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28/11/2011 | FRANCE | N°348680

France | France, Conseil d'État, 6ème sous-section jugeant seule, 28 novembre 2011, 348680


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 21 avril et 10 mai 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d'État, présentés pour Mme Zakia A, demeurant ... ; Mme A demande au Conseil d'État :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 1100623 du 8 mars 2011 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Strasbourg, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, a rejeté sa requête tendant à la suspension de la décision du 17 septembre 2010 du préfet du Bas-Rhin lui refusant le bénéfice du regroupement

familial au profit de son mari et à ce qu'il soit enjoint au préfet du Ba...

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 21 avril et 10 mai 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d'État, présentés pour Mme Zakia A, demeurant ... ; Mme A demande au Conseil d'État :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 1100623 du 8 mars 2011 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Strasbourg, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, a rejeté sa requête tendant à la suspension de la décision du 17 septembre 2010 du préfet du Bas-Rhin lui refusant le bénéfice du regroupement familial au profit de son mari et à ce qu'il soit enjoint au préfet du Bas-Rhin de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois ;

2°) de mettre à la charge de l'État le versement d'une somme de 2 500 euros à la SCP Didier-Pinet au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Michel Thenault, Conseiller d'Etat,

- les observations de la SCP Didier, Pinet, avocat de Mme A,

- les conclusions de M. Xavier de Lesquen, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Didier, Pinet, avocat de Mme A,

Considérant qu'aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision ;

Considérant que la condition d'urgence à laquelle est subordonné le prononcé d'une mesure de suspension doit être regardée comme remplie lorsque la décision administrative contestée préjudicie de manière suffisamment grave et immédiate à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu'il entend défendre ; qu'il appartient au juge des référés, saisi d'une demande tendant à la suspension d'une telle décision, d'apprécier concrètement, compte tenu des justifications fournies par le requérant, si les effets sur la situation de ce dernier ou, le cas échéant, des personnes concernées, sont de nature à caractériser une urgence justifiant que, sans attendre le jugement de la requête au fond, l'exécution de la décision soit suspendue ;

Considérant qu'en se fondant, pour relever l'absence de situation d'urgence, sur la seule circonstance que Mme A, alors qu'elle était mariée depuis 2007, n'avait sollicité le regroupement familial qu'en juin 2010, le juge des référés a commis une erreur de droit ; qu'ainsi, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, l'ordonnance attaquée doit être annulée ;

Considérant qu'il y a lieu, par application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, de régler l'affaire au titre de la procédure de référé engagée par Mme A ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 411-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Le regroupement familial ne peut être refusé que pour l'un des motifs suivants : 1° Le demandeur ne justifie pas de ressources stables et suffisantes pour subvenir aux besoins de sa famille. Sont prises en compte toutes les ressources du demandeur et de son conjoint indépendamment des prestations familiales et des allocations prévues à l'article L. 262-1 du code de l'action sociale et des familles, à l'article L. 815-1 du code de la sécurité sociale et aux articles L. 351-9, L. 351-10 et L. 351-10-1 du code du travail. Les ressources doivent atteindre un montant qui tient compte de la taille de la famille du demandeur. Le décret en Conseil d'État prévu à l'article L. 441-1 fixe ce montant qui doit être au moins égal au salaire minimum de croissance mensuel et au plus égal à ce salaire majoré d'un cinquième. Ces dispositions ne sont pas applicables lorsque la personne qui demande le regroupement familial est titulaire de l'allocation aux adultes handicapés mentionnée à l'article L. 821-1 du code de la sécurité sociale ou de l'allocation supplémentaire mentionnée à l'article L. 815-24 du même code ; (...) ;

Considérant d'une part, qu'eu égard à la durée de la séparation des époux, au délai écoulé depuis la demande de regroupement familial et aux difficultés médicales rencontrées par Mme A qui sont de nature à compromettre les chances du succès de la grossesse espérée par le couple, la condition d'urgence est satisfaite ;

Considérant, d'autre part, qu'est de nature à créer un doute sérieux sur la légalité de la décision attaquée le moyen tiré de ce que le préfet aurait méconnu les dispositions précitées de l'article L. 411-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en estimant, au seul vu des caractéristiques de l'emploi qu'elle occupe, que l'origine et la nature des revenus de Mme A ne permettaient pas de considérer que la condition de stabilité des ressources exigée par ces dispositions était garantie ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A est fondée à demander la suspension de la décision refusant le bénéfice du regroupement familial au profit de son époux ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de justice administrative : Le juge des référés statue par des mesures qui présentent un caractère provisoire (...) ; qu'en vertu de ces dispositions, il appartient au juge des référés, qu'il soit saisi ou non de conclusions à cette fin, d'assortir la suspension des obligations provisoires qui en découleront pour l'administration ; qu'en l'espèce, il y a lieu d'enjoindre au préfet du Bas-Rhin de réexaminer la demande de Mme A au regard des motifs de la présente décision dans le délai d'un mois à compter de sa notification, sans qu'il y ait lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Considérant que Mme A a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que la SCP Hélène Didier et François Pinet, avocat de Mme A, renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État, de mettre à la charge de l'État la somme de 2 500 euros à verser à la SCP Hélène Didier et François Pinet ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'ordonnance n° 1100623 du 8 mars 2011 du juge des référés du tribunal administratif de Strasbourg est annulée.

Article 2 : L'exécution de la décision du 17 septembre 2010 du préfet du Bas-Rhin refusant à Mme A le bénéfice du regroupement familial au profit de son époux, est suspendue jusqu'à ce qu'il ait été statué sur la demande présentée par l'intéressée devant le tribunal administratif de Strasbourg tendant à l'annulation de la décision susvisée.

Article 3 : Il est fait injonction au préfet du Bas-Rhin de réexaminer la demande de Mme A dans le délai d'un mois à compter de la notification qui lui sera faite de la présente décision.

Article 4 : L'État versera à la SCP Hélène Didier et François Pinet la somme de 2 500 euros en application du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que cette société renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à Mme Zakia A, au préfet du Bas -Rhin et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration.


Synthèse
Formation : 6ème sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 348680
Date de la décision : 28/11/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 28 nov. 2011, n° 348680
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : Mme Christine Maugüé
Rapporteur ?: M. Michel Thenault
Rapporteur public ?: M. Xavier de Lesquen
Avocat(s) : SCP DIDIER, PINET

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2011:348680.20111128
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