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26/07/2011 | FRANCE | N°333546

France | France, Conseil d'État, 1ère et 6ème sous-sections réunies, 26 juillet 2011, 333546


Vu, 1°) sous le n° 333546, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 3 novembre 2009 et 3 février 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour le DEPARTEMENT DES ALPES DE HAUTE-PROVENCE, représenté par le président du conseil général ; le DEPARTEMENT DES ALPES DE HAUTE-PROVENCE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision implicite du Premier ministre rejetant sa demande tendant à l'édiction des mesures réglementaires nécessaires à l'application de l'article 27 de la loi n° 2007-293 du

5 mars 2007 réformant la protection de l'enfance ;

2°) d'enjoindre à l'Etat...

Vu, 1°) sous le n° 333546, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 3 novembre 2009 et 3 février 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour le DEPARTEMENT DES ALPES DE HAUTE-PROVENCE, représenté par le président du conseil général ; le DEPARTEMENT DES ALPES DE HAUTE-PROVENCE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision implicite du Premier ministre rejetant sa demande tendant à l'édiction des mesures réglementaires nécessaires à l'application de l'article 27 de la loi n° 2007-293 du 5 mars 2007 réformant la protection de l'enfance ;

2°) d'enjoindre à l'Etat, en application des dispositions de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, de prendre les mesures d'application de la loi n° 2007-293 du 5 mars 2007 ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 164 623,20 euros en réparation des préjudices subis en raison de cette carence du pouvoir réglementaire ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu, 2°) sous le n° 335941, la requête, enregistrée le 26 janvier 2010, présentée pour le DEPARTEMENT DE SEINE-MARITIME, représenté par le président du conseil général ; le DEPARTEMENT DE SEINE-MARITIME demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision implicite par laquelle le ministre du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité a rejeté sa demande tendant à ce que soient prises les mesures réglementaires prévues à l'article 27 de la loi n° 2007-293 du 5 mars 2007 réformant la protection de l'enfance ;

2°) d'enjoindre à l'Etat de prendre les mesures réglementaires nécessaires à l'application de cet article dans un délai de trois mois à compter de la notification de la décision à venir, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard ;

3°) d'allouer au DEPARTEMENT DE SEINE-MARITIME la somme de 2,7 millions d'euros en réparation du préjudice subi du fait de cette carence du pouvoir réglementaire ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

....................................................................................

Vu, 3°) sous le n° 336041, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 28 janvier et 27 avril 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour le DEPARTEMENT DE L'ISERE, représenté par le président du conseil général ; le DEPARTEMENT DE L'ISERE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 19 octobre 2009 par laquelle le Premier Ministre a refusé de prendre le décret prévu à l'article 27 de la loi n° 2007-293 du 5 mars 2007 réformant la protection de l'enfance ;

2°) d'annuler la décision implicite de rejet opposée à sa demande tendant à la réparation par l'Etat du préjudice résultant de la carence du pouvoir réglementaire et de condamner l'Etat à lui verser la somme de 678 705 euros à ce titre ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

....................................................................................

Vu, 4°) sous le n° 336301, la requête, enregistrée le 5 février 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour le DEPARTEMENT DE PARIS, représenté par le président du conseil de Paris ; le DEPARTEMENT DE PARIS demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 18 décembre 2009 par laquelle le Premier ministre a refusé de prendre les mesures réglementaires prévues à l'article 27 de la loi n° 2007-293 du 5 mars 2007 réformant la protection de l'enfance ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

....................................................................................

Vu, 5°) sous le n° 336302, la requête, enregistrée le 5 février 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour le DEPARTEMENT DE PARIS, représenté par le président du conseil de Paris ; le DEPARTEMENT DE PARIS demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision du 18 décembre 2009 par laquelle le Premier ministre a refusé de lui allouer une indemnité de 4 495 508 euros au titre de la compensation des coûts résultant de la mise en oeuvre des dispositions de la loi n° 2007-293 du 5 mars 2007 réformant la protection de l'enfance ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de cette somme et des intérêts légaux dus sur celle-ci ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

....................................................................................

Vu, 6°) sous le n° 336645, la requête, enregistrée le 15 février 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour le DEPARTEMENT DE L'ESSONNE, représenté par le président du conseil général ; le DEPARTEMENT DE L'ESSONNE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir les décisions implicites par lesquelles le ministre du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité a rejeté ses demandes tendant à ce que soient prises les mesures réglementaires prévues à l'article 27 de la loi n° 2007-293 du 5 mars 2007 réformant la protection de l'enfance et à ce qu'il soit indemnisé du préjudice subi du fait de la carence du pouvoir réglementaire ;

2°) d'enjoindre au Premier ministre de prendre les mesures nécessaires à l'application de cet article, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard ;

3°) d'allouer au DEPARTEMENT DE L'ESSONNE la somme de 3,1 millions d'euros en réparation du préjudice financier résultant de cette carence du pouvoir réglementaire ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

....................................................................................

Vu, 7°) sous le n° 336842, la requête, enregistrée le 19 février 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour le DEPARTEMENT DE LOT-ET-GARONNE, représenté par le président du conseil général ; le DEPARTEMENT DE LOT-ET-GARONNE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision implicite par laquelle le Premier ministre a refusé de prendre les mesures réglementaires prévues à l'article 27 de la loi n° 2007-293 du 5 mars 2007 réformant la protection de l'enfance ;

2°) d'enjoindre à l'Etat de prendre ces mesures dans un délai de trois mois sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard ;

3°) d'allouer au DEPARTEMENT DE LOT-ET-GARONNE la somme de 195 654 euros en réparation du préjudice financier qui résulte de la carence du pouvoir réglementaire ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

....................................................................................

Vu, 8°) sous le n° 336909, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 22 février et 25 mai 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour le DEPARTEMENT DE LA HAUTE-GARONNE, représenté par le président du conseil général ; le DEPARTEMENT DE LA HAUTE-GARONNE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du Premier ministre du 21 décembre 2009 refusant d'édicter les mesures réglementaires nécessaires à l'application de l'article 27 de la loi du 5 mars 2007 réformant la protection de l'enfance et de lui verser la somme de 1 466 000 euros en réparation du préjudice subi du fait de ce refus ;

2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 2 531 882 euros en réparation des préjudices subis du fait de la carence du pouvoir réglementaire ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu, 9°) sous le n° 337400, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 9 mars et 7 juin 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour le DEPARTEMENT DE MEURTHE-ET-MOSELLE, représenté par le président du conseil général ; le DEPARTEMENT DE MEURTHE-ET-MOSELLE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision implicite du Premier ministre rejetant sa demande tendant à l'édiction des mesures réglementaires prévues à l'article 27 de la loi n° 2007-293 du 5 mars 2007 réformant la protection de l'enfance ;

2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 408 491 euros en réparation des préjudices subis du fait de la carence du pouvoir réglementaire ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu, 10°) sous le n° 338275, la requête, enregistrée le 1er avril 2010, présentée pour le DEPARTEMENT DU DOUBS, représenté par le président du conseil général ; le DEPARTEMENT DU DOUBS demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 1er mars 2010 par laquelle le Premier ministre a refusé d'édicter les mesures réglementaires nécessaires à l'application de l'article 27 de la loi n° 2007-293 du 5 mars 2007 réformant la protection de l'enfance et de l'indemniser du préjudice résultant de la carence du pouvoir réglementaire ;

2°) d'enjoindre à l'Etat de prendre ces mesures réglementaires dans un délai de trois mois à compter de la notification de la décision à intervenir, sous peine d'une astreinte de 1 000 euros par jour de retard ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 700 000 euros en réparation de ce préjudice ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu, 11°) sous le n° 338998, la requête, enregistrée le 27 avril 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le DEPARTEMENT DU VAL-DE-MARNE, représenté par le président du conseil général ; le DEPARTEMENT DU VAL-DE-MARNE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision implicite du Premier ministre rejetant sa demande tendant à l'édiction des mesures réglementaires nécessaires à l'application de l'article 27 de la loi n° 2007-293 du 5 mars 2007 réformant la protection de l'enfance ;

2°) d'enjoindre à l'Etat d'édicter ces mesures ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 1 444 000 euros en réparation du préjudice subi du fait de la carence du pouvoir réglementaire ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

....................................................................................

Vu, 12°) sous le n° 339149, la requête, enregistrée le 3 mai 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour le DEPARTEMENT DE LA HAUTE-VIENNE, représenté par le président du conseil général ; le DEPARTEMENT DE LA HAUTE-VIENNE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 1er mars 2010 par laquelle le Premier ministre a refusé d'édicter les mesures réglementaires nécessaires à l'application de l'article 27 de la loi n° 2007-293 du 5 mars 2007 réformant la protection de l'enfance et de l'indemniser du préjudice résultant de la carence du pouvoir réglementaire ;

2°) d'enjoindre à l'Etat de prendre ces mesures réglementaires dans un délai de trois mois à compter de la notification de la décision à intervenir, sous peine d'une astreinte de 1000 euros par jour de retard ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 645 000 euros en réparation de ce préjudice ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

....................................................................................

Vu, 13°) sous le n° 339150, la requête, enregistrée le 3 mai 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour le DEPARTEMENT DE L'OISE, représenté par le président du conseil général ; le DEPARTEMENT DE L'OISE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision du Premier ministre du 1er mars 2010 rejetant sa demande tendant à l'indemnisation du préjudice résultant de la carence du pouvoir réglementaire à édicter les mesures nécessaires à l'application de l'article 27 de la loi n° 2007-293 du 5 mars 2007 réformant la protection de l'enfance, ainsi que la décision implicite du Premier ministre rejetant sa demande tendant à l'édiction de ces mesures ;

2°) d'enjoindre à l'Etat d'édicter ces mesures réglementaires dans un délai de trois mois à compter de la décision, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 1 015 989,09 euros en réparation du préjudice subi du fait de l'absence de ces mesures réglementaires ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

....................................................................................

Vu, 14°) sous le n° 339153, la requête, enregistrée le 3 mai 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour le DEPARTEMENT DU TERRITOIRE DE BELFORT, représenté par le président du conseil général ; le DEPARTEMENT DU TERRITOIRE DE BELFORT demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision du 1er mars 2010 par laquelle le Premier ministre a rejeté sa demande tendant au versement de la somme de 205 000 euros due à raison du préjudice résultant de l'absence de mesures réglementaires nécessaires à l'application de l'article 27 de la loi n° 2007-293 du 5 mars 2007 réformant la protection de l'enfance ;

2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 205 000 euros, outre les intérêts à compter du 8 janvier 2010 et leur capitalisation ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

....................................................................................

Vu, 15°) sous le n° 339890, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 25 mai et 25 août 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour le DEPARTEMENT DE SEINE-ET-MARNE, représenté par le président du conseil général ; le DEPARTEMENT DE SEINE-ET-MARNE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du Premier ministre du 19 mars 2010 refusant d'édicter les mesures réglementaires nécessaires à l'application de l'article 27 de la loi n° 2007-293 du 5 mars 2007 réformant la protection de l'enfance ;

2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 3 992 138 euros en réparation du préjudice subi du fait du retard dans l'édiction de ces mesures réglementaires ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

....................................................................................

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu la loi n° 2007-293 du 5 mars 2007, notamment son article 27 ;

Vu le décret n° 2010-497 du 17 mai 2010 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Jean Lessi, Auditeur,

- les observations de la SCP Peignot, Garreau, avocat du DEPARTEMENT DES ALPES DE HAUTE-PROVENCE, du DEPARTEMENT DE L'ISERE, du DEPARTEMENT DE LA HAUTE-GARONNE, du DEPARTEMENT DE MEURTHE-ET-MOSELLE et du DEPARTEMENT DE LA SEINE-ET-MARNE, de la SCP Boutet, avocat du DEPARTEMENT DE SEINE-MARITIME, du DEPARTEMENT DE L'ESSONNE, du DEPARTEMENT DU LOT-ET-GARONNE, du DEPARTEMENT DU DOUBS, du DEPARTEMENT DE HAUTE-VIENNE et du DEPARTEMENT DE L'OISE, de Me Foussard, avocat du DEPARTEMENT DE PARIS, et de la SCP Boulloche, avocat du DEPARTEMENT DU TERRITOIRE DE BELFORT,

- les conclusions de Mme Claire Landais, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Peignot, Garreau, avocat du DEPARTEMENT DES ALPES DE HAUTE-PROVENCE, du DEPARTEMENT DE L'ISERE, du DEPARTEMENT DE LA HAUTE-GARONNE, du DEPARTEMENT DE MEURTHE-ET-MOSELLE et du DEPARTEMENT DE LA SEINE-ET-MARNE, à la SCP Boutet, avocat du DEPARTEMENT DE SEINE-MARITIME, du DEPARTEMENT DE L'ESSONNE, du DEPARTEMENT DU LOT-ET-GARONNE, du DEPARTEMENT DU DOUBS, du DEPARTEMENT DE HAUTE-VIENNE et du DEPARTEMENT DE L'OISE, à Me Foussard, avocat du DEPARTEMENT DE PARIS, et à la SCP Boulloche, avocat du DEPARTEMENT DU TERRITOIRE DE BELFORT ;

Considérant que les requêtes visées ci-dessus présentent à juger les mêmes questions ou des questions connexes ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;

Sur les conclusions relatives à l'édiction des mesures réglementaires d'application de l'article 27 de la loi du 5 mars 2007 réformant la protection de l'enfance :

Considérant que le décret nécessaire à l'application de l'article 27 de la loi du 5 mars 2007 réformant la protection de l'enfance, qui crée un fonds national de financement de la protection de l'enfance ayant notamment pour objet de compenser les charges résultant pour les départements de la mise en oeuvre de cette loi, est intervenu le 17 mai 2010 et a été publié le lendemain au Journal officiel de la République française ; que, par suite, les conclusions à fin d'annulation des décisions du Premier ministre refusant d'édicter ces mesures réglementaires sont dépourvues d'objet, sans qu'ait d'incidence à cet égard la circonstance que le décret soit contesté ; qu'il en va de même, par voie de conséquence, des conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint au Premier ministre, le cas échéant sous astreinte, d'édicter de telles mesures ; qu'il n'y a donc pas lieu de statuer sur ces conclusions dans les requêtes visées aux 1° à 4° et 6° à 13° ; que ces mêmes conclusions présentées dans la requête du DEPARTEMENT DE SEINE-ET-MARNE, dont l'introduction est postérieure à la publication du décret du 17 mai 2010, ne peuvent être accueillies ;

Sur les conclusions à fin d'indemnisation :

Considérant qu'entre la date de publication de la loi du 5 mars 2007 et celle du décret du 17 mai 2010 relatif au fonds national de financement de la protection de l'enfance s'est écoulé un délai de plus de trois ans ; qu'eu égard à la nature des mesures qu'il incombait au Premier ministre de prendre, le délai raisonnable dont il disposait a ainsi été dépassé dans des conditions présentant un caractère fautif ;

Considérant qu'avant la publication du décret du 17 mai 2010, le préjudice résultant de l'absence de compensation des charges résultant, pour les départements, de la mise en oeuvre de la loi du 5 mars 2007 trouvait son origine dans la carence du pouvoir réglementaire à prendre les mesures d'application de l'article 27 de cette loi, qui avait pour effet de faire obstacle à la mise en place du fonds national de financement de la protection de l'enfance et au versement de toute compensation ;

Mais considérant que le décret du 17 mai 2010 a pour objet d'assurer la mise en oeuvre du droit à compensation dans les conditions prévues à l'article 27 de la loi du 5 mars 2007 ; qu'en vertu des dispositions de l'article 3 de ce décret, il appartient au comité de gestion du fonds national de financement de la protection de l'enfance de déterminer le montant de l'enveloppe consacrée à la compensation des charges résultant pour les départements de la mise en oeuvre de cette loi ; qu'il résulte de l'instruction que ce dernier a, le 15 juillet 2010, décidé d'affecter 21 millions d'euros à cette enveloppe et de verser cette somme par tiers pendant trois ans ; qu'en vertu de l'article 6 du même décret, chaque département bénéficiera, dans le cadre de cette enveloppe, d'une dotation calculée selon les règles qu'il fixe, tenant compte notamment de leur potentiel financier et de la population des bénéficiaires de l'aide sociale à l'enfance qu'il prend en charge, sans relation nécessaire avec le montant des charges qu'il a effectivement supportées au titre de la mise en oeuvre de la loi du 5 mars 2007 et de l'année au titre de laquelle il a exposé ces dépenses ;

Considérant qu'il résulte de ce qui vient d'être dit que le retard dans l'édiction des mesures réglementaires d'application de l'article 27 de la loi du 5 mars 2007 n'a pas privé les départements du droit à compensation qu'ils tirent de ces dispositions compte tenu des crédits disponibles ; que, dans ces conditions, le préjudice allégué par les départements requérants, qui porte sur l'absence d'une telle compensation, est dépourvu de lien de causalité avec le dépassement fautif du délai imparti au Gouvernement pour prendre ces mesures réglementaires ; que, par suite, les conclusions indemnitaires présentées par les départements requérants ne peuvent être accueillies ;

Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance ;

D E C I D E :

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Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions des requêtes visées aux 1° à 4° et 6° à 13° ci-dessus tendant à l'annulation du refus du Premier ministre d'édicter les mesures réglementaires nécessaires à l'application de l'article 27 de la loi n° 2007-293 du 5 mars 2007 et à ce qu'il soit enjoint à ce dernier de prendre ces mesures, le cas échéant sous astreinte.

Article 2 : Les conclusions de la requête du DEPARTEMENT DE SEINE-ET-MARNE tendant à l'annulation du refus du Premier ministre d'édicter les mesures réglementaires nécessaires à l'application de l'article 27 de la loi n° 2007-293 du 5 mars 2007 sont rejetées, ainsi que le surplus des conclusions des requêtes.

Article 3 : La présente décision sera notifiée au DEPARTEMENT DE PARIS, au DEPARTEMENT DU TERRITOIRE DE BELFORT, au DEPARTEMENT DE LA HAUTE-VIENNE, au DEPARTEMENT DU DOUBS, au DEPARTEMENT DE L'ESSONNE, au DEPARTEMENT DE LA HAUTE-GARONNE, au DEPARTEMENT DU VAL-DE-MARNE, au DEPARTEMENT DE LA SEINE-MARITIME, au DEPARTEMENT DE LOT-ET-GARONNE, au DEPARTEMENT DE L'OISE, au DEPARTEMENT DES ALPES DE HAUTE-PROVENCE, au DEPARTEMENT DE L'ISERE, au DEPARTEMENT DE MEURTHE-ET-MOSELLE, au DEPARTEMENT DE SEINE-ET-MARNE, au Premier ministre et à la ministre des solidarités et de la cohésion sociale.


Synthèse
Formation : 1ère et 6ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 333546
Date de la décision : 26/07/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 26 jui. 2011, n° 333546
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Christian Vigouroux
Rapporteur ?: M. Jean Lessi
Rapporteur public ?: Mme Claire Landais
Avocat(s) : SCP PEIGNOT, GARREAU

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2011:333546.20110726
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