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23/12/2010 | FRANCE | N°342078

France | France, Conseil d'État, 2ème sous-section jugeant seule, 23 décembre 2010, 342078


Vu le pourvoi, enregistré le 2 août 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, du MINISTRE DE L'INTERIEUR, DE L'OUTRE-MER ET DES COLLECTIVITES TERRITORIALES ; le MINISTRE DE L'INTERIEUR, DE L'OUTRE-MER ET DES COLLECTIVITES TERRITORIALES demande au Conseil d'Etat d'annuler l'ordonnance n° 1013352/9 du 26 juillet 2010 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Paris a, à la demande de M. Abdelkader A, ordonné sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative la suspension de l'exécution de la décision implicite de ce ministre refusa

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Vu le pourvoi, enregistré le 2 août 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, du MINISTRE DE L'INTERIEUR, DE L'OUTRE-MER ET DES COLLECTIVITES TERRITORIALES ; le MINISTRE DE L'INTERIEUR, DE L'OUTRE-MER ET DES COLLECTIVITES TERRITORIALES demande au Conseil d'Etat d'annuler l'ordonnance n° 1013352/9 du 26 juillet 2010 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Paris a, à la demande de M. Abdelkader A, ordonné sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative la suspension de l'exécution de la décision implicite de ce ministre refusant d'abroger l'arrêté ministériel du 27 juillet 2000 décidant de son expulsion;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Yves Gounin, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Roger, Sevaux, avocat de M. A,

- les conclusions de M. Frédéric Lenica, Rapporteur public ;

La parole ayant à nouveau été donnée à la SCP Roger, Sevaux, avocat de M. A,

Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision ;

Considérant que, pour retenir que le moyen tiré de ce que le refus d'abrogation de l'arrêté d'expulsion pris à l'encontre de M. A méconnaissait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales était propre à créer un doute sérieux quant à la légalité de cet arrêté, le juge des référés du tribunal administratif de Paris s'est fondé sur l'ancienneté de son arrivée en France, la présence de la quasi-totalité de sa famille de nationalité française sur le territoire et sa volonté de réinsertion ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier soumis au juge des référés que l'intéressé a, dès l'âge de seize ans, commis des faits de vols avec violence puis de rébellion et de violence avec arme qui lui ont valu une première peine d'emprisonnement d'un an ; qu'il a commis au même âge un meurtre pour lequel il a été condamné à huit ans de réclusion criminelle par la cour d'assises des mineurs ; qu'il a fait l'objet de vingt-quatre procédures disciplinaires durant sa détention pénitentiaire ; qu'entre septembre 2005 et février 2009, il a fait l'objet de dix condamnations, notamment pour récidive de violence avec arme, mise en danger de la vie d'autrui et menaces de mort réitérées ; que, eu égard tant à la nature et à la gravité des faits dont s'est rendu coupable M. A qu'à son comportement en détention, qui mettent en doute la sincérité de sa volonté de réinsertion, le juge des référés du tribunal administratif de Paris a dénaturé les pièces du dossier en estimant qu'était de nature à faire naître un doute sérieux sur la légalité du refus d'abrogation de l'arrêté d'expulsion le moyen tiré de ce que la mesure d'expulsion prise à l'encontre de M. A, qui est célibataire et sans enfant, porterait une atteinte disproportionnée à la vie privée et familiale de l'intéressé, alors même qu'il n'aurait plus d'attaches dans son pays d'origine et qu'il aurait vécu en France depuis plus son plus jeune âge ; que par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen du pourvoi, son ordonnance du 26 juillet 2010 doit être annulée ;

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, de régler l'affaire au titre de la procédure de référé engagée par M. A ;

Considérant que, pour demander la suspension du refus d'abrogation de l'arrêté d'expulsion dont il fait l'objet, M. A fait valoir que ce refus porte une atteinte à sa vie privée et familiale contraire aux stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, eu égard au fait qu'il vit en France depuis l'âge de neuf mois, que ses parents et ses frères vivent en France, qu'il n'a plus d'attaches dans son pays d'origine et qu'il cherche à se réinsérer, et porte atteinte à son droit à un procès équitable ainsi qu'à un recours effectif, garantis par les articles 6 et 13 de la même convention, dès lors qu'il lui interdit de séjourner en France alors qu'il y a introduit des recours contentieux contre les arrêtés mettant fin à son assignation à résidence et fixant l'Algérie comme pays de renvoi ;

Considérant qu'en l'état de l'instruction, aucun des moyens présentés par M. A à l'encontre du refus d'abrogation de l'arrêté d'expulsion du 27 juillet 2000 n'est de nature à créer un doute sérieux quant à la légalité de cette décision ; que, par suite, il y a lieu, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur l'urgence, de rejeter la demande de suspension de M. A ; qu'il en va de même de ses conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet de l'Aube de mettre fin à sa rétention ;

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement d'une somme au titre des frais exposés par M. A tant devant le tribunal administratif que devant le Conseil d'Etat et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

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Article 1er : L'ordonnance du 26 juillet 2010 du juge des référés du tribunal administratif de Paris est annulée.

Article 2 : La demande de M. A devant le juge des référés du tribunal administratif de Paris ainsi que ses conclusions présentées devant le Conseil d'Etat tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : La présente décision sera notifiée au MINISTRE DE L'INTERIEUR, DE L'OUTRE-MER, DES COLLECTIVITES TERRITORIALES ET DE L'IMMIGRATION et à M. Abdelkader A.


Synthèse
Formation : 2ème sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 342078
Date de la décision : 23/12/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 23 déc. 2010, n° 342078
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Honorat
Rapporteur ?: M. Yves Gounin
Avocat(s) : SCP ROGER, SEVAUX

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2010:342078.20101223
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