Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 1er août et 17 octobre 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme Dominique B, épouse C ; Mme C demande au Conseil d'Etat ;
1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 6 juin 2011 par laquelle le premier président de la cour d'appel de Nîmes lui a infligé un avertissement ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 ;
Vu le décret n° 2000-815 du 25 août 2000 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Pierre Chaubon, Conseiller d'Etat,
- les observations de Me de Nervo, avocat de Mme Dominique C.
- les conclusions de M. Xavier de Lesquen, rapporteur public ;
La parole ayant été à nouveau donnée à Me de Nervo, avocat de Mme Dominique C ;
1. Considérant qu'aux termes de l'article 43 de l'ordonnance du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature : " Tout manquement par un magistrat au devoir de son état, à l'honneur, à la délicatesse ou à la dignité, constitue une faute disciplinaire (...) " ; que selon son article 44 : " En dehors de toute action disciplinaire, l'inspecteur général des services judiciaires, les premiers présidents, les procureurs généraux et les directeurs ou chefs de service à l'administration centrale ont le pouvoir de donner un avertissement aux magistrats placés sous leur autorité. L'avertissement est effacé automatiquement du dossier au bout de trois ans si aucun nouvel avertissement ou aucune sanction disciplinaire n'est intervenue pendant cette période " ;
2. Considérant que sur le fondement de ces dispositions le premier président de la cour d'appel de Nîmes a prononcé un avertissement à l'encontre de Mme C, juge de proximité auprès du tribunal d'instance de Privas, par une décision du 6 juin 2011 ;
3. Considérant, en premier lieu, que les avertissements pris à l'encontre des magistrats sur le fondement de l'article 44 de l'ordonnance du 22 décembre 1958 précité sont prononcés non par une instance collégiale, mais par l'autorité hiérarchique, en dehors de toute procédure disciplinaire ; qu'il suit de là que les moyens tirés de l'irrégularité, au regard des stipulations de l'article 6 § 1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, de la procédure d'avertissement contestée ne peuvent qu'être écartés ;
4. Considérant, en second lieu, que l'avertissement infligé à Mme A a été prononcé au motif que cette dernière avait quitté l'audience du tribunal correctionnel de Privas du 24 février 2011 au bénéfice d'une suspension, sans tenir compte des autres magistrats du tribunal, du ministère public, des avocats, des témoins et parties en cause, et notamment des victimes, et que cette circonstance constituait un manquement aux devoirs de l'état de magistrat, plus précisément à ses responsabilités professionnelles essentielles, ainsi qu'un manquement à la délicatesse qui a porté atteinte au crédit de l'institution judiciaire ; qu'il ressort des pièces du dossier que le premier président de la cour d'appel ne s'est pas fondé, pour prendre sa décision, sur des faits matériellement inexacts ; que les faits reprochés à Mme A sont constitutifs d'un manquement par ce magistrat aux devoirs de son état, en particulier un manquement à la délicatesse, les dispositions du décret du 25 août 2000 relatif à l'aménagement et à la réduction du temps de travail dans la fonction publique de l'Etat et dans la magistrature ne pouvant avoir ni pour objet ni pour effet d'autoriser les magistrats à quitter une audience prématurément ; que de tels faits étaient de nature à fonder légalement l'avertissement prononcé à l'encontre de l'intéressée ;
5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la requérante n'est pas fondée à demander l'annulation de la décision attaquée ; que par suite ses conclusions tendant au bénéfice de l'article L 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;
D E C I D E :
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Article 1er : La requête de Mme Dominique C est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mme Dominique B épouse C et à la garde des sceaux, ministre de la justice.