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06/04/2012 | FRANCE | N°353835

France | France, Conseil d'État, 1ère sous-section jugeant seule, 06 avril 2012, 353835


Vu la requête, enregistrée le 3 novembre 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Jerôme B, demeurant ... ; M. B demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement n° 1101735 du 4 octobre 2011 du tribunal administratif de Versailles en tant qu'il a, à la demande de M. François A, annulé, à son article 1er, les opérations électorales qui se sont déroulées les 20 et 27 mars 2011 pour l'élection du conseiller général dans le canton de Montlhéry (Essonne) ;

2°) de rejeter la protestation de M. A ;

3°) de mettre à la cha

rge de M. A le versement de la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du co...

Vu la requête, enregistrée le 3 novembre 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Jerôme B, demeurant ... ; M. B demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement n° 1101735 du 4 octobre 2011 du tribunal administratif de Versailles en tant qu'il a, à la demande de M. François A, annulé, à son article 1er, les opérations électorales qui se sont déroulées les 20 et 27 mars 2011 pour l'élection du conseiller général dans le canton de Montlhéry (Essonne) ;

2°) de rejeter la protestation de M. A ;

3°) de mettre à la charge de M. A le versement de la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 27 mars 2012, présentée par M. A ;

Vu le code électoral ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Pascal Trouilly, Maître des Requêtes,

- les conclusions de Mme Maud Vialettes, rapporteur public ;

Considérant que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a annulé, à la demande de M. A, les opérations électorales qui se sont déroulées les 20 et 27 mars 2011 pour l'élection du conseiller général dans le canton de Montlhéry (Essonne), aux motifs, d'une part, que M. B, candidat élu, avait procédé à des affichages irréguliers, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 51 du code électoral, et, d'autre part, que la diffusion d'une publication, l'avant-veille du scrutin, par l'association " Mieux vivre à Linas " correspondait à un don en faveur de M. B, prohibé par l'article L. 52-8 du même code ; que M. B fait appel de ce jugement en tant qu'il a annulé les opérations électorales ;

Considérant que M. B a justifié du mandat donné à son mandataire ; que, par suite, la fin de non-recevoir opposée par M. A doit être écartée ;

Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 52-8 du code électoral : " (...) Les personnes morales, à l'exception des partis ou groupements politiques, ne peuvent participer au financement de la campagne électorale d'un candidat, ni en lui consentant des dons sous quelque forme que ce soit, ni en lui fournissant des biens, services ou autres avantages directs ou indirects à des prix inférieurs à ceux qui sont habituellement pratiqués (...) " ; que l'association " Mieux vivre à Linas " a procédé à la diffusion, le 25 mars 2011, du premier numéro d'une publication intitulée " Le petit Linois " ; que ce numéro comporte plusieurs articles critiquant le bilan de M. A, conseiller général sortant et maire de Linas, et reproduit des extraits d'un entretien avec M. B, réalisé quelques jours auparavant et publié sur le site internet de l'association ; que, toutefois, il ne résulte pas de l'instruction que des liens existeraient entre cette association et M. B, ni que ce dernier aurait été à l'instigation de la publication de ce numéro ou même, aurait donné son accord à cette publication ; que, par ailleurs, si cette dernière indiquait que M. B était candidat, elle n'appelait pas expressément à voter en sa faveur ; que, dans ces conditions, l'édition et la distribution de cette publication ne peuvent, contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, être regardées comme caractérisant un don au sens des dispositions précitées de l'article L. 52-8 du code électoral ;

Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article L. 51 du code électoral : " Pendant la durée de la période électorale, dans chaque commune, des emplacements spéciaux sont réservés par l'autorité municipale pour l'apposition des affiches électorales. / Dans chacun de ces emplacements, une surface égale est attribuée à chaque candidat ou à chaque liste de candidats. / Pendant les trois mois précédant le premier jour du mois d'une élection et jusqu'à la date du tour de scrutin où celle-ci est acquise, tout affichage relatif à l'élection, même par affiches timbrées, est interdit en dehors de cet emplacement ou sur l'emplacement réservé aux autres candidats. " ; qu'il résulte de l'instruction, notamment d'un rapport de police municipale et des attestations et photographies produites par M. A, que des affiches en faveur de M. B ont été apposées en dehors des emplacements prévus à cet effet et que cet affichage irrégulier a présenté un caractère massif et prolongé, sans aucune mesure avec les affichages irréguliers en faveur de M. A ; que, toutefois, compte tenu de l'écart de voix entre les deux candidats au second tour, cet affichage irrégulier ne peut être regardé comme ayant altéré les résultats du scrutin ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est à tort que le tribunal administratif a retenu, pour annuler les opérations électorales, les deux griefs analysés ci-dessus ;

Considérant toutefois qu'il y a lieu pour le Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres griefs soulevés par M. A devant le tribunal administratif et le Conseil d'Etat ;

Considérant, en premier lieu, que l'article L. 48 du code électoral dispose que " les affiches des actes émanés de l'autorité seront seules imprimées sur papier blanc " ; que s'il est constant que des affiches en faveur de M. B ont été imprimées sur papier blanc, il ne résulte pas de l'instruction que cette circonstance aurait, dans les circonstances de l'espèce, induit les électeurs en erreur ou donné à cette candidature un caractère officiel ; que le grief doit ainsi être écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, que, si M. A reproche à M. B d'avoir distribué le 25 mars 2011 un tract qui comporterait de nombreuses " allégations mensongères, voire calomnieuses ", et s'il soutient que la distribution du " Petit Linnois ", précédée de la publication d'une interview sur le site internet de l'association " Mieux vivre à Linas ", aurait altéré la sincérité du scrutin, il ne résulte pas de l'instruction que le tract excédait les limites de la propagande électorale, ni que la distribution du " Petit Linnois " aurait correspondu à une manoeuvre de la part de M. B ;

Considérant, enfin, que dans sa protestation formée devant le tribunal administratif de Versailles, M. A s'est borné à soutenir que " la nature et le volume des frais engagés par M. B dans le but de sa campagne électorale sont non conformes à la réglementation " ; qu'il n'a assorti de précisions ce grief que dans un mémoire complémentaire produit devant le tribunal après l'expiration du délai de protestation ; que, par suite, le grief tiré de l'irrégularité du compte de campagne de M. A, soulevé à nouveau en appel, est irrecevable ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B est fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'article 1er du jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a annulé les opérations électorales ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit à ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; que, par ailleurs, les conclusions présentées au titre des mêmes dispositions par M. A, partie perdante dans la présente instance, ne peuvent qu'être rejetées ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'article 1er du jugement n° 1101735 du 4 octobre 2011 du tribunal administratif de Versailles est annulé.

Article 2 : La protestation présentée par M. A devant le tribunal administratif de Versailles est rejetée.

Article 3 : Les conclusions présentées par les parties au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. Jérôme B et à M. François A.

Copie en sera adressée pour information au ministre de l'intérieur, de l'outre mer, des collectivités territoriales et de l'immigration et à la commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques.


Synthèse
Formation : 1ère sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 353835
Date de la décision : 06/04/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 06 avr. 2012, n° 353835
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Christophe Chantepy
Rapporteur ?: M. Pascal Trouilly
Rapporteur public ?: Mme Maud Vialettes

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2012:353835.20120406
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