La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

13/09/2010 | FRANCE | N°342138

France | France, Conseil d'État, Juge des référés, 13 septembre 2010, 342138


Vu la requête, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 3 août 2010, présentée par M. Ahmed A, élisant domicile chez ... ; M. A demande au juge des référés du Conseil d'Etat :

1°) d'ordonner, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension de l'exécution de la décision implicite par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté son recours dirigé contre la décision du 26 mars 2009 du ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale e

t du développement solidaire refusant à M. A un visa de long séjour ;

2°...

Vu la requête, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 3 août 2010, présentée par M. Ahmed A, élisant domicile chez ... ; M. A demande au juge des référés du Conseil d'Etat :

1°) d'ordonner, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension de l'exécution de la décision implicite par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté son recours dirigé contre la décision du 26 mars 2009 du ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire refusant à M. A un visa de long séjour ;

2°) d'enjoindre au ministre des affaires étrangères et au consul général de France à Alger de lui délivrer un visa de long séjour dans un délai de trente jours à compter de la notification de la décision à intervenir, sous astreinte de 1 500 euros par jour de retard ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

il soutient que l'urgence est caractérisée compte tenu de la précarité de sa situation, de ce qu'il se trouve séparé de ses parents, installés régulièrement en France et de ses cinq frère et soeurs, dont quatre sont de nationalité française et de ce qu'il est arrivé en France alors qu'il était âgé d'à peine six ans ; qu'il existe un doute sérieux quant à la légalité de la décision contestée ; qu'en effet cette décision méconnaît l'autorité de la chose précédemment jugée par le Conseil d'Etat statuant au contentieux ; qu'elle porte une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie familiale garanti par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'en outre elle ne saurait être justifiée par des nécessités d'ordre public, les derniers faits pour lesquels il a été condamné remontant à novembre 2000 ; que la décision méconnaît les articles 7 bis et 6-5 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ; qu'elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

Vu la copie du recours, enregistré le 1er juin 2009, présenté par M. A à la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France ;

Vu la copie de la requête en annulation présentée par M. A ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 19 août 2010, présenté par le ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire qui conclut au rejet de la requête ; il soutient que la condition d'urgence n'est pas remplie en ce que le requérant est âgé de 35 ans, qu'il vit en Algérie depuis 9 ans et qu'il ne justifie d'aucune circonstance particulière qui interdirait aux membres de sa famille de lui rendre visite ; que l'autorité de la chose jugée ne prive pas l'administration de la possibilité de prendre une décision de même portée sur un autre fondement ; que le requérant ne relève pas d'une des catégories particulières de demandeurs de visa pour lesquelles la motivation de refus de visa est nécessaire ; qu'il ne remplit pas les conditions pour obtenir un visa dit de retour ou un visa en qualité de visiteur ; que la décision n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation ; que l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'a pas été méconnu ;

Vu le nouveau mémoire, enregistré le 3 septembre 2010, présenté par M. A, qui reprend les conclusions de sa requête et les mêmes moyens et demande, en outre, au juge des référés du Conseil d'Etat, à titre subsidiaire, d'enjoindre au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire ainsi qu'au consul général de France à Alger de réexaminer la demande de visa long séjour dans le délai de 30 jours à compter de la notification de la décision à intervenir ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir convoqué à une audience publique, d'une part, M. A et, d'autre part, le ministre de l'immigration, de l'identité nationale, de l'intégration et du développement solidaire ;

Vu le procès-verbal de l'audience du 9 septembre 2010 à 11 heures au cours de laquelle ont été entendus :

- Me Haas, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat de M. A ;

- le représentant de M. A ;

- le représentant du ministre de l'immigration, de l'identité nationale, de l'intégration et du développement solidaire ;

Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision. ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés que M. A, de nationalité algérienne, est né en 1975 et est entré en France en 1981 au titre du regroupement familial ; que ses parents résident régulièrement en France, de même que ses cinq frère et soeurs dont quatre sont de nationalité française ; que, par un arrêté du 19 septembre 2001, qui a été exécuté, le ministre de l'intérieur a décidé son expulsion du territoire français ; que, par un jugement en date du 15 mars 2004 devenu définitif, le tribunal administratif de Versailles a annulé cet arrêté au motif qu'il méconnaissait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que le visa d'entrée et de long séjour en France que M. A a sollicité après l'annulation de la mesure d'expulsion lui a été refusé par décision du 8 mai 2006 du consul général de France à Alger, confirmée par décision expresse de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France en date du 30 août 2007 ;

Considérant que, par décision en date du 26 janvier 2009, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a annulé cette dernière décision pour méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et a enjoint au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire, de réexaminer la demande de visa dans un délai d'un mois ; que toutefois le ministre a, par une décision du 26 mars 2009, confirmé le refus de visa ; qu'après avoir saisi à nouveau la commission de recours, M. A demande la suspension de l'exécution du nouveau refus de visa qui lui a été opposé ;

Considérant, d'une part, qu'eu égard à la durée de l'éloignement forcé de M. A du territoire français et à la circonstance que toutes ses attaches familiales sont en France, la condition d'urgence exigée par l'article L. 521-1 du code de justice administrative est, dans les circonstances de l'espèce, remplie ;

Considérant, d'autre part, que les moyens tirés de ce que la décision attaquée méconnaîtrait l'autorité de la chose jugée par le Conseil d'Etat statuant au contentieux et qu'elle porterait une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée et familiale garanti par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales sont de nature, en l'état de l'instruction, à faire sérieusement douter de la légalité de cette décision ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A est fondé à demander la suspension de l'exécution de la décision attaquée ; qu'il y a lieu d'enjoindre au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire de réexaminer la demande de visa dans un délai de quinze jours à compter de la notification de la présente ordonnance ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

O R D O N N E :

------------------

Article 1er : L'exécution de la décision du ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire en date du 26 mars 2009 est suspendue.

Article 2 : Il est enjoint au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire de réexaminer la demande de visa de M. A dans un délai de quinze jours à compter de la notification de la présente ordonnance.

Article 3 : L'Etat versera à M. A la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente ordonnance sera notifiée à M. Ahmed A et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.


Synthèse
Formation : Juge des référés
Numéro d'arrêt : 342138
Date de la décision : 13/09/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 13 sep. 2010, n° 342138
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Stahl
Rapporteur ?: M. Jacques-Henri Stahl
Avocat(s) : HAAS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2010:342138.20100913
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award