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29/10/2012 | FRANCE | N°332157

France | France, Conseil d'État, 4ème sous-section jugeant seule, 29 octobre 2012, 332157


Vu la requête, enregistrée le 21 septembre 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par Mme Geneviève D, demeurant ..., M. Gilles E, demeurant ..., Mme Catherine F, demeurant ... ; Mme D et autres demandent au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 27 juillet 2009 du ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche modifiant l'arrêté du 15 décembre 1997 portant délégation de pouvoirs en matière de recrutement et de gestion des professeurs des universités et des maître de conférences ;

Vu les autres pièces du dossier ;



Vu le code de l'éducation ;

Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
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Vu la requête, enregistrée le 21 septembre 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par Mme Geneviève D, demeurant ..., M. Gilles E, demeurant ..., Mme Catherine F, demeurant ... ; Mme D et autres demandent au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 27 juillet 2009 du ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche modifiant l'arrêté du 15 décembre 1997 portant délégation de pouvoirs en matière de recrutement et de gestion des professeurs des universités et des maître de conférences ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'éducation ;

Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

Vu le décret n° 84-431 du 6 juin 1984 ;

Vu le décret n° 93-1335 du 20 décembre 1993 ;

Vu l'arrêté du 10 février 2012 portant délégation de pouvoirs en matière de recrutement et de gestion de certains personnels enseignants des établissements publics d'enseignement supérieur et de recherche ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Bruno Bachini, Maître des Requêtes,

- les conclusions de M. Rémi Keller, rapporteur public,

1. Considérant qu'aux termes de l'article L. 951-3 du code de l'éducation : " Le ministre chargé de l'enseignement supérieur peut déléguer par arrêté aux présidents des universités et aux présidents ou directeurs des autres établissements publics d'enseignement supérieur, dans les conditions fixées par décret en Conseil d'Etat, tout ou partie de ses pouvoirs en matière de recrutement et de gestion des personnels titulaires, stagiaires et non titulaires de l'Etat qui relèvent de son autorité (...) / Les compétences ainsi déléguées s'exercent au nom de l'Etat (...) " ;

2. Considérant qu'en délégant aux présidents et directeurs des établissements publics d'enseignement supérieur dont la liste est fixée à son article 2 les pouvoirs de prendre des mesures de suspension à caractère conservatoire, dans l'intérêt du service, à l'égard des professeurs et maîtres de conférences, lesquelles ne constituent pas des sanctions disciplinaires, ainsi que les actes pris pour assurer l'exécution des sanctions prononcées par les conseils d'administration des établissements constitués en section disciplinaire et le Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche en application du code de l'éducation, à l'exception de la mise à la retraite d'office et de la révocation, l'arrêté du 27 juillet 2009 du ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche, qui n'a eu ni pour objet ni pour effet de déléguer les pouvoirs exercés par ces deux juridictions disciplinaires à l'égard des enseignants-chercheurs, s'est borné à prévoir la déconcentration de pouvoirs relatifs à la gestion des personnels placés sous son autorité ; que, dès lors, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que cet arrêté serait, de ce fait, entaché d'incompétence ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article 1er du décret du 20 décembre 1993 relatif à la déconcentration de certaines opérations de gestion concernant les professeurs des universités, les maîtres de conférence, les assistants de l'enseignement supérieur et les enseignants-chercheurs assimilés aux professeurs des universités et aux maîtres de conférences, dans sa version, alors applicable, issue des dispositions de l'article 40 du décret du 23 avril 2009 : " Ne peuvent faire l'objet de la délégation prévue à l'article L. 951-3 du code de l'éducation : / 1° Les décisions relatives à la nomination et à la cessation de fonctions des professeurs des universités ; les décisions relatives à l'avancement de grade, à la mise à disposition, à la délégation, au détachement, à la disponibilité, à la mise en position hors cadres et à la cessation de fonctions des enseignants-chercheurs assimilés aux professeurs des universités, au sens du 1° de l'article 6 du décret du 16 janvier 1992 (...) ; / 2° Les décisions relatives à la nomination en qualité de stagiaire et à la cessation de fonctions des maîtres de conférences ; les décisions relatives à la mise à disposition, à la délégation, au détachement nécessitant un arrêté interministériel ou l'accord d'un ou plusieurs ministres et à la mise en position hors cadres des enseignants-chercheurs assimilés aux maîtres de conférences, au sens du 1° de l'article 6 du décret du 16 janvier 1992 (...) / 4° Pour les personnels mentionnés aux 1°, 2° (...) ci-dessus, les décisions relatives à l'octroi des congés prévus à l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 (...) lorsque l'avis du comité médical supérieur est requis. " ;

4. Considérant qu'il résulte des termes mêmes des 1° et 2° de cet article qu'à l'exclusion des décisions relatives à la nomination et à la cessation de fonctions, les interdictions de délégation qu'ils prévoient, notamment s'agissant des décisions d'avancement de grade et de mise en disponibilité, ne concernent que ceux des enseignants-chercheurs qui sont assimilés aux professeurs des universités au sens du 1° de l'article 6 du décret du 16 janvier 1992 relatif au Conseil national des universités ainsi que ceux qui sont assimilés aux maîtres de conférence au sens de ces mêmes dispositions ; que, par suite, l'arrêté attaqué, dont les dispositions s'appliquent aux seuls professeurs des universités et maîtres de conférences, n'a pas méconnu ces dispositions des 1° et 2° de l'article 1er du décret du 20 décembre 1993 dans leur version alors applicable en délégant les pouvoirs du ministre de prendre les décisions qu'il mentionne, notamment celles relatives à l'avancement de grade et à la mise en disponibilité des professeurs d'université ;

5. Considérant qu'il résulte des dispositions combinées des articles L. 951-3 du code de l'éducation et 1er du décret du 20 décembre 1993 mentionnés ci-dessus que le ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche a pu, sans entacher son arrêté d'illégalité, déléguer aux présidents et directeurs d'établissements publics d'enseignement supérieur l'exercice au nom de l'Etat de l'intégralité de ses pouvoirs en matière de recrutement et de gestion des professeurs des universités et des maîtres de conférences, titulaires et stagiaires, exception faite des décisions relatives à la nomination et à la cessation de fonctions ainsi que de celles relatives à l'octroi de congés prévus à l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 lorsque l'avis du comité médical supérieur est requis ; que, contrairement à ce que soutiennent les requérants, cette délégation, par laquelle le ministre s'est borné à mettre en oeuvre la déconcentration autorisée par la loi, n'a ni pour objet ni pour effet de dessaisir l'Etat de ses compétences au bénéfice d'une autre personne morale, ni de créer une nouvelle catégorie de fonctionnaires qui ne serait pas régie par le statut général des fonctionnaires de l'Etat, ni de porter atteinte au principe d'interdiction des nominations pour ordre ;

6. Considérant que, d'une part, aux termes de l'article L. 952-5 du code de l'éducation : " Les présidents d'université et les directeurs d'établissement peuvent accorder, à titre exceptionnel, des dispenses en tout ou partie aux obligations de résidence et de présence qu'implique toute fonction universitaire d'enseignement et de recherche " ; que, d'autre part, aux termes de l'article 34, relatif aux maîtres de conférences, du décret du 6 juin 1984 fixant les dispositions statutaires communes applicables aux enseignants-chercheurs : " Les changements de discipline à l'intérieur d'un établissement doivent faire l'objet d'un avis favorable du conseil scientifique siégeant en formation restreinte aux enseignants d'un rang au moins égal " ; qu'aux termes de l'article 51 du même décret : " Les mutations des professeurs des universités sont prononcées par arrêté du président ou du directeur de l'établissement d'accueil (...) " ; qu'aux termes de l'article 51-1 du même décret : " Les changements de discipline des professeurs des universités à l'intérieur d'un établissement s'effectuent conformément à la procédure fixée à l'article 34 " ;

7. Considérant que par l'effet combiné de ces dispositions du code de l'éducation et du décret du 6 juin 1984, les présidents et directeurs des établissements publics d'enseignement supérieur ont, en tout état de cause, compétence, d'une part, pour accorder les autorisations d'absence et, d'autre part, pour prononcer, sur l'avis favorable du conseil scientifique siégeant en formation restreinte aux enseignants d'un rang au moins égal, les changements de discipline des professeurs et maîtres de conférences à l'intérieur de l'établissement placé sous leur autorité dans des conditions garantissant le respect des principes de liberté et d'indépendance des enseignants-chercheurs ; que, dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance de ces principes par les délégations prévues sur ce point par l'arrêté attaqué ne peut qu'être écarté ;

8. Considérant que les requérants ne sauraient, en tout état de cause, utilement invoquer les dispositions de l'article 5 bis de la loi du 13 juillet 1983 contre l'arrêté attaqué ni exciper, à ce titre, de l'illégalité du décret du 23 avril 2009 dès lors que, contrairement à ce qu'ils soutiennent et comme il a été dit plus haut, cet arrêté n'a eu ni pour objet ni pour effet de déléguer aux présidents d'université un pouvoir disciplinaire ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à demander l'annulation pour excès de pouvoir de l'arrêté du 27 juillet 2009 du ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de Mme D, M. E et Mme F est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mme Geneviève D, à M. Gilles E, à Mme Catherine F et à la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche.


Synthèse
Formation : 4ème sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 332157
Date de la décision : 29/10/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 29 oct. 2012, n° 332157
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Marc Dandelot
Rapporteur ?: M. Bruno Bachini
Rapporteur public ?: M. Rémi Keller

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2012:332157.20121029
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