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22/02/2012 | FRANCE | N°341877

France | France, Conseil d'État, 4ème sous-section jugeant seule, 22 février 2012, 341877


Vu 1°), sous le n° 341877, la requête, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 26 juillet 2010, présentée par le SYNDICAT NATIONAL DE L'ENSEIGNEMENT SUPERIEUR-FSU (SNESUP-FSU), dont le siège est 78, rue du Faubourg Saint-Denis à Paris (75010) ; le SYNDICAT NATIONAL DE L'ENSEIGNEMENT SUPERIEUR-FSU (SNESUP-FSU) demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret n° 2010-570 du 28 mai 2010 portant diverses dispositions statutaires applicables à certains personnels enseignants et d'éducation relevant du ministre de l'éducation nat

ionale ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euro...

Vu 1°), sous le n° 341877, la requête, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 26 juillet 2010, présentée par le SYNDICAT NATIONAL DE L'ENSEIGNEMENT SUPERIEUR-FSU (SNESUP-FSU), dont le siège est 78, rue du Faubourg Saint-Denis à Paris (75010) ; le SYNDICAT NATIONAL DE L'ENSEIGNEMENT SUPERIEUR-FSU (SNESUP-FSU) demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret n° 2010-570 du 28 mai 2010 portant diverses dispositions statutaires applicables à certains personnels enseignants et d'éducation relevant du ministre de l'éducation nationale ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu 2°), sous le n° 341993, la requête, enregistrée le 29 juillet 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par l'ASSOCIATION SAUVONS LUNIVERSITE, dont le siège est 3, rue du Dessous des Berges à Paris (75013), représentée par son président en exercice, la FEDERATION DES CONSEILS DE PARENTS D'ELEVES DES ECOLES PUBLIQUES (FCPE), dont le siège est 108-110, avenue Ledru-Rollin à Paris (75544 Cedex 11), représentée par son président en exercice, la FEDERATION DES SYNDICATS SUD EDUCATION, dont le siège est 17, boulevard de la Libération à Saint-Denis (93200), représentée par M. Jean Burner, co-secrétaire fédéral, l'ASSOCIATION GENERALE DES ETUDIANTS DE PARIS-SORBONNE, Université Paris-IV, dont le siège est 1, rue Victor Cousin à Paris (75005), représentée par son président en exercice, la FEDERATION DES SYNDICATS SUD-ETUDIANTS, dont le siège est 25-27, rue des Envièrges à Paris (75020), représentée par son porte-parole et le SYNDICAT DES ETUDIANTS DE NANTES, dont le siège est 3, rue Jean Crabosse à Nantes (44000), représentée par son président en exercice ; l'ASSOCIATION SAUVONS LUNIVERSITE et autres demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret n° 2010-570 du 28 mai 2010 portant diverses dispositions statutaires applicables à certains personnels enseignants et d'éducation relevant du ministre de l'éducation nationale ou, à titre subsidiaire, ses articles 1, 2, 6, 10, 12, 13 et 19 et, par voie de conséquence, 22 ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 500 euros à verser à chacun des requérants en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

....................................................................................

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu la Constitution ;

Vu le code de l'éducation ;

Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Hervé Guichon, chargé des fonctions de Maître des Requêtes,

- les conclusions de Mme Gaëlle Dumortier, rapporteur public ;

Considérant que les requêtes enregistrées sous les numéros 341877 et 341993 sont dirigées contre le même décret ; qu'il y a donc lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;

Sur l'intervention :

Considérant que Mme A a intérêt à l'annulation du décret attaqué ; que son intervention est donc recevable ;

Sur la légalité du décret attaqué :

Considérant que le décret attaqué du 28 mai 2010 a pour objet de modifier les statuts particuliers de conseillers principaux d'éducation, des professeurs agrégés de l'enseignement secondaire, des professeurs certifiés, des professeurs d'éducation physique et sportive, des professeurs des écoles et des professeurs de lycée professionnel pour prévoir notamment d'une part que, pour être titularisés, les candidats ayant subi avec succès les épreuves du concours, doivent justifier du certificat de compétences en langues de l'enseignement supérieur et du certificat de compétences en informatique et internet, d'autre part que, lorsqu'il n'en est pas disposé autrement, les conditions requises des candidats pour se présenter aux concours s'apprécient non plus à la date de clôture des inscriptions mais à la date de publication des résultats d'admissibilité aux concours ; que le décret prévoit en outre que les concours internes seront ouverts aux enseignants non titulaires des établissements d'enseignement privé sous contrat d'association ;

En ce qui concerne la légalité externe :

Considérant, en premier lieu, qu'aucune disposition législative ou réglementaire n'imposait ni la consultation du Conseil supérieur de la fonction publique de l'Etat, dès lors que le décret attaqué n'introduit dans les statuts particuliers des personnels intéressés aucune dérogation à une disposition du statut général, ni celle du Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche ; que, par ailleurs, le comité technique paritaire ministériel a été consulté les 10 mars et 19 mai 2010, comme il ressort des visas du décret attaqué ;

Considérant, en deuxième lieu, que l'apposition des contreseings du ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique ainsi que du secrétaire d'Etat chargé de la fonction publique, à supposer même qu'ils n'aient pas été obligatoires, est sans incidence sur la légalité du décret attaqué ;

En ce qui concerne la légalité interne :

S'agissant des dispositions fixant la date à laquelle sont appréciées les conditions requises des candidats pour concourir :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 20 de la loi du 11 janvier 1984 : Les candidats aux concours doivent remplir les conditions générales prévues aux articles 5 et 5 bis du titre Ier du statut général et par le statut particulier du corps auxquels ils postulent au plus tard à la date de la première épreuve du concours ou, s'il s'agit d'un concours comprenant un examen des titres des candidats, à la date de la première réunion du jury chargé de la sélection des dossiers, sauf indications contraires dans le statut particulier du corps concerné ; qu'il résulte des termes mêmes de la loi que le législateur a expressément habilité le pouvoir réglementaire à prévoir une date de vérification des conditions pour être admis à concourir plus tardive que celle de la première épreuve ou de la première réunion du jury ; qu'en disposant que les conditions pour être admis à concourir pour les corps des personnels d'éducation et d'enseignement intéressés s'apprécient à la date de la publication des résultats d'admissibilité aux concours, le décret attaqué n'est pas allé au-delà de ce que prévoient les dispositions de l'article 20 ci-dessus rappelées ; que, par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que ces dispositions seraient entachées d'illégalité ;

S'agissant des dispositions relatives aux enseignants des établissements d'enseignement privés :

Considérant qu'il résulte de l'article L. 914-1 du code de l'éducation que les règles générales qui déterminent notamment les conditions de service des maîtres titulaires de l'enseignement public sont applicables également aux maîtres exerçant dans les établissements d'enseignement privés liés à l'Etat par contrat et que ces derniers bénéficient des mesures de promotion prises en faveur des maîtres de l'enseignement public ; qu'ainsi en prévoyant que les maîtres exerçant dans un établissement d'enseignement privé sous contrat pourront se présenter aux concours internes, le pouvoir réglementaire n'a ni opéré une assimilation entre établissements d'enseignement privés sous contrat et établissements d'enseignement publics ni porté atteinte au principe de laïcité ;

S'agissant des dispositions relatives aux certificats de compétences en langues de l'enseignement supérieur et en informatique et internet :

Considérant, en premier lieu, que le décret attaqué a délégué par des dispositions suffisamment précises au ministre chargé de l'enseignement supérieur le pouvoir de définir les conditions d'attribution des certificats de compétences et au ministre chargé de l'éducation celui d'établir la liste des titres, diplômes, certificats, attestations ou qualifications équivalentes attestant des compétences en langues ou en informatique et internet ;

Considérant, en deuxième lieu, que l'exercice du pouvoir réglementaire implique pour son détenteur la possibilité de modifier à tout moment les normes qu'il définit sans que les personnes auxquelles sont, le cas échéant, imposées de nouvelles contraintes puissent invoquer un droit au maintien de la réglementation existante ; que les auteurs du décret attaqué ont pu ainsi légalement prévoir, s'agissant d'une condition statutaire pour être titularisé et non de la création d'un nouveau mode d'accès à un corps de fonctionnaires, que les lauréats aux concours de recrutement des corps de personnels enseignants ou d'éducation devraient justifier de l'obtention d'un certificat de compétences en langues de l'enseignement supérieur et d'un certificat de compétences en informatique et internet ;

Considérant, en troisième lieu, qu'il résulte des dispositions mêmes du décret attaqué, que, pour être titularisés, tous les lauréats des concours de recrutement intéressés se trouvent soumis à la même condition d'avoir obtenu les certificats de compétences précités, qui ont pour objet de vérifier l'acquisition d'un niveau de compétences dans des matières qui facilitent l'accessibilité aux savoirs et leur diffusion ; que la situation des candidats aux corps enseignants en langues étrangères est différente de celle des candidats des autres disciplines, qui justifie, en raison du niveau de compétences requis dans au moins deux langues étrangères, qu'il ne soit pas exigé de ces candidats le certificat de compétences en langues étrangères de l'enseignement supérieur ; que les moyens tirés de l'atteinte au principe d'égalité et de la violation de l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen ne peuvent dès lors qu'être écartés ;

Considérant, en quatrième lieu, que les dispositions du décret attaqué, qui contrairement à ce qui est soutenu, n'obligent pas à enseigner dans une langue étrangère, ne méconnaissent ni l'article 2 de la Constitution, ni les dispositions de l'article L. 121-3 du code de l'éducation relatifs à l'emploi de la langue française ;

Considérant, en cinquième lieu, qu'en prévoyant que les candidats reçus à un concours externe devront désormais justifier des deux certificats mentionnés pour être nommés fonctionnaires stagiaires et que les candidats à un concours interne devront justifier des mêmes certifications pour être titularisés, les dispositions du décret attaqué ne portent pas atteinte au principe du recrutement par concours fixé par l'article 16 de la loi du 13 juillet 1983 susvisée et ne méconnaissent pas les dispositions des articles 19 et 20 de la loi du 11 janvier 1984 ;

Considérant, en sixième lieu, que, eu égard à la place des échanges internationaux dans les cursus scolaires et universitaires et à l'importance de la maîtrise d'une langue étrangère qui constitue un des objectifs de la politique nationale en vue de la construction de l'espace européen de l'enseignement, le moyen tiré de ce que le décret attaqué serait entaché d'erreur manifeste d'appréciation pour avoir imposé la détention d'un certificat de compétences en langues ne peut qu'être écarté ;

Considérant, en septième lieu, que le décret attaqué ne porte pas atteinte au rôle confié aux Instituts universitaires de formation des maîtres par l'article L. 625-1 du code de l'éducation en ce qu'il ne prévoit pas que ces organismes sont chargés de la délivrance des certificats de compétences précités ;

Considérant enfin, d'une part, que si les requérants soutiennent que les dispositions du décret attaqué, en tant qu'elles exigent des candidats qu'ils justifient des certificats de compétences en langues et en informatique et internet, sont de nature à priver le ministre de la possibilité de pourvoir les postes mis au concours, il n'est pas établi que ces dispositions portent atteinte, par elles mêmes, au principe de continuité du service public ; d'autre part, que la formation en vue d'obtenir les certificats contestés est d'ores et déjà organisée et que la mise en oeuvre des dispositions attaquées n'interviendra qu'en septembre 2012 pour les lauréats du concours externe et en septembre 2013 pour les lauréats du concours interne et du troisième concours ; qu'eu égard à ce qui vient d'être rappelé, le moyen tiré de ce que ces dispositions relatives à l'entrée en vigueur du décret attaqué auraient pour effet d'évincer illégalement certains candidats ne peut qu'être écarté ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les conclusions à fin d'annulation du décret attaqué doivent être rejetées ainsi que, par suite, celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

-------------

Article 1er : L'intervention de Mme A est admise.

Article 2 : Les requêtes du SYNDICAT NATIONAL DE L'ENSEIGNEMENT SUPERIEUR-FSU (SNES-FSU), de l'ASSOCIATION SAUVONS L'UNIVERSITE, de la FEDERATION DES CONSEILS DE PARENTS D'ELEVES DES ECOLES PUBLIQUES, de l'ASSOCIATION GENERALE DES ETUDIANTS DE PARIS-SORBONNE, de la FEDERATION DES SYNDICATS SUD-ETUDIANT et du SYNDICAT DES ETUDIANTS DE NANTES sont rejetées.

Article 3 : La présente décision sera notifiée au SYNDICAT NATIONAL DE L'ENSEIGNEMENT SUPERIEUR-FSU (SNES-FSU), à l'ASSOCIATION SAUVONS L'UNIVERSITE, à la FEDERATION DES CONSEILS DE PARENTS D'ELEVES DES ECOLES PUBLIQUES, à l'ASSOCIATION GENERALE DES ETUDIANTS DE PARIS-SORBONNE, à la FEDERATION DES SYNDICATS SUD-ETUDIANT, au SYNDICAT DES ETUDIANTS DE NANTES, à Mme Louise-Michel A, au Premier Ministre et au ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative.

Copie en sera adressée pour information au ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche, au ministre du travail, de l'emploi et de la santé, à la ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat, porte-parole du Gouvernement et au ministre de la fonction publique.


Synthèse
Formation : 4ème sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 341877
Date de la décision : 22/02/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 22 fév. 2012, n° 341877
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Marc Dandelot
Rapporteur ?: M. Hervé Guichon
Rapporteur public ?: Mme Gaëlle Dumortier

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2012:341877.20120222
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