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27/07/2009 | FRANCE | N°297474

France | France, Conseil d'État, 9ème et 10ème sous-sections réunies, 27 juillet 2009, 297474


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 18 septembre et 18 décembre 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SA GENERAL ELECTRIC FLEET SERVICES (GECFS), dont le siège est à Maisons Alfort (94706 Cedex) ; la SA GECFS demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 23 juin 2006 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté sa requête tendant, d'une part, à l'annulation du jugement n°001702 du 20 novembre 2003 par lequel le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant au remboursem

ent d'un crédit de taxe sur la valeur ajoutée de 1 605 419 F (244 744...

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 18 septembre et 18 décembre 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SA GENERAL ELECTRIC FLEET SERVICES (GECFS), dont le siège est à Maisons Alfort (94706 Cedex) ; la SA GECFS demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 23 juin 2006 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté sa requête tendant, d'une part, à l'annulation du jugement n°001702 du 20 novembre 2003 par lequel le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant au remboursement d'un crédit de taxe sur la valeur ajoutée de 1 605 419 F (244 744 euros) et, d'autre part, à l'annulation du jugement n° 003510 du 20 novembre 2003 par lequel le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui payer les intérêts moratoires prévus à l'article L. 208 du livre des procédures fiscales, à la suite du dégrèvement de 9 622 489 F intervenu le 8 mars 2000 et à la condamnation de l'Etat à lui verser ces intérêts moratoires ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le premier protocole additionnel à cette convention ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Frédéric Boudier, chargé des fonctions de Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Gatineau, Fattaccini, avocat de la SA GENERAL ELECTRIC CAPITAL FLEET SERVICES,

- les conclusions de M. Pierre Collin, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Gatineau, Fattaccini, avocat de la SA GENERAL ELECTRIC CAPITAL FLEET SERVICES ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la SA GENERAL ELECTRIC FLEET SERVICES (GECFS), qui exerce une activité de location de longue durée de véhicules, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité qui a porté, en matière de taxe sur la valeur ajoutée, sur les exercices clos les 31 décembre 1995 et 1996 ; que, par lettres du 18 décembre 1996, portant sur la période du 1er janvier 1994 au 30 novembre 1996, et du 28 décembre 1998, portant sur la période du 1er au 31 décembre 1996, elle a demandé à l'administration fiscale la restitution de la taxe sur la valeur ajoutée déclarée au titre de la période correspondant aux années 1994, 1995 et 1996 afférente aux indemnités reçues de sa clientèle à la suite de la résiliation de contrats de location ; qu'en réponse à ces courriers, l'administration a reconnu, le 8 mars 2000, que les indemnités d'assurance perçues en cas de sinistre sur les véhicules de location n'avaient pas à être soumises à la taxe dans la limite de 15 861 987 F (2 418 144 euros) et a procédé à la compensation de celle-ci avec des rehaussements de taxe sur la valeur ajoutée notifiés à la suite de la vérification de comptabilité dans la limite de 6 239 198 F (951 205 euros) et a autorisé la société à imputer le solde de 9 622 489 F (1 466 939 euros) sur ses prochaines déclarations mensuelles, imputation à laquelle la société a effectivement procédé immédiatement ; que la SA GECFS se pourvoit en cassation contre l'arrêt de la cour d'administrative d'appel de Paris par lequel celle-ci a rejeté sa requête tendant, d'une part, à l'annulation du jugement du 20 novembre 2003 par lequel le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant notamment à la restitution de la taxe sur la valeur ajoutée payée à tort, pour un montant de 1 605 419 F (244 744 euros) et, d'autre part, à l'annulation du jugement du 20 novembre 2003 par lequel le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui payer les intérêts moratoires prévus à l'article L. 208 du livre des procédures fiscales, en raison du dégrèvement de 9 622 489 F intervenu le 8 mars 2000 ;

Sur les conclusions tendant à la restitution du solde de 244 744 euros :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 190 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable à la présente affaire : Les réclamations relatives aux impôts, contributions, droits, taxes, redevances, soultes et pénalités de toute nature, établis ou recouvrés par les agents de l'administration, relèvent de la juridiction contentieuse lorsqu'elles tendent à obtenir soit la réparation d'erreurs commises dans l'assiette ou le calcul des impositions, soit le bénéfice d'un droit résultant d'une disposition législative ou réglementaire. / Sont instruites et jugées selon les règles du présent chapitre toutes actions tendant à la décharge ou à la réduction d'une imposition ou à l'exercice de droits à déduction, fondées sur la non-conformité de la règle de droit dont il a été fait application à une règle de droit supérieure (...) ;

Considérant qu'aux termes du IV de l'article 271 du code général des impôts : La taxe déductible dont l'imputation n'a pu être opérée peut faire l'objet d'un remboursement dans les conditions, selon les modalités et dans les limites fixées par décret en Conseil d'Etat ; qu'aux termes de l'article 242-0 A de l'annexe II au code général des impôts, pris sur le fondement de l'article 271 précité : Le remboursement de la taxe sur la valeur ajoutée déductible dont l'imputation n'a pu être opérée doit faire l'objet d'une demande des assujettis. Le remboursement porte sur le crédit de taxe déductible constaté au terme de chaque année civile ; qu'aux termes de l'article 242-0 C de la même annexe, dans sa rédaction applicable à la présente affaire : I. 1. Les demandes de remboursement doivent être déposées au cours du mois de janvier (...). / II. 1. Par dérogation aux dispositions du I, les assujettis soumis de plein droit ou sur option au régime normal d'imposition peuvent demander un remboursement au titre d'un trimestre civil lorsque chacune des déclarations de ce trimestre fait apparaître un crédit de taxe déductible. La demande de remboursement est déposée au cours du mois suivant le trimestre considéré (...) ; que s'il résulte des dispositions précitées des articles 242-0 A et 242-0 C que le redevable ne peut demander le remboursement du crédit de taxe sur la valeur ajoutée dont il dispose que dans des délais déterminés, ces dispositions n'ont ni pour objet, ni pour effet de faire obstacle à ce que ce redevable puisse ultérieurement, si ce crédit demeure, non seulement procéder à son imputation sur une taxe due, mais encore, le cas échéant, en demander le remboursement au cours du mois de janvier de l'année suivante ou au cours du mois suivant un trimestre civil où chacune des déclarations de ce trimestre fait apparaître un crédit de taxe déductible ;

Considérant que lorsqu'un contribuable en situation de crédit permanent de taxe sur la valeur ajoutée constate, à la suite de la surestimation de son chiffre d'affaires déclaré, un crédit de taxe sur la valeur ajoutée déductible supplémentaire, il lui appartient de reporter sur les déclarations suivantes l'excédent de crédit de taxe déductible pour en permettre l'imputation ultérieure sur la taxe sur la valeur ajoutée à collecter, puis, le cas échéant, de formuler une demande de remboursement de l'excédent de taxe sur la valeur ajoutée déductible dans les conditions fixées par les articles 242-0 A et suivants de l'annexe II au code général des impôts ;

Considérant, en premier lieu, que la cour, qui n'était pas tenue de se prononcer sur tous les détails de l'argumentation de la SA GECFS, a suffisamment motivé son arrêt et répondu aux moyens de la société en indiquant que la société ne pouvait obtenir le remboursement de la taxe sur la valeur ajoutée déclarée à tort que par une réclamation présentée dans les formes prévues aux articles 242-0 A et suivants de l'annexe II au code général des impôts dès lors que la surestimation par la SA GECFS du chiffre d'affaires qu'elle avait déclaré au titre de la période du 1er janvier 1995 au 31 décembre 1996 n'avait donné lieu à aucun paiement de taxe sur la valeur ajoutée, en raison de la situation de crédit permanent de taxe sur la valeur ajoutée dans laquelle la société se trouvait pendant toute la période vérifiée ;

Considérant, en second lieu, que , dès lors que la SA GECFS était en situation de crédit permanent de taxe sur la valeur ajoutée, il lui appartenait, pour obtenir le remboursement du crédit supplémentaire de taxe sur la valeur ajoutée résultant de la surestimation du chiffre d'affaires déclaré, qu'elle ne pouvait imputer sur une taxe due, de présenter une réclamation dans les formes prévues aux articles 242-0 A et suivants de l'annexe II au code général des impôts ; que, par suite, la cour n'a pas commis d'erreur de droit en jugeant qu'en l'absence d'une telle réclamation, les conclusions de la société requérante tendant à la restitution d'un montant de taxe sur la valeur ajoutée de 244 744 euros ne pouvaient qu'être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'allocation des intérêts moratoires prévus à l'article L. 208 du livre des procédures fiscales :

Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 208 du livre des procédures fiscales : Quand l'Etat est condamné à un dégrèvement d'impôt par un tribunal ou quand un dégrèvement est prononcé par l'administration à la suite d'une réclamation tendant à la réparation d'une erreur commise dans l'assiette ou le calcul des impositions, les sommes déjà perçues sont remboursées au contribuable et donnent lieu au paiement d'intérêts moratoires (...) ;

Considérant que la SA GECFS n'a pas présenté de réclamation dans les formes prévues aux articles 242-0 A et suivants de l'annexe II au code général des impôts ; qu'en l'absence d'une telle réclamation, seule voie ouverte à la société pour obtenir un remboursement en raison de sa situation de crédit permanent de taxe sur la valeur ajoutée au cours de la période du 1er janvier 1995 au 31 décembre 1996, la cour n'a pas commis d'erreur de droit en jugeant que la société ne pouvait prétendre au versement d'intérêts moratoires sur la somme de 1 466 939 euros qu'elle a imputée sur ses déclarations mensuelles ;

Considérant que le moyen tiré de la violation de l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est nouveau en cassation ; que, n'étant pas d'ordre public, il n'est pas recevable ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SA GECFS n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque ; que ses conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, par suite, qu'être rejetées ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi de la SA GECFS est rejeté.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la SA GECFS et au ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat.


Synthèse
Formation : 9ème et 10ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 297474
Date de la décision : 27/07/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

CONTRIBUTIONS ET TAXES - GÉNÉRALITÉS - DIVERS - REMBOURSEMENT - DROIT AUX INTÉRÊTS MORATOIRES (ART - L - 208 DU LPF) - CONDITION - PRÉSENTATION D'UNE RÉCLAMATION RÉGULIÈRE.

19-01-06 Contribuable en situation de crédit permanent de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) cherchant à obtenir le remboursement d'un crédit de TVA déductible supplémentaire apparu à la suite de la surestimation de son chiffre d'affaires déclaré. Faute d'avoir présenté une réclamation dans les formes prescrites par les articles 242-0 A et suivants de l'annexe II au code général des impôts, seule voie ouverte au contribuable, celui-ci ne peut prétendre au versement des intérêts moratoires prévus à l'article L. 208 du livre des procédures fiscales (LPF).

CONTRIBUTIONS ET TAXES - RÈGLES DE PROCÉDURE CONTENTIEUSE SPÉCIALES - RÉCLAMATIONS AU DIRECTEUR - FORMES - CRÉDIT DE TVA TROUVANT SON ORIGINE DANS UNE SURESTIMATION DU CHIFFRE D'AFFAIRES DÉCLARÉ PAR UN REDEVABLE EN SITUATION DE CRÉDIT PERMANENT DE TAXE - DEMANDE DE REMBOURSEMENT - FONDEMENT - ARTICLE L - 190 DU LPF - ABSENCE - ARTICLE 242-0 A ET SUIVANTS DE L'ANNEXE II AU CGI - EXISTENCE.

19-02-02-01 Lorsqu'un contribuable en situation de crédit permanent de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) constate, à la suite de la surestimation de son chiffre d'affaires déclaré, un crédit de TVA déductible supplémentaire, il lui appartient de reporter sur les déclarations suivantes l'excédent de crédit de taxe déductible pour en permettre l'imputation ultérieure sur la TVA à collecter, puis, le cas échéant, de formuler une demande de remboursement de l'excédent de TVA déductible dans les conditions fixées par les articles 242-0 A et suivants de l'annexe II au code général des impôts (CGI). La voie de la réclamation prévue par l'article L. 190 du livre des procédures fiscales (LPF) n'est pas ouverte.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - TAXES SUR LE CHIFFRE D'AFFAIRES ET ASSIMILÉES - CRÉDIT DE TVA TROUVANT SON ORIGINE DANS UNE SURESTIMATION DU CHIFFRE D'AFFAIRES DÉCLARÉ PAR UN REDEVABLE EN SITUATION DE CRÉDIT PERMANENT DE TAXE - DEMANDE DE REMBOURSEMENT - FONDEMENT - ARTICLE L - 190 DU LPF - ABSENCE - ARTICLES 242-0 A ET SUIVANTS DE L'ANNEXE II AU CGI - EXISTENCE.

19-06 Lorsqu'un contribuable en situation de crédit permanent de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) constate, à la suite de la surestimation de son chiffre d'affaires déclaré, un crédit de TVA déductible supplémentaire, il lui appartient de reporter sur les déclarations suivantes l'excédent de crédit de taxe déductible pour en permettre l'imputation ultérieure sur la TVA à collecter, puis, le cas échéant, de formuler une demande de remboursement de l'excédent de TVA déductible dans les conditions fixées par les articles 242-0 A et suivants de l'annexe II au code général des impôts (CGI). La voie de la réclamation prévue par l'article L. 190 du livre des procédures fiscales (LPF) n'est pas ouverte.


Publications
Proposition de citation : CE, 27 jui. 2009, n° 297474
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Martin
Rapporteur ?: M. Frédéric Boudier
Rapporteur public ?: M. Collin Pierre
Avocat(s) : SCP GATINEAU, FATTACCINI

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2009:297474.20090727
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