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29/10/2010 | FRANCE | N°340212

France | France, Conseil d'État, 7ème et 2ème sous-sections réunies, 29 octobre 2010, 340212


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 3 juin et 16 juin 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour le SYNDICAT MIXTE D'ASSAINISSEMENT DE LA REGION OUEST DE VERSAILLES (SMAROV), dont le siège est 12 rue Mansart à Versailles (78000) ; le SYNDICAT MIXTE D'ASSAINISSEMENT DE LA REGION OUEST DE VERSAILLES (SMAROV) demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance du 17 mai 2010 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Versailles, statuant en application de l'article L. 551-1 du code de justice admin

istrative, a annulé, à la demande de la société Cabinet Conseil A...

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 3 juin et 16 juin 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour le SYNDICAT MIXTE D'ASSAINISSEMENT DE LA REGION OUEST DE VERSAILLES (SMAROV), dont le siège est 12 rue Mansart à Versailles (78000) ; le SYNDICAT MIXTE D'ASSAINISSEMENT DE LA REGION OUEST DE VERSAILLES (SMAROV) demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance du 17 mai 2010 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Versailles, statuant en application de l'article L. 551-1 du code de justice administrative, a annulé, à la demande de la société Cabinet Conseil Aspasie, la procédure de passation du marché d'assistance pour la maîtrise environnementale du périmètre syndical engagée le 8 janvier 2010 par le SMAROV, ainsi que l'ensemble des décisions se rapportant à cette procédure ;

2°) statuant en référé, de rejeter la demande de la société Cabinet Conseil Aspasie ;

3°) de mettre à la charge de la société Cabinet Conseil Aspasie le versement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code des marchés publics ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Laurent Cytermann, chargé des fonctions de Maître des Requêtes,

- les observations de Me Balat, avocat du SYNDICAT MIXTE D'ASSAINISSEMENT DE LA RÉGION OUEST DE VERSAILLES (SMAROV) et de la SCP Célice, Blancpain, Soltner, avocat de la société Cabinet Conseil Aspasie,

- les conclusions de M. Nicolas Boulouis, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à Me Balat, avocat du SYNDICAT MIXTE D'ASSAINISSEMENT DE LA RÉGION OUEST DE VERSAILLES (SMAROV) et à la SCP Célice, Blancpain, Soltner, avocat de la société Cabinet Conseil Aspasie ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés que le SYNDICAT MIXTE D'ASSAINISSEMENT DE LA REGION OUEST DE VERSAILLES (SMAROV) a engagé le 8 janvier 2010 une procédure de passation d'un marché d'assistance pour la maîtrise environnementale du périmètre syndical ; que ce marché comportait différentes missions, dont une mission d'assistance à maîtrise d'ouvrage pour le suivi de l'exécution de marchés de maîtrise d'oeuvre de travaux d'extension et de mise aux normes, qui donnait lieu à l'émission de bons de commande, tandis que les autres prestations étaient rémunérées par un prix forfaitaire ; qu'à l'issue de cette procédure, le marché a été attribué à un groupement dont la société d'études générales d'infrastructures (SEGI) était le mandataire ; que la société Cabinet Conseil Aspasie, concurrent évincé, a saisi le tribunal administratif de Versailles d'un référé précontractuel ; que par une ordonnance du 17 mai 2010, le juge des référés du tribunal administratif de Versailles a annulé la procédure de passation du marché, en se fondant sur la circonstance que le SMAROV avait engagé une unique procédure de passation en vue de la conclusion de deux marchés distincts dans leur objet et dans leur durée ; que le SMAROV se pourvoit en cassation contre cette ordonnance ;

Sur le pourvoi du SMAROV :

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi ;

Considérant que l'article 77 du code des marchés publics dispose : I. Un marché à bons de commande est un marché conclu avec un ou plusieurs opérateurs économiques et exécuté au fur et à mesure de l'émission de bons de commande. Lorsqu'un marché à bons de commande est attribué à plusieurs opérateurs économiques, ceux-ci sont au moins au nombre de trois, sous réserve d'un nombre suffisant de candidats et d'offres. / Dans ce marché le pouvoir adjudicateur a la faculté de prévoir un minimum et un maximum en valeur ou en quantité, ou un minimum, ou un maximum, ou encore être conclus sans minimum ni maximum. / L'émission des bons de commande s'effectue sans négociation ni remise en concurrence préalable des titulaires, selon des modalités expressément prévues par le marché. / Les bons de commande sont des documents écrits adressés aux titulaires du marché. Ils précisent celles des prestations, décrites dans le marché, dont l'exécution est demandée et en déterminent la quantité. / II. La durée des marchés à bons de commande ne peut dépasser quatre ans, sauf dans des cas exceptionnels dûment justifiés, notamment par leur objet ou par le fait que leur exécution nécessite des investissements amortissables sur une durée supérieure à quatre ans. / L'émission des bons de commande ne peut intervenir que pendant la durée de validité du marché. Leur durée d'exécution est fixée conformément aux conditions habituelles d'exécution des prestations faisant l'objet du marché. Le pouvoir adjudicateur ne peut cependant retenir une date d'émission et une durée d'exécution de ces bons de commande telles que l'exécution des marchés se prolonge au-delà de la date limite de validité du marché dans des conditions qui méconnaissent l'obligation d'une remise en concurrence périodique des opérateurs économiques. (...) ; qu'aucune disposition du code des marchés publics ni aucun principe n'interdisent d'inclure dans un unique marché des prestations donnant lieu à l'émission de bons de commande et d'autres prestations, à condition que les deux types de prestations soient clairement distingués, que les stipulations du contrat relatives aux prestations donnant lieu à l'émission de bons de commande respectent les dispositions de l'article 77 précité et que la conclusion d'un marché global soit permise par les dispositions de l'article 10 du même code relatives à l'allotissement ;

Considérant qu'en se fondant sur la seule circonstance que le SMAROV avait engagé une unique procédure en vue de la réalisation de prestations donnant lieu à l'émission de bons de commande, la durée d'émission étant limitée à quatre ans, et d'autres prestations dont la durée d'exécution était de cinq ans, pour juger que le SMAROV avait manqué à ses obligations de transparence et de mise en concurrence, le juge des référés du tribunal administratif de Versailles a commis une erreur de droit ; que son ordonnance doit être annulée ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative et de régler l'affaire au titre de la procédure de référé engagée ;

Sur la demande de la société Cabinet Conseil Aspasie :

En ce qui concerne les conclusions à fin d'injonction :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 551-4 du code de justice administrative, issu de l'ordonnance n° 2009-515 du 7 mai 2009 : Le contrat ne peut être signé à compter de la saisine du tribunal administratif et jusqu'à la notification au pouvoir adjudicateur de la décision juridictionnelle ; qu'il en résulte que les conclusions de la requête tendant à ce qu'il soit enjoint au SMAROV de différer la signature du contrat litigieux sont dépourvues d'objet ;

En ce qui concerne la demande d'annulation de la procédure de passation du marché :

Considérant, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la demande, que l'article 10 du code des marchés publics dispose : Afin de susciter la plus large concurrence, et sauf si l'objet du marché ne permet pas l'identification de prestations distinctes, le pouvoir adjudicateur passe le marché en lots séparés dans les conditions prévues par le III de l'article 27.A cette fin, il choisit librement le nombre de lots, en tenant notamment compte des caractéristiques techniques des prestations demandées, de la structure du secteur économique en cause et, le cas échéant, des règles applicables à certaines professions. Les candidatures et les offres sont examinées lot par lot. Les candidats ne peuvent présenter des offres variables selon le nombre de lots susceptibles d'être obtenus. Si plusieurs lots sont attribués à un même titulaire, il est toutefois possible de ne signer avec ce titulaire qu'un seul marché regroupant tous ces lots. / Le pouvoir adjudicateur peut toutefois passer un marché global, avec ou sans identification de prestations distinctes, s'il estime que la dévolution en lots séparés est de nature, dans le cas particulier, à restreindre la concurrence, ou qu'elle risque de rendre techniquement difficile ou financièrement coûteuse l'exécution des prestations ou encore qu'il n'est pas en mesure d'assurer par lui-même les missions d'organisation, de pilotage et de coordination (...) ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que contrairement à ce que soutient le SMAROV, l'objet du marché, qui comporte le suivi de l'exécution du contrat d'affermage et de ses avenants, la gestion et le suivi de la passation et de la mise en oeuvre de nouveaux avenants à ce contrat, la rédaction d'un bilan environnemental annuel, l'aide à la préparation des décisions du SMAROV et l'assistance au maître d'ouvrage pour le suivi de l'exécution de marchés de maîtrise d'oeuvre pour des travaux d'extension et de mise aux normes, permet bien l'identification de prestations différentes ; que le SMAROV n'établit ni que l'allotissement du marché rendrait son exécution techniquement difficile, ni qu'il ne serait pas en mesure d'assurer par lui-même les missions d'organisation, de pilotage et de coordination ; que la passation d'un marché global a donc méconnu les dispositions de l'article 10 du code des marchés publics ; que la société Cabinet Conseil Aspasie, qui est une société de petite taille spécialisée dans l'assistance à maîtrise d'ouvrage, justifie avoir été lésée par ce manquement ;

Considérant que par suite, la procédure de passation du marché doit être annulée ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge du SMAROV le versement d'une somme de 3 500 euros à la société Cabinet Conseil Aspasie ; que les mêmes dispositions font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de la société Cabinet Conseil Aspasie, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme demandée par le SMAROV ;

D E C I D E :

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Article 1er : L'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Versailles en date du 17 mai 2010 est annulée.

Article 2 : La procédure de passation du marché d'assistance pour la maîtrise environnementale du périmètre syndical engagée le 8 janvier 2010 par le SMAROV est annulée, ainsi que l'ensemble des décisions se rapportant à cette procédure.

Article 3 : Le SMAROV versera une somme de 3 500 euros à la société Cabinet Conseil Aspasie au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la demande de la société Cabinet Conseil Aspasie est rejeté.

Article 5 : Les conclusions du SMAROV tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 6 : La présente décision sera notifiée au SYNDICAT MIXTE D'ASSAINISSEMENT DE LA REGION OUEST DE VERSAILLES (SMAROV), à la société Cabinet Conseil Aspasie et à la société d'études générale d'infrastructures.


Synthèse
Formation : 7ème et 2ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 340212
Date de la décision : 29/10/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-02-04 MARCHÉS ET CONTRATS ADMINISTRATIFS. FORMATION DES CONTRATS ET MARCHÉS. CONTENU. - INCLUSION, DANS UN UNIQUE MARCHÉ, DE PRESTATIONS DONNANT LIEU À L'ÉMISSION DE BONS DE COMMANDE ET D'AUTRES PRESTATIONS - LÉGALITÉ - EXISTENCE - CONDITIONS.

39-02-04 Aucune disposition du code des marchés publics, notamment l'article 77 de ce code relatif aux marchés à bons de commande, ni aucun principe n'interdisent d'inclure dans un unique marché des prestations donnant lieu à l'émission de bons de commande et d'autres prestations, à condition que les deux types de prestations soient clairement distingués, que les stipulations du contrat relatives aux prestations donnant lieu à l'émission de bons de commande respectent les dispositions de l'article 77 et que la conclusion d'un marché global soit permise par les dispositions de l'article 10 du même code relatives à l'allotissement.


Publications
Proposition de citation : CE, 29 oct. 2010, n° 340212
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Martin
Rapporteur ?: M. Laurent Cytermann
Rapporteur public ?: M. Boulouis Nicolas
Avocat(s) : BALAT ; SCP CELICE, BLANCPAIN, SOLTNER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2010:340212.20101029
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