif consentie à la suite d'une cession de droits sociaux, et qu'elles y ont figuré au cours des années d'imposition.


Références :

[RJ1]

Inf. CAA Nancy, 9 mai 1996, Société générale de confiserie, n° 94NC01002, T. p. 850.


Publications
Proposition de citation : CE, 03 jui. 2009, n° 304305
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Daël
Rapporteur ?: M. Jérôme Michel
Rapporteur public ?: M. Olléon Laurent
Avocat(s) : SCP CELICE, BLANCPAIN, SOLTNER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2009:304305.20090703
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