La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

02/06/2010 | FRANCE | N°300847

France | France, Conseil d'État, 9ème et 10ème sous-sections réunies, 02 juin 2010, 300847


Vu le pourvoi, enregistré le 22 janvier 2007 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE, qui demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille en date du 23 novembre 2006 en tant que, faisant partiellement droit aux conclusions de la requête de M. Daniel A dirigées contre le jugement du tribunal administratif de Marseille en date du 3 décembre 2001, il l'a déchargé du rappel de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités mises à sa charge au titre de

la période du 1er janvier au 31 décembre 1985 ;

2°) réglant l'affa...

Vu le pourvoi, enregistré le 22 janvier 2007 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE, qui demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille en date du 23 novembre 2006 en tant que, faisant partiellement droit aux conclusions de la requête de M. Daniel A dirigées contre le jugement du tribunal administratif de Marseille en date du 3 décembre 2001, il l'a déchargé du rappel de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités mises à sa charge au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 1985 ;

2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter ces conclusions d'appel ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Pauline Flauss, chargée des fonctions de Maître des Requêtes,

- les observations de Me Balat, avocat de M. A,

- les conclusions de Mme Claire Legras, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à Me Balat, avocat de M. A ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que le commerce d'antiquités exploité par M. A a fait l'objet, entre juin et décembre 1988, d'une vérification de comptabilité conduisant notamment à un rappel de taxe sur la valeur ajoutée assorti de pénalités de mauvaise foi, notifié à l'intéressé le 13 décembre 1989 et confirmé le 18 mai 1990, au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 1985 ; que M. A a contesté ce rappel, ainsi que d'autres rappels de taxe sur la valeur ajoutée et redressements en matière d'impôt sur le revenu qui avaient été prononcés à son encontre ; que par une décision du 14 février 1994, rendue sur les réclamations de M. A relatives à la taxe sur la valeur ajoutée, le directeur départemental des services fiscaux de Paris a partiellement admis ces réclamations mais a maintenu le rappel en droits et pénalités au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 1985 ; que M. A a demandé au tribunal administratif de Paris la décharge des seules pénalités pour mauvaise foi afférentes aux rappels de taxe sur la valeur ajoutée dus pour l'année 1985 ; que par jugement du 22 mai 1997 devenu définitif, ce tribunal a jugé qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur ces conclusions à concurrence du dégrèvement prononcé en cours d'instance et rejeté le surplus des conclusions de la demande de M. A ; que par jugement du 3 décembre 2001, le tribunal administratif de Marseille, désigné, par ordonnance du président de la section du contentieux en date du 15 juin 2001 rendue en application de l'article R. 342-2 du code de justice administrative, pour statuer sur les rappels de taxe sur la valeur ajoutée et les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu restant en litige, a notamment rejeté les conclusions de la demande de M. A dirigées contre le rappel de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 1985 et les pénalités restant en litige ; que par arrêt du 23 novembre 2006, la cour administrative d'appel de Marseille a notamment déchargé M. A de ce rappel et de ces pénalités ; que le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE se pourvoit en cassation contre cet arrêt en tant qu'il a fait droit aux conclusions d'appel de M. A ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen du pourvoi ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 52 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable à la procédure de vérification de comptabilité ayant abouti au rappel litigieux de taxe sur la valeur ajoutée : Sous peine de nullité de l'imposition, la vérification sur place des livres et documents comptables ne peut s'étendre sur une durée supérieure à trois mois (...) ; qu'aux termes du dernier alinéa de l'article L. 10 du livre des procédures fiscales : Avant l'engagement d'une des vérifications prévues aux articles L. 12 et L. 13, l'administration des impôts remet au contribuable la charte des droits et obligations du contribuable vérifié ; les dispositions contenues dans la charte sont opposables à l'administration ; qu'aux termes du paragraphe 2 du chapitre II de la charte des droits et obligations du contribuable vérifié, dans sa rédaction applicable à l'espèce : Les investigations sur place du vérificateur entre sa première et sa dernière visite ne peuvent durer plus de trois mois (...) ; que par ailleurs, l'article L. 47 du livre des procédures fiscales dans sa version applicable dispose : Un examen contradictoire de l'ensemble de la situation fiscale personnelle d'une personne physique au regard de l'impôt sur le revenu ou une vérification de comptabilité ne peut être engagée sans que le contribuable en ait été informé par l'envoi ou la remise d'un avis de vérification.(...) / En cas de contrôle inopiné tendant à la constatation matérielle des éléments physiques de l'exploitation ou de l'existence et de l'état des documents comptables, l'avis de vérification de comptabilité est remis au début des opérations de constatations matérielles. L'examen au fond des documents comptables ne peut commencer qu'à l'issue d'un délai raisonnable permettant au contribuable de se faire assister par un conseil ; qu'aux termes du paragraphe 3 du chapitre I de la charte : Lors de cette première visite, il peut uniquement procéder à des constatations matérielles ; que le terme de visite utilisé à ce chapitre, eu égard à la référence aux investigations sur place, n'a pas entendu viser la notion de première visite du contrôle telle que mentionnée au paragraphe 2 du chapitre II de la charte mais l'hypothèse d'un contrôle inopiné ; qu'il résulte de l'ensemble de ces dispositions que le délai de trois mois qu'elles prévoient s'applique aux seules visites lors desquelles les agents vérificateurs procèdent à des investigations dans les livres et documents comptables de l'entreprise concernée en vue de leur examen au fond et non le contrôle inopiné prévu par les dispositions de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales, ayant pour objet la constatation matérielle des éléments physiques de l'exploitation ou de l'existence et de l'état des documents comptables ainsi que la remise de l'avis de vérification de comptabilité ;

Considérant que, pour juger que l'administration avait méconnu les dispositions précitées de la charte des droits et obligations du contribuable vérifié en excédant le délai de trois mois qu'elles prévoient, la cour administrative d'appel de Marseille s'est fondée sur la circonstance que la première visite effectuée par le vérificateur dans le commerce d'antiquités exploité à Paris par M. A avait eu lieu le 6 juin 1988 et que sa dernière visite, lors de laquelle la notification de redressement a été remise au contribuable, avait eu lieu le 13 décembre 1988, sans rechercher si ces visites avaient donné lieu à des investigations sur place destinées à l'examen au fond des livres et documents comptables du commerce de M. A ; que dans ces conditions, la cour a entaché son arrêt d'erreur de droit ; que par suite le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE est fondé à en demander l'annulation en tant qu'il a fait droit aux conclusions de la requête de M. A dirigées contre le rappel de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 1985 ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler, dans cette mesure, l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que si la première visite du vérificateur dans le commerce exploité par M. A a eu lieu le 7 juin 1988, cette visite constituait un contrôle inopiné ayant pour objet l'inventaire des stocks de l'établissement et la remise au contribuable de l'avis de vérification ; que la première intervention sur place du vérificateur, en vue de l'examen au fond des livres et documents comptables du commerce exploité par M. A a eu lieu le 22 juin 1988 ; que la dernière intervention du vérificateur ayant le même objet a eu lieu le 7 septembre suivant ; que la visite du 13 décembre 1988, lors de laquelle le vérificateur a remis au contribuable la notification de redressement, ne présentait pas cet objet ; qu'ainsi, le délai de trois mois entre la première et la dernière intervention sur place, prescrit par les dispositions précitées de l'article L. 52 du livre des procédures fiscales ainsi que par la charte des droits et obligations du contribuable vérifié, a été respecté ; que par suite, M. A n'est pas fondé à soutenir que la procédure de redressement serait pour ce motif entachée d'irrégularité ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre en appel, que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté les conclusions de sa demande dirigées contre le rappel de taxe sur la valeur ajoutée et les pénalités correspondantes restant dues au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 1985 ; que par suite, ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille en date du 23 novembre 2006 est annulé en tant qu'il a fait droit aux conclusions de la requête de M. A dirigées contre le jugement du tribunal administratif de Marseille en date du 3 décembre 2001 en tant qu'il a rejeté les conclusions de l'intéressé tendant à la décharge du rappel de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités correspondantes restant dues au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 1985.

Article 2 : Les conclusions de la requête de M. A devant la cour administrative d'appel de Marseille ayant le même objet sont rejetées, ainsi que ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée au MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA REFORME DE L'ETAT et à M. Daniel A.


Synthèse
Formation : 9ème et 10ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 300847
Date de la décision : 02/06/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 02 jui. 2010, n° 300847
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Martin
Rapporteur ?: Mme Pauline Flauss
Rapporteur public ?: Mme Legras Claire
Avocat(s) : BALAT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2010:300847.20100602
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award