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10/11/2010 | FRANCE | N°336914

France | France, Conseil d'État, 3ème sous-section jugeant seule, 10 novembre 2010, 336914


Vu la requête, enregistrée le 22 février 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la COMMUNE DE SAINT-SIFFRET (30700), représentée par son maire ; la COMMUNE DE SAINT-SIFFRET demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret n° 2009-1707 du 30 décembre 2009 authentifiant les chiffres des populations de métropole, des départements d'outre-mer, de Saint-Barthélemy, de Saint-Martin et de Saint-Pierre-et-Miquelon en tant qu'il fixe sa population à un chiffre qu'elle estime inférieur à la réalité ;

2°) d'enjoindr

e à l'Etat de fixer sa population réelle à 1 119 habitants au 1er janvier 2010 ;
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Vu la requête, enregistrée le 22 février 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la COMMUNE DE SAINT-SIFFRET (30700), représentée par son maire ; la COMMUNE DE SAINT-SIFFRET demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret n° 2009-1707 du 30 décembre 2009 authentifiant les chiffres des populations de métropole, des départements d'outre-mer, de Saint-Barthélemy, de Saint-Martin et de Saint-Pierre-et-Miquelon en tant qu'il fixe sa population à un chiffre qu'elle estime inférieur à la réalité ;

2°) d'enjoindre à l'Etat de fixer sa population réelle à 1 119 habitants au 1er janvier 2010 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu la loi n° 51-711 du 7 juin 1951 ;

Vu la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 ;

Vu la loi n° 2002-276 du 27 février 2002;

Vu le décret n° 2003-485 du 5 juin 2003 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Emilie Bokdam, Auditeur,

- les conclusions de Mme Emmanuelle Cortot-Boucher, rapporteur public ;

Considérant que la COMMUNE DE SAINT-SIFFRET demande l'annulation pour excès de pouvoir du décret du 30 décembre 2009 authentifiant les chiffres des populations de métropole, des départements d'outre-mer, de Saint Barthélemy, de Saint-Martin et de Saint-Pierre-et-Miquelon, en tant que ce décret a fixé sa population à un chiffre qu'elle estime inférieur à la réalité ;

En ce qui concerne la légalité externe du décret :

Considérant, en premier lieu, que la circonstance qu'un ministre a contresigné un décret dont il n'a pas à assurer l'exécution est, en tout état de cause, sans influence sur sa légalité ; que, dès lors, le moyen tiré par la commune du caractère superflu de certains contreseings doit être écarté ;

Considérant en deuxième lieu, que ni l'article 156 de la loi du 27 février 2002 relative à la démocratie de proximité, ni aucune autre disposition législative ou réglementaire, ni aucun principe général du droit n'imposent que les opérations de recensement de la population confiées à l'institut national de la statistique et des études économiques (INSEE), qui relèvent de la seule responsabilité de l'Etat, soient menées ni que leurs résultats soient arrêtés contradictoirement avec les communes intéressées ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que, ainsi que le prescrivent les articles 24 et suivants du décret du 5 juin 2003 relatif au recensement de la population, la commune n'aurait pu transmettre à l'INSEE toutes informations utiles à l'enquête réalisée en vue du recensement et faire valoir ses remarques auprès de l'institut au cours de cette enquête ; que les dispositions de l'article 6 de la loi du 7 juin 1951 sur l'obligation, la coordination et le secret en matière de statistiques, qui interdisent la communication à des tiers des renseignements individuels figurant dans les questionnaires de recensement avant l'expiration d'un délai de vingt-cinq ans et ne prévoient la possibilité de déroger à cette interdiction que dans le cas de demandes effectuées à des fins de statistique publique ou de recherche scientifique ou historique, s'opposent à ce que la liste nominative des habitants retenus soit communiquée aux communes par l'INSEE ;

Considérant, en troisième lieu, que la circonstance que la lettre par laquelle l'INSEE a notifié les résultats du recensement à la commune n'aurait pas été motivée, n'est pas susceptible d'affecter la légalité du décret attaqué ;

En ce qui concerne la légalité interne du décret :

Considérant que la COMMUNE DE SAINT-SIFFRET soutient que c'est au prix d'erreurs matérielles que le décret attaqué fixe à 951 habitants sa population totale, alors que le recensement complémentaire réalisé en 2007 retenait un chiffre supérieur et que divers indices démontrent que sa population dépasse le millier d'habitants ;

Considérant, d'une part, que les recensements complémentaires de la population des communes avaient pour objet, en application des articles R. 2151-4 et suivants du code général des collectivités territoriales alors en vigueur, de permettre, à titre temporaire, la prise en compte d'une population fictive, au titre de l'exécution ou de la mise en chantier de programmes de construction, jusqu'au recensement général suivant ; qu'aux termes du VI de l'article 156 de la loi du 27 février 2002 relative à la démocratie de proximité : Les dates des enquêtes de recensement peuvent être différentes selon les communes. / Pour les communes dont la population est inférieure à 10 000 habitants, les enquêtes sont exhaustives et ont lieu chaque année par roulement au cours d'une période de cinq ans. Pour les autres communes, une enquête par sondage est effectuée chaque année ; la totalité du territoire de ces communes est prise en compte au terme de la même période de cinq ans (...) ; que le VIII du même article dispose : Un décret authentifie chaque année les chiffres des populations de métropole, des départements d'outre-mer, de Saint-Barthélemy, de Saint-Martin et de Saint-Pierre-et-Miquelon, des circonscriptions administratives et des collectivités territoriales ; que le X du même article prévoit l'intervention, à la fin de la première période de cinq ans mentionnée au VI, du premier décret authentifiant les chiffres de population en application du VIII précité ; qu'aux termes de l'article 157 de la même loi : I. Jusqu'à la publication du décret mentionné au X de l'article 156, la population des collectivités territoriales et des circonscriptions administratives est celle qui a été authentifiée par décret à l'issue du dernier recensement général de la population effectué en métropole, dans les départements d'outre-mer et à Saint-Pierre-et-Miquelon, modifiée, le cas échéant, par des recensements complémentaires./ A compter de la publication du même décret, les références au recensement général de la population et au recensement complémentaire sont remplacées par des références au recensement de la population dans toutes les dispositions législatives alors en vigueur (...) ; que le nouveau régime des enquêtes du recensement a été précisé par le décret du 5 juin 2003 ;

Considérant qu'il résulte du I de l'article 157 de la loi du 27 février 2002 que la prise en compte, pour établir les chiffres officiels de la population des communes, des résultats des recensements complémentaires postérieurs au dernier recensement général de la population intervenu en 1999, au demeurant provisoires et sujets à confirmation, n'a été prévue que jusqu'à la publication du premier décret authentifiant les chiffres de la population pris en application de l'article 156 de la même loi ; que le décret litigieux, qui a été pris en application de ce dernier article, devait dès lors prendre en compte les seuls résultats issus, par enquêtes exhaustives ou sondages, du recensement de la population opéré dans les conditions fixées par l'article 156 de la loi et par les articles 20 et suivants du décret du 5 juin 2003 ; que la commune ne peut, par suite, utilement se prévaloir des résultats du recensement complémentaire intervenu en 2007 ;

Considérant, d'autre part, que la commune se borne à faire état, outre des résultats du recensement complémentaire intervenu en 2007, d'un comptage opéré par elle des personnes habitant en résidence principale sur son territoire ainsi que d'une hausse des logements mis en chantier depuis 2006 ; qu'il ne ressort toutefois pas des pièces du dossier que l'INSEE qui, s'agissant d'une commune de moins de 10 000 habitants, a procédé à un recensement exhaustif de la population, aurait omis de prendre en compte des personnes ayant leur résidence principale dans la commune ni que le chiffre réel de la population de la COMMUNE DE SAINT-SIFFRET aurait été supérieur à celui qui figure au tableau annexé au décret attaqué ; que, par suite, la commune n'est pas fondée à soutenir que ce décret serait entaché d'erreurs matérielles s'agissant de la fixation du chiffre de sa population ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la COMMUNE DE SAINT-SIFFRET n'est pas fondée à demander l'annulation du décret du 30 décembre 2009 authentifiant les chiffres des populations de métropole, des départements d'outre-mer, de Saint-Barthélemy, de Saint-Martin et de Saint-Pierre-et-Miquelon en tant qu'il fixe sa population à 951 habitants ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ne peuvent, en tout état de cause, qu'être rejetées ;

D E C I D E :

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Article 1er : La requête de la COMMUNE DE SAINT-SIFFRET est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la COMMUNE DE SAINT-SIFFRET, au Premier ministre, à la ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales.


Synthèse
Formation : 3ème sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 336914
Date de la décision : 10/11/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 10 nov. 2010, n° 336914
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Ménéménis
Rapporteur ?: Mme Emilie Bokdam
Rapporteur public ?: Mme Cortot-Boucher Emmanuelle

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2010:336914.20101110
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