La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

28/12/2012 | FRANCE | N°344052

France | France, Conseil d'État, 3ème et 8ème sous-sections réunies, 28 décembre 2012, 344052


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 2 novembre 2010 et 27 janvier 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la société Scott SA, dont le siège est Le Capitole 55, avenue des Champs pierreux à Nanterre (92012), représentée par son président directeur général, et la société Kimberly Clark SAS, dont le siège est Le Capitole 55, avenue des Champs pierreux à Nanterre (92012), représentée par son président directeur général ; la société Scott SA et la société Kimberly Clark SAS demandent au Conseil d'Etat :
r>1°) d'annuler l'arrêt n° 07NT00572 du 31 août 2010 de la cour administrative d'...

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 2 novembre 2010 et 27 janvier 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la société Scott SA, dont le siège est Le Capitole 55, avenue des Champs pierreux à Nanterre (92012), représentée par son président directeur général, et la société Kimberly Clark SAS, dont le siège est Le Capitole 55, avenue des Champs pierreux à Nanterre (92012), représentée par son président directeur général ; la société Scott SA et la société Kimberly Clark SAS demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 07NT00572 du 31 août 2010 de la cour administrative d'appel de Nantes en tant qu'il n'a que partiellement fait droit à leur requête tendant, d'une part, à l'annulation du jugement du 9 janvier 2007 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté leur demande tendant à l'annulation des titres de recettes n° 3629, 3630 et 3631 d'un montant respectif de 1 541 150 francs, 2 999 848 francs et 1 238 082 francs émis à leur encontre par le maire d'Orléans, et, d'autre part, à l'annulation de ces titres de recettes et à ce que la commune d'Orléans soit condamnée à leur rembourser l'intégralité de ces sommes ;

2°) réglant l'affaire au fond dans cette mesure, de faire droit à leur appel ;

3°) de mettre à la charge de la commune d'Orléans la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 11 décembre 2012, présentée pour la société Kimberly Clark SAS ;

Vu le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;

Vu l'ordonnance n° 344052 du président de la 3ème sous-section de la section du contentieux du 8 octobre 2012 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Guillaume Odinet, Auditeur,

- les observations de la SCP Piwnica, Molinié, avocat de la société Scott et de la société Kimberly Clark et de la SCP Lyon-Caen, Thiriez, avocat de la commune d'Orléans,

- les conclusions de Mme Emmanuelle Cortot-Boucher, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Piwnica, Molinié, avocat de la société Scott et de la société Kimberly Clark et à la SCP Lyon-Caen, Thiriez, avocat de la commune d'Orléans ;

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la commune d'Orléans et le département du Loiret ont conclu le 31 août 1987 avec la société Scott SA un protocole d'accord en vue de l'implantation, par cette société, d'une usine de fabrication de papier dans l'agglomération d'Orléans ; qu'en application de ce protocole d'accord, la commune d'Orléans a inséré dans le tarif de la redevance d'assainissement, un coefficient de dégressivité du prix du mètre cube d'eau consommé de 0,25 applicable aux volumes d'eau supérieurs à 150 000 m3 par an, dont ont bénéficié successivement les sociétés Scott SA, Scott SNC et Kimberly Clark SNC ; que, par une décision n° 2002/14/CE du 12 juillet 2000, la Commission des Communautés européennes a notamment qualifié ce coefficient de dégressivité favorable d'aide d'Etat incompatible avec le marché commun, dont elle a ordonné la récupération ; que, pour assurer l'exécution de cette décision, le maire d'Orléans a émis, le 5 décembre 2001, trois titres exécutoires de montants respectifs de 234 946,80 euros, 457 323,88 euros et 188 744,38 euros, calculés sur la base de la différence entre un coefficient de dégressivité de 0,5 et le coefficient de dégressivité de 0,25 dont ont bénéficié les sociétés de 1990 à 1998 ; que, par un jugement du 9 janvier 2007, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté la demande des sociétés Scott SA et Kimberly Clark SNC tendant à l'annulation de ces titres exécutoires ; que la société Kimberly Clark SAS, venue aux droits de la société Kimberly Clark SNC, se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 31 août 2010 de la cour administrative d'appel de Nantes en tant qu'il n'a pas entièrement fait droit à ses conclusions d'appel ;

2. Considérant qu'il ressort des termes de la décision de la Commission du 12 juillet 2000 que celle-ci, n'étant pas en mesure de déterminer la valeur de l'avantage accordé par la commune aux sociétés, a renvoyé aux autorités françaises compétentes le soin d'évaluer le montant de l'aide devant être récupérée, en prenant pour base l'écart entre un coefficient de dégressivité " raisonnable " pour une consommation dépassant 150 000 m3 et le tarif préférentiel dont avaient bénéficié les sociétés Scott SA et Kimberly Clark SNC ; qu'à cette fin, il appartenait à la commune d'Orléans de déterminer un coefficient de dégressivité raisonnable pour le calcul du montant à rembourser, en se fondant notamment sur les tarifs applicables à la même époque à des entreprises établies dans d'autres départements et comparables pour le service d'assainissement ;

3. Considérant, en premier lieu, que si la cour, qui a suffisamment motivé son arrêt sur ce point, a relevé que, selon la décision de la Commission, il était improbable que le coefficient " raisonnable " pût être inférieur à 0,5, dès lors que c'était le tarif préférentiel le plus favorable appliqué par la commune entre 1990 et 1998, elle n'a pas jugé, contrairement à ce que soutient la société Kimberly Clark, qu'il s'agissait d'un seuil minimal par lequel la commune aurait pu légalement se sentir liée, même si un seuil inférieur pouvait être justifié par elle ;

4. Considérant, en second lieu, qu'il ressort des termes de l'arrêt attaqué que la cour a estimé, par une appréciation souveraine exempte de dénaturation, que les sociétés Scott et Kimberly Clark, qui se bornaient à produire des éléments de comparaison partiels et sans indication sur leur auteur et leur date, ne critiquaient pas sérieusement le coefficient de 0,5 retenu par le maire d'Orléans pour le calcul du montant de l'aide illégale devant être restituée ; que, contrairement à ce que soutient la société Kimberly Clark, elle n'a pas jugé qu'il appartenait aux sociétés demanderesses de démontrer le caractère raisonnable d'un coefficient inférieur à 0,5 mais s'est bornée à estimer qu'elles n'apportaient aucune critique sérieuse susceptible de remettre en cause le caractère raisonnable du coefficient retenu par la commune; que, dès lors, elle n'a pas inversé la charge de la preuve ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société Kimberly Clark SAS n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque ; que ses conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, par suite, qu'être rejetées ; qu'en revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce de mettre à sa charge la somme de 3 000 euros à verser à la commune d'Orléans au titre des mêmes dispositions ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi de la société Kimberly Clark SAS est rejeté.

Article 2 : La société Kimberly Clark SAS versera à la commune d'Orléans une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la société Kimberly Clark SAS et à la commune d'Orléans.


Synthèse
Formation : 3ème et 8ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 344052
Date de la décision : 28/12/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

COLLECTIVITÉS TERRITORIALES - COMMUNE - ATTRIBUTIONS - SERVICES COMMUNAUX - ASSAINISSEMENT ET EAUX USÉES - AIDE D'ETAT RÉSULTANT D'UN TARIF TROP BAS ACCORDÉ À UNE ENTREPRISE USAGER - TITRE ÉMIS PAR LA COLLECTIVITÉ TERRITORIALE POUR LA RÉCUPÉRATION DE CETTE AIDE - LITIGE RESSORTISSANT À LA COMPÉTENCE DE LA JURIDICTION ADMINISTRATIVE - EXISTENCE (SOL - IMPL - ).

135-02-03-03-05 La juridiction administrative est compétente pour connaître d'un litige relatif à un titre émis par une collectivité territoriale pour la récupération d'une aide d'Etat, alors même que celle-ci résulte d'un tarif d'assainissement trop favorable acquitté par une entreprise usager de ce service public à caractère industriel et commercial.

COMMERCE - INDUSTRIE - INTERVENTION ÉCONOMIQUE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - DÉFENSE DE LA CONCURRENCE - AIDES D'ETAT - AIDE D'ETAT RÉSULTANT D'UN TARIF TROP BAS ACCORDÉ À UNE ENTREPRISE USAGER - TITRE ÉMIS PAR LA COLLECTIVITÉ TERRITORIALE POUR LA RÉCUPÉRATION DE CETTE AIDE - LITIGE RESSORTISSANT À LA COMPÉTENCE DE LA JURIDICTION ADMINISTRATIVE - EXISTENCE (SOL - IMPL - ).

14-05-04 La juridiction administrative est compétente pour connaître d'un litige relatif à un titre émis par une collectivité territoriale pour la récupération d'une aide d'Etat, alors même que celle-ci résulte d'un tarif d'assainissement trop favorable acquitté par une entreprise usager de ce service public à caractère industriel et commercial.

COMPÉTENCE - RÉPARTITION DES COMPÉTENCES ENTRE LES DEUX ORDRES DE JURIDICTION - COMPÉTENCE DÉTERMINÉE PAR UN CRITÈRE JURISPRUDENTIEL - ACTES - ACTES ADMINISTRATIFS - LITIGE RELATIF À UN TITRE ÉMIS PAR UNE COLLECTIVITÉ TERRITORIALE POUR LA RÉCUPÉRATION D'UNE AIDE D'ETAT RÉSULTANT D'UN TARIF D'ASSAINISSEMENT TROP BAS ACCORDÉ À UNE ENTREPRISE USAGER - LITIGE RESSORTISSANT À LA COMPÉTENCE DE LA JURIDICTION ADMINISTRATIVE - EXISTENCE - ALORS MÊME QUE LE SERVICE DE L'ASSAINISSEMENT PRÉSENTE UN CARACTÈRE INDUSTRIEL ET COMMERCIAL (SOL - IMPL - ).

17-03-02-005-01 La juridiction administrative est compétente pour connaître d'un litige relatif à un titre émis par une collectivité territoriale pour la récupération d'une aide d'Etat, alors même que celle-ci résulte d'un tarif d'assainissement trop favorable acquitté par une entreprise usager de ce service public à caractère industriel et commercial.

COMPÉTENCE - RÉPARTITION DES COMPÉTENCES ENTRE LES DEUX ORDRES DE JURIDICTION - COMPÉTENCE DÉTERMINÉE PAR UN CRITÈRE JURISPRUDENTIEL - PROBLÈMES PARTICULIERS POSÉS PAR CERTAINES CATÉGORIES DE SERVICES PUBLICS - SERVICE PUBLIC INDUSTRIEL ET COMMERCIAL - LITIGE RELATIF À UN TITRE ÉMIS PAR UNE COLLECTIVITÉ TERRITORIALE POUR LA RÉCUPÉRATION D'UNE AIDE D'ETAT RÉSULTANT D'UN TARIF D'ASSAINISSEMENT TROP BAS ACCORDÉ À UNE ENTREPRISE USAGER - LITIGE RESSORTISSANT À LA COMPÉTENCE DE LA JURIDICTION ADMINISTRATIVE - EXISTENCE - ALORS MÊME QUE LE SERVICE DE L'ASSAINISSEMENT PRÉSENTE UN CARACTÈRE INDUSTRIEL ET COMMERCIAL (SOL - IMPL - ).

17-03-02-07-02 La juridiction administrative est compétente pour connaître d'un litige relatif à un titre émis par une collectivité territoriale pour la récupération d'une aide d'Etat, alors même que celle-ci résulte d'un tarif d'assainissement trop favorable acquitté par une entreprise usager de ce service public à caractère industriel et commercial.


Publications
Proposition de citation : CE, 28 déc. 2012, n° 344052
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Guillaume Odinet
Rapporteur public ?: Mme Emmanuelle Cortot-Boucher
Avocat(s) : SCP LYON-CAEN, THIRIEZ ; SCP PIWNICA, MOLINIE

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2012:344052.20121228
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award