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22/12/2009 | FRANCE | N°333400

France | France, Conseil d'État, Juge des référés, 22 décembre 2009, 333400


Vu la requête, enregistrée le 30 octobre 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'État, présentée par M. Recep A, élisant domicile chez Mme B, demeurant ...; M. A demande au juge des référés du Conseil d'Etat :

1°) d'ordonner, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension de l'exécution de la décision implicite par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté son recours dirigé contre la décision du 26 novembre 2007 des autorités consulaires françaises à Ankara (T

urquie) lui refusant la délivrance d'un visa en qualité de conjoint de res...

Vu la requête, enregistrée le 30 octobre 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'État, présentée par M. Recep A, élisant domicile chez Mme B, demeurant ...; M. A demande au juge des référés du Conseil d'Etat :

1°) d'ordonner, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension de l'exécution de la décision implicite par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté son recours dirigé contre la décision du 26 novembre 2007 des autorités consulaires françaises à Ankara (Turquie) lui refusant la délivrance d'un visa en qualité de conjoint de ressortissante française ;

2°) d'enjoindre, à titre principal, au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire à Ankara de délivrer le visa sollicité ;

3°) d'enjoindre, à titre subsidiaire, au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire de procéder au réexamen de la demande de visa dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'ordonnance à intervenir, sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

il soutient que sa demande est recevable ; que la condition d'urgence est satisfaite dès lors que, d'une part, il se trouve séparé de sa femme alors que la réalité et la sincérité de son union matrimoniale ne peuvent être sérieusement contestées et que, d'autre part, l'état de santé de celle-ci nécessite sa présence ; qu'il existe un doute sérieux quant à la légalité de la décision litigieuse ; que le jugement du tribunal de grande instance de Montbrison en date du 16 juin 2006, qui est devenu définitif, a reconnu la validité de son mariage ; que la décision litigieuse méconnaît les dispositions de l'article L. 211-2-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'aucune tentative de fraude n'est démontrée et que sa présence en France ne constitue pas une menace à l'ordre public ; que la décision attaquée méconnaît son droit à une vie privée et familiale normale tel que garanti par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la copie du recours présenté le 24 juin 2008 à la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France ;

Vu la copie de la requête en annulation ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 14 décembre 2009, présenté par le ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire qui conclut au rejet de la requête ; il soutient que, contrairement à ce qu'indique le requérant, celui-ci n'a déposé aucune demande nouvelle de visa auprès des autorités consulaires à Ankara depuis celle déposée le 16 mai 2007 et que, de ce fait, la requête qu'il a formée le 2 juillet 2008 devant la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France contre la décision de refus qui a été opposée par les autorités consulaires françaises à sa première demande et lui a été notifiée le 11 décembre 2007 était tardive et, par suite, irrecevable ; que les conclusions à fin d'injonction de délivrer le visa sollicité sont irrecevables ; que la condition d'urgence n'est pas satisfaite dès lors que M. A ne justifie ni avoir revu son épouse, Mme B, depuis leur mariage, il y a plus de cinq ans et demi, ni entretenir avec elle une relation suivie et régulière et qu'il a attendu un an après le jugement du tribunal de grande instance pour déposer une demande de visa en qualité de conjoint de ressortissante française ; que Mme B a fait des déclarations contradictoires aux autorités consulaires au sujet de la réalité et des motifs de son intention matrimoniale ; que les moyens tirés de l'erreur de droit et de l'erreur manifeste d'appréciation qui entacheraient la décision attaquée doivent être rejetés dès lors que le jugement du tribunal de grande instance de Montbrison en date du 16 juin 2006 ne fait pas obstacle à ce que l'administration oppose un refus de délivrer un visa lorsqu'il existe, comme en l'espèce, un faisceau d'indices concordants de nature à établir que le mariage a été contracté dans le seul but de faciliter l'installation de M. A en France ; que la facture produite par Mme B n'établit pas qu'elle a effectué un voyage en Turquie en 2007 ; que celle-ci n'établit pas qu'elle aurait eu avec son époux des relations épistolaires, téléphoniques ou par l'internet depuis son mariage ; que le moyen tiré de l'atteinte disproportionnée portée à la vie privée et familiale du requérant doit être écarté, eu égard aux motifs du rejet, celui-ci n'établissant pas l'impossibilité absolue dans laquelle se trouverait son épouse de venir le rejoindre en Turquie ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 16 décembre 2009, présenté par M. A, qui reprend les conclusions de sa requête et les mêmes moyens ; il soutient en outre que la requête est recevable dès lors que le courrier que les autorités consulaires françaises à Ankara lui ont adressé le 5 mai 2008, qui confirme le premier refus en date du 26 novembre 2007, constitue un second refus, contre lequel il a formé, le 24 juin 2008, un recours devant la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France, dont celle-ci a accusé réception le 2 juillet 2009 ; que la condition d'urgence est satisfaite dès lors que les époux C justifient d'une relation suivie et régulière par divers moyens de communication, Mme C s'étant, en outre, rendue en Turquie en 2007 ; que les déclarations contradictoires de Mme C s'expliquent par la pression exercée sur elle par les agents du service de l'état civil ; que Mme C a toute sa capacité de discernement ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir convoqué à une audience publique, d'une part, M. Recep A et, d'autre part, le ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire ;

Vu le procès-verbal de l'audience publique du 17 décembre 2009 à 11 heures au cours de laquelle ont été entendus :

- Me Capron, avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation, avocat de M. A ;

- Mme B, épouse de M. A,

- les représentantes du ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire ;

Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés que M. A, ressortissant turc, a épousé en Turquie Mme B, de nationalité française, le 19 avril 2004 ; que M. A a demandé aux autorités consulaires françaises à Ankara, le 16 mai 2007, la délivrance d'un visa de long séjour en qualité de conjoint de ressortissante française ; que ces autorités ont rejeté sa demande par une décision en date du 26 novembre 2007, qui lui a été notifiée le 11 décembre 2007 ; que les mêmes autorités ont adressé à M. A une lettre, en date du 5 mai 2008, aux termes de laquelle elles relèvent qu'il s'est présenté devant elles le 2 mai en exprimant le souhait de déposer une nouvelle demande de visa de long séjour, que cette demande serait similaire à celle qui avait déjà fait l'objet d'un refus le 19 décembre 2007 et qu'il lui appartenait de contester ce dernier refus, dans le délai du recours contentieux, devant la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France ; que, regardant la lettre du 5 mai 2008 comme un nouveau refus, ce que conteste l'administration, M. A a formé, le 24 juin 2008, devant la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France, un recours contre la décision qui serait contenue dans cette lettre ; que M. A demande l'annulation de la décision implicite de rejet de son recours née, le 2 septembre 2008, du silence gardé par la commission ;

Considérant que M. A soutient qu'en rejetant implicitement son recours contre la décision des autorités consulaires françaises à Ankara refusant de lui accorder le visa de long séjour qu'il sollicite, la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a méconnu les dispositions de l'article L. 211-2-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et a entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation ;

Considérant qu'eu égard notamment à l'absence de tout élément probant tendant à établir que Mme B, épouse C, aurait, comme elle le soutient, effectué un voyage en Turquie en 2007 et aurait eu, depuis son mariage, des relations régulières par écrit ou par un moyen de télécommunication avec M. A, et nonobstant les termes du jugement devenu définitif du tribunal de grande instance de Montbrison, en date du 16 juin 2006, selon lesquels le ministère public n'avait pas, à cette date, rapporté pas la preuve du défaut du lien matrimonial entre les époux, les moyens présentés par M. A ne paraissent pas, en l'état de l'instruction, de nature à créer un doute sérieux quant à la légalité de la décision contestée ; que, par suite, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la fin de non-recevoir opposée en défense par le ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire, non plus que de rechercher si la condition d'urgence est, en l'espèce, satisfaite, la requête de M. A ne peut qu'être rejetée ainsi que, par voie de conséquence, en tout état de cause, ses conclusions à fin d'injonction ; que, par suite, ses conclusions relatives à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées ;

O R D O N N E :

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Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à M. Recep A et au ministre de l'immigration de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.


Synthèse
Formation : Juge des référés
Numéro d'arrêt : 333400
Date de la décision : 22/12/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 22 déc. 2009, n° 333400
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Christnacht
Rapporteur ?: M. Alain Christnacht
Avocat(s) : SCP CAPRON, CAPRON

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2009:333400.20091222
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