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08/02/2012 | FRANCE | N°337992

France | France, Conseil d'État, 2ème sous-section jugeant seule, 08 février 2012, 337992


Vu 1°) sous le n° 337992, la décision en date du 1er juin 2011 par laquelle le Conseil d'Etat statuant au Contentieux a, avant dire droit sur la requête, enregistrée le 26 mars 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Larbi C, ..., demandant au Conseil d'Etat, d'une part, d'annuler la décision implicite par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté son recours dirigé contre la décision du 2 décembre 2009 par laquelle le consul général de France à Alger (Algérie) lui a refusé un visa de l

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Vu 1°) sous le n° 337992, la décision en date du 1er juin 2011 par laquelle le Conseil d'Etat statuant au Contentieux a, avant dire droit sur la requête, enregistrée le 26 mars 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Larbi C, ..., demandant au Conseil d'Etat, d'une part, d'annuler la décision implicite par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté son recours dirigé contre la décision du 2 décembre 2009 par laquelle le consul général de France à Alger (Algérie) lui a refusé un visa de long séjour, d'autre part, d'enjoindre au consul général de France à Alger de lui délivrer un visa de long séjour dans un délai d'un mois à compter de la notification de la décision à intervenir et ce, sous astreinte de 100 euros par jour de retard et, enfin, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ordonné au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration de produire, dans un délai d'un mois à compter de la notification de la décision, les éléments qui peuvent être versés au dossier dans le respect des exigences liées à la sécurité nationale, lui permettant de se prononcer sur le bien-fondé du motif d'ordre public retenu à l'appui du refus de visa attaqué ;

Vu 2°) sous le n° 342706, la requête, enregistrée le 24 août 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Larbi C, ... ; M. C demande au Conseil d'Etat :

1°) de prononcer une astreinte à l'encontre du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration en vue d'assurer l'exécution de l'ordonnance n° 326863 du 10 avril 2009 par laquelle le juge des référés Conseil d'Etat a rejeté le recours du ministre de l'intérieur tendant à l'annulation des articles 1er et 2 de l'ordonnance du 23 mars 2009 par lesquels le juge des référés du tribunal administratif de Versailles, sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, a, d'une part, suspendu l'exécution de la décision du 21 mars 2009 du préfet de l'Essonne procédant à l'expulsion de M. C, en tant qu'elle fait obstacle au retour de l'intéressé sur le territoire français, et a, d'autre part, enjoint aux autorités consulaires françaises en Algérie de prendre toutes mesures de nature à permettre le retour en France de M. C ;

2°) d'enjoindre au consul général de France à Alger de lui délivrer un visa de long séjour dans un délai de sept jours à compter de la notification de la décision à intervenir et ce, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

....................................................................................

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Sophie-Caroline de Margerie, Conseiller d'Etat,

- les conclusions de M. Damien Botteghi, rapporteur public ;

Considérant que les deux requêtes présentées par M. C se rapportent au même litige ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;

Sur la requête n° 337992 :

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. Larbi C, né en 1938 et de nationalité algérienne, a résidé en France depuis 1972 et est père de onze enfants ; qu'en raison de faits commis en 1994, qualifiés de participation à une association de malfaiteurs en vue de la préparation d'un crime, de détention sans autorisation de munition ou d'arme de 1ère ou 4ème catégorie et d'utilisation de fréquence ou d'installation radioélectrique sans autorisation, il a été condamné par un jugement du tribunal de grande instance de Paris en date du 7 février 1997, confirmé par un arrêt de la cour d'appel de Paris en date du 22 septembre 1997, à une peine de cinq ans d'emprisonnement et à une interdiction du territoire d'une durée de dix ans ; que le préfet de police a pris à l'encontre de M. C, le 12 février 1998, un arrêté d'expulsion du territoire français fondé sur l'existence d'une menace grave pour l'ordre public ; que le recours pour excès de pouvoir formé par M. C contre cet arrêté a été définitivement rejeté par un arrêt de la cour administrative d'appel de Paris en date du 2 octobre 2001 ; que, par décision du 21 mars 2009, le préfet de l'Essonne a mis à exécution cet arrêté d'expulsion ; que sa décision a toutefois été suspendue par une ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Versailles en date du 23 mars 2009, qui a également enjoint aux autorités consulaires françaises en Algérie de prendre toutes mesures de nature à permettre le retour en France de M. C ; que, par une ordonnance du 10 avril 2009, le juge des référés du Conseil d'Etat a rejeté l'appel formé contre cette ordonnance par le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales ; que M. C, qui se trouve en Algérie à la suite de son éloignement, a demandé un visa de long séjour qui lui a été refusé par une décision du 2 décembre 2009 du consul général de France à Alger, implicitement confirmée par la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France ; que M. C demande l'annulation de cette décision implicite ; qu'il ressort des pièces du dossier que la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France s'est fondée, pour confirmer le refus du consul général de France à Alger, sur la menace à l'ordre public que constituerait la présence en France du requérant ;

Considérant que le Conseil d'Etat statuant au contentieux a, par une décision avant dire droit en date du 1er juin 2011, ordonné au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration de produire, dans un délai d'un mois, les éléments qui peuvent être versés au dossier dans le respect des exigences liées à la sécurité nationale, lui permettant de se prononcer sur le bien-fondé du motif d'ordre public retenu à l'appui du refus de visa attaqué ;

Considérant qu'il ressort des documents produits en application de ce supplément d'instruction et notamment de la " note blanche " établie par la direction centrale du renseignement intérieur sur laquelle l'administration s'est fondée pour estimer que la présence en France du requérant constituerait une menace pour l'ordre public, que les seuls faits reprochés au requérant sont ceux commis en 1994 ayant donné lieu à condamnation, sans qu'il soit fait état d'éléments postérieurs à cette date ; que, dans ces conditions, eu égard, d'une part, au caractère très ancien des faits et à l'absence de toute autre justification par l'administration des troubles pour l'ordre public que la venue en France de M. C risquerait d'entraîner et compte tenu, d'autre part, de l'ancienneté et de la régularité du séjour en France de l'intéressé jusqu'à l'intervention de l'arrêté prononçant son expulsion, lequel n'a été mis à exécution que plus de onze ans après son intervention, et du fait que son épouse et ses enfants, dont la plupart ont la nationalité française, vivent ou ont toujours vécu en France, la décision de la commission a porté au droit du requérant au respect de sa vie privée et familiale, tel que garanti par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, une atteinte excessive par rapport aux buts poursuivis par cette mesure ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. C est fondé à demander l'annulation de la décision implicite par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté son recours dirigé contre la décision du consul général de France à Alger lui refusant un visa de séjour en France ; qu'il y a lieu, dans les circonstance de l'espèce, de prescrire au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration de faire délivrer à M. C un visa de long séjour dans le délai d'un mois à compter de la notification de la présente décision, sous astreinte de 100 € par jour de retard ;

Sur la requête n° 342706 :

Considérant que le Conseil d'Etat ayant prescrit au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration de faire délivrer à M. C un visa de long séjour, les conclusions de cette requête, qui tendent à l'exécution, sous astreinte, de l'ordonnance du 10 avril 2009 par laquelle le juge des référés du Conseil d'Etat a rejeté le recours du ministre de l'intérieur tendant à l'annulation des articles 1er et 2 de l'ordonnance du 23 mars 2009 par lesquels le juge des référés du tribunal administratif de Versailles a, d'une part, suspendu l'exécution de la décision du 21 mars 2009 du préfet de l'Essonne procédant à l'expulsion de M. C, en tant qu'elle fait obstacle au retour de l'intéressé sur le territoire français, et, d'autre part, enjoint aux autorités consulaires françaises en Algérie de prendre toutes mesures de nature à permettre le retour en France de M. C, sont devenues sans objet ; qu'il n'y a, dès lors, plus lieu d'y statuer ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant, qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à M. C, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

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Article 1er : La décision implicite par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours de M. C dirigé contre la décision du consul général de France à Alger en date du 2 décembre 2009 lui refusant un visa d'entrée et de séjour en France est annulée.

Article 2 : Il est enjoint au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration de faire délivrer à M. C un visa de long séjour sur le territoire français dans le délai d'un mois à compter de la date de notification de la présente décision, sous astreinte de 100 € par jour de retard .

Article 3 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte de la requête n° 342706.

Article 4 : L'Etat versera à M. C une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. Larbi C et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration.


Synthèse
Formation : 2ème sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 337992
Date de la décision : 08/02/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 08 fév. 2012, n° 337992
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Edmond Honorat
Rapporteur ?: Mme Sophie-Caroline de Margerie
Rapporteur public ?: M. Damien Botteghi

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2012:337992.20120208
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