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14/12/2011 | FRANCE | N°337824

France | France, Conseil d'État, 7ème et 2ème sous-sections réunies, 14 décembre 2011, 337824


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 22 mars et 21 juin 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Bernard A, demeurant au ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 09BX01177 du 5 janvier 2010 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté sa requête tendant, premièrement, à l'annulation du jugement n° 0701065 du 26 mars 2009 du tribunal administratif de Limoges rejetant sa requête tendant, d'une part, à l'annulation de la décision du 31 août 2004 du maire de la commune d

e Marcillac-la-Croisille rejetant sa demande tendant à la démolition de...

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 22 mars et 21 juin 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Bernard A, demeurant au ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 09BX01177 du 5 janvier 2010 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté sa requête tendant, premièrement, à l'annulation du jugement n° 0701065 du 26 mars 2009 du tribunal administratif de Limoges rejetant sa requête tendant, d'une part, à l'annulation de la décision du 31 août 2004 du maire de la commune de Marcillac-la-Croisille rejetant sa demande tendant à la démolition de deux murets implantés sur la place de la mairie et, d'autre part, à ce qu'il soit enjoint à la commune de procéder à la destruction de ces ouvrages dans un délai de deux mois à compter du jugement, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ; deuxièmement, à l'annulation de la décision du 31 août 2004 et, troisièmement, à ce qu'il soit enjoint à la commune de détruire les ouvrages dans un délai de deux mois sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Marcillac-la-Croisille le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Fabrice Aubert, Auditeur,

- les observations de la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle, Hannotin, avocat de M. Bernard A et de la SCP Fabiani, Luc-Thaler, avocat de la commune de

Marcillac-la-Croisille,

- les conclusions de M. Bertrand Dacosta, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle, Hannotin, avocat de M. Bernard A et à la SCP Fabiani, Luc-Thaler, avocat de la commune de Marcillac-la-Croisille ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond qu'à l'appui de sa demande de démolition de deux murets édifiés sur la place de la mairie de la commune de Marcillac-la-Croisille, M. A, propriétaire d'un château jouxtant cette place, s'est prévalu de l'existence d'une servitude non aedificandi, illimitée dans le temps, consentie par la commune dans l'acte de vente de la parcelle correspondant à la place de la mairie signé le 1er mai 1881 avec son grand-père ; qu'il a formé un recours contre la décision du 31 août 2004 par laquelle le maire a refusé de détruire deux murets érigés en vue de l'aménagement de cette place ; qu'il se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 5 janvier 2010 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux a confirmé le jugement du 26 mars 2009 du tribunal administratif de Limoges rejetant sa requête ;

Considérant qu'antérieurement à l'entrée en vigueur du code général de la propriété des personnes publiques, il résultait des principes de la domanialité publique qu'une servitude conventionnelle de droit privé pouvait être maintenue sur une parcelle appartenant au domaine public à la double condition d'avoir été consentie antérieurement à l'incorporation de cette parcelle dans le domaine public et d'être compatible avec son affectation ; qu'en se bornant à juger que l'incessibilité et l'imprescriptibilité qui s'attachent au domaine public faisaient obstacle à la constitution sur une telle parcelle d'une servitude de droit privé, sans rechercher si la servitude dont se prévalait M. A, antérieure à l'incorporation de cette parcelle dans le domaine public et dont l'existence n'est pas contestée, était compatible avec son affectation, la cour a commis une erreur de droit ; que, par suite, M. A est fondé à demander l'annulation de l'arrêt attaqué ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la servitude dont se prévaut M. A, porte clairement sur l'impossibilité d'édifier, sur la parcelle d'assiette de la place, une construction permettant de masquer la vue du château ou en rendre l'accès plus difficile ; que cette servitude, antérieure à l'incorporation de cette parcelle dans le domaine public communal, est compatible avec son affectation, à la date du litige, comme place publique ;

Mais considérant que les murets dont M. A sollicite la destruction, d'une hauteur de 50 centimètres et disposés en face de sa propriété, ne peuvent avoir pour effet d'en masquer la vue ; que la distance de six mètres qui sépare ces murets du portail de M. A est supérieure à la largeur réglementaire applicable des voies de circulation, fixée à cinq mètres ; que, contrairement à ce que soutient M. A, il ressort des pièces du dossier que les difficultés alléguées d'accès des véhicules poids lourds à sa propriété résultent principalement du stationnement irrégulier de voitures le long de ces murets, circonstance sans incidence sur la légalité de la décision par laquelle le maire a refusé de les faire détruire ; qu'il résulte de ce qui précède que les murets litigieux ne peuvent être regardés comme gênant l'accès du château et dès lors ne font pas obstacle à l'usage par M. A de cette servitude ; que, par suite, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non-recevoir opposées par la commune, M. A n'est pas fondé à se plaindre de ce que le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande ;

Considérant que la présente décision, qui rejette les conclusions à fin d'annulation de M. A, n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, ses conclusions à fin d'injonction ne peuvent qu'être rejetées ;

Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par M. A au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'en revanche il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à sa charge, en application de ces même dispositions, la somme de 4 500 euros au titre des frais exposés par la commune de Marcillac-la-Croisille ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt du 5 janvier 2010 de la cour administrative d'appel de Bordeaux est annulé.

Article 2 : La requête de M. A est rejetée.

Article 3 : Le surplus des conclusions du pourvoi de M. A est rejeté.

Article 4 : M. A versera à la commune de Marcillac-la-Croisille la somme de 4 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à Monsieur Bernard A et à la commune de Marcillac-la-Croisille.


Synthèse
Formation : 7ème et 2ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 337824
Date de la décision : 14/12/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 14 déc. 2011, n° 337824
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Christian Vigouroux
Rapporteur ?: M. Fabrice Aubert
Rapporteur public ?: M. Bertrand Dacosta
Avocat(s) : SCP NICOLAY, DE LANOUVELLE, HANNOTIN ; SCP FABIANI, LUC-THALER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2011:337824.20111214
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