La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

02/02/2010 | FRANCE | N°334549

France | France, Conseil d'État, Juge des référés, 02 février 2010, 334549


Vu la requête, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 11 décembre 2009, présentée par Mme Rabha A veuve B, demeurant ...; Mme A demande au juge des référés du Conseil d'Etat :

1°) d'ordonner, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension de l'exécution de la décision implicite par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté son recours dirigé contre la décision du 26 février 2009 du consul général de France à Tanger (Maroc), lui refusant un visa

de long séjour en qualité d'ascendante d'un ressortissant d'un Etat membre...

Vu la requête, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 11 décembre 2009, présentée par Mme Rabha A veuve B, demeurant ...; Mme A demande au juge des référés du Conseil d'Etat :

1°) d'ordonner, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension de l'exécution de la décision implicite par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté son recours dirigé contre la décision du 26 février 2009 du consul général de France à Tanger (Maroc), lui refusant un visa de long séjour en qualité d'ascendante d'un ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne ;

2°) d'enjoindre au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire de délivrer un visa de long séjour dans un délai de 8 jours à compter de la notification de l'ordonnance à intervenir, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

elle soutient que l'urgence est caractérisée dès lorsque son isolement a des conséquences sur son état de santé ; qu'il existe un doute sérieux quant à la légalité de la décision contestée ; que celle-ci est insuffisamment motivée en l'absence de toute précision quant à la situation matérielle de M. B et la vie privée de Mme A ; qu'elle est entachée d'erreurs de fait et d'erreur manifeste d'appréciation dès lors que Mme A qui ne dispose d'aucune ressource personnelle est prise en charge par son fils dont les ressources sont suffisantes pour subvenir aux besoins de sa mère ; que la décision contestée méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, garantissant le droit à une vie familiale normale, ainsi que celles de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant dès lors que les petits-enfants de Mme A sont éloignés de leur grand-mère ;

Vu la décision dont la suspension est demandée ;

Vu la copie du recours présenté le 12 août 2009 par Mme A à la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France ;

Vu la copie de la requête en annulation présentée par Mme A ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 25 janvier 2010, présenté par le ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire, qui conclut au rejet de la requête ; il soutient que les conclusions aux fins d'injonction de la requête tendant à la délivrance d'un visa sont irrecevables ; qu'il n'existe pas de doute sérieux sur la légalité de la décision contestée ; qu'en effet, il n'y a pas d'insuffisance de motivation, la décision de la commission s'étant substituée à la décision du consul qui, d'ailleurs, expose les motifs du refus ; que c'est à bon droit que l'administration a considéré que la requérante n'était pas à la charge de M. B dans la mesure où les transferts d'argent sont postérieurs à la notification du refus de visa, qu'ils sont effectués à des dates rapprochées et pour des montants disproportionnés par rapport aux revenus de M. B ; qu'il s'agit donc de versements de circonstance ; que les revenus de M.B ne lui permettent pas de prendre en charge la requérante ; que la circonstance que le petit-fils de la requérante perçoive des revenus ne garantit pas le caractère permanent de la prise en charge ; que la décision contestée ne méconnaît ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni celles de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits des enfants ; qu'en effet, la requérante n'établit ni qu'il lui est impossible de se rendre en France, ni que ses enfants et petits-enfants ne puissent se rendre au Maroc pour des visites ponctuelles ; que l'urgence n'est pas caractérisée dans la mesure où la requérante a passé toute sa vie au Maroc qui constitue un environnement culturel et social qui lui est familier, et que les problèmes de santé invoqués peuvent être soignés au Maroc ;

Vu le mémoire, enregistré le 27 janvier 2010, présenté par Mme Rabha A veuve B qui reprend les conclusions de sa requête et les mêmes moyens ; elle soutient en outre qu'un autre de ses fils lui adresse des mandats ; que deux de ses petits-enfants sont gravement handicapés et ne peuvent se rendre au Maroc ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir convoqué à une audience publique, d'une part Mme A, et d'autre part, le ministre de l'immigration, de l'identité nationale, de l'intégration et du développement solidaire ;

Vu le procès-verbal de l'audience du 28 janvier 2010 à 11 heures au cours de laquelle ont été entendus :

- Me ROGER, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat de Mme A ;

- Les représentants de Mme A ;

- Les représentants du ministre de l'immigration, de l'identité nationale, de l'intégration et du développement solidaire ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de justice administrative : Le juge des référés statue par des mesures qui présentent un caractère provisoire. Il n'est pas saisi du principal et se prononce dans les meilleurs délais ; que selon l'article L. 521-1 du même code : Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision ;

Considérant que Mme A, veuve B, de nationalité marocaine, demande la suspension de la décision implicite par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté son recours dirigé contre la décision en date du 26 février 2009 du consul général de France à Tanger (Maroc) lui refusant la délivrance d'un visa d'entrée et de long séjour sur le territoire français en qualité d'ascendante d'un ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne ;

Considérant que pour rejeter la demande de visa de long séjour présentée par Mme A, veuve B, les autorités consulaires se sont fondées, d'une part, sur le fait que celle-ci ne se trouvait pas, au moment de la demande, à la charge de son fils, M. M'hammed B, de nationalité espagnole résident en France, ce qui ne permettait pas de lui délivrer un visa en qualité d'ascendant à charge de ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne et, d'autre part, sur l'insuffisance de ses ressources propres pour subvenir de façon autonome aux frais d'un séjour en France, ce qui ne permettait pas de lui délivrer un visa en qualité de visiteur ;

Considérant que la décision par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours de Mme A, veuve B, contre la décision du 26 février 2009 du consul général de France à Tanger, lui refusant la délivrance d'un visa de long séjour s'est définitivement substituée à la décision du consul ; que, par suite, n'est pas propre à créer un doute sérieux sur la légalité de la décision de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France le moyen tiré d'une absence de motivation de la décision du consul général de France à Tanger ;

Considérant qu'il ne ressort des pièces du dossier ni que Mme A, veuve B, bénéficie de la part de son fils M. M'hammed B de versements réguliers lui permettant de subvenir à ses besoins, ni que M. M'hammed B, qui n'est pas imposable, serait en mesure de prendre en charge une personne supplémentaire au sein de son foyer, qui comptait quatre enfants à charge ; que la circonstance qu'un des fils de M. M'hammed B contribue aux charges du ménage de ses parents est sans incidence en l'espèce sur la détermination de la qualité de Mme A, veuve B, d'ascendante à charge de M. M'hammed B ; qu'il en va de même de la circonstance qu'un autre fils de Mme A, veuve B, M. Bouzian B, résident en Espagne, ait dans le passé, subvenu aux besoins de ses parents ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France aurait commis une erreur manifeste d'appréciation, en estimant que la requérante ne pouvait se prévaloir de la qualité d'ascendante à charge d'un ressortissant d'un pays membre de l'Union européenne n'est pas de nature à faire naître un doute sérieux quant à la légalité de la décision ;

Considérant qu'au vu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, telles qu'elles viennent d'être rappelées, et alors que rien ne s'oppose à ce que les enfants de Mme A, veuve , qui résident en France ou en Espagne viennent lui rendre visite au Maroc, où elle a toujours vécu, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'est pas non plus de nature à faire naître un doute sérieux quant à la légalité de la décision ; qu'il en est de même du moyen tiré de la méconnaissance de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, Mme A, veuve B, ne justifiant pas de liens affectifs tels avec ses petits-enfants que la décision attaquée serait contraire à l'intérêt supérieur de ceux-ci ;

Considérant que, dans ces conditions, il y a lieu pour le juge des référés de rejeter l'ensemble des conclusions de la requête, y compris les conclusions à fins d'injonction et d'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

O R D O N N E :

------------------

Article 1er : La requête de Mme A est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à Mme Rabha A, veuve B, et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.


Synthèse
Formation : Juge des référés
Numéro d'arrêt : 334549
Date de la décision : 02/02/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 02 fév. 2010, n° 334549
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : Mme Camguilhem
Rapporteur ?: Mme Anne-Marie Camguilhem
Avocat(s) : SCP ROGER, SEVAUX

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2010:334549.20100202
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award