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22/02/2012 | FRANCE | N°344582

France | France, Conseil d'État, 7ème et 2ème sous-sections réunies, 22 février 2012, 344582


Vu, 1°) sous le n° 344582, la requête enregistrée le 29 novembre 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Eric A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat, d'une part, d'annuler l'arrêté du 5 novembre 2010 du ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique fixant la liste d'aptitude à l'emploi d'administrateur civil établie au titre de l'année 2010 et, d'autre part, de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu, 2°)

sous le n° 345345, la requête enregistrée le 27 décembre 2010 au sec...

Vu, 1°) sous le n° 344582, la requête enregistrée le 29 novembre 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Eric A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat, d'une part, d'annuler l'arrêté du 5 novembre 2010 du ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique fixant la liste d'aptitude à l'emploi d'administrateur civil établie au titre de l'année 2010 et, d'autre part, de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu, 2°) sous le n° 345345, la requête enregistrée le 27 décembre 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Eric A, qui demande au Conseil d'Etat, d'une part, d'annuler le décret du Président de la République du 10 décembre 2010 portant nomination d'administrateurs civils au tour extérieur 2010 et, d'autre part, de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

....................................................................................

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu l'arrêté du 14 juin 2000 fixant, d'une part, les modalités de l'examen des titres professionnels et de l'établissement de la liste d'aptitude à l'emploi d'administrateur civil, d'autre part, l'organisation et le fonctionnement du comité de sélection interministériel prévu à l'article 6 du décret n° 99-945 du 16 novembre 1999 portant statut particulier du corps des administrateurs civils ;

Vu l'arrêté du 9 juillet 2003 relatif à la notation des fonctionnaires du ministère de la défense ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Fabrice Aubert, Auditeur,

- les conclusions de M. Bertrand Dacosta, rapporteur public ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A, ingénieur divisionnaire d'études et de fabrications du ministère de la défense, a présenté sa candidature à la sélection interministérielle des administrateurs civils pour le tour extérieur de l'année 2010 ; que M. A, dont la candidature n'a pas été retenue, conteste d'une part l'arrêté du 5 novembre 2010 du ministre chargé de la fonction publique fixant la liste d'aptitude pour l'accès au grade d'administrateur civil en tant qu'il ne figure pas sur cette liste et, d'autre part, le décret du 27 décembre 2010 du Président de la République portant nomination des administrateurs civils au tour extérieur pour l'année 2010 ;

Considérant que les deux requêtes de M. A présentent à juger des questions liées ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;

Considérant que l'article 2 de l'arrêté du 9 juillet 2003 relatif à la notation des fonctionnaires du ministère de la défense dispose que : " La notation des fonctionnaires du ministère de la défense est constituée des deux éléments suivants : (...) / B) Une note chiffrée définie pour chaque fonctionnaire à partir d'une note de référence se rapportant à son grade dans le corps et à son échelon, précisée par un barème de notation (...) " ; que l'article 6 de l'arrêté du 14 juin 2000 fixant les modalités d'établissement de la liste d'aptitude à l'emploi d'administrateur civil et l'organisation et le fonctionnement du comité de sélection interministériel, dans sa rédaction applicable au présent litige, dispose quant à lui que : " Pour chaque candidat, les administrations intéressées constituent un dossier, le cas échéant, en liaison avec les administrations auprès desquelles l'agent est détaché ou dont il relève pour l'exercice de ses fonctions. Elles produisent les notes qu'il a obtenues au titre des dix dernières années ainsi qu'une appréciation motivée et circonstanciée sur sa manière de servir, sur les emplois qu'il a occupés, sur ses aptitudes à exercer les fonctions d'administrateur civil et sur le genre de tâche qu'il semble le mieux à même d'assumer. " ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A, entré au service comme inspecteur des transmissions, a été détaché en 2001 dans le corps des ingénieurs d'études et de fabrications du ministère de la défense, corps dans lequel il a été titularisé contre sa volonté à compter de septembre 2002 ; que par jugement du 18 mai 2006 devenu définitif, le tribunal administratif de Marseille a, à la demande de M. A, annulé la décision de titularisation le concernant et a enjoint au ministre de la défense de le réintégrer rétroactivement dans le corps des inspecteurs des transmissions ; qu'en conséquence de ce jugement, le ministre de la défense a, par arrêté du 6 août 2007, reclassé rétroactivement M. A au grade d'inspecteur principal des transmissions, l'intéressé ayant réussi l'examen professionnel d'accès à ce grade dès 2002, puis au grade équivalent d'ingénieur divisionnaire d'études et de fabrications à compter de l'absorption du corps des inspecteurs des transmissions dans celui des ingénieurs d'études et de fabrications, intervenue en 2005 ;

Considérant que M. A soutient qu'il appartenait au ministre de la défense de tirer toutes les conséquences de son reclassement, en modifiant ses notes chiffrées pour les faire correspondre aux notes de référence de ses nouveaux corps et grades d'appartenance, supérieures aux notes de référence des ingénieurs d'études et de fabrications en regard desquelles il avait été, et continuait d'être évalué, et qu'en communiquant ses notes chiffrées non rectifiées au comité de sélection des administrateurs civils, l'administration a méconnu le principe d'égalité entre les candidats ; que si l'administration n'était pas tenue de modifier les notes de l'intéressé pour ses années de service réalisées en qualité d'ingénieur d'études et de fabrication, la note chiffrée d'un agent ne pouvant être attribuée qu'au vu du service accompli, elle ne pouvait se dispenser de noter M. A, postérieurement à sa réintégration effective au grade d'ingénieur divisionnaire d'études et de fabrication, en se référant à la méthode de notation des agents de son grade, ce qu'elle n'a pas fait en l'espèce ;

Considérant, toutefois, qu'il ressort des pièces du dossier que le comité de sélection a été informé, à la fois dans les documents fournis par l'administration et dans ceux présentés par le requérant, de l'existence du jugement du tribunal administratif de Marseille et de la décision de reclassement dont l'intéressé a fait l'objet ; qu'il ne pouvait donc se méprendre sur la valeur des notes chiffrées de M. A à compter de 2002 ; qu'en tout état de cause, il résulte des dispositions de l'arrêté du 14 juin 2000 précité et du rapport du comité de sélection que les notes chiffrées ne constituent qu'un élément parmi de nombreux autres dans l'appréciation de la valeur des candidatures, le comité pouvant notamment s'appuyer sur les appréciations littérales complétant ces notes chiffrées, sur les évaluations spécialement remplies par la hiérarchie de chaque candidat en vue de la procédure de sélection, ainsi que sur l'ensemble des éléments de motivation et de parcours professionnel exposés par les postulants ; que, par ailleurs, le comité de sélection ne disposait pas des notes de référence ni des fourchettes de notation des corps et grades donnant accès à la procédure du tour extérieur des administrateurs civils, et ne pouvait fonder de façon déterminante sa décision sur une comparaison des notes chiffrées de M. A avec celles des autres candidats ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la transmission des notes non rectifiées de M. A au comité de sélection du tour extérieur ne peut être regardée comme ayant exercé une influence sur la décision attaquée de ne pas l'inscrire sur la liste d'aptitude des administrateurs civils ; que, par suite, M. A n'est pas fondé à demander l'annulation de cette décision au motif que l'administration aurait méconnu le principe d'égalité entre les candidats ;

Considérant que si M. A soutient que l'administration a omis de mentionner, dans son dossier de candidature, sa réussite à l'examen professionnel du principalat ainsi que son expérience antérieure à son entrée au ministère de la défense, il ressort des pièces du dossier que ces éléments figuraient dans les pièces fournies par le candidat lui-même ; que le moyen tiré de l'inexacte retranscription de son déroulé de carrière à compter de 2002 dans les documents fournis par l'administration manque en fait ; que la circonstance que le ministère de la défense a modifié la présentation de son curriculum vitae ne saurait quant à elle avoir eu d'incidence sur l'appréciation portée par le comité sur les mérites de l'intéressé ;

Considérant enfin que M. A ne peut utilement se prévaloir de ce que son supérieur hiérarchique aurait porté, dans la fiche d' " avis sur le candidat " jointe à son dossier, une appréciation de ses mérites contradictoire avec l'appréciation littérale, plus élogieuse, accompagnant sa note annuelle pour 2009, ces deux évaluations portant sur des éléments différents, l'avis global rendu par la hiérarchie de M. A sur sa candidature pour l'accès au grade d'administrateur civil ne pouvant se limiter à une évaluation de sa manière de servir durant l'année écoulée ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les conclusions de M. A tendant à l'annulation de l'arrêté du 5 novembre 2010 fixant la liste d'aptitude à l'emploi d'administrateur civil doivent être rejetées, et par voie de conséquence sa requête dirigée contre le décret du Président de la République du 10 décembre 2010 ;

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement à M. A d'une somme au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

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Article 1er : Les requêtes de M. A sont rejetées.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Eric A, au Premier ministre, à la ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat, porte-parole du Gouvernement et au ministre de la défense et des anciens combattants.


Synthèse
Formation : 7ème et 2ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 344582
Date de la décision : 22/02/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

FONCTIONNAIRES ET AGENTS PUBLICS - NOTATION ET AVANCEMENT - NOTATION - ANNULATION CONTENTIEUSE DE LA TITULARISATION DANS UN CORPS DE DÉTACHEMENT ET RECLASSEMENT RÉTROACTIF DANS LE CORPS D'ORIGINE - CONSÉQUENCE SUR LA NOTATION - 1) OBLIGATION POUR L'ADMINISTRATION DE RECTIFIER LA NOTATION POUR LA PÉRIODE COMPRISE ENTRE LA TITULARISATION ILLÉGALE ET SON ANNULATION EN SE RÉFÉRANT À LA MÉTHODE DE NOTATION DU CORPS D'ORIGINE - ABSENCE - 2) OBLIGATION POUR L'ADMINISTRATION DE SUIVRE LES MÉTHODES DE NOTATION DU CORPS D'ORIGINE APRÈS LA RÉINTÉGRATION EFFECTIVE - EXISTENCE.

36-06-01 1) Le reclassement rétroactif d'un agent public dans son corps d'origine à la suite de l'annulation contentieuse de sa titularisation dans son corps de détachement n'oblige pas l'administration à modifier les notes de l'intéressé, en se référant à la méthode de notation du corps d'origine, pour la période comprise entre la titularisation illégale et son annulation, la note chiffrée d'un agent ne pouvant être attribuée qu'au vu du service accompli. 2) En revanche, l'administration ne peut, en pareil cas, se dispenser de noter l'intéressé, postérieurement à sa réintégration effective dans son corps d'origine, en se référant à la méthode de notation des agents de son grade.

FONCTIONNAIRES ET AGENTS PUBLICS - CONTENTIEUX DE LA FONCTION PUBLIQUE - EFFETS DES ANNULATIONS - RECONSTITUTION DE CARRIÈRE - ANNULATION CONTENTIEUSE DE LA TITULARISATION DANS UN CORPS DE DÉTACHEMENT ET RECLASSEMENT RÉTROACTIF DANS LE CORPS D'ORIGINE - CONSÉQUENCE SUR LA NOTATION - 1) OBLIGATION POUR L'ADMINISTRATION DE RECTIFIER LA NOTATION POUR LA PÉRIODE COMPRISE ENTRE LA TITULARISATION ILLÉGALE ET SON ANNULATION EN SE RÉFÉRANT À LA MÉTHODE DE NOTATION DU CORPS D'ORIGINE - ABSENCE - 2) OBLIGATION POUR L'ADMINISTRATION DE SUIVRE LES MÉTHODES DE NOTATION DU CORPS D'ORIGINE APRÈS LA RÉINTÉGRATION EFFECTIVE - EXISTENCE.

36-13-02-01 1) Le reclassement rétroactif d'un agent public dans son corps d'origine à la suite de l'annulation contentieuse de sa titularisation dans son corps de détachement n'oblige pas l'administration à modifier les notes de l'intéressé, en se référant à la méthode de notation du corps d'origine, pour la période comprise entre la titularisation illégale et son annulation, la note chiffrée d'un agent ne pouvant être attribuée qu'au vu du service accompli. 2) En revanche, l'administration ne peut, en pareil cas, se dispenser de noter l'intéressé, postérieurement à sa réintégration effective dans son corps d'origine, en se référant à la méthode de notation des agents de son grade.

PROCÉDURE - JUGEMENTS - EXÉCUTION DES JUGEMENTS - EFFETS D'UNE ANNULATION - CONTENTIEUX DE LA FONCTION PUBLIQUE - ANNULATION CONTENTIEUSE DE LA TITULARISATION DANS UN CORPS DE DÉTACHEMENT ET RECLASSEMENT RÉTROACTIF DANS LE CORPS D'ORIGINE - CONSÉQUENCE SUR LA NOTATION - 1) OBLIGATION POUR L'ADMINISTRATION DE RECTIFIER LA NOTATION POUR LA PÉRIODE COMPRISE ENTRE LA TITULARISATION ILLÉGALE ET SON ANNULATION EN SE RÉFÉRANT À LA MÉTHODE DE NOTATION DU CORPS D'ORIGINE - ABSENCE - 2) OBLIGATION POUR L'ADMINISTRATION DE SUIVRE LES MÉTHODES DE NOTATION DU CORPS D'ORIGINE APRÈS LA RÉINTÉGRATION EFFECTIVE - EXISTENCE.

54-06-07-005 1) Le reclassement rétroactif d'un agent public dans son corps d'origine à la suite de l'annulation contentieuse de sa titularisation dans son corps de détachement n'oblige pas l'administration à modifier les notes de l'intéressé, en se référant à la méthode de notation du corps d'origine, pour la période comprise entre la titularisation illégale et son annulation, la note chiffrée d'un agent ne pouvant être attribuée qu'au vu du service accompli. 2) En revanche, l'administration ne peut, en pareil cas, se dispenser de noter l'intéressé, postérieurement à sa réintégration effective dans son corps d'origine, en se référant à la méthode de notation des agents de son grade.


Publications
Proposition de citation : CE, 22 fév. 2012, n° 344582
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Philippe Martin
Rapporteur ?: M. Fabrice Aubert
Rapporteur public ?: M. Bertrand Dacosta

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2012:344582.20120222
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