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01/06/2011 | FRANCE | N°342419

France | France, Conseil d'État, 2ème et 7ème sous-sections réunies, 01 juin 2011, 342419


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat les 12 août et 14 septembre 2010, présentés pour Mme Carol Ann A, demeurant ... ; Mme A demande au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir le décret en date du 30 avril 2010 par lequel le Premier Ministre a accordé son extradition aux autorités américaines ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le pacte international relatif aux droits civils e

t politiques du 19 décembre 1966 ;

Vu le traité d'extradition entre la France et...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat les 12 août et 14 septembre 2010, présentés pour Mme Carol Ann A, demeurant ... ; Mme A demande au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir le décret en date du 30 avril 2010 par lequel le Premier Ministre a accordé son extradition aux autorités américaines ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le pacte international relatif aux droits civils et politiques du 19 décembre 1966 ;

Vu le traité d'extradition entre la France et les Etats-Unis d'Amérique signé à Paris le 23 avril 1996 ;

Vu le code pénal ;

Vu le code de procédure pénale ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Sophie-Caroline de Margerie, Conseiller d'Etat,

- les observations de la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat de Mme A,

- les conclusions de M. Xavier de Lesquen, Rapporteur public,

La parole ayant à nouveau été donnée à la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat de Mme A ;

Considérant que, par trois jugements en date du 2 septembre 1994 prononcés par le tribunal du 19ème circuit du comté de Martin en Floride, Mme Carol Ann A, de nationalité américaine, a été reconnue coupable de faits d'escroquerie, vols aggravés et vol et a été condamnée à une peine d'emprisonnement d'un an suivie d'une peine de probation de dix ans ; qu'après avoir accompli sa peine d'emprisonnement, elle s'est soustraite à ses obligations de probation en prenant la fuite ; que les autorités américaines ont demandé à la France l'extradition de Mme A par deux notes verbales successives présentées le 18 mars 2008 puis le 11 mai 2009 ;

Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier et qu'il résulte, en particulier, de la seconde de ces notes verbales que l'extradition de Mme A n'était plus demandée par les autorités américaines qu'au seul titre des infractions d'escroquerie, vols aggravés et vol qui ont conduit à l'intervention des jugements du 2 septembre 1994 ; que, par suite, le décret attaqué du 30 avril 2010 qui a accordé l'extradition de la requérante au titre de ces infractions n'a pas méconnu les termes de la demande ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'il ressort des mentions de l'ampliation du décret attaqué figurant au dossier et certifiée conforme par le secrétaire général du gouvernement que ce décret a été signé par le Premier ministre ; que l'ampliation notifiée à Mme A n'avait pas à être revêtue de cette signature ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 10-2 du traité d'extradition entre la France et les Etats-Unis d'Amérique : Sont produits à l'appui de chaque demande d'extradition : (...) d) Le texte des dispositions stipulant les peines relatives à l'infraction ; que les textes afférents aux infractions d'escroquerie, vols aggravés et vol ont été annexés à la demande initiale d'extradition du 18 mars 2008 et mentionnent les pénalités encourues ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations du d) de l'article 10-2 de ce traité ne peut qu'être écarté ;

Considérant, en quatrième lieu, que l'extradition de Mme A a été accordée pour la poursuite de faits d'escroquerie, vols aggravés et vol dont il n'est pas contesté qu'ils sont incriminés en droit pénal français ; qu'il ressort des pièces du dossier que les sentences prononcées le 2 septembre 1994 à l'encontre de la requérante pour ces infractions étaient soumises à la condition d'observation des obligations de la probation et étaient susceptibles, dans l'hypothèse de la violation de ces obligations, d'être revues par le tribunal ; que, dans cette mesure, elles n'étaient pas devenues définitives ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le décret attaqué aurait été pris en méconnaissance du principe non bis in idem doit être écarté ;

Considérant, en cinquième lieu, que si, aux termes de l'article 6 du traité d'extradition entre la France et les Etats-Unis d'Amérique, l'extradition peut être refusée lorsque la remise est susceptible d'avoir des conséquences exceptionnellement graves pour la personne réclamée en raison de son âge ou de son état de santé, il ne ressort pas des pièces du dossier que le Premier ministre ait commis une erreur manifeste d'appréciation en estimant que la remise de Mme A n'était pas de nature à entraîner des conséquences d'une gravité exceptionnelle pour la situation de l'intéressée, laquelle est susceptible, le cas échéant, de recevoir les soins nécessaires à son état de santé au cours d'une incarcération aux Etats-Unis ;

Considérant, enfin, que si Mme A soutient que les conditions de détention dans les prisons américaines sont de nature à l'exposer à des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, elle n'apporte, au soutien de cette allégation, aucun élément permettant d'établir la réalité de tels risques en ce qui la concerne ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme A n'est pas fondée à demander l'annulation du décret attaqué accordant son extradition aux autorités américaines ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de Mme A est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mme Carol Ann A et au garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés.


Synthèse
Formation : 2ème et 7ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 342419
Date de la décision : 01/06/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-04-03-02 ÉTRANGERS. EXTRADITION. DÉCRET D'EXTRADITION. LÉGALITÉ INTERNE. - VIOLATION DES OBLIGATIONS DE PROBATION À LA CONDITION D'OBSERVATION DESQUELLES UNE SENTENCE A ÉTÉ PRONONCÉE - MOTIF D'EXTRADITION NE VIOLANT PAS LE PRINCIPE NON BIS IN IDEM.

335-04-03-02 La violation des obligations de probation à la condition d'observation desquelles une sentence a été prononcée par la justice pénale américaine, qui peut conduire à ce que cette sentence soit revue, constitue un motif d'extradition qui ne méconnaît pas le principe non bis in idem.


Publications
Proposition de citation : CE, 01 jui. 2011, n° 342419
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Bernard Stirn
Rapporteur ?: Mme Sophie-Caroline de Margerie
Rapporteur public ?: M. Xavier de Lesquen
Avocat(s) : SCP WAQUET, FARGE, HAZAN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2011:342419.20110601
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