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03/07/2009 | FRANCE | N°321634

France | France, Conseil d'État, 3ème et 8ème sous-sections réunies, 03 juillet 2009, 321634


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 15 octobre 2008 et 30 octobre 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme Inge A, demeurant ... et Mme Laurence A, demeurant ... ; Mme Inge A et Mme Laurence A demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance du 26 septembre 2008 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leur demande de suspension de l'exécution de l'arrêté de permis d'aménager un lotissement dénommé Vogeseblick délivré le 1er juillet 2008 par la commune de

Kolbsheim et a mis à leur charge la somme de 400 euros au titre de l'ar...

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 15 octobre 2008 et 30 octobre 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme Inge A, demeurant ... et Mme Laurence A, demeurant ... ; Mme Inge A et Mme Laurence A demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance du 26 septembre 2008 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leur demande de suspension de l'exécution de l'arrêté de permis d'aménager un lotissement dénommé Vogeseblick délivré le 1er juillet 2008 par la commune de Kolbsheim et a mis à leur charge la somme de 400 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) statuant en référé, de suspendre l'exécution de l'arrêté précité ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Kolbsheim le versement d'une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. François Delion, Maître des Requêtes,

- les observations de Me Ricard, avocat de Mme Inge A et de Mme Laurence A et de la SCP Defrenois, Levis, avocat de la commune de Kolbsheim,

- les conclusions de M. Edouard Geffray, Rapporteur public ;

La parole ayant été donnée à nouveau à Me Ricard, avocat de Mme Inge A et de Mme Laurence A et à la SCP Defrenois, Levis, avocat de la commune de Kolbsheim ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés que, par un arrêté du 1er juillet 2008, le premier adjoint au maire de la commune de Kolbsheim a délivré à cette commune un permis d'aménager un lotissement de trente-deux lots destiné à l'habitation, dénommé Vogeseblick ; que, par une ordonnance du 26 septembre 2008, contre laquelle Mmes Inge A et Laurence A se pourvoient en cassation, le juge des référés du tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leur demande tendant, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, à la suspension de l'exécution de l'arrêté précité ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 422-7 du code de l'urbanisme : Si le maire ou le président de l'établissement public de coopération intercommunale est intéressé au projet faisant l'objet de la demande de permis ou de la déclaration préalable, soit en son nom personnel, soit comme mandataire, le conseil municipal de la commune ou l'organe délibérant de l'établissement public désigne un autre de ses membres pour prendre la décision. ;

Considérant que le maire est tenu d'exercer pleinement sa compétence en matière de délivrance des autorisations d'urbanisme ; qu'il n'en va autrement, réserve faite de l'hypothèse où cette autorité a délégué ce pouvoir à un adjoint dans les conditions prévues par le code général des collectivités territoriales ou de l'application des règles de suppléance, que lorsque le maire se trouve dans le cas prévu à l'article L. 422-7 précité du code de l'urbanisme ; que, toutefois, la circonstance que la commune est le bénéficiaire de l'autorisation d'urbanisme ne saurait à elle seule faire regarder le maire comme intéressé, soit en son nom personnel, soit comme mandataire, à la délivrance de cette autorisation, au sens des dispositions de cet article ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'en jugeant que n'était pas de nature à faire naître un doute sérieux sur la légalité de la décision attaquée le moyen tiré de l'incompétence de son auteur, le juge des référés a entaché son ordonnance d'une erreur de droit ; que Mme Inge A et Mme Laurence A sont fondées, pour ce motif, à demander l'annulation de l'ordonnance attaquée ;

Considérant qu'il y a lieu, en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative de régler l'affaire au titre de la procédure de référé engagée ;

Considérant que les travaux rendus possibles par un permis d'aménager délivré en application de l'article L. 442-2 du code de l'urbanisme présenteraient un caractère difficilement réversible ; qu'ainsi les requérantes justifient de l'urgence à demander la suspension de l'exécution de ce permis ;

Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus qu'en l'absence de tout élément de nature à établir que le maire était intéressé à titre personnel ou comme mandataire au projet litigieux, est de nature à faire naître un doute sérieux sur la légalité de la décision attaquée le moyen tiré de ce qu'il appartenait au maire, et non à son adjoint, de prendre la décision attaquée ;

Considérant que, pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, aucun des autres moyens présentés n'est de nature à faire naître un doute sérieux sur la légalité du permis d'aménager attaqué ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède qu'il y a lieu de prononcer la suspension de l'exécution de la décision attaquée ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Considérant qu'il y a lieu, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de la commune de Kolbsheim la somme de 2 000 euros, qui sera versée à Mme Inge A, et la somme de 2 000 euros, qui sera versée à Mme Laurence A, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; que ces dispositions font en revanche obstacle à ce que soit mise à la charge des consorts A la somme que demande la commune de Kolbsheim au même titre ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'ordonnance du 26 septembre 2008 du juge des référés du tribunal administratif de Strasbourg est annulée.

Article 2 : L'exécution de l'arrêté du 1er juillet 2008 portant délivrance d'un permis d'aménager à la commune de Kolbsheim est suspendue.

Article 3 : La commune de Kolbsheim versera à Mme Inge A et Mme Laurence A une somme de 2 000 euros chacune au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

Article 4 : Les conclusions de la commune de Kolbsheim tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à Mme Inge A et Mme Laurence A et à la commune de Kolbsheim.


Synthèse
Formation : 3ème et 8ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 321634
Date de la décision : 03/07/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

PROCÉDURE - PROCÉDURES INSTITUÉES PAR LA LOI DU 30 JUIN 2000 - RÉFÉRÉ SUSPENSION (ART - L - 521-1 DU CODE DE JUSTICE ADMINISTRATIVE) - CONDITIONS D'OCTROI DE LA SUSPENSION DEMANDÉE - URGENCE - CONDITION PRÉSUMÉE SATISFAITE POUR LE PERMIS D'AMÉNAGER [RJ1].

54-035-02-03-02 La condition d'urgence posée pour l'application de l'article L. 521-1 du code de justice administrative sera en principe constatée dans le cas d'une demande de suspension d'une décision accordant un permis d'aménager au sens de l'article L. 442-2 du code de l'urbanisme.

URBANISME ET AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE - PERMIS DE CONSTRUIRE - PROCÉDURE D'ATTRIBUTION - AUTORITÉ COMPÉTENTE POUR STATUER SUR LA DEMANDE - MAIRE - PERMIS DÉLIVRÉ À LA COMMUNE - CIRCONSTANCE NE FAISANT PAS À ELLE SEULE REGARDER LE MAIRE COMME INTÉRESSÉ AU SENS DE L'ARTICLE L - 422-7 DU CODE DE L'URBANISME - COMPÉTENCE DU MAIRE POUR DÉLIVRER LE PERMIS [RJ2].

68-03-02-03 La circonstance que la commune est le bénéficiaire de l'autorisation d'urbanisme ne saurait à elle seule faire regarder le maire comme intéressé à la délivrance de cette autorisation au sens de l'article L. 422-7 du code de l'urbanisme.

URBANISME ET AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE - RÈGLES DE PROCÉDURE CONTENTIEUSE SPÉCIALES - PROCÉDURE D'URGENCE - RÉFÉRÉ - RÉFÉRÉ-SUSPENSION (ART - L - 521-1 DU CJA) - DEMANDE DE SUSPENSION D'UN PERMIS D'AMÉNAGER - CONDITION D'URGENCE PRÉSUMÉE SATISFAITE [RJ1].

68-06-02-01 La condition d'urgence posée pour l'application de l'article L. 521-1 du code de justice administrative sera en principe constatée dans le cas d'une demande de suspension d'une décision accordant un permis d'aménager au sens de l'article L. 442-2 du code de l'urbanisme.


Références :

[RJ1]

Cf., pour le permis de construire, 27 juillet 2001, Commune de Tulle, n° 230231, T. p. 1115.,,

[RJ2]

Cf. 23 octobre 2002, Commune de Chamonix, n° 219663, inédite au Recueil.


Publications
Proposition de citation : CE, 03 jui. 2009, n° 321634
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Vigouroux
Rapporteur ?: M. François Delion
Rapporteur public ?: M. Geffray Edouard
Avocat(s) : RICARD ; SCP DEFRENOIS, LEVIS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2009:321634.20090703
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