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04/06/2012 | FRANCE | N°337996

France | France, Conseil d'État, 4ème sous-section jugeant seule, 04 juin 2012, 337996


Vu le pourvoi sommaire et les mémoires complémentaires, enregistrés les 26 mars, 1er juin et 25 juin 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme Michèle A, demeurant au ... ; Mme A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n°s 07MA05044-09MA00115 du 26 janvier 2010 de la cour administrative d'appel de Marseille en tant qu'il a rejeté, d'une part, certaines conclusions de sa requête d'appel tendant à la réformation du jugement n° 0203102 du 28 septembre 2007 du tribunal administratif de Nice, d'autre part, sa demande d'exécution du ju

gement n° 0203102 du 28 septembre 2007 du même tribunal ;

2°) régla...

Vu le pourvoi sommaire et les mémoires complémentaires, enregistrés les 26 mars, 1er juin et 25 juin 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme Michèle A, demeurant au ... ; Mme A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n°s 07MA05044-09MA00115 du 26 janvier 2010 de la cour administrative d'appel de Marseille en tant qu'il a rejeté, d'une part, certaines conclusions de sa requête d'appel tendant à la réformation du jugement n° 0203102 du 28 septembre 2007 du tribunal administratif de Nice, d'autre part, sa demande d'exécution du jugement n° 0203102 du 28 septembre 2007 du même tribunal ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à l'ensemble des conclusions de sa requête d'appel et de sa demande d'exécution ;

3°) d'enjoindre au ministre de l'éducation nationale d'exécuter la décision à intervenir dans un délai de deux mois à compter de la notification de cette décision, et ce sous une astreinte de 500 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 11 mai 2012, présentée pour Mme A ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Bethânia Gaschet, Maître des Requêtes,

- les observations de Me Le Prado, avocat de Mme A,

- les conclusions de M. Rémi Keller, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée Me Le Prado, avocat de Mme A,

Considérant qu'après qu'un arrêt du 13 janvier 1998 de la cour administrative d'appel de Marseille eut annulé les arrêtés du recteur de l'académie de Nice plaçant Mme A en disponibilité d'office du 4 mai 1987 au 4 octobre 1993 et la reclassant, à la suite de sa réintégration dans le corps des professeurs de l'enseignement général de collège, au 6e échelon de la classe normale à compter du 1er novembre 1993, le recteur a pris le 15 mars 2002 un nouvel arrêté reclassant Mme A ; que, sur requête de celle-ci, le tribunal administratif de Nice a, par un jugement du 28 septembre 2007, annulé cet arrêté et fait partiellement droit aux conclusions de la requérante tendant à la réparation des préjudices causés par sa mise en disponibilité d'office illégale ; que Mme A ayant, d'une part, interjeté appel de ce jugement en tant qu'il ne faisait pas droit à l'ensemble de ses demandes, d'autre part, formé une demande d'exécution de ce même jugement sur le fondement de l'article L. 911-4 du code de justice administrative, la cour administrative d'appel de Marseille a, par un arrêt du 26 janvier 2010, partiellement fait droit à ses conclusions d'appel et rejeté sa demande d'exécution ; que Mme A se pourvoit en cassation contre cet arrêt en tant qu'il ne lui a pas entièrement fait droit ;

Sur l'arrêt attaqué en tant qu'il se prononce sur les préjudices subis par Mme A et sur le montant de l'indemnité accordée :

En ce qui concerne le préjudice tenant à une perte de revenus :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article premier du décret du 15 janvier 1993 instituant une indemnité de suivi et d'orientation des élèves en faveur des personnels enseignants du second degré : " Une indemnité de suivi et d'orientation des élèves non soumise à retenues pour pensions est allouée aux personnels enseignants du second degré exerçant dans les établissements scolaires du second degré ou affectés au Centre national d'enseignement à distance. / Cette indemnité comprend une part fixe à laquelle peut s'ajouter une part modulable. " ; qu'aux termes de l'article 2 de ce décret : " La part fixe est allouée aux personnels enseignants désignés à l'article 1er ci-dessus, ainsi qu'aux enseignants des classes post-baccalauréat. / L'attribution de cette part est liée à l'exercice effectif des fonctions enseignantes y ouvrant droit, en particulier au suivi individuel et à l'évaluation des élèves, comprenant notamment la notation et l'appréciation de leur travail et la participation aux conseils de classe " ; qu'il résulte de ces dispositions que la prime de suivi et d'orientation, y compris sa part fixe, ne peut être attribuée qu'aux professeurs exerçant effectivement leurs fonctions d'enseignant dans un établissement scolaire du second degré ou au Centre national d'enseignement à distance ; que, par suite, cette prime n'étant pas attribuée à tous les professeurs, mais dépendant de leur affectation, la cour a pu en déduire sans commettre d'erreur de droit que la requérante n'avait pas subi un préjudice certain lié à une perte de revenus correspondant au montant de cette prime ;

Considérant, en deuxième lieu, que la cour, qui a suffisamment motivé son arrêt sur ce point, n'était pas tenue de faire droit à la demande de la requérante tendant à ce qu'il soit recouru à un expert pour chiffrer l'ensemble de son préjudice tenant à une perte de revenus, qui a été précisément défini dans le dispositif de l'arrêt attaqué ;

Considérant, enfin, que le moyen tiré d'une erreur de droit qu'aurait commise la cour en fixant le 4 mai 1987 et non le 1er octobre 1975 comme point de départ de la reconstitution de carrière de Mme A n'est pas assorti des précisions suffisantes permettant d'en apprécier le bien-fondé ;

En ce qui concerne les autres préjudices allégués :

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond qu'en première instance, la requérante avait produit la lettre datée du 26 décembre 1994 par laquelle elle avait demandé au ministre de l'éducation nationale de l'indemniser non seulement de la perte de ses revenus entre le 4 mai 1987 et le 5 octobre 1993, mais aussi des frais médicaux et des autres dommages subis en raison de sa mise en disponibilité d'office illégale, pour un total de 1 039 311,90 francs ; que, par suite, la cour administrative d'appel de Marseille n'a pu sans dénaturer les pièces du dossier qui lui était soumis estimer que Mme A n'avait pas présenté de demandes préalables à l'administration concernant les préjudices matériels et moraux autres que le préjudice lié à une perte de revenus ;

Considérant, en revanche, que la cour n'a pas dénaturé les pièces du dossier qui lui était soumis en estimant que les conclusions de Mme A tendant à la réparation du préjudice subi du fait d'une perte de revenus entre le 4 octobre 1993 et le 30 juin 2007 étaient irrecevables faute d'avoir fait l'objet d'une demande préalable ;

Sur l'arrêt attaqué en tant qu'il se prononce sur les intérêts et la capitalisation des intérêts :

Considérant que, si la cour a jugé qu'il y avait lieu de retenir, comme point de départ des intérêts, le 28 décembre 1994, date de réception par l'administration de la lettre du 26 décembre 1994 de Mme A, il ressort des pièces du dossier qui lui était soumis que la première demande indemnitaire de l'intéressée est datée du 6 mai 1988 et a été reçue le 9 du même mois par l'administration ; qu'ainsi, la requérante est fondée à soutenir que la cour a dénaturé sur ce point les pièces du dossier ; qu'en revanche, la cour n'a pas dénaturé les pièces du dossier qui lui était soumis en estimant qu'aucune demande de capitalisation des intérêts n'avait été formulée avant le 9 août 2007 ;

Sur l'arrêt attaqué en tant qu'il se prononce sur la demande d'exécution du jugement du 28 septembre 2007 du tribunal administratif de Nice :

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que, suite au jugement du 28 septembre 2007 du tribunal administratif de Nice renvoyant Mme A devant l'administration pour la fixation du montant de l'indemnisation qui lui était due et pour sa liquidation, Mme A a perçu une indemnisation d'un montant de 106 639 euros ; que la contestation par Mme A, devant la cour administrative d'appel de Marseille, du montant de cette indemnisation, soulevait un litige distinct de celui relatif à l'exécution du jugement du 28 septembre 2007 ; que, par suite, la cour administrative d'appel n'a pas commis d'erreur de droit en jugeant que le jugement du 28 septembre 2007 avait été entièrement exécuté ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède qu'il y a lieu d'annuler l'article 3 de l'arrêt attaqué en tant qu'il fait partir les intérêts du 28 décembre 1994 et son article 5 en tant qu'il rejette les conclusions d'appel de Mme A tendant à ce que l'Etat soit condamné à réparer les préjudices matériels et moraux qu'elle soutient avoir subis en plus de la perte de revenus ; qu'il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à Mme A au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'article 3 de l'arrêt du 26 janvier 2010 de la cour administrative d'appel de Marseille est annulé en tant qu'il fait partir les intérêts à compter du 28 décembre 1994. L'article 5 du même arrêt est annulé en tant qu'il rejette les conclusions d'appel de Mme A tendant à ce que l'Etat soit condamné à réparer les préjudices matériels et moraux qu'elle soutient avoir subis en plus de la perte de revenus entre le 4 mai 1987 et le 4 octobre 1993.

Article 2 : L'affaire est renvoyée, dans la limite de la cassation ainsi prononcée, à la cour administrative d'appel de Marseille.

Article 3 : L'Etat versera à Mme A la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions du pourvoi de Mme A est rejeté.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à Mme Michèle et au ministre de l'éducation nationale.


Synthèse
Formation : 4ème sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 337996
Date de la décision : 04/06/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 04 jui. 2012, n° 337996
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Marc Dandelot
Rapporteur ?: Mme Bethânia Gaschet
Rapporteur public ?: M. Rémi Keller
Avocat(s) : LE PRADO

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2012:337996.20120604
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