La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

11/07/2011 | FRANCE | N°337340

France | France, Conseil d'État, 5ème et 4ème sous-sections réunies, 11 juillet 2011, 337340


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 8 mars et 8 juin 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour le CENTRE HOSPITALIER DE ROYAN, dont le siège est 20 avenue de Saint-Sordelin à Vaux-sur-mer (16640) ; le CENTRE HOSPITALIER DE ROYAN demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 09BX00881 du 28 décembre 2009 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux, sur renvoi après cassation, a annulé le jugement n° 03476 du 20 novembre 2003 du tribunal administratif de Poitiers rejetant la demande des consorts C-

B tendant à sa condamnation à leur verser diverses indemnités en rép...

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 8 mars et 8 juin 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour le CENTRE HOSPITALIER DE ROYAN, dont le siège est 20 avenue de Saint-Sordelin à Vaux-sur-mer (16640) ; le CENTRE HOSPITALIER DE ROYAN demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 09BX00881 du 28 décembre 2009 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux, sur renvoi après cassation, a annulé le jugement n° 03476 du 20 novembre 2003 du tribunal administratif de Poitiers rejetant la demande des consorts C-B tendant à sa condamnation à leur verser diverses indemnités en réparation du préjudice résultant de l'embolie massive dont a été victime Mme Lucette C le 18 juillet 1998 dans cet établissement et l'a condamné à verser, d'une part, différentes indemnités aux consorts C-B en leur qualité d'ayants droit et en leur nom personnel et, d'autre part, la somme de 93 170,80 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 20 novembre 2003 à la caisse primaire d'assurance maladie de la Vendée ainsi que la somme de 910 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion ;

2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter les conclusions des consorts C-B et de la caisse primaire d'assurance maladie de la Vendée ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Domitille Duval-Arnould, chargée des fonctions de Maître des Requêtes,

- les observations de Me Le Prado, avocat du CENTRE HOSPITALIER DE ROYAN, de la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat des consorts C et de la SCP Fabiani, Luc-Thaler, avocat de la caisse primaire d'assurance maladie de la Vendée,

- les conclusions de Mme Sophie-Justine Lieber, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à Me Le Prado, avocat du CENTRE HOSPITALIER DE ROYAN, à la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat des consorts C et à la SCP Fabiani, Luc-Thaler, avocat de la caisse primaire d'assurance maladie de la Vendée ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que Mme Lucette C, admise le 16 juillet 1998 au CENTRE HOSPITALIER DE ROYAN pour le traitement d'une fracture du col du fémur, a présenté le 19 juillet 1998 une embolie pulmonaire massive qui a entraîné une hypoxie cérébrale ; qu'elle a été transférée le 1er septembre 1998 au centre hospitalier de Luçon ; qu'elle est décédée le 16 avril 2003 ; que les consorts C-B ont recherché la responsabilité du CENTRE HOSPITALIER DE ROYAN afin d'obtenir réparation des préjudices ayant résulté de l'embolie pulmonaire ; que la caisse primaire d'assurance maladie de la Vendée a demandé le remboursement d'une somme de 116 610,99 euros correspondant à l'ensemble des dépenses exposées par elle au bénéfice de la victime postérieurement au 19 juillet 1998, notamment des frais d'hospitalisation au CENTRE HOSPITALIER DE ROYAN du 19 juillet au 1er septembre 1998, chiffrés à 34 908,46 euros ; que le CENTRE HOSPITALIER DE ROYAN se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 28 décembre 2009 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux, après avoir jugé que l'absence fautive de mise en oeuvre d'un traitement anticoagulant avait entraîné pour Mme C une perte de chance, évaluée à 90%, d'échapper au risque d'embolie pulmonaire, l'a condamné à verser aux consorts C-B diverses indemnités et à la caisse primaire d'assurance maladie de la Vendée, au titre des frais exposés par elle, la somme de 93 170,80 euros ;

Considérant qu'en se bornant à relever que la caisse primaire d'assurance maladie de la Vendée justifiait de dépenses s'élevant à 116 610,69 euros, dont 34 908,46 euros au titre des frais d'hospitalisation à partir du 19 juillet 1998, qu'à cette date, Mme C était toutefois atteinte d'une lésion osseuse justifiant une hospitalisation jusqu'au mois de septembre 1998 et que la caisse devait être regardée, dans ces conditions, comme justifiant de frais directement liés à l'embolie pulmonaire litigieuse pour une somme limitée à 111 489,64 euros, sans s'expliquer sur les éléments pris en compte pour fixer ce montant dont aucune pièce du dossier ne faisait état, la cour administrative d'appel de Bordeaux n'a pas mis le juge de cassation à même d'exercer son contrôle ; que, par suite et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, le CENTRE HOSPITALIER DE ROYAN est fondé à demander l'annulation de l'arrêt du 28 décembre 2009 en tant qu'il fixe les indemnités mises à sa charge au titre des dépenses de santé ; que cette annulation doit porter sur l'article 2 de l'arrêt, en tant qu'il condamne le CENTRE HOSPITALIER DE ROYAN à verser à M. Maurice C et Mme Armelle B, en leur qualité d'ayants droit de Mme Lucette C, une indemnité excédant la somme de 45 000 euros correspondant au préjudice personnel de la victime, et sur son article 3 qui fixe l'indemnité due à la caisse primaire d'assurance maladie de la Vendée ;

Considérant qu'aux termes du second alinéa de l'article L. 821-2 du code de justice administrative : Lorsque l'affaire fait l'objet d'un second pourvoi en cassation, le Conseil d'Etat statue définitivement sur cette affaire ; qu'il y a lieu, par suite, de régler l'affaire au fond dans la limite de la cassation prononcée ;

Considérant que seuls les frais résultant de l'aggravation de l'état de santé de Mme C consécutive à l'embolie pulmonaire survenue le 19 juillet 1998 peuvent être regardés comme étant en rapport avec la faute commise par les médecins du centre hospitalier de Royan en ne prescrivant pas un traitement anti-coagulant ; qu'il résulte de l'instruction que la fracture du col du fémur dont la patiente était atteinte lors de son admission devait nécessairement entraîner son hospitalisation pour une période qui ne pouvait être inférieure à six semaines ; que, dès lors, en l'absence de tout élément permettant de chiffrer le surcoût lié au traitement de l'embolie pulmonaire, la somme de 34 908,46 euros exposée par la caisse primaire d'assurance maladie de la Vendée au titre de l'hospitalisation de la patiente du 19 juillet au 1er septembre 1998 ne peut être regardée comme imputable à cette pathologie ; qu'il en va autrement pour le surplus des frais pharmaceutiques, d'hospitalisation et de transport dont la caisse demande le remboursement, soit 81 702,23 euros ; que les consorts C-B justifient qu'une somme de 71 698,75 euros correspondant à des frais d'hospitalisation de long séjour est restée à la charge de Mme C ; qu'ainsi les dépenses de santé résultant de l'accident survenu le 19 juillet 1998 s'élèvent à 153 400, 98 euros ; que le CENTRE HOSPITALIER DE ROYAN n'étant tenu à réparation qu'à hauteur de 90%, le montant total des indemnités dont le versement lui incombe s'élève à 138 060,88 euros ; que les consorts C-B, qui bénéficient d'un droit de préférence conformément aux dispositions de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, ont droit au versement d'une somme de 71 698,75 euros couvrant l'intégralité des frais demeurés à leur charge ; que la caisse primaire d'assurance maladie de la Vendée ne peut prétendre qu'à une indemnité de 66 362,13 euros correspondant au solde des sommes dues par le centre hospitalier ; que les intérêts sur cette indemnité sont dus à compter du 20 novembre 2003 ;

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que les frais exposés par la caisse primaire d'assurance maladie de la Vendée et les consorts C soient mis à la charge du CENTRE HOSPITALIER DE ROYAN qui n'est pas, dans la présente espèce, la partie perdante ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Bordeaux du 28 décembre 2009 est annulé en tant qu'il statue sur les dépenses de santé, l'article 2 étant annulé en ce qu'il condamne le CENTRE HOSPITALIER DE ROYAN à verser à M. Maurice C et Mme Armelle B, en leur qualité d'ayants droit de Mme Lucette C une somme excédant 45 000 euros, et l'article 3 étant annulé dans son ensemble.

Article 2 : Le CENTRE HOSPITALIER DE ROYAN versera à M. Maurice C et à Mme Armelle Lerochais, en leur qualité d'ayants droit de Mme Lucette C, une somme de 71 698,75 euros s'ajoutant à la somme de 45 000 euros déjà allouée par la cour administrative d'appel de Bordeaux.

Article 3 : Le CENTRE HOSPITALIER DE ROYAN versera à la caisse primaire d'assurance maladie de la Vendée une somme de 66 362,13 euros portant intérêt au taux légal à compter du 20 novembre 2003.

Article 4 : Les conclusions des consorts C-B et de la caisse primaire d'assurance maladie de la Vendée tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : La présente décision sera notifiée au CENTRE HOSPITALIER DE ROYAN, à M. Maurice C, à Mme Armelle B, et à la caisse primaire d'assurance maladie de la Vendée.


Synthèse
Formation : 5ème et 4ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 337340
Date de la décision : 11/07/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 11 jui. 2011, n° 337340
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Philippe Martin
Rapporteur ?: Mme Domitille Duval-Arnould
Rapporteur public ?: Mme Sophie-Justine Lieber
Avocat(s) : LE PRADO ; SCP BORE ET SALVE DE BRUNETON ; SCP FABIANI, LUC-THALER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2011:337340.20110711
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award