La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

31/07/2009 | FRANCE | N°312665

France | France, Conseil d'État, 6ème sous-section jugeant seule, 31 juillet 2009, 312665


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 29 janvier et 21 avril 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme Françoise A, demeurant ... ; Mme A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision du 29 octobre 2007 du garde des sceaux, ministre de la justice rejetant sa demande tendant à l'application de l'article 25-4 de l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant statut de la magistrature ;

2°) d'enjoindre au garde des sceaux, ministre de la justice de lui notifier l'état indiquant la durée des p

riodes d'activité qui peuvent être prises en compte et le montant de la con...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 29 janvier et 21 avril 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme Françoise A, demeurant ... ; Mme A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision du 29 octobre 2007 du garde des sceaux, ministre de la justice rejetant sa demande tendant à l'application de l'article 25-4 de l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant statut de la magistrature ;

2°) d'enjoindre au garde des sceaux, ministre de la justice de lui notifier l'état indiquant la durée des périodes d'activité qui peuvent être prises en compte et le montant de la contribution qui devra être payée pour chaque période rachetée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 ;

Vu le décret n°97-874 du 24 septembre 1997 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Hugues Ghenassia de Ferran, chargé des fonctions de Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Peignot, Garreau, avocat de Mme A,

- les conclusions de M. Mattias Guyomar, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Peignot, Garreau, avocat de Mme A ;

Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 25-4 de l'ordonnance du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature : Un décret en Conseil d'Etat précise les conditions dans lesquelles les personnes intégrées directement dans la magistrature au titre des articles 22 et 23 peuvent obtenir que soient prises en compte, pour la constitution de leurs droits à pension de retraite de l'Etat ou pour le rachat d'annuités supplémentaires, les années d'activité professionnelle accomplies par elles avant leur nomination comme magistrat. / Cette prise en compte est subordonnée au versement d'une contribution dont ledit décret fixe le montant et les modalités. (...) / Ce décret précise, en outre, les conditions dans lesquelles les avocats, avoués, notaires, huissiers de justice et greffiers des tribunaux de commerce intégrés directement dans la magistrature avant la date d'entrée en vigueur de la loi organique n° 92-189 du 25 février 1992 (...) peuvent bénéficier des dispositions du présent article ; qu'en application des dispositions de cet article 25-4, le décret du 24 septembre 1997 a précisé les modalités de prise en compte des années d'activité professionnelle accomplies par les personnes intégrées dans la magistrature, avant leur nomination en qualité de magistrat ; que l'article 9 de la loi organique du 25 juin 2001 prévoit que les dispositions de l'article 25-4 de l'ordonnance du 22 décembre 1958 sont également applicables aux magistrats recrutés par concours exceptionnels ;

Considérant que Mme A, qui a été recrutée dans la magistrature par la voie d'un concours exceptionnel a demandé au garde des sceaux, ministre de la justice, que lui soit adressé, en application des dispositions citées ci-dessus, un état indiquant les périodes d'activité antérieures à sa nomination, susceptibles d'être prises en compte au titre de ses droits à pension ainsi que le montant de la contribution correspondante ; que le ministre a rejeté sa demande par une décision du 29 octobre 2007, au motif que le décret d'application de la loi organique du 25 juin 2001 n'avait pas été pris ; que par une lettre en date du 4 février 2009, le garde des sceaux a fait connaître à Mme A qu'il avait décidé de faire application du décret du 24 septembre 1997 cité ci-dessus et qu'elle recevrait ultérieurement des propositions en réponse à sa demande initiale ; qu'il résulte de ce qui précède que la première décision du 29 octobre 2007 a produit effet jusqu'au 4 février 2009 puisque pendant cette période le ministre s'est abstenu d'examiner la demande de la requérante au regard des dispositions du décret du 24 septembre 1997 ; que par suite le garde des sceaux, ministre de la justice, n'est pas fondé à soutenir que les conclusions de la requête, dirigées contre la décision du 29 octobre 2007, sont devenues sans objet ;

Considérant que la loi organique du 25 juin 2001 a étendu le champ d'application de l'article 25-4 de l'ordonnance du 22 décembre 1958 ; que les dispositions du décret antérieur du 24 septembre 1997, qui ne sont pas incompatibles avec l'extension réalisée par la loi organique du 25 juin 2001, suffisent à en assurer l'application ; qu'ainsi le garde des sceaux, ministre de la justice, était tenu, en l'absence de décret particulier, de mettre en oeuvre les prescriptions du décret du 24 septembre 1997, qui permettent de rendre applicable la loi organique du 25 juin 2001 tendant à prendre en compte, au titre de leurs droits à pension, les années d'activité professionnelles accomplies, avant leur nomination en qualité de magistrat, par les personnes intégrées à l'issue des recrutements exceptionnels par concours ; que par suite en subordonnant l'application de l'article 25-4 de l'ordonnance du 22 décembre 1958 aux magistrats recrutés par cette voie à l'édiction d'un texte distinct du décret du 24 septembre 1997, alors même que le pouvoir réglementaire s'est abstenu de prévoir des modalités particulières qui seraient justifiées par la situation des magistrats en cause le garde des sceaux, ministre de la justice a commis une erreur de droit, que Mme A est fondée, pour ce motif, à demander l'annulation de sa décision du 29 octobre 2007 ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant que la présente décision implique nécessairement que soit notifié à Mme A un état dans lequel sont indiqués la durée des périodes d'activité et le montant de la contribution qui devra être payée pour la période rachetée ; qu'il y a dès lors lieu d'enjoindre au garde des sceaux, ministre de la justice de procéder à cette notification dans un délai de deux mois à compter de la notification de la présente décision ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2000 euros que Mme A demande au titre des frais engagés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La décision du 29 octobre 2007 du garde des sceaux, ministre de la justice est annulée.

Article 2 : Il est enjoint au garde des sceaux, ministre de la justice de notifier à Mme A l'état mentionné à l'article 2 du décret du 24 septembre 1997 dans un délai de deux mois à compter de la notification de la présente décision.

Article 3 : L'Etat versera à Mme A une somme de 2 000 euros en application de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à Mme Françoise A, à la ministre d'Etat, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés et au ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat.


Synthèse
Formation : 6ème sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 312665
Date de la décision : 31/07/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 31 jui. 2009, n° 312665
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Schrameck
Rapporteur ?: M. Hugues Ghenassia de Ferran
Rapporteur public ?: M. Guyomar Mattias
Avocat(s) : SCP PEIGNOT, GARREAU

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2009:312665.20090731
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award