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26/09/2012 | FRANCE | N°347062

France | France, Conseil d'État, 3ème et 8ème sous-sections réunies, 26 septembre 2012, 347062


Vu la requête sommaire, le mémoire complémentaire et les nouveaux mémoires, enregistrés les 25 février, 25 mai, 20 juin et 30 juin 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la Coordination rurale-Union nationale, dont le siège est 1, impasse Marc Chagall, BP 50590 à Auch (32022) ; la Coordination rurale-Union nationale demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret n° 2010-1753 du 30 décembre 2010 pris pour l'application de l'article L. 631-24 du code rural et de la pêche maritime dans le secteur laitier ;

) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'artic...

Vu la requête sommaire, le mémoire complémentaire et les nouveaux mémoires, enregistrés les 25 février, 25 mai, 20 juin et 30 juin 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la Coordination rurale-Union nationale, dont le siège est 1, impasse Marc Chagall, BP 50590 à Auch (32022) ; la Coordination rurale-Union nationale demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret n° 2010-1753 du 30 décembre 2010 pris pour l'application de l'article L. 631-24 du code rural et de la pêche maritime dans le secteur laitier ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le traité sur l'Union européenne ;

Vu le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et son premier protocole additionnel ;

Vu le règlement (CE) n° 1234/2007 du Conseil du 22 octobre 2007 ;

Vu le code civil ;

Vu le code rural et de la pêche maritime ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Christophe Pourreau, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Célice, Blancpain, Soltner, avocat de la Coordination rurale-Union nationale,

- les conclusions de M. Vincent Daumas, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Célice, Blancpain, Soltner, avocat de la Coordination rurale ;

1. Considérant qu'aux termes du I de l'article L. 631-24 du code rural et de la pêche maritime, issu de l'article 12 de la loi du 27 juillet 2010 de modernisation de l'agriculture et de la pêche : " I. - La conclusion de contrats de vente écrits entre producteurs et acheteurs, ou entre opérateurs économiques mentionnés au premier alinéa de l'article L. 551-1, propriétaires de la marchandise, et acheteurs, peut être rendue obligatoire pour les produits agricoles destinés à la revente ou à la transformation. / Ces contrats écrits comportent des clauses relatives à la durée du contrat, aux volumes et aux caractéristiques des produits à livrer, aux modalités de collecte ou de livraison des produits, aux critères et modalités de détermination du prix, aux modalités de paiement et aux modalités de révision et de résiliation du contrat ou au préavis de rupture. Ces clauses prévoient l'interdiction, pour les acheteurs, de retourner aux producteurs ou aux opérateurs économiques mentionnés au premier alinéa les produits qu'ils ont acceptés lors de la livraison ; cette interdiction ne s'applique pas en cas de non-conformité des produits à des normes légales ou réglementaires. Sauf stipulations contraires, ces contrats sont renouvelables par tacite reconduction pour une période équivalente à celle pour laquelle ils ont été conclus. / Ils peuvent être rendus obligatoires : / a) Par extension ou homologation d'un accord interprofessionnel, dans les conditions définies aux articles L. 631-10, L. 632-3, L. 632-4 et L. 632-12 ; / b) Ou, si aucun accord interprofessionnel ayant le même objet n'a été étendu ou homologué, par un décret en Conseil d'Etat. / L'accord interprofessionnel mentionné au a ou le décret en Conseil d'Etat mentionné au b fixe, par produit ou catégorie de produits et par catégorie d'acheteurs, la durée minimale du contrat qui est de un à cinq ans, ainsi que les modes de commercialisation pour lesquels une durée inférieure est admise. [...] " ; que la Coordination rurale-Union nationale demande l'annulation pour excès de pouvoir du décret du 30 décembre 2010 pris pour l'application de l'article L. 631-24 du code rural et de la pêche maritime dans le secteur laitier, qui rend obligatoire, pour tout achat de lait de vache livré sur le territoire français à compter du 1er avril 2011, la conclusion de contrats de vente écrits entre producteurs et acheteurs, sur la base de propositions écrites des acheteurs, et énumère les clauses devant impérativement figurer dans ces contrats ;

2. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte du droit de l'Union européenne, tel qu'interprété par la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne, qu'en présence d'un règlement portant organisation commune des marchés, les Etats membres doivent s'abstenir de toute mesure unilatérale qui relève de la compétence de l'Union, même si cette mesure est de nature à servir de soutien à la politique agricole commune ; que ce n'est que dans l'hypothèse où ce règlement ne serait pas exhaustif ou réserverait expressément aux Etats membres la faculté d'intervenir dans le secteur que ces derniers seraient compétents pour adopter des mesures dans les domaines non régis par le règlement ou qui leur seraient réservés ; que, dans cette hypothèse, les Etats membres doivent s'abstenir d'adopter, soit directement, soit par l'intermédiaire d'un organisme habilité à cet effet, toute mesure unilatérale qui serait de nature soit à déroger ou à porter atteinte à ce règlement, soit à faire obstacle au bon fonctionnement de l'organisation commune des marchés ;

3. Considérant que, pour le secteur laitier, le règlement n° 1234/2007 du Conseil du 22 octobre 2007 portant organisation commune des marchés dans le secteur agricole et dispositions spécifiques en ce qui concerne certains produits de ce secteur (règlement " OCM unique "), dans sa rédaction applicable à la date d'entrée en vigueur du décret attaqué, qui prévoit notamment des règles en matière de soutien des prix, d'organisation des campagnes de commercialisation, d'aide au stockage, de quotas de production, de droits à l'importation et de restitutions à l'exportation ainsi que de concurrence, ne peut être regardé comme exhaustif et laisse aux Etats membres, dans le cadre de leur propre droit des contrats, la possibilité d'adopter des mesures relatives aux contrats de vente entre producteurs et acheteurs de lait de vache, dès lors qu'elles ne portent atteinte ni aux dispositions du règlement, ni au bon fonctionnement de l'organisation commune des marchés ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le décret attaqué serait illégal au motif qu'il interviendrait dans une matière régie par le règlement (CE) n° 1234/2007 du Conseil du 22 octobre 2007 ne peut qu'être écarté ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 34 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne : " Les restrictions quantitatives à l'importation ainsi que toutes mesures d'effet équivalent, sont interdites entre les États membres. " ; que les dispositions du décret attaqué, qui, ainsi qu'il a été dit au point 1, régissent les relations contractuelles entre producteurs et acheteurs de lait de vache livré sur le territoire français à compter du 1er avril 2011, s'appliquent à tous les opérateurs exerçant leur activité sur le territoire français et affectent de la même manière, en droit et en fait, la commercialisation des produits nationaux et celle des produits en provenance d'autres Etats membres ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le décret attaqué méconnaîtrait les stipulations de l'article 34 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ne peut qu'être écarté ;

5. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 35 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne : " Les restrictions quantitatives à l'exportation, ainsi que toutes mesures d'effet équivalent, sont interdites entre les États membres. " ; que le décret attaqué ne régit que les relations contractuelles entre producteurs et acheteurs de lait de vache livré sur le territoire français ; qu'il n'a ni pour objet, ni pour effet de favoriser la commercialisation de ce produit sur le marché français au détriment de sa commercialisation dans d'autres Etats membres ; que, par suite, le moyen tiré de ce qu'il méconnaîtrait les stipulations de l'article 35 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne doit être écarté ;

6. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article 101 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne : " 1. Sont incompatibles avec le marché intérieur et interdits tous accords entre entreprises, toutes décisions d'associations d'entreprises et toutes pratiques concertées, qui sont susceptibles d'affecter le commerce entre États membres et qui ont pour objet ou pour effet d'empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence à l'intérieur du marché intérieur, et notamment ceux qui consistent à : / a) fixer de façon directe ou indirecte les prix d'achat ou de vente ou d'autres conditions de transaction, [...]. " ; qu'ainsi qu'il a été interprété par la Cour de justice de l'Union européenne, s'il concerne le comportement des entreprises et ne vise pas les mesures législatives ou réglementaires émanant des Etats membres, cet article, lu en combinaison avec l'article 4, paragraphe 3 du traité sur l'Union européenne, impose aux Etats de ne pas prendre ou maintenir en vigueur des mesures, même de nature législative ou réglementaire, susceptibles d'éliminer son effet utile à l'égard des entreprises ; que constitue notamment une telle mesure tout acte par lequel un Etat membre impose ou favorise la conclusion d'ententes contraires à l'article 101 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;

7. Considérant qu'aux termes de l'article L. 632-14 du code rural et de la pêche maritime : " Le centre national interprofessionnel de l'économie laitière peut élaborer et diffuser des indices de tendance, notamment prévisionnels, des marchés laitiers, ainsi que tout élément de nature à éclairer la situation des acteurs de la filière laitière. / Les centres régionaux interprofessionnels de l'économie laitière peuvent élaborer et diffuser des valeurs qui entrent dans la composition du prix de cession du lait aux collecteurs ou aux transformateurs, en s'appuyant notamment sur les indices mentionnés à l'alinéa précédent. / Les opérateurs de la filière laitière peuvent se référer aux indices et valeurs mentionnés aux deux premiers alinéas dans le cadre de leurs relations contractuelles. [...] " ; qu'aux termes de l'article R. 631-10 du même code, créé par le II de l'article 1er du décret attaqué : " Les contrats mentionnés à l'article R. 631-8 comportent au minimum : [...] 4° Les modalités de détermination du prix du lait, conformes aux dispositions des articles L. 654-30 et D. 654-29 à D. 654-31 ainsi que, le cas échéant, aux dispositions de l'article L. 441-6 du code de commerce. / Le contrat fixe les critères et les références pris en compte pour la détermination du prix de base du lait. Il peut faire référence aux dispositions de l'article L. 632-14 du présent code, ou à tout autre indicateur ou référence pertinent, sous réserve que les modalités de détermination du prix fassent l'objet d'une description détaillée. " ;

8. Considérant que les dispositions précitées du décret attaqué n'ont ni pour objet, ni pour effet de limiter la faculté des cocontractants de convenir librement d'un prix ; que, si elles prévoient que producteurs et acheteurs peuvent se référer aux indices de tendance des marchés laitiers élaborés par le centre national interprofessionnel de l'économie laitière et aux valeurs entrant dans la composition du prix du lait diffusés par les centres régionaux interprofessionnels de l'économie laitière, ces indices et valeurs, qui n'ont au demeurant qu'une valeur indicative, ne correspondent qu'à des composantes du prix du lait, dont les modalités de calcul demeurent, ainsi qu'il a été dit, librement fixées par les cocontractants ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le décret attaqué méconnaîtrait les dispositions de l'article 101 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ne peut qu'être écarté ;

9. Considérant, en cinquième lieu, que, si la Coordination rurale-Union nationale soutient que le décret attaqué serait entaché d'une " incompétence négative " au motif qu'il contraint les producteurs de lait de vache à contracter avec les acheteurs sans que leur pouvoir de négociation ait été préalablement renforcé, ni l'article L. 631-24 du code rural et de la pêche maritime, dont il fait application, ni aucune autre disposition législative ou réglementaire ne subordonnent l'entrée en vigueur de l'obligation de contractualisation dans le secteur laitier à un regroupement préalable des producteurs ou à un renforcement des attributions des organisations de producteurs ; que ce moyen ne peut, par suite, qu'être écarté ;

10. Considérant, en sixième lieu, qu'aux termes de l'article 1129 du code civil : " Il faut que l'obligation ait pour objet une chose au moins déterminée quant à son espèce. / La quotité de la chose peut être incertaine, pourvu qu'elle puisse être déterminée. " ; qu'aux termes de l'article R. 631-10 du code rural et de la pêche maritime, créé par le II de l'article 1er du décret attaqué : " Les contrats mentionnés à l'article R. 631-8 comportent au minimum : [...] 2° Les volumes et les caractéristiques du lait à livrer. / Le contrat précise à cette fin : / a) - le volume de lait à livrer par le producteur pour chacune des périodes de douze mois du contrat ainsi que, le cas échéant, les volumes par sous-périodes d'une durée minimale d'un mois, et les marges à l'intérieur desquelles le volume livré peut varier ; / - les conditions dans lesquelles le volume prévu par période de douze mois peut être ajusté à la hausse ou à la baisse et, le cas échéant, les conditions dans lesquelles le volume prévu par sous-périodes est, en conséquence, ajusté. / Jusqu'à la fin du régime de quotas laitiers prévu par le règlement (CE) n° 1234/2007 du Conseil mentionné à l'article R. 631-7, le volume prévu par période de douze mois est établi par référence au quota individuel du producteur. " ;

11. Considérant que les dispositions précitées du décret attaqué, qui, au demeurant, prévoient l'obligation de faire figurer dans les contrats de vente de lait de vache les volumes de lait à livrer, que ceux-ci soient déterminés par référence aux quotas individuels dont disposent les producteurs, tant que le régime des quotas laitiers demeure en vigueur, ou, sans cette référence, après la disparition du régime des quotas, ne sauraient être regardées comme imposant aux producteurs et aux acheteurs de conclure des contrats contraires aux dispositions de l'article 1129 du code civil ; que le moyen soulevé sur ce point par la requérante doit, dès lors, être écarté ;

12. Considérant, en septième lieu, que la Coordination rurale-Union nationale soutient que le décret attaqué est dépourvu de base légale au motif que les dispositions du troisième alinéa du II de l'article L. 631-24 du code rural et de la pêche maritime, dont il fait application, méconnaîtraient les stipulations de l'article premier du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, en ce que, en dispensant les sociétés coopératives de l'obligation de soumettre aux associés-coopérateurs une proposition de contrat de vente dès lors que les producteurs ont été destinataires des statuts ou des règlements intérieurs des sociétés intégrant les clauses contractuelles rendues obligatoires par le I de l'article L. 631-24, elles autoriseraient une modification, par les statuts ou règlements intérieurs des sociétés coopératives, des droits et obligations des associés coopérateurs ; que, toutefois, et à supposer même que, comme il est soutenu, soient en cause des biens au sens des stipulations mentionnées ci-dessus, les dispositions législatives critiquées n'ont d'autre objet que les modalités de mise en oeuvre, pour les sociétés coopératives agricoles et leurs associés coopérateurs, de l'obligation faite aux acheteurs, avant la conclusion des contrats, de soumettre aux producteurs une proposition écrite de contrat et n'ont donc nullement la portée que leur prête la requérante ; que le moyen invoqué sur ce point ne peut, dès lors, qu'être écarté ;

13. Considérant, en huitième lieu, qu'aux termes de l'article 3 du décret attaqué : " Les dispositions du présent décret entrent en vigueur le 1er avril 2011. / Pour les contrats conclus antérieurement à cette date et se poursuivant au-delà du 1er juillet 2011, les acheteurs doivent proposer aux vendeurs un avenant permettant leur mise en conformité aux dispositions de l'article L. 631-24 et de l'article R. 631-10 du code rural et de la pêche maritime au plus tard à compter du 1er juillet 2011. Toutefois, l'acheteur peut ne pas proposer de modification de la durée de l'engagement en cours jusqu'au renouvellement du contrat. " ;

14. Considérant que les dispositions de l'article L. 631-24 du code rural et de la pêche maritime doivent être interprétées, eu égard au motif d'intérêt général lié à l'impératif d'ordre public de rééquilibrage des relations entre producteurs et acheteurs et de stabilisation du marché du lait, comme ayant implicitement autorisé l'application, aux relations contractuelles en cours à la date de son entrée en vigueur et qui se poursuivent au-delà du 1er juillet 2011, de l'obligation faite aux producteurs et acheteurs de produits agricoles, de conclure des contrats de vente écrits, sur la base de propositions écrites des acheteurs ; que, par suite, le moyen tiré de ce que les dispositions précitées du décret attaqué méconnaîtraient le principe de sécurité juridique en ce que, faute de toute habilitation donnée par la loi, elles porteraient une atteinte excessive aux situations contractuelles en cours, ne peut qu'être écarté ; qu'en outre, ainsi qu'il a été dit, le décret attaqué pouvait intervenir avant que ne fussent prises, le cas échéant, des mesures destinées à renforcer le pouvoir de négociation des producteurs ;

15. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, la Coordination rurale-Union nationale n'est pas fondée à demander l'annulation du décret attaqué ; que ses conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, par suite, qu'être rejetées ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de la Coordination rurale-Union nationale est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la Coordination rurale-Union nationale, au Premier ministre, au ministre de l'économie et des finances et au ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt.


Synthèse
Formation : 3ème et 8ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 347062
Date de la décision : 26/09/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

ACTES LÉGISLATIFS ET ADMINISTRATIFS - VALIDITÉ DES ACTES ADMINISTRATIFS - VIOLATION DIRECTE DE LA RÈGLE DE DROIT - LOI - ABSENCE DE VIOLATION - CONTRATS DE VENTE DE LAIT DE VACHE - DISPOSITIONS DE L'ARTICLE R - 631-10 DU CRPM PRÉVOYANT QUE CES CONTRATS COMPORTENT CERTAINES INFORMATIONS RELATIVES NOTAMMENT AU VOLUME DE LAIT À LIVRER ET À SES CONDITIONS DE VARIATION - MÉCONNAISSANCE DE L'ARTICLE 1129 DU CODE CIVIL - ABSENCE - DÈS LORS QUE LES DISPOSITIONS CONTESTÉES N'ONT NI POUR OBJET NI POUR EFFET D'IMPOSER AUX ACHETEURS ET VENDEURS DE CONCLURE DES CONTRATS QUI SERAIENT CONTRAIRES À CET ARTICLE.

01-04-02-01 Les dispositions de l'article R. 631-10 du code rural et de la pêche maritime (CRPM), qui, au demeurant, prévoient l'obligation de faire figurer dans les contrats de vente de lait de vache les volumes de lait à livrer, que ceux-ci soient déterminés par référence aux quotas individuels dont disposent les producteurs, tant que le régime des quotas laitiers demeure en vigueur, ou, sans cette référence, après la disparition du régime des quotas, ne sauraient être regardées comme imposant aux producteurs et aux acheteurs de conclure des contrats contraires aux dispositions de l'article 1129 du code civil, selon lesquelles « il faut que l'obligation ait pour objet une chose au moins déterminée quant à son espèce. / La quotité de la chose peut être incertaine, pourvu qu'elle puisse être déterminée ». Par suite, le moyen tiré de ce que ces dispositions méconnaissent l'article 1129 de ce code doit être écarté.

ACTES LÉGISLATIFS ET ADMINISTRATIFS - VALIDITÉ DES ACTES ADMINISTRATIFS - VIOLATION DIRECTE DE LA RÈGLE DE DROIT - PRINCIPES GÉNÉRAUX DU DROIT - PRINCIPES INTÉRESSANT L'ACTION ADMINISTRATIVE - PRINCIPE DE SÉCURITÉ JURIDIQUE - MÉCONNAISSANCE - ABSENCE - DISPOSITIONS DU DÉCRET DU 30 DÉCEMBRE 2010 PRIS POUR L'APPLICATION DE L'ARTICLE L - 631-24 DU CRPM DANS LE SECTEUR LAITIER - DÈS LORS QUE CET ARTICLE A IMPLICITEMENT AUTORISÉ L'APPLICATION - AUX RELATIONS CONTRACTUELLES EN COURS - DE L'OBLIGATION FAITE AUX PRODUCTEURS ET ACHETEURS DE PRODUITS AGRICOLES DE CONCLURE DES CONTRATS DE VENTE ÉCRITS [RJ1].

01-04-03-07 Les dispositions de l'article L. 631-24 du code rural et de la pêche maritime (CRPM) doivent être interprétées, eu égard au motif d'intérêt général lié à l'impératif d'ordre public de rééquilibrage des relations entre producteurs et acheteurs et de stabilisation du marché du lait, comme ayant implicitement autorisé l'application, aux relations contractuelles en cours à la date de leur entrée en vigueur et qui se poursuivent au-delà du 1er juillet 2011, de l'obligation faite aux producteurs et acheteurs de produits agricoles de conclure des contrats de vente écrits, sur la base de propositions écrites des acheteurs. Par suite, le moyen tiré de ce que les dispositions du décret n° 2010-1753 du 30 décembre 2010 pris pour l'application de cet article dans le secteur laitier méconnaîtraient le principe de sécurité juridique en ce que, faute de toute habilitation donnée par la loi, elles porteraient une atteinte excessive aux situations contractuelles en cours, ne peut qu'être écarté.

ACTES LÉGISLATIFS ET ADMINISTRATIFS - APPLICATION DANS LE TEMPS - DISPOSITIONS DE L'ARTICLE L - 631-24 DU CRPM - DISPOSITIONS AYANT IMPLICITEMENT AUTORISÉ L'APPLICATION - AUX RELATIONS CONTRACTUELLES EN COURS - DE L'OBLIGATION FAITE AUX PRODUCTEURS ET ACHETEURS DE PRODUITS AGRICOLES DE CONCLURE DES CONTRATS DE VENTE ÉCRITS - EXISTENCE [RJ1].

01-08 Les dispositions de l'article L. 631-24 du code rural et de la pêche maritime (CRPM) doivent être interprétées, eu égard au motif d'intérêt général lié à l'impératif d'ordre public de rééquilibrage des relations entre producteurs et acheteurs et de stabilisation du marché du lait, comme ayant implicitement autorisé l'application, aux relations contractuelles en cours à la date de leur entrée en vigueur et qui se poursuivent au-delà du 1er juillet 2011, de l'obligation faite aux producteurs et acheteurs de produits agricoles de conclure des contrats de vente écrits, sur la base de propositions écrites des acheteurs. Par suite, le moyen tiré de ce que les dispositions du décret n° 2010-1753 du 30 décembre 2010 pris pour l'application de cet article dans le secteur laitier méconnaîtraient le principe de sécurité juridique en ce que, faute de toute habilitation donnée par la loi, elles porteraient une atteinte excessive aux situations contractuelles en cours, ne peut qu'être écarté.

AGRICULTURE - CHASSE ET PÊCHE - PRODUITS AGRICOLES - ÉLEVAGE ET PRODUITS DE L'ÉLEVAGE - PRODUITS LAITIERS - CONTRATS DE VENTE DE LAIT DE VACHE - 1) DISPOSITIONS DE L'ARTICLE R - 631-10 DU CRPM PRÉVOYANT QUE CES CONTRATS COMPORTENT CERTAINES INFORMATIONS RELATIVES NOTAMMENT AU VOLUME DE LAIT À LIVRER ET À SES CONDITIONS DE VARIATION - MÉCONNAISSANCE DE L'ARTICLE 1129 DU CODE CIVIL - ABSENCE - DÈS LORS QUE LES DISPOSITIONS CONTESTÉES N'ONT NI POUR OBJET NI POUR EFFET D'IMPOSER AUX ACHETEURS ET VENDEURS DE CONCLURE DES CONTRATS QUI SERAIENT CONTRAIRES À CET ARTICLE - 2) DISPOSITIONS DE L'ARTICLE L - 631-24 DU CRPM - DISPOSITIONS AYANT IMPLICITEMENT AUTORISÉ L'APPLICATION - AUX RELATIONS CONTRACTUELLES EN COURS - DE L'OBLIGATION FAITE AUX PRODUCTEURS ET ACHETEURS DE PRODUITS AGRICOLES DE CONCLURE DES CONTRATS DE VENTE ÉCRITS - EXISTENCE [RJ1].

03-05-03-02 1) Les dispositions de l'article R. 631-10 du code rural et de la pêche maritime (CRPM), qui, au demeurant, prévoient l'obligation de faire figurer dans les contrats de vente de lait de vache les volumes de lait à livrer, que ceux-ci soient déterminés par référence aux quotas individuels dont disposent les producteurs, tant que le régime des quotas laitiers demeure en vigueur, ou, sans cette référence, après la disparition du régime des quotas, ne sauraient être regardées comme imposant aux producteurs et aux acheteurs de conclure des contrats contraires aux dispositions de l'article 1129 du code civil, selon lesquelles « il faut que l'obligation ait pour objet une chose au moins déterminée quant à son espèce. / La quotité de la chose peut être incertaine, pourvu qu'elle puisse être déterminée ». Par suite, le moyen tiré de ce que ces dispositions méconnaissent l'article 1129 de ce code doit être écarté.,,2) Les dispositions de l'article L. 631-24 du CRPM doivent être interprétées, eu égard au motif d'intérêt général lié à l'impératif d'ordre public de rééquilibrage des relations entre producteurs et acheteurs et de stabilisation du marché du lait, comme ayant implicitement autorisé l'application, aux relations contractuelles en cours à la date de leur entrée en vigueur et qui se poursuivent au-delà du 1er juillet 2011, de l'obligation faite aux producteurs et acheteurs de produits agricoles de conclure des contrats de vente écrits, sur la base de propositions écrites des acheteurs. Par suite, le moyen tiré de ce que les dispositions du décret n° 2010-1753 du 30 décembre 2010 pris pour l'application de cet article dans le secteur laitier méconnaîtraient le principe de sécurité juridique en ce que, faute de toute habilitation donnée par la loi, elles porteraient une atteinte excessive aux situations contractuelles en cours, ne peut qu'être écarté.


Références :

[RJ1]

Cf., sur les critères de l'applicabilité aux contrats en cours lorsque des dispositions législatives ne comportent pas de mention expresse en ce sens, CE, Assemblée, 8 avril 2009, Compagnie générale des eaux et commune d'Olivet, n°s 271737 271782, p. 116.


Publications
Proposition de citation : CE, 26 sep. 2012, n° 347062
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Edmond Honorat
Rapporteur ?: M. Christophe Pourreau
Rapporteur public ?: M. Vincent Daumas
Avocat(s) : SCP CELICE, BLANCPAIN, SOLTNER

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2012:347062.20120926
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