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19/10/2009 | FRANCE | N°332049

France | France, Conseil d'État, Juge des référés, 19 octobre 2009, 332049


Vu la requête, enregistrée le 16 septembre 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Farid A et Mme Isabelle B, épouse A, élisant domicile au ... ; M. et Mme A demandent au juge des référés du Conseil d'Etat :

1°) d'ordonner, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension de l'exécution de la décision en date du 16 juillet 2009 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours de M. A dirigé contre la décision implicite du consul géné

ral de France à Fès (Maroc), lui refusant l'octroi d'un visa d'entrée en ...

Vu la requête, enregistrée le 16 septembre 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Farid A et Mme Isabelle B, épouse A, élisant domicile au ... ; M. et Mme A demandent au juge des référés du Conseil d'Etat :

1°) d'ordonner, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension de l'exécution de la décision en date du 16 juillet 2009 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours de M. A dirigé contre la décision implicite du consul général de France à Fès (Maroc), lui refusant l'octroi d'un visa d'entrée en France ;

2°) d'enjoindre au ministre des affaires étrangères de délivrer à M. A le visa sollicité ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 000 euros à verser à l'avocat de M. et Mme A en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

ils soutiennent que l'urgence est caractérisée dès lors que la décision litigieuse prolonge la séparation des époux, qui dure depuis plus de deux ans déjà ; qu'il existe un doute sérieux quant à la décision contestée ; qu'elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation, dès lors que l'intention matrimoniale des époux est réelle ; qu'en outre, en séparant de la sorte les époux, alors même que leur mariage n'a jamais été contesté devant l'autorité judiciaire, elle porte atteinte à leur droit de mener une vie privée et familiale normale, en méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la décision dont la suspension est demandée ;

Vu la copie de la requête à fin d'annulation présentée à l'encontre de cette décision ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 12 octobre 2009, présenté par le ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire qui conclut au rejet de la requête ; il soutient que la demande d'injonction de délivrer le visa sollicité est irrecevable puisque cette mesure aurait des effet en tous points identiques à ceux qui résulteraient de l'exécution par l'administration d'un jugement annulant sa décision pour illégalité ; que la condition d'urgence n'est pas remplie dès lors que l'existence d'un préjudice grave et immédiat subi par les requérants n'est pas établi ; qu'en outre, M. A n'a contracté ce mariage que dans le but de s'installer en France ; qu'il n'existe aucun doute quant à la légalité de la décision contestée dès lors que, d'une part, celle-ci a été prise en considération d'un faisceau d'indices précis et concordants faisant douter de la sincérité du mariage contracté par les requérants, compte tenu notamment du caractère précipité du mariage ; que, d'autre part, en l'absence de justificatifs sérieux de communauté de vie avant le mariage et du maintien de relations post-matrimoniales, elle n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridictionnelle ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir convoqué à une audience publique, d'une part, M. et Mme A, d'autre part, le ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire ;

Vu le procès-verbal de l'audience publique du jeudi 15 octobre 2009 à 14 heures 30 au cours de laquelle a été entendu Me Coutard, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat de M. et Mme A ;

Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision ;

Considérant qu'il appartient en principe aux autorités consulaires de délivrer au conjoint étranger d'un ressortissant français dont le mariage n'a pas été contesté devant l'autorité judiciaire le visa nécessaire pour que les époux puissent mener une vie familiale normale ; que pour y faire obstacle, il appartient à l'administration, si elle allègue une fraude, d'établir que le mariage a été entaché d'une telle fraude de nature à justifier légalement le refus de visa ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. A, ressortissant marocain né le 1er janvier 1976, a épousé le 30 août 2007, à Taza (Maroc), Mme Isabelle B, née le 8 mai 1955, de nationalité française ; que leur acte de mariage a été transcris sur les registres d'état-civil français le 11 octobre 2007 ; qu'il demande la suspension de l'exécution de la décision par laquelle la délivrance du visa de long séjour qu'il sollicitait en qualité de conjoint de ressortissant français lui a été refusée au motif que ce mariage avait été contracté dans le seul but de faciliter son établissement en France ;

Considérant que si M. et Mme A soutiennent que, malgré leur éloignement géographique, ils entretiennent des contacts réguliers, les éléments qu'ils produisent à l'appui de leurs affirmations restent peu nombreux et essentiellement limités à des factures téléphoniques non détaillées et à des bons de commande de billets d'avion entre décembre 2007 et octobre 2008, dont le caractère probant est d'ailleurs discuté par l'administration ; que le ministre fait état d'un faisceau d'indices faisant douter de la sincérité des intentions matrimoniales du requérant, en soulignant notamment le caractère précipité du mariage ; qu'ainsi, M. A, après avoir fait connaissance de Mme B sur internet en septembre 2006, l'aurait rencontré pour la première fois en février 2007 et l'a épousé dès le mois d'août 2007 ; que si, en l'état de l'instruction, il existe un doute, qu'il appartiendra au juge du fond de lever, sur la légalité de la décision contestée, les documents produits par les intéressés ne permettent pas de regarder ce doute comme sérieux ; qu'ainsi, le moyen tiré de l'erreur d'appréciation commise par la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France sur les intentions matrimoniales du requérant n'est pas, en l'état de l'instruction, de nature à faire naître un doute sérieux sur la légalité du refus de visa ; qu'il en va de même, par voie de conséquence, du moyen tiré de ce que la décision attaquée aurait porté au droit des intéressés au respect de leur vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise et aurait, par suite, méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non recevoir opposée par la ministre, que la requête de M. et Mme A, y compris les conclusions relatives à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, doit être rejetée ;

O R D O N N E :

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Article 1er : La requête de M. Farid A et Mme Isabelle B, épouse A est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à M. Farid A et Mme Isabelle B, épouse A et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.


Synthèse
Formation : Juge des référés
Numéro d'arrêt : 332049
Date de la décision : 19/10/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 19 oct. 2009, n° 332049
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Aguila
Rapporteur ?: M. Yann JR Aguila
Avocat(s) : SCP COUTARD, MAYER, MUNIER-APAIRE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2009:332049.20091019
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